L'arrivé de Lake Les premières rues Les conflits Le début d'une ville

chapitre 1:Une colonie de tempérance


À la fin du XIXe siècle, les mouvements de tempérance, dont le but est la prohibition de la vente et de la consommation d’alcool, commencent à se multiplier ici et là dans l’Est du pays, principalement en Ontario et dans les Maritimes. Au Québec, les mouvements de tempérance n'ont pas autant de succès que dans les provinces voisines.

En 1882, un de ces mouvements, la Temperance Colonization Society, obtient du ministère de l’Intérieur une concession d’environ 500 000 acres dans le district de la Saskatchewan dans les Territoires du Nord-Ouest. Cette concession le long de la rivière Saskatchewan-Sud comprend 21 townships allant de la réserve Moose Wood (près de Dundurn) jusqu’à Clark’s Crossing au nord de la future ville de Saskatoon.

White Cap, ou Wapahaska, était originaire du Minnesota, aux États-Unis. Il était venu s’établir au Canada avec sa tribu en 1862, au lendemain de l’insurrection des Sioux au Minnesota. Au début, il s’était établi dans la région de Fort Ellice et de Fort Qu’Appelle, mais au début des années 1870, il s’était fixé définitivement le long de la rivière Saskatchewan-Sud dans la réserve Moose Wood. En 1885, les guerriers de White Cap participent aux batailles de l’Anse-aux-Poissons (Fish Creek) et de Batoche.

Dans cette même région, près de la réserve de White Cap, un groupe de Métis dirigé par Charles Trottier a établi un campement d’hiver appelé la Prairie Ronde à la fin des années 1860. Ce Trottier était un ancêtre de l'ancien joueur de hockey, Bryan Trottier, de Val Marie en Saskatchewan.

Au milieu des années 1870, le gouvernement fédéral fait construire une ligne télégraphique allant de Winnipeg jusqu’au Fort Edmonton. Cette ligne télégraphique traverse la rivière Saskatchewan-Sud quelques kilomètres au nord de la future ville de Saskatoon à un endroit appelé Clark’s Crossing.



L'arrivé de Lake

S’il y a de l’activité à la Prairie Ronde et à Clark’s Crossing dès 1875, il ne semble pas y avoir d’activité dans la région de Saskatoon avant 1882 date à laquelle John Neilson Lake de la Temperance Colonization Society quitte Toronto et se rend dans l’Ouest avec un groupe d’arpenteurs pour choisir le site de la future colonie de tempérance. «Le groupe voyage par train de Toronto à Moosomin, le terminus du CPR à cette époque, et ensuite en wagon, arrivant à Clark’s Crossing le 28 juillet. Là, ils établissent leur base d’opération.»1 Une partie du trajet du groupe doit se faire aux États-Unis car la Compagnie du Canadien Pacifique n’a pas encore construit la ligne de chemin de fer entre Sault-Sainte-Marie et Winnipeg.

Les pistes dans la région de Saskatoon vers 1883Au début, Lake pense à Clark’s Crossing comme site de sa colonie de tempérance, mais le traversier est situé à l’extrême nord de la concession de la compagnie. Le groupe se rend ensuite à la réserve du chef White Cap et lors de son retour à Clark’s Crossing, après une visite peu productive avec le chef sioux, ils s’arrêtent pour la nuit sur les bords de la rivière Saskatchewan-Sud dans la région de la future avenue Broadway. C’est cet endroit qu’on choisit comme site de la colonie. «Il s’agissait d’un choix délibéré; non seulement était-il reconnu que la rivière serait une bonne source d’eau pour la consommation domestique et pour l’irrigation dans ce pays dépourvu de sources d’eau, mais on croyait aussi que la rivière fournirait un moyen de transport vers le lac Winnipeg.»2

Fin août 1882, le groupe a installé son campement à cet endroit et a même choisi un nom pour la colonie. «Le nom “Minnetonka” avait été suggéré mais le 20 août, un membre du groupe apporte une branche couverte de baies rouges. Lake, apprenant que les Indiens appellent ces baies saskatoons, (Mis-sask-quah-too-min ) un tapis de fleurs, choisit immédiatement “Saskatoon” comme nom de la colonie.»3

Ayant donné un nom à la colonie, John N. Lake retourne à Toronto pour recruter des colons, tandis que certains membres du groupe choisissent de passer l’hiver à Prince Albert plutôt que de refaire le long trajet.

Lake revient au printemps suivant avec un groupe d’environ 35 colons. Cette fois, le groupe peut se rendre en train jusqu’à Moose Jaw, le nouveau terminus du Canadien Pacifique, avant d’entreprendre le long voyage en «wagon» jusqu’à Saskatoon. On y trace les premières rues. La colonie longe le côté est de la rivière et comprend des rues bien connues aujourd’hui: Broadway, Victoria, Main et Lansdowne. Les dirigeants de la Temperance Colonization Society demandent aux arpenteurs d'abandonner le plan des rues utilisé dans toutes les villes de cette époque. On demande que les rues et les avenues soient très larges permettant ainsi de bâtir des terre-pleins centraux.