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«Saskatchewan étudiante voyage»: l'aventure d'une génération

Recherche et rédaction des textes:
Alice M. Gaudet, Stella Gentil-Perret, Rita Gareau et Laurier Gareau

«On vient de mettre sur pied en Saskatchewan un projet tout à fait nouveau pour cette province. On l'appelle "SEV '68", c'est-à-dire "Saskatchewan étudiante voyage".» C'est ainsi que les Franco-Canadiens de la Saskatchewan apprenaient, en mai 1968, par le truchement de La Liberté et le Patriote, le lancement du projet des voyages SEV. Cet été-là, 31 jeunes de la province font un premier voyage, accompagné du père André Mercure, o.m.i., curé de Jackfish Lake. Entre 1968 et 1979, plus de 400 jeunes Fransaskois vivront la même expérience; un voyage d'éducation, de patriotisme et de personnalité.

Bien sûr, si le premier voyage SEV a lieu durant l'été 1968, l'idée d'un tel projet mijotait, depuis au moins un an, dans la tête du père Mercure et de l'abbé Arthur Marchildon, curé de la paroisse Saint-André de North Battleford. En 1967, c'était le centenaire de la Confédération canadienne. Nombreux étaient ceux qui se rendaient à Montréal pour la grande foire internationale – EXPO 67!

Comme tout le monde le faisait cette année-là, l'abbé Marchildon et le père Mercure discutaient notre beau et grand pays – le CANADA! Mais, ils parlaient aussi de ce pays bilingue où les jeunes francophones de la Saskatchewan manquaient de fierté. Comment pouvaient-ils assurer une relève si les jeunes n'étaient pas fiers d'être Franco-Canadiens de la Saskatchewan?

«Si on prenait cette jeunesse – les mettait dans un autobus – et qu'on les envoyait se baigner – se saucer dans un atmosphère français. Qu'ils voient des gens qui... parlent... vivent... s'amusent... gagnent leur vie... chantent et prient... en français. Eh bien, ces jeunes reviendraient fiers! Ils pourraient dire: J'appartiens à un grand peuple – pas besoin d'avoir peur de parler le français.»

Voilà le rêve des deux curés. Voilà ce qui est devenu le RÊVE de plus de 400 jeunes Fransaskois.

En allant à EXPO 67, l'abbé Marchildon rétablit des contacts avec des connaissances personnelles et des amis du père Mercure (parenté et confrères religieux). Il explore toutes les possibilités de financer une telle aventure. Enfin, en octobre 1967, le voyage est né!

Le choix des voyageurs

SEV, «Saskatchewan étudiante voyage», était un voyage interprovincial de cinq à six semaines, mais les 30 à 35 jeunes choisis chaque année ne faisaient pas un simple voyage touristique. Avant tout, les voyages SEV étaient, pour les jeunes participants, un éveil à la culture française. Tout en aidant à former la Relève franco-canadienne de la Saskatchewan, SEV avait pour but de faire connaître le caractère de la jeunesse canadienne, la richesse du pays, tant naturelle que culturelle, et permettre aux jeunes francophones de la Saskatchewan de vivre une vie en équipe, comme frères et soeurs, dans la joie, le partage et la fraternité.

«Sur 150 jeunes qui avaient demandé de participer au voyage de "SEV '68", seuls 31 ont été choisis. Les autres pourront se reprendre l'année prochaine, car l'on prévoit faire de "Saskatchewan étudiante voyage" un projet annuel.» Seulement 31 jeunes sont choisis pour le premier voyage, peut-être 35 la deuxième année et ainsi de suite. Mais comment sont-ils choisis? Quels critères utilise-t-on pour choisir entre Jean-Baptiste de Meyronne et Jeannette de Victoire?

D'abord, les participants viennent des institutions d'éducation comme le Collège Mathieu de Gravelbourg, le Collège Notre-Dame de Saint-Louis et les nombreux couvents de la province. Il y a aussi des jeunes choisis des cercles régionaux de l'ACFC et des camps d'été. Enfin, les premières années, les gagnants du Concours oratoire de CFNS sont encouragés à dépenser leur prix pour payer leur passage sur le voyage SEV.

Tout élève, garçon et fille, de la Xe, XIe et XIIe, parlant convenablement le français, peut soumettre une demande. Mais avant d'être choisi, un candidat doit faire remplir un formulaire d'évaluation par son professeur de français, son directeur d'école, son curé et un officier du cercle local de l'ACFC. L'évaluation cherche à savoir si le jeune parle convenablement le français, s'il est fidèle à ses devoirs religieux, s'il manifeste un intérêt à la culture française, s'il boit, etc., etc.

Toutefois, les organisateurs connaissent assez bien la province pour savoir qu'ils ne peuvent pas exiger que tous les voyageurs aient suivi le cours de français de l'ACFC «parce que cette distinction excluerait un certain nombre de bons candidats qui n'ont pas le français de l'ACFC chez eux.» Bien sûr, un candidat ayant suivi le cours de français de l'ACFC a un avantage sur celui qui n'a pas eu cette occasion. Un jeune de la XIe année est généralement choisi avant un confrère de la XIIe année «parce que ce jeune peut retourner dans son école pour partager son expérience». La préférence est parfois donnée au garçon dans l'école, non pas parce que les organisateurs sont sexistes, mais «pour avoir un nombre suffisant qui, chaque année d'ailleurs, est inférieur à celui des filles». Avant tout, les jeunes qui sont choisis doivent s'assurer d'être de dignes représentants de la Saskatchewan française.

Malgré tout, le Comité SEV se réserve le choix final des participants. Comme bien des anciens voyageurs disent: «Si Merc t'aimait...».

L'organisation des voyages

Afin de s'assurer que chaque voyage se déroulera sans problèmes majeurs, un Comité SEV avait été mis sur pied dès 1968. «Le Comité SEV était responsable des voyages SEV, SEVI et Dr Hamelin, ainsi que le journal La Sève et le Camp FEU, et les réunions à Noël, le tirage annuel, les archives, les soupers de rencontres SEV et SEVI, et les jours de préparations.»

Prenons le temps de repasser certains des sigles mentionnés ci-dessus. SEV était «Saskatchewan Étudiante Voyage» tandis que SEVI était le voyage international généralement sous la direction de l'abbé Arthur Marchildon. Dr Hamelin était un voyage échange pour des jeunes de North Battleford. Les Camps FEU (Français Étudiants Unis) étaient des camps d'été à Victoire, commencés pour les jeunes (16 à 20 ans) qui n'avaient pas été choisis pour le voyage SEV. Plus tard, ces camps serviront comme outil préparatoire au voyage pour des jeunes de 14 à 15 ans. En ce qui concerne ces camps, certains se posent encore aujourd'hui la question: «Est-ce que c'était un "test" pour savoir qui ferait un bon voyageur?» Enfin, il ne faut pas oublier les voyages ESS (Échange Saguenay Saskatchewan) où un groupe de jeunes de la région de Chicoutimi venait passer deux semaines dans les provinces de l'Ouest (à la fin août), après avoir accueilli chez eux les voyageurs de SEV.

Le Comité SEV était responsable d'assurer la bonne marche de chacun de ces projets. Pour aider avec le travail, on avait établi l'Amicale «La Sève»qui regroupait les amis et les anciens voyageurs de SEV et de SEVI et les participants des Camps FEU et des voyages Dr Hamelin et ESS. Toutefois, le gros du travail reposait généralement sur les épaules du père André Mercure, de l'abbé Arthur Marchildon, de soeur Marguerite Bourgeois et de Mlle Catherine Dupont de la paroisse Saint-André de North Battleford. «Les gens de North Battleford se rappellent certainement du petit coin bien rempli de filières. Chaque année, des centaines de lettres dictées par les pères faisaient leur chemin autour du monde. Mlle Catherine Dupont et Sr Marguerite Bourgeois et toutes les autres secrétaires "travaillent jour et nuit sur ce travail énorme" sans compter leurs heures.»

Le Comité SEV est composé d'un exécutif et de directeurs, soit des amis de SEV, des anciens voyageurs de la région de North Battleford et le président de l'ACFC locale. SEV, bien sûr, est organisé par le Comité SEV sous le patronage de l'ACFC de North Battleford et de l'ACFC provinciale.

Le père Mercure accepte de relever beaucoup des responsabilités du programme SEV. Il n'est donc pas surprenant que pendant les années qu'il est curé de paroisse à Edmonton, les anciens voyageurs qui se trouvent dans la région de la capitale albertaine sont appelés à venir aider à remplir des enveloppes.

Le financement des voyages

«Le voyage SEV n'est pas organisé par l'ACFC provinciale, mais elle lui donne son encouragement et son appui moral auprès du Secrétariat d'État d'Ottawa.»

Entre 1968 et 1975, le Comité SEV reçoit des subventions substantielles du Secrétariat d'État du Canada pour lui permettre de réaliser ses projets, principalement les voyages SEV et SEVI. Mais le Comité reçoit aussi un appui financier de nombreuses organisations provinciales, nationales et internationales (comme la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal et France-Canada), de nombreuses paroisses canadiennes-françaises et d'individus à travers le pays.

Cependant, les embêtements financiers s'amplifient vers 1974. D'autres groupes, comme l'ACFC provinciale, s'étaient lancés dans les voyages-échanges. En 1974, l'octroi du Secrétariat d'État est coupé des deux tiers comparativement à l'année précédente. Les organisateurs doivent choisir entre deux solutions: annuler le voyage ou solliciter de l'aide ailleurs. Les amis et anciens de SEV et de Radio-Prairie-Nord Ltée viennent au secours du voyage. Même l'ACFC provinciale contribue à la réussite du voyage 1974. Le gouvernement du Québec est une autre source de financement; il aide au niveau de l'accueil des jeunes dans la province de Québec, comme à Chicoutimi.

La contribution du voyageur doit être payée par le comité local de l'ACFC. Mais il arrive parfois que les parents sont obligés de payer eux-mêmes la note. Cette contribution augmente d'année en année; en 1968, la contribution est de 75 $ par voyageur, mais bientôt, cette somme dépasse 250$. À part de cette contribution, les voyageurs, aidés des anciens et des amis de SEV, vendent pour des milliers de dollars de billets Pay What You Pull chaque année. Comme dernière ressource, des anciens et des amis acceptent de défrayer, de leur poche, des dépenses supplémentaires du voyage.

Même si le voyage SEV ne remplit plus les critères d'admissibilité du Secrétariat d'État et donc n'est plus admissible aux subventions, il est au crédit des organisateurs qu'ils n'aient pas accepté de se plier aux exigences du gouvernement et de changer le caractère du voyage. Le soutien de la paroisse St-André de North Battleford devient de plus en plus précieux et les jeunes (et leurs parents) acceptent de débourser une plus grande partie des coûts.

Les voyages

Le financement étant en place et la plupart des jeunes ayant été choisis, les organisateurs convoquent les jeunes à des journées de préparation. Les premières années, cette préparation se fait les trois jours avant le départ. Plus tard, elle aura lieu à North Battleford au printemps. «Une cinquantaine de jeunes de 15 à 18 ans prenaient des cours: le secret du charme et les bonnes manières. Ils recevaient aussi de l'information sur l'histoire des francophones de la Saskatchewan, de la politique et de l'économie de la province. "Tu ne peux pas représenter ta province si tu ne la connais pas" leur disait le père Mercure.» Mais pour bien des jeunes, le traditionnel «party» chez Louis Bandet de North Battleford est plus important que les renseignements concernant le voyage.

C'est lors de cette rencontre que le comité fait son choix final des 35 à 45 jeunes qui feront le trajet. «Si un jeune ne s'était pas bien comporté pendant les préparations, il était notifié et remplacé par un substitut.»

La veille du départ, les jeunes se réunissent pour choisir le gouvernement du voyage. On choisit un exécutif avec un(e) président(e), un(e) vice-président(e) et plusieurs secrétaires (un pour le journal du voyage, un autre pour remercier les hôtes, etc.). Il y a aussi plusieurs ministres de choisis parmi les voyageurs (finances, alimentation, etc.).

Le ministre des transports, par exemple, est chargé d'organiser une chaîne humaine de 35 jeunes pour lever les valises sur les étagères au-dessus des bancs et en ranger d'autres sous les bancs et toujours assurer que l'autobus soit chargé dans quelques minutes. Le ministre de l'Alimentation doit voir à ce que les repas soient préparés, même s'il doit se lever à 4 h 30. «Le "peanut butter" et "jam" ou les "beans" faisaient l'affaire mais avec "Maman" Topping, un bon repas de dinde et garnitures était tout à fait possible.»

Edgar Topping de Bellevue est le conducteur officiel des voyages SEV pendant de nombreuses années et son épouse, Donalda ("Maman" Topping), l'accompagne et devient conseillère des jeunes. Les dernières années, M. et Mme Topping ne font plus le voyage et il y a plusieurs personnes qui agissent comme conducteurs de l'autobus et comme conseillers.

Puis, avant de monter dans la «Pitoune», l'autobus officiel du voyage, le père Mercure fait un dernier sermon aux jeunes dans lequel il partage son expérience de «voyageologie». Voici quelques-uns des derniers conseils offerts aux voyageurs: «Pas d'mariage en voyage! Jamais seul, rarement deux, souvent quatre ou cinq! Déconstipez-vous, c'est-à-dire, dégênez-vous! Pas de cliques! Même si nos pieds sont fatigués, on ne se plaint pas!»

Puis, pour finir son message de départ, il réitère généralement sa philosophie de voyage: «Je veux vous saucer dans le Lac St-Jean afin que vous ayez vraiment la chance de vous développer et de vous exprimer dans une ambiance totalement française.»

Puis, on est prêt à partir pour... Saskatoon... Regina... St-Norbert... St-Boniface... North Bay... Sudbury... Ottawa... Montréal... Québec... Chicoutimi... Baie St-Paul... Caraquet... Mont Carmel (Î-P-É), Louisbourg, St-Jean (Terre-Neuve), Halifax, Lewiston (Maine), Chicago, Detroit et Duluth (Minnesota). Il s'agit ici de seulement quelques-uns des endroits visités au cours des années. Au début, certains groupes passent mêmes quelques jours à visiter la Saskatchewan avant de rentrer chez eux à la fin du voyage.

Entre 1968 et 1979, plus de 400 jeunes font le voyage SEV, soit environ 35 par année. Chacun garde de doux souvenirs personnels de son expérience sur SEV. Mais, la plupart vivent des expériences semblables. «Avant de s'habituer, on se cognait souvent la tête sur l'étagère au-dessus des bancs de l'autobus.» «On couchait sur des planchers durs sans oreillers. C'était pas trop confortable.» «Les maires nous présentaient avec les clefs de la ville. Nous étions intéressés, surtout que la cérémonie serait suivi d'un banquet, souvent le meilleur repas de la semaine.»

Combien d'anciens voyageurs se souviennent du fameux club des «pipeux»? Le club est fondé sur le voyage SEV '69. «Daniel LeBlanc, Roland Beauchesne, Omer DeGagné, Aubin Gaudet, Martin Laforge, Maurice Laventure, Richard Marcotte et Roland Roy faisaient partie du club. Même M. Topping, qui ne fumait pas, a pris part dans un concours que Maurice Laventure a gagné. Il fallait nettoyer, bourrer, allumer et fumer sa pipe en lisant le journal en trois minutes.»

Comme les temps ont changé au cours des ans. Alors qu'au début des voyages, il était strictement interdit de porter des «jeans» et des espadrilles en voyage, il était tout à fait permis de fumer dans la Pitoune. Aujourd'hui, la cigarette se voit interdite partout, mais à cette époque, «Merc avait toujours son cigare à la bouche.»

En 1971, le groupe SEV rencontre le premier ministre du Canada, l'Honorable Pierre Elliot Trudeau. C'est à ce même M. Trudeau qu'on attribue le slogan: «Les voyages forment la jeunesse.» Ces mêmes voyageurs de 1971 ont l'occasion de visiter la compagnie Playtex Bra. «On sépare les gars des filles. Bien sûr, les gars sont les derniers à revenir à l'autobus.»

Les voyageurs de SEV '72 vivent un épisode moins plaisant: «Accident de Léo Konanz. Il est frappé par une automobile et reste à l'hôpital général d'Ottawa pour trois semaines. Il rejoint le groupe pour une journée avant de retourner chez lui.»

«Suzanne Grimard manque l'autobus de Montréal à Valleyfield.» Cette voyageuse de SEV '74 découvre que l'avertissement du père Mercure, qu'on n'attend pas pour ceux qui sont en retard, est bel et bien vrai. Mlle Grimard doit trouver ses propres moyens pour se rendre à Valleyfield.

Chaque année du voyage SEV, les jeunes reviennent avec une multitude d'histoires à conter à leurs parents et amis. Gustave Gaudet (SEV '70) raconte les souvenirs suivants: «Nous sommes allés à la pêche à Caraquet, N.B. Louise Gaudet a noyé son poisson en essayant de l'entrer. C'était durant une tempête où chaque vague remplissait le bateau. On a tellement été basculé que plusieurs eurent le mal de mer. SEV '70, c'était l'année des 11 crevaisons à la Pitoune. On avait un système bien organisé pour assurer que la Pitoune reprenne le chemin en moins de trois minutes. Guy Bissonnette, le plus gros du groupe, enlevait les tarreaux, Georges Lavoie et Raymond Ouellette levaient la Pitoune avec le "jack" et moi je me glissais sous l'autobus pour sortir le "spare". On est allé voir un match des Expos contre les Cubs de Chicago au vieux Jarry Park. Les Expos ont gagné.»

Il arrivait parfois que les choses ne tournaient pas rond. Stella Gareau (SEV '74) se souvient d'une journée en particulier de son voyage. «Malgré toute l'organisation, nous avons eu bien des problèmes le 17 juillet 1974. Le matin, on quitte St-Bruno pour se rendre à Rimouski. On a une journée bien remplie d'activités: la traverse du fleuve St-Laurent à St-Siméon, visite du centre des loisirs de Rivière-du-Loup, dîner champêtre et arrivée à Rimouski à 16 h 00 pour une réception officielle à l'hôtel de ville suivie d'une tournée de la ville, d'un souper offert par la ville et une soirée avec les jeunes de la place. Le coucher était prévu à la polyvalente Paul-Hubert. On arrive à l'hôtel de ville à 16 h 00. Pas de maire! Personne nous attend! Pas de réception, pas de souper, pas de soirée ni même de lieu pour se coucher. Cependant, le père Mercure et Mme Topping réussissent à trouver notre personne contact à Rimouski. Elle nous trouve un endroit à coucher dans une bâtisse qui doit devenir foyer d'âge d'or. Pour le souper, c'est au Buffet Éclair aux frais de SEV. Et tout retourne à la normale.»

Nombreux sont les anciens qui ont laissé des souvenirs de leur voyage. Julien Poulin et Luc April (SEV '72) écrivent: «Nous avons appris que la chose la plus importante pour un voyage comme tel, c'est de rendre service aux autres et d'essayer de se comprendre mieux les uns les autres. Aussi, grâce au Père, nous avons appris un tas de bonnes choses qui nous aideront énormément dans chacune de nos vies. Merci à père Mercure pour son courage, à M. Topping pour sa patience et à Mme Topping pour son aide.»

Une autre des membres de SEV '72, Renée Verville, écrivait dans le Journal La Sève: «Il faut en faire l'expérience pour découvrir l'intensité des liens de fraternité qui s'établissent et grandissent entre les jeunes durant un mois et demi. Nous devenons une famille, l'amitié grandit, et nous nous enrichissons au contact des personnes que nous rencontrons tout au long du chemin qui nous accueillent avec tant de chaleur humaine.»

Rita Magnin (SEV '76) écrit: «Je me souviens qu'on chantait tout le temps. C'était l'année que les États-Unis célébraient leur bicentenaire. Nous avons été invités à participer au défilé de Lewiston (Maine). Nous chantions tout en marchant, suivi de la Pitoune. Et après, nous avons donné un concert dans le parc. On nous a présenté comme les "Canadian Singers".»

En 1977, on ajoute des nouvelles couleurs au voyage. Lisette Jeanneau (SEV '77) écrivait à l'occasion: «Nous célébrons notre dixième anniversaire... nous sommes embarqués dans "La Pitoune" (notre autobus) qui a été peinturée d'un frappant vert et jaune en imitation du drapeau de la Saskatchewan. Non seulement la Pitoune a revêtu un beau manteau neuf, mais chacun de nous a reçu un blouson vert avec l'écusson de SEV.»

Enfin, les jeunes écrivent dans leurs journaux: «On était excité. On avait peur. On s'ennuyait parfois. On se trouvait à peau blanche sur les plages. Jamais n'aurions-nous deviné les larmes qui couleraient lorsqu'on se dirait au revoir après les six semaines.»

Après les voyages

Dès le début, le père Mercure et l'abbé Marchildon organisent des rencontres d'amitié et d'évaluation. Les anciens se rencontrent chaque année à Noël à North Battleford. Il y a aussi des rencontres d'universitaires, anciens de SEV, des soupers dans les paroisses des voyageurs comme à Regina, à Saskatoon et à Edmonton. En 1972, à l'occasion du 25e anniversaire de mariage de M. et Mme Topping, il y a une grande rencontre de SEV à Bellevue.

En 1969, le Comité SEV met sur pied L'Amicale «La Sève» dont le but est d'entretenir des liens entre ses membres par des rencontres et des reportages et autres documents. Après la mort du père Mercure en 1986, l'Amicale cesse d'exister et c'est seulement au cours de la dernière année que des anciens ont entrepris de la faire renaître.

Le journal La Sève est aussi fondé en 1969. Tout en payant leur cotisation à l'Amicale, les anciens s'assurent un abonnement au journal. Le journal est publié quatre fois par année par le père Mercure et l'abbé Marchildon et continue à paraître jusqu'au printemps 1981.

Vers le milieu des années 1970, le caractère même de SEV commence à évoluer. On commence à permettre aux gars le port des «jeans» et des «t-shirts» et aux filles celui des «halter dresses». Alors qu'il était strictement interdit aux premiers gars à faire le voyage en 1968, 1969, 1970, etc. d'avoir les cheveux longs, ce règlement n'existe plus en 1978. Cette année-là, Daniel Poulin est directeur du groupe et lui-même porte les cheveux jusqu'aux épaules.

Le groupe de SEV '79 passe trois jours au festival historique «On s'garroche à Batoche» avant d'entreprendre ce qui sera le dernier voyage. Quelques mois plus tard, une époque prend fin. «La réunion de Noël était un vrai fiasco, car tout le monde n'avait pas reçu une lettre d'invitation. Une vingtaine se trouvent à North Battleford et sont déçus.»

Le voyage SEV cesse d'exister. Toutefois, entre 1968 et 1979, SEV aura permis à plus de 400 jeunes Fransaskois de vivre une expérience inoubliable. Le père André Mercure, o.m.i. et l'abbé Arthur Marchildon avaient caressé, en 1967, un rêve: celui d'organiser des voyages qui pourraient servir de formation pour une relève franco-canadienne en Saskatchewan. Des voyages qui pourraient servir à rebâtir la fierté des jeunes pour leur héritage francophone. Des voyages qui permettraient de baigner la jeunesse de la Saskatchewan dans une atmosphère française. Ces buts furent-ils atteints au cours des années? Une personne n'a pas à chercher loin pour trouver des anciens voyageurs. Ils sont impliqués dans les organisations fransaskoises provinciales, régionales et locales. On les trouve dans les groupes de parents fransaskois, parmi les syndics et les comités de la pastorale. Mais avant tout, la plupart continuent d'être fiers de leurs racines françaises. Sa vocation, celle de bâtir une relève fransaskoise, Saskatchewan étudiante voyage l'a bien remplie. Merci!

Un ancien, Armand Poirier (SEV '72), écrivait récemment: «SEV, c'est une expérience qui m'a beaucoup touché. Ayant grandi dans une famille pauvre, je n'aurais jamais eu une telle chance. Ça m'a fait beaucoup grandir. Lors du voyage de SEV, j'ai vu une croix au Québec sur laquelle fit inscrit: "Canadien français – garde ta langue, aime ta foi et conserve tes traditions". SEV m'a certainement aidé à cet égard.»

En 1991, lors d'une discussion entre des anciens voyageurs et l'abbé Arthur Marchildon, il a été convenu d'organiser un mini-colloque qui a eu lieu cette année-là. L'année suivante, on a préparé une vidéo intitulée «Reflets sur S.E.V.» qui a été présentée à la Fête fransaskoise à Zénon Park. Après une étude auprès des anciens, on décide de fêter le 25e anniversaire de «La Sève» en 1993. Cette réunion de famille aura lieu les 16, 17 et 18 juillet 1993 à la Ferme Champêtre à St-Denis. Plusieurs anciens voyageurs ont déjà indiqué qu'ils y seraient. Tous sont invités... anciens voyageurs et amis de «La Sève».

Dis donc! À ces dates, les 16, 17 et 18 juillet 1968, le premier groupe SEV était rendu à quel endroit...

En 1991, l'abbé Arthur Marchildon commence à s'inquiéter des archives de SEV qui sont entreposées dans son garage. Il demande alors à quelques anciens de faire le ménage dans les boîtes de documents et de les préparer pour qu'ils soient déposés et préservés aux Archives de la Saskatchewan.

Déjà, certains documents ont été détruits par accident et l'abbé Marchildon veut s'assurer que le même sort ne soit pas réservé aux documents encore en sa possession.

Il manque toutefois certains documents comme des «journaux de voyage». Des anciens ont peut-être des copies de ces documents. Si c'est le cas, il serait possible de les photocopier avant de déposer les documents aux Archives de la Saskatchewan. L'original serait retourné à son propriétaire.

Donc, si vous êtes un ancien et que vous avez encore le journal de voyage de votre année, communiquez avec Alice (Gobeil) Gaudet au 423-5349.

(L'information pour cet article a été puisée ici et là dans les archives de «La Sève».)

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