Lettre envoyée par le Premier ministre Paul Martin au premier ministre Danny Williams, en réponse à la lettre de ce dernier du 3 janvier 2005

J’ai lu votre lettre du 3 janvier 2005 au sujet des discussions portant sur les revenus tirés des ressources extracôtières. Il s’agit là d’un dossier auquel j’accorde une grande importance tout comme vous à titre de premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador. Permettez-moi de vous présenter les principes qui sous-tendent la position du gouvernement du Canada dans le cadre de ces discussions.

Janvier 14, 2005
Ottawa (Ontario)

Monsieur le Premier Ministre,

J’ai lu votre lettre du 3 janvier 2005 au sujet des discussions portant sur les revenus tirés des ressources extracôtières. Il s’agit là d’un dossier auquel j’accorde une grande importance tout comme vous à titre de premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador. Permettez-moi de vous présenter les principes qui sous-tendent la position du gouvernement du Canada dans le cadre de ces discussions.

Dès le début de nos discussions, j’ai fermement indiqué que je suis pleinement conscient de l’importance des revenus tirés des ressources extracôtières pour Terre-Neuve-et-Labrador. Je reconnais ainsi l’illustre histoire de la province et la détermination de ses citoyens à recourir au débouché offert par les ressources extracôtières pour rehausser leur prospérité économique et financière. Les gains à court terme sont substantiels, mais la véritable récompense durable dont bénéficieront les générations à venir se trouve dans la possibilité pour Terre-Neuve-et-Labrador de devenir une province plus prospère qui n’est plus tributaire des paiements de péréquation. C’est pourquoi j’avais pris cet engagement en juin dernier et que depuis, par l’entremise de mes ministres, j’ai déposé une offre fédérale qui le respecte en tous points.

Nous sommes tous deux conscients que votre province touche déjà 100 % des revenus tirés de l’exploitation des ressources extracôtières. Les modalités actuelles de l’Accord Atlantique font en sorte que la province recevra tous ces revenus pendant toute la durée du projet d’exploitation pétrolière au large des côtes. À cet égard, les ressources extracôtières de Terre-Neuve-et-Labrador sont déjà traitées comme s’il s’agissait de ressources exploitées sur la terre ferme. Nos discussions ont toujours porté sur les effets de l’augmentation des revenus tirés des ressources extracôtières sur les paiements de péréquation de la province.

Pour les autres provinces, les paiements de péréquation diminuent habituellement d’un dollar par dollar d’augmentation des revenus autonomes, mais ce n’est pas le cas des revenus tirés des ressources extracôtières de Terre-Neuve-et-Labrador en raison de l’Accord. Cependant, le problème réside dans le fait qu’aux termes de l’Accord, la protection qu’obtient Terre-Neuve-et-Labrador passera à moins de 100 % d’ici la fin de l’application des modalités compensatoires de l’Accord Atlantique qui prend fin en 2011. Ceci se traduirait par une perte de revenus pour la province pendant que celle-ci reçoit encore des paiements de péréquation. C’est le problème que je voulais régler lors de nos discussions de juin. En bref, je me suis engagé à ce que, tant que Terre-Neuve-et-Labrador sera admissible à la péréquation et pour la durée d’application des modalités compensatoires de l’Accord, votre province reçoive une protection de 100 % contre la réduction des paiements de péréquation en raison des revenus qu’elle tirerait de l'exploitation des ressources extracôtières.

Dans ce contexte, l’offre du gouvernement du Canada est en tous points conforme à l’engagement que j’ai pris en juin. Elle confirme la garantie que Terre-Neuve-et-Labrador recevra 100 % des revenus qu’elle tire de la production de gaz et de pétrole au large des côtes. Elle offre une nouvelle garantie à l’effet que tant que Terre-Neuve-et-Labrador sera admissible à la péréquation, elle recevra une protection de 100 % contre la réduction des paiements de péréquation qui découlerait de ces revenus pendant la période d'application des modalités compensatoires de l’Accord. De plus, nous retenons tous les montants actuellement prévus dans l’Accord. Voilà qui respecte mon engagement intégral et qui prévoit des paiements supplémentaires considérables pour la province. En effet, d’après vos propres prévisions de prix et de production, le tout pourrait se traduire par 2,6 milliards de dollars de plus d’ici 2012 par rapport aux sommes que vous touchez actuellement en vertu de l’Accord. Ceci dépasse aussi largement l’importante hausse des montants prévus dans le nouveau cadre pour la péréquation dont nous avons convenu en octobre.

L’approche que je prône à l’égard des revenus tirés des ressources extracôtières de Terre-Neuve-et-Labrador repose sur deux principes fondamentaux. Premièrement, je m’engage à offrir à Terre-Neuve-et-Labrador le soutien financier dont elle a besoin en reconnaissance de sa situation économique et financière particulière. Et deuxièmement, il est tout aussi important qu’un accord conclu avec Terre-Neuve-et-Labrador en vue d’octroyer une aide additionnelle au titre des ressources extracôtières soit équitable envers l’ensemble des Canadiennes et des Canadiens. L’Accord Atlantique initial ayant été signé il y a plus de 20 ans, je suis donc le premier Premier ministre qui soit disposé à prendre un tel engagement envers votre province, et j’ai respecté cet engagement dans la proposition que nous vous avons présentée.

Depuis juin, vous avez soulevé d’autres enjeux, notamment, que malgré la fin des modalités compensatoires de l’Accord en 2011, vous voulez que la protection contre les réductions soit maintenue par la suite. Vous avez exprimé une préoccupation quant au fait que la période d’application de l’entente est trop courte pour vous permettre de régler les difficultés financières auxquelles vous êtes confronté, une situation touchant uniquement Terre-Neuve-et-Labrador. Cela ne faisait pas partie de l’entente de juin, mais j’ai indiqué que nous étions disposés à étudier une prolongation des modalités compensatoires jusqu’en 2020. Vous avez reconnu à l’occasion des discussions avec le ministre Goodale que pour être juste pour le reste du pays une prolongation devait être fonction des indicateurs financiers. Comme notre sous-ministre des Finances vous l’a indiqué durant les discussions à Winnipeg, nous sommes disposés à envisager des indicateurs qui fonctionnent pour Terre-Neuve-et-Labrador.

Vous avez également soulevé la question d’une protection accrue si Terre-Neuve-et-Labrador perdait son admissibilité à la péréquation au cours des huit prochaines années. Nous n’avons pas abordé cette question en juin. Même si la province ne devient plus admissible à la péréquation, l’Accord actuel prévoit déjà des montants exceptionnels et généreux qui représenteraient au moins 85% des montants de l’année précédente. À l’heure actuelle, les versements effectués en vertu de l’Accord prévoient donc des paiements importants, bien après que la province ne sera plus admissible à la péréquation. Donc, toute affirmation voulant que Terre-Neuve-et-Labrador se retrouve au bord du gouffre une fois devenue une province « nantie » est inexacte.

Cette dernière question s’avère la pierre d’achoppement de nos discussions. Vous demandez maintenant au gouvernement du Canada de verser des montants additionnels et de maintenir la totalité des paiements compensatoires même si la province n’est plus admissible à la péréquation. Cela signifie que Terre-Neuve-et-Labrador ne bénéficierait plus de la péréquation en raison du niveau élevé de ses propres revenus, respectant ainsi le principal objectif de l’Accord, mais continuerait de recevoir du gouvernement du Canada des paiements compensatoires supplémentaires qu’il serait pratiquement impossible de distinguer par rapport aux paiements de péréquation. Cette démarche ne correspond pas à votre déclaration publique, à savoir que « une fois que nous aurons atteint la norme de la péréquation, nous disons que nous ne voudrons plus de la péréquation. Tout ce que nous voulons après et pour toujours c’est 100 % de nos revenus provinciaux, à l’instar de l’Alberta ou de tout autre. » (The Globe and Mail, A1, le 18 novembre) [traduction]

Permettez moi de terminer en précisant que j’ai abordé nos discussions de bonne foi, tout comme mes ministres et mes représentants. La proposition présentée respecte l’engagement que j’ai pris envers les résidents de Terre-Neuve-et-Labrador. Au cours des derniers mois, nous avons toujours fait preuve de souplesse dans nos négociations avec vous.

Je suis, bien entendu, disposé à vous rencontrer. Les ministres Goodale et Efford continueront de mener des discussions avec vos représentants. Je leur ai demandé de réagir aux enjeux techniques particuliers que vous soulevez dans votre lettre.

J’espère que les discussions se poursuivront entre le gouvernement du Canada et la province de Terre-Neuve-et-Labrador pour en arriver à une entente portant sur les nouvelles modalités touchant les ressources extracôtières.

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