Chapitre un

La Nouvelle-France au temps de La Vérendrye

Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye est né le 17 novembre 1685 à Trois-Rivières. Il est le fils de René Gaultier de Varennes et de Marie Boucher. Son père, un lieutenant du régiment Carignan-Salières, est arrivé en Nouvelle-France en 1665.

Samuel de Champlain avait établi une fortification à Québec en 1608 et la Nouvelle-France était née. Au début, le territoire qui deviendra un jour le Canada était contrôlé par des compagnies de commerce des fourrures et de pêche. En 1661, en France, Louis XIV avait pris le pouvoir absolu et deux ans plus tard il avait décidé que la couronne administrerait dorénavant la colonie de la Nouvelle-France.

Puisqu’il devait assurer la sécurité de la colonie (contre les attaques des Iroquois et des Anglais de Nouvelle-Angleterre), Louis XIV avait nommé, en 1665, Jean Talon comme nouvel intendant de la Nouvelle-France. Il avait aussi envoyé 1 200 soldats du régiment Carignan-Salières au Québec. Ces soldats représentaient le tiers de la population de la Nouvelle-France, car après 60 ans d’existence, le nombre d’habitants était de 2 500 personnes.

Le nouvel intendant, Jean Talon, ne croyait pas que la colonie puisse survivre si son économie se limitait à la traite des fourrures et à la pêche et il avait exorté les habitants à diversifier l’économie de la Nouvelle-France. Entre 1665 et 1672, Talon avait encouragé les résidants de la Nouvelle-France à défricher du terrain pour l’agriculture, à se lancer dans l’élevage du bétail et à ensemencer de nouvelles graines comme le lin et le chanvre. Il avait aussi encouragé la mise sur pied d’entreprises industrielles, de moulins à scie et de chantiers de construction navale. Puisque la population de la Nouvelle-France était peuplée, majoritairement, d’hommes, Talon avait fait venir mille jeunes femmes de France (les filles du Roi) pour qu’elles épousent les habitants.


C’est dans ce pays qu’était arrivé en 1665, René Gaultier. Sa compagnie du régiment Carignan-Salières avait été envoyée à Trois-Rivières. Là, il s'était lié d'amitié avec le gouverneur, Pierre Boucher, et, en 1667, il avait épousé sa fille âgée de douze ans. En 1668, il avait remplacé son beau-père comme gouverneur de Trois-Rivières et il avait acquis des seigneuries et des titres - de Varennes et de La Vérendrye.

René Gaultier de Varennes et Marie Boucher ont eu treize enfants, mais seulement huit (quatre garçons et quatre filles) ont atteint l’âge adulte. Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye allait être le plus célèbre. Mais, afin de mieux comprendre l’importance du rôle qu’allait jouer La Vérendrye, il faut explorer quelques autres événements historiques qui se sont produits à cette époque.

L’arrivée du régiment Carignan-Salières en 1665 et les campagnes que ces soldats avaient menées contre les Iroquois avaient obligé les Indiens à établir une certaine paix avec les Français. Mais, malgré la paix qui régnait dans la colonie, malgré les initiatives de Talon, la Nouvelle-France ne semblait pas prospérer tel que souhaité.

Puisque les jeunes hommes n’avaient plus à craindre les Iroquois, ils abandonnaient leurs fermes le long du Saint-Laurent pour se diriger vers l’intérieur du pays à la recherche des riches fourrures. Mais, le gouvernement de la Nouvelle-France, voulant garder les jeunes à la ferme, avait imposé des restrictions au commerce des fourrures.

Pierre-Esprit Radisson et son beau-père, Chouart des Groseilliers, ne voulant pas accepter ces restrictions, s’étaient rendus en Angleterre où leurs informations sur la Nouvelle-France avaient mené à la création de la Compagnie de la Baie d’Hudson en 1670.

Les travaux d’exploration de l’intérieur du pays par les Français avaient commencé avec Samuel de Champlain et Étienne Brulé, vers 1610. Ils s’étaient rendus jusqu’au lac Huron. En 1623, Brulé avait pénétré à l’intérieur du pays jusqu’au lac Supérieur. Vinrent ensuite les voyages de Radisson et des Groseilliers. Au début des années 1670, Louis Jolliet et le père Marquette avaient découvert le Mississippi. À cette époque, la Nouvelle-France réclamait tous les territoires du Canada d'aujourd'hui ainsi que tous les territoires à l’ouest du Mississippi jusqu’en Louisianne.

Toutefois, les Anglais étaient installés à la Baie d’Hudson et le long de l’Atlantique, en Nouvelle-Angleterre. L’année de la naissance de La Vérendrye en 1685, le nouveau gouverneur général de la Nouvelle-France, Brisay de Denonville, «vit que la Nouvelle-France était prise dans un étau entre la compagnie de la Baie d’Hudson dans le nord et le nord-ouest et les Iroquois, avec l’appui actif de New York, dans le sud et le sud-ouest.»1 Denonville avait décidé d’envoyer une expédition à la Baie James pour prendre possession des forts anglais et établir des postes français. Puis, il avait encouragé l’exploration de tous les territoires du nord, de l’ouest et du sud-ouest. Cette politique, appuyée par son successeur, Frontenac, allait demeurer en vigueur jusqu’à la défaite de Québec en 1759.