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BordéeIl y a quelques semaines, nous pouvions croire que l'hiver était presque fini; quelques beaux jours ensoleillés et une neige fondante poussait les gens du Nord à croire que le printemps serait bientôt parmi nous. Hélas, Mère Nature ne collabore pas toujours avec nos souhaits. La semaine dernière, la Saskatchewan a connu un retour des temps froids ainsi que plusieurs bonnes bordées de neige. Dans son Dictionnaire de la langue québécoise, Léandre Bergeron nous dit que bordée est un nom féminin – une forte chute de neige. Selon Dagenais dans son Dictionnaire des difficultés de la langue française au Canada, le mot bordée date du XVIe siècle et signifiait l'ensemble des canons rangés d'un côté d'un navire. Plus tard, le terme est venu à exprimer l'idée d'une décharge simultanée de tous les canons. C'est au Canada que bordée a pris le sens d'une chute de neige. Toujours selon Dagenais, «il serait compréhensible que le langage populaire des Canadiens, largement marqué par le vocabulaire de la marine, se serve comme image de bordée pour dire «rafale» en parlant de la neige. Entre une rafale de neige, ou de grêle, ou de pluie et une bordée d'obus, la comparaison vient d'emblée. Ce n'est cependant pas au sens de rafale qu'on emploie le mot au Canada, mais à celui de «forte chute», quelle qu'en soit la durée, qui peut être de plusieurs jours, et sans tenir compte du vent.» Dagenais précise qu'il est faux de dire «nous avons eu une bordée de neige cette semaine». Selon lui, nous devrions dire «il est tombé beaucoup de neige cette semaine». Il faut reconnaître l'erreur que nous faisons en utilisant bordée dans le sens de chute de neige. Toutefois, dans un sens littéraire, pouvons-nous dire que «beaucoup de neige» est aussi coloré qu'une «bonne bordée de neige»? Admettons-le! Pour nous au Canada qui vivons dans la neige pendant sept mois de l'année, il faut à tout prix ajouter de la couleur à cette petite neige blanche. Le terme existe dans la littérature canadienne-française. Plusieurs ont parlé des bordées de neige au Canada. David Rogers, dans son Dictionnaire de la langue québécoise rurale a relevé un exemple dans le roman «La Terre du huitième» à la page 95: «Pas d'étoiles: on aura du mauvais temps. Je serais pas surpris qu'on ait bientôt une petite bordée de neige pis qu'on entende le raveau des orignaux.» Au Canada français, le mot bordée a également un autre sens, soit celui de faire beaucoup de travail. Par exemple, on dit «j'ai fait une bonne bordée de travail aujourd'hui.» De plus, les premiers colons utilisaient le terme dans le sens de «faire du travail sans arrêt». Ils disaient par exemple: «J'ai labouré cinq acres dans une bordée aujourd'hui.» Au Canada, un autre terme a été légèrement modifié pour mieux décrire la réalité d'ici. Le terme bourrasque est bel et bien accepté dans le vocabulaire français. Le mot veut dire, selon le Petit Robert, «un coup de vent impétueux et de courte durée.» Chez-nous, on entendait souvent l'expression «une bourrasque de neige». C'est qu'au Canada le terme bourrasque a pris le sens de «chute de neige abondante accompagnée de vents impétueux.» Maintenant, il est plus probable qu'on va entendre bourrasse de neige plutôt que bourrasque. Nous avons quand même été chanceux la semaine dernière que la belle bordée de neige que nous avons reçu n'a pas tournée en bourrasse, surtout que la Saskatchewan est connu pour ses vents impétueux. Dans ce cas, la neige est restée sur les champs où elle peut mieux servir aux fermiers, plutôt que de se retrouver sur mon trottoir. |