LE MINISTRE STÉPHANE DION DÉPOSE UNE
NOUVELLE RÉSOLUTIONCONCERNANT LA
MODIFICATION CONSTITUTIONNELLE
PROPOSÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
OTTAWA (ONTARIO), le 1er Octobre 1997 – Le Président du Conseil privé
et ministre des Affaires intergouvernementales, l’honorable Stéphane Dion, a
déposé à la Chambre des communes une résolution de modification
constitutionnelle de l’article 93 de la Loi constitutionnelle de 1867, et
annoncé que cette résolution serait renvoyée à un comité mixte spécial qui
fera rapport au Parlement au cours des prochaines semaines.
Le ministre Dion avait déjà déposé une motion identique le 22 avril dernier,
mais le déclenchement de l’élection avait à ce moment empêché la
création du comité chargé d’étudier cette modification constitutionnelle.
«Comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer à plusieurs reprises, le
gouvernement du Canada appuie la modification envisagée parce qu’elle est
bénéfique pour les citoyens touchés et parce qu’elle reçoit auprès d’eux
un appui raisonnable» a déclaré le Ministre.
M. Dion a souligné que même si le gouvernement canadien avait pu constater au
cours des derniers mois l’existence d’un consensus autour de ce projet, y
compris pour la modification constitutionnelle, le respect des traditions
démocratiques rendait nécessaire la création d’un tel comité. Ce comité
permettra ainsi aux citoyens, experts et groupes intéressés de s’y faire
entendre.
Rappelant que la société québécoise s’est laïcisée et considérablement
diversifiée avec l’apport de nouveaux arrivants, le Ministre a souligné que
le besoin de réorganiser les structures scolaires sur une base linguistique
plutôt que confessionnelle faisait l’objet d’un large consensus au sein de
la société québécoise. M. Dion précise toutefois que «le gouvernement
québécois ne cherche pas à exclure toute référence à la religion dans l’enseignement,
mais plutôt à déconfessionnaliser les structures. Nombreux sont les
Québécois qui tiennent à l’instruction religieuse, et le gouvernement
québécois en a tenu compte.»
En outre, ajoute le Ministre, «l’article 520 de la Loi sur l’instruction
publique, tel que modifié par l’article 36 et l’annexe de la Loi modifiant
la Loi sur l’instruction publique, autorise notamment les écoles qui le
désirent à conserver leur orientation confessionnelle. Qui plus est, le droit
à l’enseignement religieux demeure garanti par l’article 41 de la Charte
des droits et libertés de la personne du Québec, un document ayant une valeur
quasi constitutionnelle selon la Cour suprême du Canada.»
Le ministre Dion a de plus déclaré que la modification constitutionnelle
proposée n’allait nullement à l’encontre des intérêts de la communauté
anglophone et que «l’article 23 de la Charte canadienne des droits et
libertés continuera d’offrir de fortes garanties constitutionnelles aux
anglophones du Québec.» «D’autre part», estime M. Dion, «la création de
commissions scolaires linguistiques permettra à la communauté anglophone de
consolider ses effectifs et donc de faire reposer sur des assises plus solides
les droits que lui confère l’article 23.»
Invitant ses collègues de la Chambre à appuyer la modification, le Ministre a
déclaré : «Le gouvernement dont je fais partie a répété à plusieurs
reprises que toute modification constitutionnelle devra faire l’objet d’un
consensus raisonnable au sein des minorités affectées. Je suis heureux de
constater que cette exigence est ici respectée.» «Le gouvernement du Canada
affirme solennellement que la même exigence serait incontournable dans l’hypothèse
où une autre province réclamerait une modification des garanties dont
jouissent les minorités sur son territoire», a conclu le ministre Dion.
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Annexe : Énoncé intégral du ministre Dion
Pour information: André Lamarre
Secrétaire de presse
(613) 943-1838
ÉNONCÉ DU MINISTRE DION
SUR LA MODIFICATION
DE L’ARTICLE 93 (ÉDUCATION) DE LA LOI
CONSTITUTIONNELLE DE 1867
Introduction
Monsieur le Président,
Le 15 avril 1997, l’Assemblée nationale du Québec a voté à l’unanimité
en faveur d’une résolution de modification constitutionnelle qui mettrait fin
à l’application au Québec des paragraphes (1) à (4) de l’article 93 (éducation)
de la Loi constitutionnelle de 1867. J’ai déposé une résolution identique
à la Chambre le 22 avril dernier, mais le déclenchement des élections ne nous
a pas permis de procéder à la création du comité qui devait être chargé d’étudier
cette modification constitutionnelle. Voilà pourquoi je dépose de nouveau
cette résolution, afin qu’elle soit renvoyée à un comité mixte spécial
qui devra faire rapport au Parlement au cours des prochaines semaines.
Comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer à plusieurs reprises, le
gouvernement du Canada appuie la modification envisagée parce qu’elle est
bénéfique pour les citoyens touchés et parce qu’elle reçoit auprès d’eux
un appui raisonnable.
C’est une chose que de souhaiter des commissions scolaires linguistiques, c’en
est une autre que de vouloir y parvenir par un changement constitutionnel. Même
si le gouvernement du Canada a pu constater au cours des derniers mois l’existence
d’un consensus autour de ce projet, y compris pour la modification
constitutionnelle, on ne saurait faire fi des traditions démocratiques que
partagent les Québécois avec tous leurs concitoyens du Canada. L’Opposition
officielle à l’Assemblée nationale a d’ailleurs demandé, en vain, au
gouvernement du Québec la tenue d’une commission parlementaire. Aussi
croyons-nous nécessaire de procéder dans le respect de notre procédure
parlementaire, en créant un comité mixte où pourront venir s’exprimer
experts, groupes et citoyens. Un tel comité permettra à ces derniers de faire
valoir leurs points de vue tout en favorisant une meilleure compréhension des
changements recherchés par la modification constitutionnelle.
Une modification souhaitable
et appuyée par tous les groupes visés
Depuis un certain temps déjà, la société québécoise s’est laïcisée et
s’est considérablement diversifiée grâce à l’apport de nouveaux
arrivants. Aussi n’est-il pas surprenant que cette société se soit
interrogée à maintes reprises sur le bien-fondé d’un système érigé sur
des bases confessionnelles. Au fil des consultations et des rapports qui ont
jalonné les trente dernières années, un consensus s’est dégagé sur la
nécessité de réorganiser les structures scolaires sur une base linguistique
plutôt que confessionnelle. Ce consensus s’est confirmé lors des états
généraux sur l’éducation (1996), à l’occasion desquels on a pu vérifier
que les Québécois de confession catholique et protestante, aussi bien
anglophones que francophones, désiraient l’implantation de commissions
scolaires linguistiques.
L’Assemblée nationale du Québec a pris acte de cette volonté de changement
en adoptant à l’unanimité, le 15 avril 1997, la résolution ayant pour objet
de modifier l’article 93 de la Loi constitutionnelle de 1867 dans son
application au Québec. Deux mois plus tard, soit le 19 juin 1997, les
parlementaires québécois ont de nouveau témoigné de leur cohésion sur cette
question en votant unanimement en faveur de la loi qui assurera la mise en place
de commissions scolaires linguistiques et qui régira la place et le rôle de la
confessionnalité dans le réseau scolaire du Québec (Loi modifiant la Loi sur
l’instruction publique).
La modification projetée permet non seulement d’adapter la Constitution
canadienne pour tenir compte des transformations profondes qu’a connues la
société québécoise, mais elle a également le mérite de permettre les
changements désirés par la très grande majorité des citoyens affectés.
Soulignons d’abord que le gouvernement québécois ne cherche pas à exclure
toute référence à la religion dans l’enseignement, mais plutôt à
déconfessionnaliser les structures. Nombreux sont les Québécois qui tiennent
à l’instruction religieuse, et le gouvernement québécois en a tenu compte.
L’article 520 de la Loi sur l’instruction publique, tel que modifié par l’article
36 et l’annexe de la Loi modifiant la Loi sur l’instruction publique,
autorise notamment les écoles qui le désirent à conserver leur orientation
confessionnelle. Qui plus est, le droit à l’enseignement religieux demeure
garanti par l’article 41 de la Charte des droits et libertés de la personne
du Québec, un document ayant une valeur quasi constitutionnelle selon la Cour
suprême du Canada.
De tels aménagements ne sont certes pas étrangers au soutien que recueille la
réforme souhaitée par les autorités québécoises. Si elle ne se prononce pas
sur les moyens retenus, l’Assemblée des évêques du Québec n’en a pas
moins publiquement soutenu l’implantation de commissions scolaires
linguistiques et ne s’est pas opposée à la modification de l’article 93.
Pour leur part, nombre de groupes et d’associations ont endossé la
modification constitutionnelle que demande l’Assemblée nationale du Québec;
qu’il me soit simplement permis de mentionner à titre d’exemples le Comité
catholique du Conseil supérieur de l’éducation, la Fédération des
commissions scolaires, la Fédération des comités de parents et les
associations syndicales représentant l’ensemble du corps enseignant de la
province.
S’il est vrai que l’article 93 ne protège pas les droits linguistiques, il
n’en est pas moins vrai que la langue et la confessionnalité sont intimement
liées sur le plan historique. Par le passé, la minorité anglophone du Québec
s’est fortement appuyée sur les commissions scolaires protestantes pour
assurer son épanouissement. La modification constitutionnelle proposée aujourd’hui
ne va pas à l’encontre des intérêts de cette communauté, bien au
contraire. En effet, l’article 23 de la Charte canadienne des droits et
libertés continuera d’offrir de fortes garanties constitutionnelles aux
anglophones du Québec. Tandis que l’article 93 garantit l’existence de
structures de gestion confessionnelles à Montréal et Québec ainsi que le
droit à la dissidence dans le reste de la province, l’article 23 permet à la
minorité de contrôler et de gérer des structures scolaires linguistiques.
D’autre part, la création de commissions scolaires linguistiques permettra à
la communauté anglophone de consolider ses effectifs et donc de faire reposer
sur des assises plus solides les droits que lui confère l’article 23. Dans l’état
actuel des choses, les commissions scolaires protestantes desservent une
proportion grandissante d’enfants dont la langue d’instruction est le
français; ce phénomène risque de faire perdre à la communauté anglophone le
contrôle de ces institutions, qui reflètent d’ailleurs de moins en moins sa
réalité sociologique et qui ne peuvent de toute façon répondre aux besoins
de sa composante catholique. À cet égard, il importe aussi de souligner que
les étudiants qui se déclarent de foi protestante comptent aujourd’hui pour
moins de 40 % des étudiants desservis par les commissions scolaires
protestantes.
Certes, il n’est que normal pour tout groupe minoritaire de vouloir accroître
ses droits constitutionnels. Nous comprenons les inquiétudes que la minorité
anglophone éprouve en raison de sa situation démographique, des dispositions
qui limitent l’accès à l’école anglaise, ainsi que de l’orientation
sécessionniste du présent gouvernement québécois. Dans cette perspective, on
comprend que certains groupes issus de la communauté anglophone se saisissent
de l’occasion qui leur est offerte pour réclamer l’application intégrale
de l’article 23 au Québec. Le gouvernement du Canada est cependant d’avis
que cette problématique soulève un tout autre débat. Si la modification
proposée ne va pas aussi loin que certains pourraient le souhaiter, elle
mérite néanmoins d’être adoptée parce qu’elle va dans le sens des
intérêts de la minorité comme de la majorité au Québec.
Le gouvernement dont je fais partie a répété à plusieurs reprises que toute
modification constitutionnelle devra faire l’objet d’un consensus
raisonnable au sein des minorités affectées. Je suis heureux de constater que
cette exigence est ici respectée. Le gouvernement du Canada affirme
solennellement que la même exigence serait incontournable dans l’hypothèse
où une autre province réclamerait une modification des garanties dont
jouissent les minorités sur son territoire.
Conclusion
La société québécoise est parvenue à faire consensus sur une question
constitutionnelle qui touche des aspects aussi vitaux pour les citoyens que l’école,
la langue, la religion et la Constitution. Pour cette raison, et parce que ses
retombées seront positives pour l’ensemble de la collectivité québécoise,
le gouvernement estime que cette modification devrait être adoptée.
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