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Une enseignante pour Hoey

Marie-Antoinette se dirige ensuite vers l’École Normale de Brandon ayant choisi de poursuivre une carrière d’enseignante. Elle veut suivre les traces de son grand-père qui a été doyen de la faculté des lettres de l’Université de Lille, de son père qui a été professeur de littérature à la même université et de son frère, Antonio qui est enseignant au Manitoba.

En 1925, Antonio quitte le Manitoba pour assumer un poste d’enseignant à Hoey en Saskatchewan. Ainsi commence la longue association entre la famille de Margerie et la communauté franco-canadienne de la Saskatchewan.

À cette époque, Hoey est un village en pleine croissance. Les premières familles françaises étaient arrivées dans la région en 1891. On pouvait y reconnaître les familles Baribeau, Godin, Labelle, Frigon et Duval.

En 1925, il y avait deux médecins à Hoey, les docteurs Moreau et Lefebvre. Le Français, Joseph Hallé était gérant de la banque Hochelaga, A. St-Arnaud était commerçant et Louis Boileau était secrétaire de la municipalité rurale de St-Louis dont les bureaux étaient à Hoey. (Louis Boileau deviendra plus tard un des vice-présidents du Wheat Pool de la Saskatchewan.) C’est également dans cette communauté qu’on retrouvait la famille Motut.

Antonio de Margerie est appelé à remplacer Louis Charbonneau comme enseignant à Hoey. Mentionnons que ce sont Louis Charbonneau et Amédée Motut de Hoey, appuyés par Raymond Denis, qui avaient poussé l’ACFC à agir dans le domaine de l’enseignement du français en mettant sur pied un système d’examens ou de concours de français.

Charbonneau et certains autres enseignants avaient collaboré avec Raymond Denis pour rédiger les premiers examens en 1925. «Les élèves des classes françaises de la quatrième à la douzième année s’y présentèrent le 20 juin 1925. Tous ceux qui avaient réussi l’examen avaient droit à un diplôme, et l’élève qui avait enregistré le meilleur résultat dans chaque année d’études recevait un prix.»5

La qualité de l’enseignement du français à l'école de Hoey ne diminue pas entre 1925 et 1929 avec Antonio de Margerie comme instituteur. Durant cette même période, Marie-Antoinette enseigne à l’école Allaire de Saint-Eustache, au Manitoba. L’école est située à cinq milles du village et la jeune institutrice a 28 élèves.

Plusieurs années plus tard, elle se souviendra que sa première année, elle avait «une élève qui devait écrire des examens du Département d’Éducation à ce moment-là. Et j’avais l’impression que si cette élève ne réussissait pas, ma carrière d’institutrice était finie!»6 Évidemment, l’élève réussira ses examens et Marie-Antoinette poursuivra sa carrière.

En 1929, Antonio est toujours enseignant à Hoey quand on lui demande de se consacrer corps et âme aux causes des francophones de la Saskatchewan en remplacant Joseph-Eldège Morrier comme chef du Secrétariat de l’ACFC

Antonio de Margerie doit entrer en fonction à l’ACFC le 1er juillet 1929, mais avant de quitter Hoey il réussit à convaincre sa soeur, Marie-Antoinette, de venir le remplacer à l’école. Au cours des cinq années suivantes, elle saura inculquer aux jeunes de Hoey l’amour de la langue et de la littérature française.

Comment réussissaient ses élèves au «Concours annuel de français» organisé par l’ACFC? Rappelons qu'à cette époque une institutrice enseignait toutes les matières de la première à la huitième année et le français ne pouvait être enseigné qu'une heure par jour.

Dans le Patriote de l’Ouest du 5 août 1931, on trouve les résultats des examens de français de 1931. Deux élèves de mademoiselle de Margerie se classent au premier rang de leur niveaux scolaires, recevant ainsi un prix d’excellence.

Il s’agit d’Annette Godbout en quatrième année et de Roger Motut en huitième. Lorraine Pilon est au 10e rang en cinquième année et Regina Pilon est au 12e rang en sixième année. Lorsqu’on considère qu’il y a environ 2 000 élèves qui ont passé ces examens, les résultats obtenus par les élèves de mademoiselle de Margerie sont quand même sont quand même impressionnants.(Roger Motut deviendra plus tard professeur de littérature à l’Université de l’Alberta.)7

Durant son séjour à Hoey, il y a souvent des concerts offerts au grand public. Nous savons par exemple que son frère, Antonio, a été chef de la chorale entre 1925 et 1929. «Du temps de M. Antonio de Margerie, Hoey avait une des plus belles chorales des alentours. Quelle belle messe de minuit il préparait»8Il est possible que Marie-Antoinette ait continué l’oeuvre entreprise par son frère avant son départ de Hoey.