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Archives - Paul Martin

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Allocution du Premier ministre Paul Martin à l'ouverture de la première Table ronde Canada-Autochtones

Avril 19, 2004
Ottawa (Ontario)

DISCOURS DU PREMIER MINISTRE

Le texte prononcé fait foi

Bienvenue à vous tous. Je voudrais remercier les Anciens qui sont aujourd’hui avec nous, en particulier l’Ancien William Commanda, pour sa prière d’ouverture et pour nous avoir tous invité à nous réunir ici dans le territoire ancestral algonquin.

Je voudrais aussi remercier les dirigeants autochtones qui sont venus des quatre coins du pays pour participer à cette toute première Table ronde Canada-peuples autochtones.

Comme vous, j’attendais ce jour important avec impatience. Cette journée est le résultat des réunions que nous avons eues par le passé avec les dirigeants des cinq organisations nationales – l’Assemblée des Premières nations, l’Inuit Tapiriit Kanatami, le Ralliement national des Métis, l’Association des femmes autochtones du Canada et le Congrès des peuples autochtones – qui sont toutes représentées ici aujourd’hui.

Le Canada ne serait pas ce qu’il est sans les Autochtones. Vos traditions, vos cultures et vos langues l’enrichissent énormément.

Les Premières nations possèdent un lien particulier avec les terres et les rivières du Canada. En fait, la colonisation européenne en Amérique du Nord vient du fait que les Premières nations étaient prêtes à partager ces richesses. Il est maintenant temps de renouveler et de renforcer l'engagement qui lie le gouvernement et les Premières nations.

Il ne fait aucun doute que nous devons renforcer nos relations avec la nation métisse du Canada. Il est temps de reconnaître la contribution des Métis à notre pays.

Il faut absolument reconnaître, dans un premier temps, la culture, le mode de vie et l’environnement uniques des Inuits, et dans un deuxième temps, leur contribution grandissante à la réalisation de notre rêve à l'égard du Nord.

Les défis auxquels les Autochtones sont confrontés constituent le plus grand défi que le Canada doit relever.

C'est un défi aux conséquences énormes – pas seulement pour les personnes d'origine autochtone, mais pour le pays tout entier.

Plus de la moitié de la population autochtone vit maintenant en milieu urbain, et ce nombre ne cesse de croître. Bon nombre d’entre eux sont de jeunes Autochtones qui déménagent pour trouver du travail et avoir une meilleure qualité de vie. Et beaucoup ont de la difficulté à s’ajuster au contexte urbain et à des exigences très différentes de celles des collectivités qu'ils connaissent.

Si les jeunes Autochtones ne réussissent pas, c’est nous tous qui perdons. Pendant trop longtemps, nous avons tourné le dos à cette réalité morale et économique.

Nous ne pouvons contourner ou ignorer la réalité démographique. La population autochtone est celle qui grandit le plus vite au Canada, et les enfants autochtones sont une part importante de notre avenir.

Or, pour eux, c’est un avenir façonné par des attentes ignorées et des promesses non tenues.

Ça ne peut pas continuer.

Le discours du Trône mentionne que les Autochtones doivent participer pleinement à tout ce que Canada a à offrir et jouir d’une plus grande autonomie financière et d’une qualité de vie toujours meilleure, le tout basé sur les droits ancestraux et sur les traités que nos aïeux ont signés jadis et qui ne doivent pas être oubliés.

Mais il ne faut pas oublier la réalité d'aujourd'hui. Il faut la reconnaître également.

La triste vérité est que nous n'avons pas besoin d'indicateurs économiques pour voir la différence de qualité de vie entre la majorité des Autochtones et les autres Canadiens.

Autrement dit, nous devons briser le cycle de la pauvreté, de l’indignité et de l’injustice qui est le lot quotidien de trop d’Autochtones. Nous devons améliorer véritablement leurs conditions de vie. Et tout cela doit mener à l'autonomie financière.

Quels moyens allons-nous prendre pour réussir?

La réponse comporte trois éléments.

Premièrement, nous devons nous fixer des buts précis – pour renverser la vapeur et redonner espoir.

Honnêtement, des énergies considérables et de grands efforts ont été déployés dans un passé récent. Mais pour être franc, les résultats ne sont tout simplement pas satisfaisants. Nous devons aller plus loin. Nous devons faire encore mieux.

Nos buts doivent avoir comme raison d'être d'organiser chacun de nos efforts et de cibler chacune de nos interventions.

Quels devraient être ces buts?

Chose certaine, ils devront viser de meilleurs soins de santé et de meilleures conditions de logement; un nombre plus élevé de jeunes finissants du secondaire; plus d'Autochtones à l'université; des entreprises autochtones plus prospères; un développement économique accru; une plus grande autonomie.

Mais quels que soient ces buts, ils doivent être atteints conjointement, et il doivent être pertinents – et mesurables.

Le résultat final de nos objectifs doit être, quand nous les aurons atteints, d'avoir mis un terme aux terribles préjugés selon lesquels les Autochtones seront toujours un peu – ou beaucoup – distancés par les autres Canadiens.

Le deuxième élément requis pour réussir consiste à démontrer notre volonté politique de se mettre au travail afin d'atteindre nos buts et de maintenir le cap, quoi qu'il arrive. En tant que Premier ministre, vous pouvez compter sur mon soutien – et celui de mon gouvernement. Nous sommes déterminés. Nous ne dévierons pas de notre objectif.

Bien entendu, la volonté politique n’est pas à sens unique. J’invite tous les dirigeants autochtones ici et ailleurs à prendre un engagement semblable et à se joindre à nous pour faire bouger les choses radicalement. Pour travailler avec nous et pour œuvrer les uns avec les autres. Pour mettre de côté les problèmes du passé et les rivalités politiques afin que nous puissions effectuer les grands changements souhaités.

Quant à nous, nous allons réserver des sièges à la table – comme nous l’avons fait aujourd’hui – pour les collectivités et les dirigeants autochtones. À l'avenir, le gouvernement discutera avec eux avant d’élaborer des politiques. Ce principe de collaboration constituera la pierre angulaire de notre nouveau partenariat.

Le troisième élément nécessaire pour réussir veut que nous convenions d'un plan concret pour atteindre nos objectifs.

Si les 8 milliards de dollars dépensés chaque année ne donnent pas les résultats escomptés – améliorons la façon de les utiliser. Si la structure du gouvernement ne fonctionne pas, modifions-la.

Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien fait du bon travail. L’interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits aussi. Cependant, le gouvernement travaille en collaboration avec de nombreux ministères, d’où le besoin d’une plus grande coordination – et le Cabinet du Premier ministre est là pour donner un coup de main.

C’est la raison pour laquelle notre nouveau gouvernement a annoncé la création d’un Comité du Cabinet chargé des affaires autochtones, présidé par le Premier ministre. J’ai également nommé un secrétaire parlementaire chargé des affaires autochtones.

Nous avons aussi, au sein du Bureau du Conseil privé, établi un Secrétariat des affaires autochtones, qui coordonne le travail du gouvernement.

Mais nous devons faire encore plus. Par exemple, les dirigeants inuits ont durant des années déploré l’absence, au sein du gouvernement, d’un secrétariat chargé des questions inuites. Et, pour parler franchement, c’est là une omission de notre part.

Alors, nous allons y voir. Aujourd’hui, je suis heureux d’annoncer la mise sur pied d’un nouveau Secrétariat inuit au sein du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Autre chose : les ministres doivent s’assurer que leurs ministères font leur travail en concertation avec les communautés autochtones. Et étant donné le large éventail de programmes publics, il importe que les ministères travaillent de plus près les uns avec les autres.

C’est l’une des raisons pour lesquelles le gouvernement du Canada est représenté en si grand nombre aujourd’hui – plus de 40 représentants, dont plus de 24 ministres du Cabinet.

C’est tout probablement le plus important rassemblement de ministres à l’extérieur de la salle du Cabinet depuis des décennies. Et, s’ils sont ici, c’est pour faire progresser notre action.

Lorsque j’ai formé le nouveau gouvernement, j’ai donné à chacun des ministres une lettre de mandat lui indiquant ce qu’il devait accomplir. Aujourd’hui, j’écris de nouveau aux ministres, pour leur demander de travailler en concertation avec vous et de vous consulter au préalable sur les importantes mesures politiques qui vous concernent.

Des changements sont également requis de votre côté.

Accroître les moyens d'action pour améliorer la transparence, l’imputabilité et la bonne gouvernance est une étape importante vers l'autonomie gouvernementale des Autochtones.

C'est pour cela que nous créons le Centre indépendant sur le gouvernement des Premières nations. Cet organisme stimulera l'application des meilleures pratiques liées au renforcement de l’imputabilité et de la transparence, tout en développant les principes de l’autonomie gouvernementale. Je sais, pour en avoir déjà discuté avec les dirigeants autochtones, que cette initiative vous tient à cœur.

Jusqu'à présent, nous avons parlé des changements requis au sein de l'appareil gouvernemental. Il ne fait aucun doute que ces changements sont des facteurs importants pour atteindre nos buts. Toutefois, ils ne constituent pas un plan en soi. Or, aujourd'hui, et dans les prochains jours, nous travaillerons ensemble à l'élaboration d'un plan.

Dans ce contexte, nous devrons nous pencher sur une foule de questions. Mais dans le cadre des discussions que j'ai eues avec les dirigeants autochtones partout au pays, six domaines clés sont ressortis comme devant faire partie intégrante de ce plan.

Premièrement, il est essentiel de faciliter l'amélioration des résultats scolaires des générations les plus jeunes parmi les populations autochtones – de l'école maternelle jusqu’à la douzième année. Les éducateurs et dirigeants autochtones doivent être les premiers concernés dans ce débat. Ce principe s'applique tant aux réserves qu'aux centres urbains.

Cela signifie appuyer des mesures novatrices telles que la création de conseils
scolaires des Premières nations et d'établissements d'enseignement autochtones qui veilleraient à ce que les plus hautes normes soient observées et à ce qu’un programme respectueux des principes, des valeurs et de l’histoire de nos peuples autochtones soit créé. Des mesures novatrices sont également requises en matière d'éducation postsecondaire. À cet égard, l’Université des Premières nations en Saskatchewan est un modèle à suivre.

Deuxièmement, il ne suffit pas de chercher à améliorer la santé des populations autochtones en général : nous devons également reconnaître leurs besoins particuliers. Il faudra donner davantage de moyens d’action aux administrations qui offrent des soins essentiels à la communauté en ce qui a trait aux problèmes de dépendance et de suicide chez les jeunes, dont les taux sont alarmants, ainsi qu’à l’épidémie de diabète, une maladie qui sévit dans de nombreuses communautés autochtones.

Troisièmement, nous devons favoriser les possibilités économiques pour les Autochtones vivant à l’intérieur et à l’extérieur des réserves. Nous devons simplifier et consolider les programmes fédéraux. En facilitant l’accès à ces programmes, les obstacles à l’emploi seront réduits, et le climat d’investissement dans les communautés autochtones permettra d’encourager le partenariat et l’entrepreneuriat.

Nous devons reconnaître que l'exploitation de nos ressources naturelles, si importantes en elles-mêmes, doit également être un outil de développement économique et de création d'emplois pour les Autochtones du Canada. Nous avons fait des progrès importants à ce chapitre depuis quelques années, mais cela ne doit être qu'un début.

Quatrièmement, nous devons faire mieux en matière de logements sociaux. Nous devons proposer d’autres modèles pour la construction de logements dans les réserves, et élaborer une stratégie nationale pour régler les problèmes de logements à l’extérieur des réserves.

Cinquièmement, nous devons assumer nos responsabilités, à la fois dans ce que nous faisons de bien et dans ce que nous ne faisons pas très bien. Il faut se doter d'un bulletin réaliste et transparent en matière autochtone pour établir des cibles précises à atteindre et prévoir des moyens de mesurer nos progrès et nos réalisations en la matière.

Enfin, nous devons trouver des moyens plus efficaces de conclure les négociations concernant les ententes d’autonomie gouvernementale et les revendications territoriales. Nous ne pouvons plus laisser les tribunaux décider. Ceux-ci ne peuvent définir les liens qui nous unissent. Nous, nous le pouvons, en maintenant une collaboration basée sur le respect mutuel et la confiance. C’est la voie que nous devons tracer.

Mesdames, Messieurs

La Table ronde d’aujourd’hui nous donne l’occasion de nous engager ensemble à améliorer de manière fondamentale la qualité de vie des Autochtones.

Bien entendu, nous savons que nous ne pouvons y arriver seuls. Il faudra travailler avec les provinces, les territoires, les municipalités et le secteur privé pour bâtir le nouveau partenariat nécessaire à notre réussite collective.

Nous ne devons pas sous-estimer la quantité de travail que nous aurons à accomplir. Pas plus que nous pouvons prétendre que ce sera toujours facile.

Nous devons être prêts à travailler fort et à trouver des solutions novatrices pour surmonter les obstacles auxquels nous ferons face.

Nous pouvons y arriver, mais pour cela, il faudra collaborer.

Aujourd’hui, dans cette salle, nous pouvons prendre les premières mesures pour consolider cette relation. Nous entamons une nouvelle ère de coopération.

Notre nouveau voyage ensemble sera long, mais la destination est trop importante pour que nous la manquions.

Cette destination est une société dans laquelle tous les Canadiens – Autochtones et non-Autochtones – sauront se soutenir mutuellement, égaux dans les occasions qui s’offrent à eux, dans la dignité et dans la qualité de vie.

Dans dix ans, peut-être regarderons-nous cette journée et cette Table ronde comme le point de départ d’une nouvelle vie pour les Autochtones du Canada. Un événement annonçant un avenir prometteur et prospère.

Tel est notre objectif. Et avec un but précis, un plan concret et une volonté politique de changement, nous serons en mesure de l’atteindre.

Et maintenant, mettons-nous au travail.

Merci.  


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Mise à jour: 2006-07-27  Avis importants