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Gouine


Comme je l'ai mentionné à plusieurs reprises dans cette chronique, certains termes étaient familiers dans certaines régions de la province et non pas dans d'autres. C'est que différentes communautés fransaskoises furent colonisées par des gens venant de différentes régions du Québec, de la France, de la Nouvelle Angleterre et même de la Suisse et de la Belgique. Ces gens apportaient avec eux leur langage, leurs expressions et leurs coutumes.

Pourquoi s'attarder à nouveau sur cette réalité de la colonisation de la Saskatchewan? C'est que madame Annette Loiselle de Saskatoon a suggéré une expression qui m'était complètement étrangère. Elle écrit: «Ça c'est une belle gouïne.» Toutefois, sans même me référer à un dictionnaire, pour connaître le vrai sens du terme, je crois que je peux recommander à monsieur John Crosbie, ministre fédéral, de ne pas appeler Sheila Copps, candidate à la chefferie libérale, d'être «une belle gouïne

C'est quoi au juste une gouïne? Bélisle dans son Dictionnaire nord-américain de la langue française nous dit seulement que c'est «une femme de mauvaise vie.» Dans son Dictionnaire de la langue québécoise, Léandre Bergeron nous donne quelques détails supplémentaires. Une gouine, selon lui, c'est le «terme qu'utilisent les gens honnêtes pour décrire une femme délurée. Ex.: Mon père m'a dit que la femme à Toutant, c't'une gouine Délurée se dit d'une personne qui a l'esprit vif et avisé, qui est habile à se tirer d'embarras.

Chez nous, le terme gouine était inconnu, mais par contre on entendait souvent le terme fouine, qui, selon Bélisle, veut dire une personne curieuse ou indiscrète. Le terme fouine ne semble pas être aussi péjoratif que gouine.

Madame Loiselle nous propose aussi l'expression: «Regarde cette grosse torche de fille.» Cette expression, je dois admettre, elle est commune à la plupart des régions francophones de la Saskatchewan. Personnellement, je préfère toujours le terme que m'a suggéré le docteur Edmour Gaudet – toutoune. Ça me semble un peu moins vulgaire que grosse torche.

Un autre lecteur demande d'où vient le mot bouscaud. Un homme bouscaud, selon Bergeron, c'est «un lourdaud ou un homme gros et court.» Toutefois, je n'ai pas pu trouver d'origine pour ce terme, ni de mot qui lui ressemble et qui pourrait nous donner un indice quant à son origine.

Marie-Louise Perron, archiviste aux Archives de la Saskatchewan, après avoir lu une récente chronique où il était question de gibelotte m'a appelé pour me dire que chez-elle on disait souvent une patiche ou patishe pour décrire un mets mal réussi. Je n'ai pas trouvé ce terme dans aucun dictionnaire. Comme tant d'autres, il est possible qu'il nous ait été transmis par les Métis.

J'ai alors décidé de consulter un dictionnaire cri-anglais pour voir s'il n'y aurait pas des mots cris qui ressemblent un peu à patiche. Il y en a deux: «papu'yehtaw» (il le renvoit) et «paste'wiyas» (la viande sèche). C'est possible que le terme patiche vient du cri.

Une photo dans l'Eau Vive du 1er mars a retenu mon attention. Il s'agissait d'une photo du Frère Raymond Deschênes, alias Ti-Frère, que presque tous les anciens collégiens ont connu. À l'époque où il était à Gravelbourg, tous les collégiens allaient le voir quand ils avaient une faveur à lui demander. La réponse de Ti-Frère: «Grouille pas d'icitte. J'reviens tout de suite!» Et, il partait à la course pour ne pas revenir pour quelques heures. Les gars attendaient un certain temps et ils partaient à leur tour.

Dagenais, dans son Dictionnaire des difficultés du français au Canada nous rappelle l'origine du verbe grouiller. «Au XVIe siècle, grouiller signifiait s'agiter en parlant d'une personne: il ne sert rien que de grouiller. Au XVIIe siècle, dans le langage familier, on disait grouiller au sens de bouger, de remuer, acception que le verbe a conservée au Canada. La forme pronominale se grouiller s'emploie encore en France dans le parler populaire pour dire se hâter: nous arriverons en retard si vous ne vous grouillez pas. Employé au lieu de bouger ou remuer, grouiller est un mot vieilli et populaire.»

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