Chapitre 2:

Une communauté francophone autour de la paroisse


Au début, la ville de Regina est surtout protestante quoiqu’il y ait un groupe important de catholiques. Pascal Bonneau est un de ceux qui travaillent activement à l’établissement d’une paroisse catholique à Regina. Dès 1882, il demande au père Joseph Hugonard, o.m.i., de la mission de Qu’Appelle de venir chanter une messe dans la capitale. «Une tente servit de chapelle.»18 Le père Hugonard viendra dire la messe aux fidèles de Regina jusqu’en 1884. La messe est dite soit dans la maison de Pascal Bonneau, soit dans la salle McCusker (le grenier de la forge de Charles McCusker).

En 1884, l’abbé L.-N. Larche arrive comme premier prêtre résidant. «Il n’y a pas de prêtre résident, ni d’église avant que deux commerçants fervents et énergétiques, Pascal Bonneau et Charles McCusker, prélèvent plus de mille dollars de toute la communauté envers une église. Au printemps de 1884, peu de temps après l’arrivée du père Larche, le premier curé, une belle petite église fut dédiée par Mgr Taché.»19 La première paroisse catholique de Regina est St. Mary’s et elle a pour mission de desservir toute la population catholique de la ville, anglophone comme francophone.

En 1912, la capitale est choisie comme siège épiscopal de l’archidiocèse de Regina et Olivier-Elzéar Mathieu est nommé premier archevêque. L’ancien recteur de l’Université Laval s’assure que les francophones de la ville reine auront une messe en français. «Au temps de Mgr Mathieu, les Canadiens français catholiques de Régina avaient une messe spéciale avec sermon (en français) le dimanche à la cathédrale.»20

Toutefois, comme c’est généralement le cas dans toutes les villes de l’Ouest canadien, sauf à Saint-Boniface, les francophones de Regina sont éparpillés ici et là et il est très difficile de les regrouper. Même s’il y a une messe en français à la cathédrale, plusieurs continuent à fréquenter la paroisse St. Mary’s. En 1932, après la mort de Mgr Mathieu, certains Canadiens français demandent au nouvel évêque, Mgr McGuigan, de nommer un Franciscain, le père Célestin Demers, o.f.m., comme chancelier auprès du groupe français. «Le 3 février, l’Archevêque me remit un document officiel me priant de faire tout ce qui était en mon pouvoir pour regrouper les Canadiens français de la ville à la cathédrale du Sacré-Coeur, où à la chapelle des Franciscains, rue McIntyre.»21

Ainsi commencent les démarches pour établir la paroisse canadienne-française de Regina, la paroisse Saint-Jean-Baptiste. Pendant 21 ans, les francophones sont invités à se rendre à la chapelle des Franciscains pour entendre une messe en français. «Toutefois, les services religieux en français procurés par les Franciscains de Régina étaient absolument insuffisants, en raison de l’étroitesse de leur chapelle.»22 Pour cette raison, la majorité des Canadiens français est toujours obligée d’assister à des messes en anglais à la cathédrale ou à la paroisse St. Mary’s.

En 1944, Mgr McGuigan promet que les francophones pourront avoir leur propre paroisse s’ils en font la demande, mais le groupe français doit attendre encore plusieurs années avant que cette promesse ne devienne réalité. En 1950, un nouvel archevêque, Mgr O’Neill, donne la permission au père Sylvestre Beaudet, o.f.m., de chanter deux messes en français chaque dimanche. Cette permission permet d’augmenter sensiblement le nombre de francophones qui assistent aux messes en français.

En août de la même année, les francophones décident que le temps est venu de demander la création d’une paroisse nationale canadienne-française dans la capitale. Une lettre, signée par Jos Girardin, Paul Bouthillier et Avila Letourneau, et accompagnée d’une pétition de 250 signatures, est envoyée à Mgr O’Neill «lui exprimant le désir de la grande majorité des Canadiens français de Régina d’obtenir “une paroisse Franco-Canadienne pour le groupe français de Régina et des environs.”»23

La première requête des francophones est refusée par un comité diocésain. Le groupe franco-catholique revient à la charge l’année suivante. Ils adressent une nouvelle lettre à Mgr O’Neill qui conduit cette fois à une rencontre entre l’archevêque et Avila Letourneau. «L’archevêque déclara à son interlocuteur qu’il était prêt à accorder une paroisse nationale aux Franco-catholiques de Régina, moyennant deux conditions: 1) il était essentiel de disposer de fonds suffisants, et, 2) il fallait un nombre suffisant de paroissiens.»24