L'histoire
des médias francophones en Colombie-Britannique est relativement récente. À
l'exception de quelques courageuses mais éphémères tentatives de presse écrite
locale, ce n'est qu'à la fin des années 1960 que les franco-colombiens peuvent
s'informer de l'actualité provinciale, nationale et internationale dans leur
langue.
La toute première ébauche de presse communautaire remonte à l'époque de
la colonisation. C'est le début de la ruée vers l'or ; le Comte de Garro,
après avoir fuit le Second Empire en France, arrive en Californie, poussé
par la fièvre de l'or. La population française de Californie est alors évaluée
à 20 000 personnes. Nombre d'entre eux se déplacent avec la fièvre de l'or
de la Californie à la vallée du fleuve Fraser. Certains s'arrêtent en route
à Victoria.
C'est
le cas du Comte de Garro. Là, il rencontre Mgr Demers, qui le prend sous sa
protection. Ensemble, ils ont l'idée de lancer le premier périodique d'expression
française. Le Courrier de Nouvelle-Calédonie sort son premier numéro
le 2 septembre 1858. L'initiative allait se résumer à un peu plus d'un mois
de vie, neuf parutions et deux éditions spéciales.
Comment
expliquer la disparition de ce lien communautaire ? Désintéressement des
francophones, manque d'implication ? Toujours est-il qu'il fallut quatre-vingt-sept
ans pour qu'une autre parution de langue française voie le jour : La
Colombie, dont la vie est éphémère elle-aussi. Enfin, vingt années plus
tard, en 1965, André Piolat et Roméo Paquette imaginent un journal communautaire
francophone. Avec des moyens dérisoires, un duplicateur et l'hospitalité
de la paroisse Notre-Dame de Fatima de Maillardville, une vingtaine de bénévoles
et beaucoup de volonté, les deux hommes fondent un premier journal ensemble,
un mensuel du nom symbolique de l'Appel. Le journal connaît un certain
succès ce qui lui permet d'être imprimé pendant quelque temps sur les presses
de La Survivance des Pères Oblats d'Edmonton. Cependant, privé de
subventions autres que les 800 dollars de la Fédération des Franco-colombiens,
le journal s'éteint progressivement. Une colonne est consacrée dans le nouvel
hebdomadaire en français, le Soleil de Vancouver, fondé le 28 avril
1968 par André Piolat.
Le
Soleil de Vancouver, qui devient vite le Soleil de Colombie,
est le premier réel journal communautaire. «Sans peur, ni faveur»,
son
premier
slogan donne le ton de l'ouverture. André Piolat explique en première page
qu'il était impensable que la troisième ville du Canada n'ait pas encore
son propre journal en français. Après un sondage mené aussi bien auprès
des francophones que des anglophones, il a jugé qu'une telle publication
était nécessaire et serait bienvenue. Il crée donc cet hebdomadaire représentant
la communauté francophone mais indépendant de toute influence religieuse
ou politique. «Le Soleil veut être un journal du peuple, écrit pour
le peuple, dans la langue du peuple, en français de tous les jours partant
du principe que, comme les discours, les mots les plus courts sont toujours
les meilleurs.» Pendant trente ans, l'hebdomadaire commentera l'actualité
des francophones en Colombie-Britannique. Fidèle à
ses valeurs initiales, il sera le seul à tenir aussi longtemps, de façon indépendante
et avec succès, le flambeau de la presse communautaire de Colombie-Britannique.
Au décès d'André Piolat, le journal est repris par Jacques Baillaut
puis vendu au début de l'année 1998 à une entreprise qui fait faillite presque
aussitôt ; la communauté perd son seul représentant de la presse écrite.
La
disparition du Soleil de Colombie laisse une place béante. Pierre Rivard,
directeur du Centre culturel francophone de Vancouver, annonce qu'il prend la
relève du journal communautaire à l'assemblée générale annuelle de la FFCB en
mai 1998. Il s'occupera de l'Express du Pacifique pendant une année,
au terme de laquelle il devra proposer un plan d'action pour que le journal
puisse vivre de lui-même et acquérir son indépendance. En 2001, l'Express est
toujours sous la tutelle du Centre.
Aux yeux de la communauté, il découle de ces négociations une chose importante
: un nouveau journal de langue française la représente. Le journal, qui tire
à 1500 exemplaires, sort son premier numéro le 4 juillet 1998.
On ne pourrait parler de presse francophone sans mentionner le bi-mensuel
bilingue et indépendant, la Source. Fondé un an après l'Express
du Pacifique (le premier numéro sort le 2 juin 1999), ce journal s'est
doté d'une mission toute différente. Écrit dans les deux langues officielles
du Canada, il a comme double objectif de couvrir l'actualité des différentes
communautés culturelles qui habitent Vancouver et d'essayer de construire
progressivement un pont entre ces communautés.
À ces principaux journaux, il faut ajouter de nombreuses petites publications
locales visant à tenir les francophones informés de l'actualité de leur environnement
immédiat, à les sortir de leur isolement et à servir de lien communautaire.
Ces journaux, dont le rayonnement géographique est réduit et le contenu ciblé,
jouent un rôle essentiel au sein de leurs communautés et contribuent à la survie
du fait français. Mais le domaine des médias ne se résume pas à la presse écrite.
La radio et la télévision sont deux autres outils puissants d'information et
de communication entre les membres d'une même communauté. Comment ces médias
desservent-ils les franco-colombiens ?