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Bernard Tétreault


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Bernard Tétreault, commerçant de Saint-Brieux, membre influent de C.F.N.S. à Saskatoon (Archives de la Saskatchewan) 6.2 Kb

L'élément de langue française dans l'Ouest canadien a été peu et mal servi par la radio d'État à ses débuts. Devant la mauvaise volonté évidente des chefs politiques et des dirigeants de la société d'État, les capitaines des groupes minoritaires du Manitoba, de l'Alberta et de la Saskatchewan résolurent de construire leurs propres stations de radio. Dans cette dernière province, la situation était doublement difficile, car il fallait construire une station pour le Nord et une autre pour le Sud, étant donné l'éparpillement de la population. La station des «Canadiens-Français du Nord de la Saskatchewan», érigé à Saskatoon, entra officiellement en ondes au début de novembre 1952, quelques mois après celle de Gravelbourg. Le premier directorat de C.F.N.S. était formé d'hommes de la trempe du Dr Maurice Demay, d'Antonio de Margerie, de Clotaire Denis, d'Albert Marchildon, de M. l'abbé J.-A. Beaulac et de Bernard Tétreault; ce dernier allait y siéger sans interruption pendant plus de vingt ans. Grâce à son expérience dans le monde des affaires, il rendit d'insignes services, en particulier durant la construction de la sation et lors de son déménagement quelques années plus tard.

Le père de Bernard Tétreault, natif de la région de Montréal, arrive dans l'Ouest vers 1907 pour être chef de gare à Kinley, à l'ouest de Saskatoon, sur la voie du Grand Tronc Pacifique. Bernard Tétreault naît le 3 octobre 1913, fils cadet d'une famille de dix enfants. C'est en septembre 1924 que la famille Tétreault vient s'établir à Saint-Brieux, afin que les enfants puissent fréquenter une école française et catholique. Le jeune Bernard termine donc ses études élémentaires à l'école du village, puis il part pour le Collège Mathieu, à Gravelbourg, où il obtient un diplôme en commerce. Il décroche sans peine un emploi à la Banque de Commerce et il est affecté à North Battleford, Wadena, Tramping Lake et Saint-Brieux au cours des cinq années suivantes. Ayant remis sa démission, il vient à peine de reprendre ses études au collège quand son père, malade depuis quelque temps, meurt à l'automne de 1935.

En société avec Laurent, son frère aîné, Bernard Tétreault rachète une épicerie et magasin général à Saint-Brieux en 1936. Malgré la crise économique, l'entreprise est bien gérée et rapporte suffisamment pour que Bernard puisse subvenir aux besoins d'un foyer; il épouse Edith Lefebvre en octobre 1938. Il est en même temps représentant d'une grande compagnie d'assurances, conseiller en placements et représentant-vendeur d'une fabrique de pierres tombales. Après la Seconde Guerre mondiale, l'augmentation du chiffre d'affaires et la transformation des habitudes de consommation amènent les deux frères à construire un magasin de plus grandes dimensions.

La cause de la radio française dans l'Ouest avait entretemps continué à avancer et l'idée de construire les stations avait pris forme. On avait créé deux compagnies, Radio-Gravelbourg et Radio-Prince-Albert, dans les villes où les stations devaient être établis. Une grande campagne de souscription lancée à l'été de 1944 avait rapporté 200 000 $ dans l'Est – dont 120 000 $ revenaient à la Saskatchewan en raison des problèmes particuliers auxquels elle faisait face – et près de 170 000 $ dans l'Ouest. Pour administrer les fonds ainsi recueillis dans la section nord de la Saskatchewan, les délégués des paroisses se réunirent à Prince-Albert le 24 avril 1946 afin d'élire un directorat de 10 membres, plus tard élargi à 13 membres. Bernard Tétreault fut choisi, car on sentait bien que son expérience pratique serait précieuse. Il allait conserver ce siège de directeur jusqu'à son décès.

Au printemps de 1951, il ne fait plus aucun doute que les permis d'exploitation des stations C.F.R.G à Gravelbourg et C.F.N.S. à Saskatoon – car on avait découvert que le rayonnement y serait meilleur qu'à Prince-Albert – seront accordés à brève échéance. Le directorat de C.F.N.S. met alors sur pied un «comité de construction», formé de Bernard Tétreault, de l'abbé J.-A. Beaulac et de Roger Dupuis. Le comité doit diriger les travaux de construction des tours d'émission et des studios, et s'assurer qu'ils soient terminés dans les meilleurs délais et au coût le plus bas possible. Contrairement à C.F.R.G. qui a eu la bonne fortune de pouvoir acheter un immeuble déjà construit à Gravelbourg, les gens de Saskatoon doivent construire à neuf sur un terrain le long de l'avenue Broadway, une des grandes artères de la ville. C'est donc dire que l'on a fort à faire pour choisir un architecte, un entrepreneur et des artisans, et surveiller le progrès des travaux. Enfin, après plusieurs délais occasionnés par la pénurie de travailleurs spécialisés, on achève de dresser les antennes et la station entre en ondes le 6 novembre 1952. M. Tétreault avait entre temps été élu membre du conseil d'administration de la station en mai 1951. C'est d'ailleurs lui qui soumet la proposition pour le choix des lettres d'appel du poste. C.H.B.D., en l'honneur de Mgr Maurice Baudoux, a la faveur de la majorité des directeurs et seul le refus catégorique de Mgr Baudoux les oblige à choisir plutôt C.F.N.S.

Bernard Tétreault continue à servir fidèlement la «Voix française du Nord de la Saskatchewan» pendant de nombreuses années. En 1965, on propose son nom au poste de président de C.F.N.S., quoique ce soit M. Clotaire Denis qui l'emporte finalement aux voix. L'année suivante, il est encore une fois choisi membre du comité de construction lorsqu'une compagnie pétrolière fait l'achat du site des studios, à un prix très avantageux. Avec le profit de la transaction, on peut liquider quelques dettes, construire de nouveaux studios et augmenter la puissance de diffusion à 10 000 watts.

Radio Prairies-Nord n'est pas la seule entreprise d'intérêt public et le seul mouvement national qui bénéficient de son aide et de son expérience. Membre actif du cercle local de l'Association Catholique Franco-Canadienne de la Saskatchewan, il est commissaire d'école du district Saint-Brieux n° 1463 pendant de nombreuses années et occupe le fauteuil de président pendant plus de dix ans. Secrétaire de la compagnie locale de téléphone pendant trois décennies, il travaille aussi avec acharnement afin d'assurer le financement et l'installation du système d'aqueduc et d'égoût dans le village et on peut dire qu'il est l'un de ceux qui contribuent le plus au raccordement du système de distribution d'électricité au réseau provincial. Il sert également au Conseil du village pendant quelque temps. Bernard Tétreault s'intéresse de plus à la vie sportive de son village et surtout au club de curling, sport qu'il pratique avec ardeur. Et comme le village est privé de services bancaires depuis la fermeture de la Banque de Commerce vers la fin des années 1930, il dirige avec d'autres le mouvement pour la création d'une caisse populaire. Lors de sa mise sur pied en 1956, il devient son premier gérant, poste qu'il conservera pendant plusieurs années.

Bernard Tétreault meurt d'un cancer le 12 mars 1967, à l'âge de 54 ans. Même si son nom a rarement fait la manchette, il a joué un rôle vital dans l'établissement et la survie de C.F.N.S., la radio française du Nord de la Saskatchewan.

(renseignements: Historique de Saint-Brieux, 1904-1979, s.l. 1981, passim; La Liberté et le Patriote, 9 mars 1967, p. 9 et 30 mars 1967, p. 10; dossiers Radio-Prairie-Nord Ltée (C.F.N.S.) aux Archives provinciales)

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