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Joseph-Henri Prud'homme


C'est à Mgr Joseph-Henri Prud'homme que revient l'honneur d'avoir été le premier prêtre natif de l'Ouest élevé à la dignité épiscopale. Il faisait d'ailleurs partie d'une famille illustre dans l'histoire du Manitoba. Le futur évêque du diocèse de Prince-Albert et Saskatoon naît à Saint-Boniface le 9 septembre 1882. Par sa mère, Apolline Hénault, il est le neveu de Joseph Dubuc, juge en chef du Manitoba. Son père, Louis-Arthur Prud'homme, est député de La Vérendrye à l'Assemblée législative de Winnipeg; il sera par la suite nommé juge, deviendra membre puis président de la section française de la Société Royale du Canada, prendra la tête de la Société historique de Saint-Boniface et publiera un nombre important d'ouvrages historiques sur l'Ouest.

C'est dans ce milieu profondément chrétien et français que grandit l'enfant. Il fait ses premières études à Saint-Boniface, d'abord à l'école primaire des Soeurs Grises puis au collège des Jésuites. Après quelques années dans les séminaires de Montréal, il est ordonné prêtre à Saint-Boniface en octobre 1904 par Mgr Langevin. Il a tout juste vingt-deux ans, et c'est en vertu d'une dispense extraordinaire du pape qu'il peut recevoir l'onction sacerdotale à un âge si jeune. Une condition est assortie à cette dispense: Joseph-Henri Prud'homme ira poursuivre ses études à Rome. Il part aussitôt pour le Collège Canadien au Vatican afin d'y obtenir ses titres de docteur en théologie et en droit canonique. Il étudie aussi l'allemand et effectue quelques séjours en Allemagne afin d'y étudier les questions sociales.

Il revient à Saint-Boniface à l'été de 1908 et commence sa carrière au palais épiscopal. Il est d'abord secrétaire-archiviste puis secrétaire de Mgr Langevin, avant d'être nommé au poste important de chancelier du diocèse. Il n'a pas encore célébré son vingt-neuvième anniversaire de naissance. On ne peut nier que cette carrière, rien de moins que fulgurante, il la doit en partie à son nom; mais il n'en demeure pas moins qu'il fait preuve d'une grande valeur intellectuelle et qu'il possède des talents riches et variés. Personne ne doute qu'on le prépare à de hautes fonctions.

Le 16 janvier 1921, il est élu évêque de Prince-Albert et Saskatoon. Le siège est vacant depuis de longs mois et cette absence n'a fait qu'exacerber les tiraillements entre les différents groupes ethniques. Mgr Prud'homme est l'homme idéal pour ramener la paix, ne fusse que parce qu'il parle couramment la langue de trois des principaux groupes catholiques, le français, l'allemand et l'anglais. Il parle aussi l'italien et le polonais, et comprend, paraît-il, quelques langues slaves.

Un défaut chronique de santé l'oblige toutefois à s'absenter de temps à autre. Ainsi, quelques mois à peine après sa nomination à Prince-Albert, il doit effectuer un assez long séjour en Floride, dans la solitude de la petite île de Passe-à-Grille, pour y refaire sa santé. Sur le chemin du retour, il passe quelques semaines en Nouvelle-Angleterre, dans l'intérêt de l'immigration des Franco-Américains dans son diocèse.

De son premier séjour en Europe, il semble avoir conservé une prédilection pour ce continent, ses villes et ses trésors religieux. Déjà lors des discussions menant à la division du diocèse de Saint-Boniface en 1916, il accompagne son archevêque à Rome pour faire valoir auprès du Vatican le point de vue des franco-catholiques de l'Ouest canadien. Il assure aussi la direction spirituelle de pèlerinages outre-mer. En 1925, il conduit 150 personnes vers la Ville Éternelle et trois ans plus tard, il mène quelques dizaines de pèlerins jusqu'à Rome et Jérusalem, visitant en chemin Paris, Vienne, Athènes, Constantinople et Le Caire. À son retour, il fait publier dans Le Patriote de l'Ouest des notes de voyages minutieusement détaillées. Un journaliste du Devoir de Montréal rapporte à ses lecteurs un épisode du pèlerinage qui montre bien les talents de linguiste de Mgr Prud'homme. «Le Souverain Pontife, écrit-il, a accordé une audience d'une heure et vingt minutes à Monseigneur. Monseigneur et Sa Sainteté avaient commençé la conversation en français. Amené à parler de la Pologne, Monseigneur s'est exprimé en polonais. Parlant ensuite de l'Autriche, Monseigneur s'est exprimé en allemand. Naturellement, Monseigneur n'ignore pas l'anglais... Le Saint-Père paraissait se demander jusqu'où cela irait...»

Moins d'un an plus tard, il repart pour l'Allemagne et la Pologne, dans l'intérêt de la colonisation et «pour y recruter des prêtres sachant les langues des diverses populations de son diocèse.» Il rend visite à Thérèse Neumann, la grande stigmatisée, s'arrête à Rome et revient par la France.

En janvier 1937, il prend la décision de remettre sa démission. Le Patriote de l'Ouest en résume les raisons et dresse le bilan du travail accompli. «Un travail assidu de quinze ans au service du diocèse de Prince-Albert a sans doute fortement entamé sa réserve de forces physiques et des indispositions prolongées et répétées on fait comprendre ou craindre à Son Excellence que sa santé ne pourrait tenir plus longtemps sous un fardeau toujours grossissant.

«Sous sa direction, trente-cinq missions ont été érigées en paroisses, soixante-dix chapelles de missions ont été construites, onze communautés religieuses nouvelles se sont installées dans le diocèse, une chaire de philosophie scolastique a été instituée à l'Université d'État de la Saskatchewan, une maison pour les étudiants a été bâtie à Saskatoon, des conférences sur la doctrine catholique ont été inaugurées à Radio-État, le premier synode diocésain de l'Ouest a tenu ses assises à Prince-Albert, cinq hôpitaux ont été fondés, une société de colonisation a été organisée, des couvents ont été construits, un high school a été fondé en notre ville, des conférences ecclésiastiques, des concours catéchistiques ont obtenu de consolants succès, trois paroisses sont devenues des endroits de pèlerinage annuel.»

Le prélat se retire alors au séminaire des Missions étrangères à Pont-Viau, au Québec, avec le titre d'évêque de Salde, en Afrique française. Il décède au séminaire le 5 janvier 1952.

(citations: première, Le Patriote de l'Ouest, 9 mai 1928, p. 1; suivantes, ibid., 3 février 1937, p. 3)

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