Le 17 février 2000
Mississauga (Ontario)
Au cours des dernières semaines et des derniers mois, des milliers – voire des millions – de mots ont été dits et écrits sur la fin d'un millénaire et le début du suivant. L'aube d'un nouveau siècle est peut-être symbolique, mais le nouvel ordre mondial et la nouvelle économie dans lesquels nous vivons sont bien réels.
L'autoroute de l'information révolutionne les affaires, l'administration, la société et la participation des citoyens. Nous sommes engagés dans une course planétaire où la vision nationale est essentielle. Où les partenariats sont indispensables. Où l'État fournit la charpente, mais le secteur privé construit le reste. Où il faut penser en termes mondiaux. Et où la réussite appartient au plus rapide.
Quand nous avons formé le gouvernement il y a moins de sept ans, le mot cybercommerce n'était pas encore entré dans la langue. Aujourd'hui, c'est un secteur de plusieurs milliards de dollars qui transforme le monde des affaires. L'Internet n'existait que dans la pensée d'un chercheur anonyme du Pentagone. Il n'y avait qu'une cinquantaine de pages sur le Web. Aujourd'hui, il y en a 50 millions. L'Internet n'est que l'exemple le plus frappant des transformations mondiales engendrées par la naissance de l'économie mondiale fondée sur le savoir.
Quand nous avons formé le gouvernement, nous savions qu'il nous fallait préparer le Canada à prospérer dans le nouveau siècle et dans la nouvelle économie. Nous savions que le gouvernement ne peut pas tout faire, qu'il doit mettre l'accent sur les secteurs où il peut avoir un impact réel. Nous avons commencé par dresser un plan d'action. Un plan qui a donné de bons résultats.
Nous avons fait le ménage dans les finances publiques; stimulé le commerce et l'investissement; amélioré le climat d'affaires; favorisé la croissance de la productivité; et assuré la viabilité à long terme de notre régime de pensions public ainsi que de notre système de soins de santé. Nous avons aussi investi dans le savoir, dans les enfants et dans la santé et réduit le fardeau fiscal.
Nous avons géré les fonds publics avec toute la prudence, le professionnalisme et la compétence possible. Et comme n'importe quelle entreprise privée, nous avons aussi des vérificateurs qui nous disent constamment comment améliorer notre tenue de livres. Qui trouvent toujours des points à améliorer.
Et je vous assure que nous prenons les recommandations de nos vérificateurs très au sérieux. Avant notre arrivée au pouvoir, le vérificateur général ne faisait rapport à la Chambre qu'une fois par année. Nous l'avons autorisé à faire rapport quatre fois par année. Je suis déterminé à faire tout ce qu'il est possible de faire pour améliorer la tenue des dossiers et la gestion des fonds publics. Tout en servant le public sans alourdir indûment la bureaucratie, le fardeau réglementaire et la paperasse administrative. Cependant, replaçons les manchettes dans leur contexte.
Quand nous avons formé le gouvernement, le déficit était de 42 milliards de dollars. Aujourd'hui, l'équilibre budgétaire est atteint. Et l'équilibre sera maintenu. L'économie connaît une forte croissance – près de quatre pour cent en 1999. La dette publique diminue. Les taux d'intérêt sont faibles. L'inflation est stable et modérée. Les revenus sont en hausse. Des centaines de milliers d'emplois sont créés chaque année – 1,3 million d'emplois ont été créés entre la fin de 1996 et janvier 2000, dont 425 000 l'an dernier seulement. Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, le taux de chômage était de 11,5 %. Il est maintenant de 6,8 % – son point le plus bas depuis vingt-cinq ans. La confiance des entreprises et des consommateurs est élevée.
Notre réseau de fibres optiques est le plus perfectionné au monde. Nous avons les meilleurs tarifs téléphoniques. Le Canada arrive en tête sur le plan de la pénétration de l'ordinateur individuel, du câble et du téléphone. Le Canada est le premier grand pays à avoir complètement branché son réseau d'écoles et de bibliothèques à l'Internet.
Notre gouvernement a avancé pas à pas. Mais les pas se sont additionnés en six ans. Et grâce au courage et à la discipline des Canadiens, nous avons fait beaucoup de chemin au cours de ces six années. Nous sommes maintenant en bonne position pour nous tailler une place de choix dans la nouvelle économie. Nous sommes maintenant en bonne position pour aller de l'avant avec audace et vision.
L'automne dernier, dans le discours du Trône, nous avons énoncé une stratégie globale pour placer le Canada à l'avant-garde de l'économie du savoir. Pour repousser les limites de notre réussite au 21e siècle grâce à une économie dynamique et à une population apte à innover. Une société où la prospérité, plutôt que de profiter seulement à quelques-uns, est partagée par le plus grand nombre. Où chaque enfant est assuré d'un bon départ dans la vie. Où les jeunes ont la possibilité de s'épanouir et de réaliser leur potentiel dans le domaine de leur choix. Où les citoyens ont accès aux connaissances et aux compétences dont ils ont besoin pour exceller. Où les citoyens – quel que soit leur revenu – reçoivent des soins de santé de qualité.
Dans moins de deux semaines, le ministre des Finances présentera le premier budget du 21e siècle. Un budget audacieux. Un budget orienté vers l'avenir. Un budget qui prolongera les succès des six budgets précédents, et qui sera notre quatrième budget équilibré consécutif. Un budget où non seulement les comptes sont équilibrés, mais l'approche aussi.
Un budget qui continue de répondre aux priorités des Canadiens en matière de santé et d'éducation. Un budget qui tient compte du fait que notre niveau de vie et notre qualité de vie sont directement liés à notre capacité de favoriser l'avancement des connaissances, l'innovation et l'adaptation et de maximiser les possibilités d'apprentissage. Un budget qui fera converger l'économie, la politique sociale et l'environnement.
Un budget qui ouvrira des horizons aux étudiants des premier, deuxième et troisième cycles et aux diplômés. Qui permet à l'innovateur de 25 ou 30 ans de transformer ses idées d'affaires en entreprises florissantes. Un budget qui encourage le risque et récompense le succès. Un budget qui fera du Canada le milieu le plus propice à la créativité et à l'esprit d'entreprise. Un budget qui permet aux Canadiens de profiter des fruits de leur discipline. Qui répond au besoin d'allégements fiscaux des familles avec des enfants.
Un budget qui prévoit un vaste plan pluriannuel de réduction des impôts. Un plan qui définit des objectifs précis et qui permet de les atteindre. Comme notre plan de réduction du déficit, nous le suivrons avec persévérance et avec succès.
Cependant, notre budget reconnaîtra aussi que les baisses d'impôt ne règlent pas tout. Notre réussite dans l'économie mondialisée repose sur l'investissement en plus des baisses d'impôt. Notre succès dépend des talents de nos gens, de notre capacité d'apprendre, de nous adapter rapidement aux occasions qui se présentent et de faire des découvertes. Le budget réalisera l'équilibre entre tous ces éléments essentiels. Il investira dans les enfants, dans le savoir, dans la créativité, dans l'innovation, dans la santé, et dans l'environnement.
Dans dix jours, vous verrez les mesures que notre budget mettra en place pour instaurer un climat propice à la créativité et à l'esprit d'entreprise. Les gouvernements ne sont pas des entrepreneurs. Notre rôle est d'aider à créer un climat propice aux entrepreneurs.
De son côté, le secteur privé a la responsabilité d'agir. Je mets donc les entreprises canadiennes au défi de changer leur conception du risque. D'accroître l'accès au capital, et particulièrement au capital de risque. D'accorder une plus grande priorité au lancement de nouvelles entreprises. De chercher plus énergiquement de nouveaux débouchés à l'étranger. D'investir davantage dans la recherche et le développement et de former leur main-d'oeuvre pour relever les défis qui s'annoncent.
Les Canadiens utilisent davantage l'Internet que les Américains. Mais le monde des affaires est très lent à se lancer dans le cybercommerce. Pendant que nous mettons en place un ensemble de politiques favorables au commerce électronique, je lance le défi aux entreprises de travailler ensemble afin de conquérir une part de cinq pour cent du commerce électronique mondial pour le Canada d'ici l'an 2003.
Et de faire des affaires d'une valeur de plus de 200 milliards de dollars par ce moyen.
Les défis et les possibilités qui s'offrent au Canada sont énormes. Pour réussir, nous devrons tous unir nos efforts – tous les gouvernements, les entreprises, le secteur bénévole et les organisations non gouvernementales. Même les gouvernements dont les approches divergent.
Franchement, je ne trouve pas cela utile ni productif quand le Premier ministre Harris parraine des annonces partisanes du Parti conservateur sur le contenu du prochain budget du gouvernement fédéral. Ou quand il tente de nous faire la leçon sur notre manière de gouverner. S'il continue comme cela, je me sentirai peut-être obligé de lui répondre.
Je devrai peut-être lui dire que les baisses d'impôt sont importantes, mais qu'elles ne devraient pas être financées avec de l'argent emprunté. Je ne suis pas toujours d'accord avec Ralph Klein et Lucien Bouchard. Mais nous pensons tous les trois qu'il faut d'abord éliminer les déficits avant de réduire les impôts. Contrairement à l'Ontario, qui a financé ses baisses d'impôt en augmentant son déficit de 14 milliards de dollars au cours des quatre dernières années – une somme qui a été directement ajoutée à la dette de la province.
Je serai peut-être obligé de lui parler de l'importance d'une approche équilibrée afin de préparer le Canada et l'Ontario pour le 21e siècle. De lui rappeler que les transferts en espèces et en points d'impôt du gouvernement fédéral vers l'Ontario sont aujourd'hui plus élevés que lorsque nous sommes arrivés au gouvernement et ce, en dépit du fait que nos dépenses totales soient moins élevées. Je serai peut-être obligé de lui dire que les baisses d'impôt sont importantes, mais qu'elles ne doivent pas être financées aux dépens du système de santé ontarien.
Que les baisses d'impôt sont importantes, mais qu'elles ne doivent pas être financées aux dépens de l'enseignement postsecondaire. Saviez-vous que les universités de l'Ontario ont les frais d'inscription les plus élevés au pays et que l'Ontario dépense moins d'argent par personne pour l'enseignement postsecondaire que toute autre province? Est-ce là la meilleure façon de préparer la population de cette province à l'ère du savoir?
Je ne cherche pas à marquer des points dans ce débat. Je vais essayer de résister à la tentation. Mais vous me connaissez assez bien pour savoir que, quand on m'attaque, je riposte.
Cela dit, nous avons trop de choses à accomplir ensemble pour perdre notre temps à des chicanes politiques. Les gens de l'Ontario nous ont élus tous les deux. Ils s'attendent à nous voir travailler ensemble. Je veux que vous sachiez que Mike Harris et moi, nous avons très bien travaillé au fil des ans, malgré nos divergences. Et je tiens à lui dire aujourd'hui que nous devons continuer à travailler ensemble. Que nous devons laisser de côté les considérations partisanes. Ce n'est pas si difficile. Nos objectifs fondamentaux se rejoignent, même si nos approches sont différentes.
Nous voulons tous les deux faire du Canada le milieu le plus favorable au succès au 21e siècle. Le milieu qui attire et retient les gens. Par ses horizons sans limites. Par sa promotion de la réussite et de l'excellence. Par ses possibilités d'avenir. Un milieu où il fait bon élever une famille, profiter des beautés de la nature, de collectivités sûres et d'un environnement sain.
Un pays qui fait la promotion de la paix, de la diversité culturelle ainsi que des bienfaits de la nouvelle économie mondiale pour l'humanité. Un Canada qui soit à la fois un chef de file et une inspiration pour le monde entier.