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Enfirouaper


Réaliser une chronique comme celle-ci demande deux choses: premièrement, la coopération des lecteurs qui vont suggérer des mots et des expressions et deuxièmement une bonne série de dictionnaires qui permettent de chercher le sens et l'origine des mots et des expressions.

Comme je le mentionnais dans la dernière chronique, les gens ont été très fidèles à l'appel et je me trouve avec une bonne réserve de mots et d'expressions qu'on m'a suggéré, certains datant d'avant Noël 1988. En ce qui concerne les dictionnaires, le Salon du livre de l'A.C.E.L.F. m'a permis d'ajouter de nouveaux titres à ma bibliothèque. Entre autres, je me suis procuré celui que Rossel Vien recommandait, soit le Dictionnaire nord-américain de la langue française de Louis-Alexandre Bélisle de la Société royale du Canada. De plus, j'ai acheté le dictionnaire des Régionalismes québécois usuels de R. Dubuc et J.C. Boulanger et le Glossaire du vieux parler acadien de Éphrem Boudreau. Enfin, puisque le docteur Rosario Morin suggère souvent des anglicismes dans notre parler fransaskois, il fallait que je me paie le Dictionnaire des anglicismes de Gilles Colpron. Maintenant, je ne m'attends pas à ce que tout le monde commande ces bouquins puisque la note monte assez vite lorsqu'on parle de dictionnaires, soixante-dix dollars juste pour le Bélisle. Dans la Parlure fransaskoise, je vais essayer de vous transmettre certaines des perles trouvées dans ces volumes.

Comme je le mentionnais plus tôt, j'ai un bon backlog ou une bonne réserve de mots. Il y a plusieurs mois, Cléophas Bouvier de Gravelbourg me déclarait que lorsqu'il était jeune il se faisait souvent enfirouaper dans les mauvaises aventures de ses camarades. J'ai trouvé plusieurs références à ce terme, ainsi que plusieurs façons d'épeler le mot.

Dans le dictionnaire des Régionalismes québécois usuels, on peut lire: «enfirouaper, verbe transitif – emberlificoter quelqu'un, le tromper. Il s'est fait encore enfirouaper par les belles paroles de ce maître-chanteur.» Le Petit Robert nous dit que: «emberlificoter, verbe transitif – entortiller, embrouiller quelqu'un pour le tromper.»

Léandre Bergeron dans son Dictionnaire de la langue québécoise nous offre une différente épellation mais le sens reste le même: «enfiferouâper, verbe transitif – tromper. Attraper. Ex. s'est fait enfiferouâpeé de belle manière par ce vendeur d'auto. – engloutir, avaler rapidement. Ex. J'ai enfiferouâpé mon repas dans deux minutes.»

Dans Bélisle, on trouve le terme écrit de la même façon que dans le dictionnaire des Régionalismes québécois usuels, mais avec la même définition que vient de nous donner Bergeron.

Il faut s'aventurer dans le Livre des expressions québécoises de Pierre DesRuisseaux pour trouver l'origine de ce mot. Lui aussi a une différente épellation pour ce verbe transitif: «Enfirwâper, se faire jouer, berner. Référence aux anglais qui, autrefois, s'habillaient de fourrure. Enfirwâper (in fur wrapped, anglais pour enveloppés de fourrure) par opposition aux Français qui eux, portaient habituellement des vêtements de lin. Ainsi, quand les Français se faisaient jouer, berner, par les Anglais, ils employaient cette expression qui par la suite s'est généralisée.»

Malgré cette affirmation de DesRuisseaux, j'ai trouvé dans le dictionnaire Larousse de l'ancien français un mot qui peut être à l'origine d'enfirouâper. «Enfierir ou enferir, verbe de la fin du XIIe siècle. S'obstiner au combat avec une ardeur pleine d'orgueil.»

Enfin, ce terme s'est faufillé dans la littérature québécoise, comme nous le dit David Rogers dans son Dictionnaire de la langue québécoise rurale: «Enfirouaper, tromper, attraper, berner. Ben, il y a qu'un soir qu'il était chaud, i s'est laissé enfirouaper et pi'i'a signé. Le lendemain i s'est réveillé en kaki; soldat!» Trente arpents de Philippe Ringuet, page 195.

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