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Présentes précieuses, Datung, par Monique Parizeau, 2000

Monique Parizeau
Soierie, 1/1, 1993




 


 

Monique Parizeau

L’art de créer, c’est l’art de donner. L’artiste donne à voir, à découvrir sans aucun doute, à appréhender le monde à qui veut bien s’en donner la peine.

Pendant des siècles, les femmes artistes ont été ignorées. Que d’obstacles à franchir pour la femme artiste! Elle a eu à vaincre des préjugés masculins, à l’occasion féminins, pensons à Camille Claudel. Ces préjugés existent-ils encore ? Les choix sont difficiles pour la femme artiste, et ils le demeureront. Exercer son art ou pas, avoir des enfants ou pas.

1970 - École des Beaux-Arts de Montréal - réflexe tout naturel des étudiantes en art : celui de signer leurs oeuvres de leur nom de famille, précédé d’une initiale. Pourquoi ? Parce qu’à cette époque pas si lointaine, pour les hommes connaisseurs ou pas, une oeuvre signée d’un nom féminin n’avait aucun intérêt à leurs yeux. C’était l’attitude masculine qui dictait en quelque sorte notre comportement. Combien de fois certains hommes, jeunes ou vieux, nous interrogeaient sur la nécessité d’entreprendre des études en art. Pour eux, mariage et enfants suffisaient; par conséquent, ces études étaient une perte de temps! Même quelques professeurs féminins émettaient des remarques qui en disaient long sur leur attitude face à l’étudiante. Sachant que nous avions mari et enfants, elles s’interrogeaient sur notre présence en ces lieux. Tous et chacun s’attendaient à ce que nous soyons à nos tâches familiales.

Heureusement, les temps ont changé, les mentalités ont évolué. Le Dinner Party de l’Américaine Judy Chicago, présenté au Musée d’art contemporain de Montréal en 1982, fut une révélation pour tous. La moitié de l’exposition portait sur l’énumération de quelques artistes-femmes depuis l’Antiquité et cela, dans les pays dits civilisés seulement.

De nos jours, la société demande aux femmes de réussir en tout. La femme aura toujours à choisir et ce sera un dilemme constant. Si elle a des enfants, doit-elle mettre en veilleuse ses aspirations artistiques ? Ou doit-elle renoncer aux enfants pour se réaliser en tant qu’artiste ? Si elle accepte les enfants, que de déchirements, petits et grands, et que de préoccupations de tous ordres qui, hélas, sont loin de faciliter la création. Pour l’artiste masculin, le problème ne se pose même pas; il ira à son atelier tous les jours, son bien-être étant souvent assuré par sa conjointe qui verra à tout, et aux enfants évidemment! Certes, il y a eu quelques progrès, mais les tâches familiales restent le plus souvent l’apanage de la femme.

Que de grands défis à relever. Les femmes ont des choses à dire, qu’elles soient artistes ou écrivains. Ces dernières, depuis une vingtaine d’années, prolifèrent et les meilleures oeuvres sont traduites de par le monde. Les écrivains se servent de mots, les artistes se servent de formes, de lignes et de couleurs. Les femmes artistes ont elles aussi beaucoup à donner et font découvrir à l’autre moitié du genre humain leur aspect de la vie, leur créativité, leur intuition, leur sensibilité. Elles sont conscientes de leurs possibilités. Elles sont près de la vie et c’est une richesse. La femme, parce qu’elle donne la vie et la fait grandir, et cela est déjà une grande création, touche à l’essentiel : la vie, la lente progression vers un tout avec ses joies et ses douleurs. Tout cela passe dans son art, c’est une évidence. Les préoccupations de la société qui l'entoure se révèlent également à travers l'expression de son art. Elle ne se limite pas à son univers quotidien. Son regard s'étend au-delà. L’être se révèle dans ses oeuvres. À l’autre d’aller y puiser.

Somme toute, la créativité fait appel aux émotions. Les femmes artistes savent les exprimer avec mille et une nuances et touchent celui qui sait voir.

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