Réponse du Premier ministre Chrétien aux premiers
ministres provinciaux et aux leaders de gouvernement au sujet de la santé
Le 7 mars 2000
Ottawa (Ontario)
Vous trouverez, ci-inclus, copie d'une lettre que le Premier ministre
Chrétien a fait parvenir aujourd'hui au Premier ministre Lucien Bouchard,
en réponse à la récente lettre dans laquelle ce dernier faisait part du point
de vue des premiers ministres provinciaux et des leaders de gouvernement concernant le budget
fédéral et demandait la tenue d'une rencontre des premiers ministres sur la santé.
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Service de presse du CPM : (613) 957-5555
Monsieur le Premier ministre,
Je vous remercie de votre lettre dans laquelle vous me faites part du point de vue des premiers
ministres provinciaux et des leaders de gouvernement concernant le budget fédéral.
Je suis heureux de voir que vous accueillez favorablement les réductions d'impôt et qu'elles vous
paraissent importantes pour accroître la compétitivité du Canada. Comme vous et vos collègues
l'avez souligné dans votre lettre du 3 février dernier, il importe que les gouvernements trouvent un
juste équilibre entre les réductions d'impôt et de nouvelles dépenses dans les dossiers prioritaires.
Dans ma réponse du 11 février, je vous ai réitéré mon engagement à cet égard et, à mon avis, le
budget reflète cet engagement.
Je suis parfaitement conscient de l'ampleur des difficultés qui persistent dans le domaine de la santé
et de l'urgence de s'en occuper. Bien que ces difficultés soient bien réelles, il faut que nous les
abordions de façon éclairée en vue d'améliorer un système de santé qui continue de bien servir les
Canadiens. Plusieurs autres pays industrialisés connaissent des difficultés analogues. Ce que nous
pouvons toutefois conclure des efforts déployés pour réformer les régimes de santé au Canada et à
l'étranger, c'est qu'il n'y a pas de solutions simples ni de solutions rapides. Nous reconnaissons tous
qu'investir plus d'argent dans la santé n'est pas la seule réponse, comme l'a si clairement déclaré
votre ministre des finances la semaine dernière.
Il est vrai que les Canadiens souhaitent un engagement à long terme pour assurer l'avenir du
système. Ils appuient fermement, comme tous les gouvernements, les cinq principes du régime
(universalité, accessibilité, intégralité, transférabilité et administration publique).
Les gouvernements se doivent de continuer à travailler ensemble pour assurer la viabilité à long
terme du système de soins de santé. Il nous faut, à cette fin, mieux comprendre les pressions
auxquelles il est soumis, notamment sur les plans démographique, technologique et des ressources
humaines, et ce, afin de pouvoir mieux planifier pour l'avenir.
Il y a à peine un an, nous, les premiers ministres, nous sommes réunis pour parler de la santé et des
politiques sociales et pour renouveler notre engagement à la collaboration. Avant cette rencontre,
tous les premiers ministres provinciaux et leaders de gouvernement avaient réitéré leur
détermination à travailler avec le gouvernement du Canada pour mieux répondre aux besoins des
Canadiens. Nos ministres de la santé avaient déjà réalisé des progrès considérables en vue d'établir
nos priorités communes et de définir les grandes orientations pour le renouvellement du système de
santé. J'avais alors indiqué que le gouvernement du Canada allait procéder à un nouvel
investissement majeur dans les transferts aux provinces, pour montrer que son engagement à
l'égard de la santé est un engagement bien réel.
Le gouvernement du Canada a pris d'importantes mesures pour faire avancer de nombreuses
priorités du système de santé. Dans la mesure où sa situation financière le lui permettait, le
gouvernement a fait plusieurs investissements successifs dans le système de soins de santé. En
1999, il y a eu la bonification de 11,5 milliards $ sur cinq ans du Transfert canadien en matière de
santé et de programmes sociaux, assortie d'un fonds d'affectation spécial que les gouvernements
des provinces et territoires pouvaient utiliser comme ils jugeaient approprié, et auxquels certains
n'ont pas touché l'année dernière. Concrètement, grâce à ces mesures combinées, la valeur du
plancher pour la composante en espèces du Transfert canadien est passée de 11 milliards $, en
1996, à 15,5 milliards $. Dans le budget de 2000, le gouvernement du Canada a affecté des fonds
additionnels en vue de résoudre les difficultés les plus urgentes du système de santé, tandis que tous
les gouvernements continuent de travailler ensemble à préparer la voie à de futurs investissements
à long terme. La valeur totale annuelle du Transfert canadien, y compris les points d'impôt, pourrait
passer de 29,4 milliards $, pour l'année financière en cours, à 32,7 milliards $, en 2003-2004 — un
niveau à ce jour inégalé.
En 2000-2001, le Transfert canadien et les paiements de péréquation dépasseront d'environ 1,8
milliard $ et 1,5 milliard $ respectivement les niveaux auxquels ils se trouvaient à l'époque où nous
avons formé le gouvernement, en 1993. De plus, grâce à un important appui des gouvernements
provinciaux, le gouvernement du Canada a investi chaque année 2 milliards $ dans la Prestation
fiscale canadienne pour enfants et il a annoncé une nouvelle bonification annuelle de 2,5 milliards $
d'ici 2004. Ces mesures viennent en aide aux gouvernements provinciaux et territoriaux dans le
secteur de l'assistance sociale.
Le gouvernement du Canada a également consacré des sommes au développement d'un système
d'information sur la santé plus efficace. Grâce à ce système, nous pourrons réaliser une réforme
des soins de santé fondée sur des données et des connaissances fiables ainsi que mesurer nos
progrès et faire en sorte que les Canadiens en soient tenus informés. De plus, dans le cadre du
Fonds pour l'adaptation des services de santé, nos gouvernements travaillent ensemble à définir
diverses approches novatrices à la réforme du système de santé, approches qui contribueront à
définir l'orientation que prendra la modernisation du régime de soins de santé.
Le gouvernement du Canada a également fait d'importants investissements dans la promotion et la
protection de la santé, dans la prévention des maladies, dans les sciences de la santé et la
recherche en santé, ce qui nous aidera à composer avec nombre des éléments générateurs de coût
dans le système de santé.
Depuis notre rencontre de l'an dernier, et à la suite de la conférence des premiers ministres de l'été
dernier, les ministres de la santé et leurs fonctionnaires respectifs ont continué à collaborer
étroitement pour analyser les questions susceptibles de nous permettre d'établir un plan pour
renforcer le système de santé. Par exemple, ils se sont entendus pour travailler ensemble à des
solutions visant à renforcer les ressources humaines en santé et à améliorer la structure et la
prestation des services de soins de première ligne. Les ministres de la santé sont censés se réunir
ce mois-ci et au début de mai. Leurs travaux avancent à un bon rythme, mais les progrès réalisés à
ce jour ne sont pas suffisants pour servir de point de départ à une rencontre productive des
premiers ministres. Les Canadiens ne seront satisfaits que lorsque nous pourrons leur présenter des
solutions concrètes aux problèmes que connaît le système de santé et un engagement à long terme
pour le renforcer.
L'engagement à long terme qui est requis des gouvernements ne doit pas se restreindre à un
engagement financier. À mon avis, la viabilité du régime de soins de santé, aujourd'hui et demain,
dépend de la volonté des gouvernements de collaborer afin d'accélérer le processus de réforme
déjà en cours. Il serait bon que nous élaborions un plan pour faire en sorte que le système de santé
reflète nos principes communs tout en étant suffisamment souple pour favoriser l'innovation. Un tel
plan appellerait nos gouvernements à prendre des engagements à long terme et à garantir le
financement nécessaire, quitte à ce que celui-ci soit graduel.
Nous devons encourager fortement nos ministres de la santé à poursuivre leurs efforts et à
augmenter la cadence au besoin, tout en leur allouant assez de temps pour réaliser des progrès
véritables. Aussi, je propose que nous nous entendions dès maintenant pour leur demander de
présenter un rapport intérimaire en juin et pour planifier, si les travaux sont suffisamment avancés,
la tenue d'une rencontre des premiers ministres dans la seconde moitié de l'année. La santé serait
la grande question à l'ordre du jour.
Il est clair que les questions de réforme du système de santé ont une incidence financière
considérable qui dépasse le mandat même des ministres de la santé. Je propose donc également
que les ministres des finances participent au processus qui culminera avec la rencontre des
premiers ministres.
Quant à moi, je peux vous assurer de mon engagement à suivre les travaux de près et à
communiquer régulièrement avec chacun des premiers ministres et leaders de gouvernement.
Les Canadiens s'attendent à des efforts conjoints de la part de nos gouvernements pour renforcer
le régime de soins de santé et nous devons nous y mettre. Nous partageons tous un même
engagement à maintenir un régime de soins de santé public qui soit universel, accessible et de
qualité. Je crois que c'est sur cet engagement que repose le consensus dont nous avons besoin pour
définir une approche commune adaptée aux besoins de notre système de soins de santé.
Je vous prie d'agréer, monsieur le Premier ministre, l'assurance de ma haute considération.
(ORIGINAL SIGNÉ PAR LE
TRÈS HONORABLE JEAN CHRÉTIEN)
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