Chapitre 3:

La tragédie de la grande dépression

Ponteix se trouve en plein centre du triangle de Palliser. En 1857, la Grande-Bretagne envoie une expédition, sous la direction du Capitaine John Palliser, pour explorer le territoire qui appartenait à cette époque à la Compagnie de la Baie d’Hudson. Le territoire avait déjà été exploré par des traiteurs de fourrures et des chasseurs de bisons. Le peintre Paul Kane avait même visité le territoire en 1840 pour réaliser des tableaux des Indiens du sud de la Saskatchewan.

L’expédition de Palliser en 1857 n’a donc pas comme objectif de découvrir un nouveau territoire. Plutôt, il a pour mission d’explorer le territoire et de voir si la Terre de Rupert serait propice à l’agriculture.

Entre 1857 et 1859, l’expédition Palliser parcourt les Prairies de l’Ouest. Dans son rapport, il fait état de la fertilité de certaines parties du territoire, surtout la région de la rivière Rouge en allant vers le nord-ouest jusqu’à Edmonton. Toutefois, il décrivait un triangle dans le sud comme étant quasi-désert. Ce triangle a pris le nom de Triangle de Palliser. Le capitaine Palliser maintenait que ce triangle ne pourrait jamais être utilisable pour l’agriculture, que le terrain était trop aride pour la culture du grain.

Durant les années 1880, le Gouvernement du Canada espère convaincre des millions d’immigrants de venir s’installer dans les Prairies de l’Ouest. On demande alors au professeur John Macoun d’explorer à nouveau le triangle de Palliser. Lors de ses voyages de 1857 à 1859, Palliser n’avait jamais visité la région même. Il s’était plutôt dirigé de la rivière Rouge vers le nord-ouest, vers Edmonton. Macoun décide qu’il va pénétrer dans le triangle même. Il voyage de Winnipeg au Fort Ellice et ensuite se dirige vers la Montagne de Cyprès et le Fort Walsh. Lorsqu’il a terminé son voyage, Macoun rejette complètement l’idée de Palliser que le triangle est un désert peu propice à l’agriculture.33


Le rapport du professeur Macoun incite le gouvernement à augmenter sa campagne de peuplement de la région du sud de la Saskatchewan. Des milliers et des milliers de colons arrivent pour prendre des homesteads entre 1890 et 1925.

Lequel des deux avait raison? Lorsque les précipitations sont suffisantes, le triangle peut être un véritable paradis, comme le maintenait le professeur John Macoun. Par contre, par temps de sécheresse, le triangle devient un désert, comme le soutenait le capitaine John Palliser.

Comme on l’a mentionné, Ponteix se trouve en plein dans le triangle de Palliser. Au début, il y a suffisamment de pluie et les récoltes sont généralement bonnes. Mais les bonnes années prennent fin et sont remplacées par des années de sécheresse. Toutefois, il serait faux de dire que la sécheresse est arrivée tout d’un coup en 1929. En réalité, la région qu’on connaît sous le nom de triangle de Palliser avait été frappée par des sécheresses depuis le début de la colonisation. Entre 1916 et 1926, quelques 6 460 fermes furent abandonnées dans le triangle de Palliser.34

À partir de 1929, la sécheresse rend la situation plus difficile pour les fermiers de la Saskatchewan. Mais l’absence de pluie n’est pas le seul problème des agriculteurs durant les années 1930. Pour survivre, les fermiers dépendent des consommateurs qui achètent leurs produits.

Le 24 octobre 1929, il y a un effondrement total de la bourse de New York, qui plonge le monde entier dans une crise économique. Ceci mène à une chute vertigineuse des prix des produits agricoles. En mai 1928, le prix d’un boisseau de blé numéro 1, du blé dur roux du printemps, est de 1,63 $. Quatre ans plus tard, le prix est de 35 cents le boisseau. Les prix des autres produits de la ferme chutent également durant la même période.

Malgré les faibles prix, c’est le temps qui marque le plus les fermiers. L’hiver et l’été de 1931 voient le triangle de Palliser en pleine sécheresse. Les vents de l’ouest causent des tempêtes de poussière; la couche de terre arable est soulevée par le vent et transportée de la Saskatchewan jusqu’au Manitoba. Pendant l’été, le ciel est noir.