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Pierre Barbier


L'abbé Pierre-Xavier Barbier est né aux Boffres, près d'Annonay en Ardèche, le 18 avril 1863. Après ses études classiques, il est ordonné prêtre en décembre 1888. Six ans plus tard, il répond à l'appel de Mgr Albert Pascal, évêque de Prince Albert, qui effectue alors une tournée en France dans le but de recruter des prêtres pour ses missions.

La simplicité est le principal trait de caractère de celui qu'on a affectueusement nommé «le bon Père Barbier». D'abord affecté à la mission de Bonne-Madone, il est envoyé à Saint-Louis en 1897. «Il était de cette race ancienne de prêtres assez gais, totalement étrangers aux maximes du monde et qui s'imposaient à l'affection générale. Il était si peu animé de l'esprit moderne qu'il ne s'habillait jamais en clergyman; il portait toujours sa soutane. Pratique et heureux, il avait une notion très exacte de la valeur de l'argent. On l'aimait et on le respectait. Voici comment le décrit un ami: Le teint de ses joues semblable à celui d'un jeune bébé, ses yeux d'un bleu pâle reflétaient la candeur et le bonheur du jeune âge. Il était sûr que depuis longtemps sa place était prête au Paradis. Il comprenait qu'en ce monde rien n'est à nous et que les apparences de bonheur sont plus durables en nos songes qu'en réalité. Indifférent au tumulte de la vie, il se délectait du Paradis par la prière, par la vision et l'esprit. Chaque jour, il offrait gentiment sa vie au Seigneur. Austère comme un traité de droit canon, sa nourriture était bien simple: sa soupe lui durait plusieurs jours, même au risque de surir.»1

«Quand une paroisse était à fonder chez des colons très pauvres, Mgr Pascal l'y envoyait l'abbé Barbier: «Lui vit d'amour de Dieu et de rien», disait-il. Son esprit de pauvreté est resté proverbial dans tous les postes qu'il a desservis. Deux personnes le surprirent un jour à l'heure de son repas de midi: sur la table, un plat de pissenlits, une tranche de pain sec et une tasse d'eau constituaient le menu. Même en hiver le fourneau de cuisine suffisait pour réchauffer son logis.»2

En 1898, il devient pasteur de la paroisse Sainte-Jeanne d'Arc, à Domrémy, où il demeure jusqu'en 1911, alors qu'il prend la relève de l'abbé LeFloch, de Saint-Brieux.

La colonisation de la région de Saint-Brieux et Kermaria est particulièrement pénible: fortement boisées, souvent marécageuses et pierreuses, les terres commencent à peine à être défrichées. L'agriculture ne rapporte encore presque rien et pour survivre les hommes gagnent les chantiers du nord à chaque automne; c'est donc dire qu'on a bien peu à donner au curé. Avant d'accepter la cure, l'abbé Barbier sonde prudemment le terrain.

«Vers le 20 juillet, le prêtre sur lequel Sa Grandeur Monseigneur Pascal a jeté les yeux pour être notre pasteur vient visiter sa future paroisse. Avant d'assumer ce fardeau, il visite chacun de nous, et devant les encouragements et les promesses de collaboration qu'il reçoit de la part de tous, il décide d'accepter; il vient donc se fixer au milieu de nous pour la fête de l'Assomption, et pendant quinze ans il se dépensera sans compter à l'organisation paroissiale de notre colonie.»3

Pendant plusieurs années, il se dévoue pour mettre sur pied les organismes paroissiaux qu'il juge indispensables à la survie de l'esprit catholique et français. Ce qu'il désire avant tout, c'est l'installation d'une communauté de religieuses enseignantes au village: les Filles de la Providence acceptent une fondation en 1924.

«C'est également cette année-là que nous entrevoyons la possibilité de voir le bon Père Barbier nous quitter. Nous sommes si bien habitués à le voir dans la colonie que l'idée de son départ ou de son changement ne nous est jamais venue à l'esprit. Aussi quand, pendant l'été de 1924, la rumeur circule qu'il pourrait bien partir, nous sommes tous décontenancés: une requête signée par la quasi-totalité des paroissiens et demandant à Sa Grandeur Monseigneur Prud'homme de bien vouloir laisser le P. Barbier avec nous, est adressée à l'évêché. Monseigneur Prud'homme comprend les sentiments qui ont dicté notre démarche et il veut bien nous promettre de nous laisser le P. Barbier comme curé, aussi longtemps qu'il le désirera. De son côté, le P. Barbier touché de cette marque de confiance et d'affection de notre part consent à demeurer au rnilieu de nous, du moins temporairement. Cependant, prêtre dévoué et désintéressé, il considère avant tout le bien des âmes: or de plus en plus, il se rend compte que la présence d'un prêtre qui connaîtrait plusieurs langues devient une nécessité. Il y a en effet quelques familles de langue anglaise aux environs ainsi que des familles de langue allemande, mais il y a surtout des Italiens et des Hongrois, et naturellement ces familles désireraient que le prêtre qui les visite pût parler leur langue; par ailleurs, le P. Barbier songe que s'il y avait deux prêtres à Saint-Brieux, l'un chargé de la paroisse qui est entièrement française, l'autre consacrant son temps aux petits groupements catholiques de langues diverses qui sont dans les environs, ce serait certes le meilleur moyen de donner satisfaction à tous. Il est persuadé que pour ce travail de missions parmi des catholiques de différentes races, une communauté religieuse arrive généralement à de meilleurs résultats parce qu'elle dispose d'hommes préparés à ce genre de ministère. Or justement à l'automne de 1924, les Prêtres de Sainte Marie sont venus s'établir à Tisdale et ont pris charge des missions avoisinantes. Saint-Brieux serait le centre naturel de ces petits postes. Après mûre réflexion, en 1926, le bon P. Barbier prie Sa Grandeur Monseigneur Prud'homme de l'envoyer dans un poste entièrement de langue française et de confier la paroisse de Saint-Brieux aux Prêtres de Sainte Marie. Certes c'est avec grand chagrin que nous voyons le P. Barbier s'éloigner de nous et c'est réciproque.»4

S'il accepte ainsi le départ, c'est peut-être aussi parce qu'il nourrit le secret espoir que les Prêtres de Sainte Marie de Tinchebray ouvrent une école apostolique à Saint-Brieux, ce qui donnerait une nouvelle impulsion au village.

Quoi qu'il en soit, l'abbé Barbier se rend à Saint-Front, où il demeure jusqu'à sa retraite en 1933. «Là encore, il avait à coeur l'éducation des enfants et demanda aux Filles de la Providence de bien vouloir prendre charge de l'école. En 1933, l'école s'ouvrait sous la direction des religieuses. Malgré son âge avancé, le Père Barbier voulut revenir dans sa vieille paroisse de Saint-Brieux, afin d'aider le Père Rivard, surchargé d'ouvrage. Il resta parmi nous encore dix ans. Cependant le 29 août 1943, au chagrin de tous, il s'éteignait dans le Seigneur. Il repose dans notre cimetière et au pied de la Croix, un monument a été élevé à sa mémoire.»5

(citations: 1 Je me souviens, Album historique de Saint-Louis, p. 49; 2 esquisse préparée par Soeur Marie-Madeleine Tournier, collection S.h.S.; 3 Denys Bergot, Réminiscences d'un pionnier, Saint-Brieux, 1929, p. 52; 4 ibid, pp. 72 et 74; 5 Cinquantenaire de la Paroisse de St-Brieux, Saskatchewan, p. 54 aux Archives provinciales)

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