Louis-Philippe Hébert
À la nage
1901

 

 

 

Fiertés et
remords


1901

 

 

 

Notre parcours du siècle débute, paradoxalement, par une œuvre qui nous plonge dans le passé.

À la nage, réalisée en 1901 par le sculpteur Louis-Philippe Hébert, fait référence à la tentative de prise de Québec par l'amiral anglais Phipps en 1690 : un nageur français aurait plongé et nagé afin de s'emparer du drapeau de l'amiral ennemi.

La sculpture nous montre le nageur en pleine action, au moment précis où, victorieux, il soulève l'étendard hors de l'eau.

Hébert n'est pas le seul à puiser son inspiration dans un passé lointain et idéalisé, antérieur à des épisodes plus éprouvants de l'histoire du Canada français.

Depuis l'échec des Rébellions de 1837-1838 et la défaite de 1840, tout l'imaginaire québécois, au dire des historiens, tente, en effet, de faire oublier ces revers en créant une galerie de personnages héroïques, plus grands que nature, qui témoigne d'une envergure et d'une dignité que la réalité lui refuse.

Les autorités civiles et religieuses seront les premières à promouvoir cette vision du passé, relayées ensuite par les historiens et par de nombreux artistes.

 

   

Nous retrouvons toujours cette vision, vingt ans plus tard, dans le dessin de Suzor-coté, La Vérendrye au passage des Rocheuses (1923), qui, bien que délesté de sa charge dramatique, véhicule un triomphalisme certain.


Marc-Aurèle de Foy Suzor-Coté

La Vérendrye au passage des Rocheuses
1923

 

Chez Arthur Villeneuve, en 1959, le passé, déjà plus proche, du Débarquement en Normandie, s'accompagne d'un réalisme qui rend la scène insupportable malgré le haut degré de simplification et d'interprétation que le style, dit naïf, du peintre-barbier lui fait subir.

Arthur Villeneuve
Le Débarquement en Normandie
1959

 

Les artistes de la fin du siècle jetteront quant à eux sur ce passé, colonial et guerrier, un regard qui en dénonce avec force tous les abus.

Melvin Charney, par exemple, présente, dans Way Station No. 3 (1984), l'architecture, ici plus particulièrement celle des camps de concentration, comme lieu d'exercice de la mémoire et du pouvoir.


Melvin Charney
Way Station No. 3

1984

 

Dans un livre sans titre, Dominique Blain fait surgir, à l'aide d'un léger effacement, toutes les pressions exercées sur l'individu par le pouvoir social et politique, toutes ces voix que l'histoire n'entend, n'écoute, ne diffuse pas.

 

F.G.

Dominique Blain
Sans titre

1990