Chapitre 1

Les premières années

Gabriel Dumont est né entre 1836 et 1838 dans la région de Saint-Boniface, dans ce qui était autrefois la colonie de la Rivière Rouge. Sa famille est membre d’un groupe important de Métis qui se distinguent comme chasseurs de bisons et traiteurs de fourrures. Son grand-père, Jean-Baptiste Dumont, était un coureur de bois de Montréal qui avait épousé, «à la mode du pays»,1 une Indienne de la tribu des Sarcees. Son père, Isidore Dumont, est né dans la région du Fort des prairies.2

Isidore et ses deux frères, Gabriel et Jean, ont vécu leur jeunesse dans cette immense région, sauvage à l’époque, située entre Fort Carlton et Fort Edmonton. Ils étaient trappeurs, traiteurs de fourrures et chasseurs. Ils étaient ce qu’on appelait à l’époque des «hommes libres»,3 c’est-à-dire qu’ils n’étaient pas au service de la Compagnie de la Baie d’Hudson.



La Colonie de la Rivière-Rouge vers 1844.


Durant les années 1830, plusieurs Métis décident d’aller s’installer sur des terres dans la région de la Rivière-Rouge. Ils cultivent quelques acres, élèvent des animaux et augmentent leurs revenus avec les produits de la chasse. Isidore Dumont se trouve un lot de rivière 4 près de Saint-Boniface et il commence à récolter un peu de blé, d’avoine et de pommes de terre. C’est là que naît le jeune Gabriel.

Pendant les longs mois d’hiver, la colonie de la Rivière-Rouge offre toutes sortes d’occasions aux Métis de se regrouper et de s’amuser. Les hommes s’enveloppent dans leurs longs capots bleus, mettent leurs belles ceintures fléchées multicolores et se promènent sur les routes de la colonie dans leurs carrioles tirées par leurs meilleurs chevaux. L’hiver, à la colonie de la Rivière-Rouge, c’est le temps des noces: les Métis sortent leurs violons et dansent des gigues de la Rivière-Rouge jusqu’aux petites heures du matin. Mais Gabriel Dumont est trop petit pour se souvenir de ces soirées.

Pour son père, Isidore, la vie à la Rivière-Rouge est trop paisible. Il n’aime pas tellement la vie d’agriculteur. En 1840, lorsque le jeune Gabriel n’a que deux ou trois ans, il décide de quitter la Rivière-Rouge et de regagner le pays de sa naissance; le pays vallonné et boisé de la Saskatchewan, une région qui se trouve entre la fourche Saskatchewan et la fourche des Gros Ventres.5