Chapitre trois

La Vérendrye atteint les prairies de l’Ouest

Tout en effectuant ses travaux d’exploration, La Vérendrye doit essayer de maintenir la paix entre les différentes tribus indiennes, car toute guerre autochtone nuirait aux possibilités des La Vérendrye de se déplacer ici et là dans ce nouveau territoire. À cette époque, les Cris, les Assiniboines et les Monsonis ont comme ennemis traditionnels les Sioux et les Saulteux.

D’autre part, La Vérendrye espère toujours être le premier explorateur européen à atteindre cette tribu des Mandanes: «Ce que les Cris lui avaient dit des Mandanes lui permettait de croire qu’ils avaient des affinités marquées avec les Européens. Ils avaient les cheveux clairs, leur langue et leurs habitations ressemblaient à celles des Français. D’après les dires, cette peuplade habitait les bords du fleuve de l’Ouest (c’était en fait le Missouri), qui se trouvait à 300 lieues du lac des Bois.»16

La Vérendrye doit aussi prendre en considération la relation des Français avec ces tribus de l’Ouest. Alors que Champlain s’était permis de prendre parti pour les Algonquins et les Montagnais dans leur guerre contre les Iroquois (les Iroquois étant alliés des Anglais) au début des années 1600, La Vérendrye ne peut pas faire de même en 1732. C’est que les Sioux, comme les Cris, sont les alliés des Français. «La Vérendrye devait donc traiter des affaires indiennes avec une extrême prudence.»17

En 1734, il ne peut plus empêcher les Cris d’attaquer les Sioux et il accepte d’envoyer son fils, Jean-Baptiste, comme conseiller auprès des Indiens. Pendant ce temps, un autre fils de La Vérendrye, Pierre, quitte le Fort Saint-Charles et se dirige à nouveau vers le lac Ouinipigon. Il suit plusieurs rivières jusqu’à ce qu'il atteigne la rivière Rouge. Il réussit presque à atteindre le lac Ouinipigon; il rencontre les tribus indiennes dans la région et apprend que ces dernières aimeraient voir l’établissement d’un fort français au lac Ouinipigon.

En mai 1734, Jean-Baptiste accompagne les Cris et les Monsonis dans leur expédition de guerre, mais il les abandonne avant qu’ils attaquent les Sioux.

Lorsqu’il revient au Fort Saint-Charles, son frère Pierre est de retour de son voyage d’exploration et il a trouvé un endroit idéal pour un poste de traite sur la rivière Rouge. Une nouvelle expédition se dirige vers le lac Ouinipigon. Cette fois-ci, l’expédition réussit à atteindre le lac et en juin Jean-Baptiste a terminé les travaux de construction d'un nouveau poste de traite, le Fort Maurepas.

Pendant ce temps, La Vérendrye retourne dans l’Est du pays où il rencontre les membres de l’association fondée trois ans plus tôt pour financer ses expéditions. Ces financiers ne veulent plus lui avancer d’argent. Du gouvernement, il apprend que le roi ne consent pas à contribuer à son entreprise et que «le produit du commerce des fourrures devait suffire.»18 Avec ses associés, La Vérendrye réussit à négocier une nouvelle entente. Les associés s’occuperont entièrement de l’aspect commercial de l’entreprise et La Vérendrye se consacrera uniquement à l’exploration de la région.

En juin 1735, La Vérendrye se remet en route pour l’Ouest en compagnie de son plus jeune fils, Louis-Joseph, et d’un missionnaire jésuite, le père Jean-Pierre Aulneau.

L’année suivante est une année difficile pour La Vérendrye. D'abord, il y a la mort de son neveu La Jemerais. Ce dernier est en charge du Fort Maurepas depuis l’été 1734. En 1735, les provisions de Montréal n'arrivent au Fort Maurepas que pendant l’hiver. À cause du manque de provisions, La Jemerais tombe malade et La Vérendrye envoie ses fils, Pierre et François, au Fort Maurepas pour étudier la situation. La Jemerais meurt le 11 mai 1736 alors qu'il est en route pour le Fort Saint-Charles.

Puisqu’il manque de provisions pour ses nouveaux forts, La Vérendrye doit alors envoyer, en toute hâte, son fils, Jean-Baptiste, chercher des provisions au Fort Kaministiquia. Les Sioux attaquent le groupe , Jean-Baptiste et le père Aulneau sont tués .

Malgré ces tragédies, La Vérendrye est déterminé à poursuivre et à atteindre le lac Ouinipigon, chose qu’il réussit à faire en février 1737. Louis-Joseph l’avait précédé au Fort Maurepas l’automne précédent. «Là, au début mars 1737, il a rencontré plusieurs chefs Kenisteno du nord. Ils lui firent une carte indiquant une rivière qu’ils appelaient Paskquaw (prairie) - “la rivière de l’ouest”.»19