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“ Recettes de l'exploitation des ressources naturelles : l'expérience canadienne ”


Notes pour une allocution de
l'Honorable Rona Ambrose
Présidente du Conseil privé de la Reine pour le Canada
Ministre des Affaires intergouvernementales
Ministre de la diversification de l'économie de l'Ouest canadien

Santos (Brésil)

Le 16 juillet 2007

L'allocution prononcée fait foi


Je suis très heureuse d'avoir été invitée à prendre la parole aujourd'hui dans la magnifique ville de Santos.

Le Premier ministre du Canada, Stephen Harper, a fait des Amériques une priorité gouvernementale, et nous envisageons de resserrer considérablement nos liens avec cette région en général et le Brésil en particulier.  

Notre approche stratégique met l'accent sur la collaboration avec nos principaux partenaires pour défendre nos valeurs et intérêts communs et ce, dans le cadre de trois thèmes clés : la démocratie, la prospérité et la sécurité. 

Nos relations avec le Brésil sont particulièrement importantes à cet égard.

Le Canada et le Brésil entretiennent des relations très positives et fructueuses. Le Canada accorde de l'importance aux partenariats bien développés et grandissants qu'il a établis avec le Brésil. 

Notre objectif est de consolider ces partenariats pour défendre nos intérêts communs dans la région et sur la scène internationale.

Nos relations ont un riche passé. Les entreprises canadiennes investissent au Brésil depuis plus d'un siècle, et Brascan fut la première à le faire.

Les niveaux d'investissement n'ont jamais été plus élevés. Le Brésil vient au premier rang parmi les pays d'Amérique centrale et du Sud pour ce qui est de l'investissement direct étranger au Canada. 

L'acquisition de l'entreprise canadienne Inco par la Companhia Vale do Rio Doce (CVRD) a resserré les liens commerciaux.   

Le commerce entre nos pays continue de croître. Nous avons récemment assisté à une coopération accrue dans les domaines de l'agriculture et des sciences et la technologie. Nous examinons également des possibilités de coopération dans le domaine des biocarburants.


Notre expérience dans le domaine des ressources naturelles

Dans ce contexte, je suis très heureuse de pouvoir vous faire part de l'expérience du Canada, dont le régime fédéral permet aux gouvernements infranationaux de profiter des recettes de l'exploitation des ressources naturelles.

Tout Albertain (comme moi) est naturellement désireux de parler du rôle des ressources naturelles (particulièrement le pétrole et le gaz) tant dans l'économie canadienne en général que dans l'économie de sa province.

Fort de ses très importantes réserves pétrolières, notamment les sables bitumineux de l'Athabasca dans le nord de l'Alberta, le Canada est une superpuissance énergétique émergente. Parallèlement, il y a au Canada peu de questions plus susceptibles de susciter un vigoureux débat public que celle de savoir quels gouvernements devraient bénéficier des recettes de l'exploitation des ressources naturelles.

Permettez-moi de vous expliquer brièvement pourquoi.

Je vais articuler mon explication autour de certains faits importants à propos du Canada et du fédéralisme canadien et des raisons pour lesquelles la situation canadienne est en de nombreux points similaire à celle du Brésil même s'il existe des différences importantes.


Richesses naturelles du Canada

Fait no 1 : Le Canada, comme le Brésil, est un vaste pays qui est particulièrement riche en ressources naturelles.

Même si le Brésil a connu une forte croissance dans les secteurs des biocarburants, de l'électricité, du gaz naturel et du pétrole ces dernières années, ce qui lui a permis, par exemple, d'atteindre l'autosuffisance dans le domaine pétrolier l'an dernier, le Canada est depuis longtemps un important producteur et exportateur d'énergie.

La production pétrolière et gazière canadienne (source particulièrement appréciable de recettes gouvernementales) revêt une importance particulière.

Par exemple, en 2006, le Canada a produit quelque
2,6 millions de barils de pétrole par jour, comparativement à quelque 1,6 million de barils par jour au Brésil.

Et la production gazière annuelle du Canada, 220 milliards de mètres cubes en 2006, excède également la production annuelle du Brésil, qui s'établit à environ 18 milliards de mètres cubes.


La population relativement limitée du Canada

Fait no 2 : La population du Canada de 33 millions d'habitants équivaut seulement à environ un sixième de la population du Brésil.

En raison de sa population relativement limitée, le Canada a pu exporter une grande partie de sa production d'énergie, notamment du pétrole, du gaz, de l'hydroélectricité et du charbon.

De plus, étant donné que le Canada tire de la production d'énergie des recettes publiques nettement supérieures à celles du Brésil, les recettes par habitant ainsi obtenues sont beaucoup plus élevées que celles du Brésil.


Prise en charge provinciale des ressources naturelles du Canada

Fait no 3 : Aux termes de la Constitution du Canada, presque toutes les ressources naturelles intracôtières appartiennent aux provinces. (Les ressources qui se trouvent dans les trois territoires nordiques du pays appartiennent au gouvernement fédéral; quelques Premières Nations autochtones possèdent également des ressources naturelles abondantes.)

Par conséquent, ce sont les gouvernements provinciaux, et non le gouvernement fédéral ou les administrations municipales, qui perçoivent et reçoivent presque toutes les redevances et autres recettes générées par les ressources intracôtières se trouvant sur leurs territoires de compétence.

Étant donné l'importance grandissante de la production extracôtière de pétrole et de gaz ici au Brésil, j'ajouterais que cela est aussi effectivement le cas pour les ressources naturelles extracôtières.

Selon la Constitution, les ressources naturelles extracôtières appartiennent au gouvernement fédéral du Canada.

Cependant, pour assurer un meilleur équilibre entre les provinces, des ententes ont été signées durant les années 1980 pour que Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse, deux provinces situées sur la côte Est du pays, reçoivent toutes les recettes de l'exploitation pétrolière et gazière effectuée au large de leurs côtes respectives.


Concentration régionale des richesses naturelles du Canada

Fait n° 4 : Au Canada, les recettes gouvernementales tirées du pétrole et du gaz sont concentrées dans quelques provinces.

C'est particulièrement vrai dans ma province natale, l'Alberta, qui compte environ 3,4 millions d'habitants. On y produit 1,8 million de barils de pétrole par jour et 167 millions de mètres cubes de gaz naturel (c'est-à-dire plus des deux tiers de la production totale du Canada).

Les gouvernements tirent aussi des recettes substantielles de l'exploitation du pétrole, du gaz et des autres ressources naturelles, notamment :

  • les provinces de l'Ouest, soit la Colombie-Britannique (qui compte plus ou moins 4,3 millions d'habitants) et la Saskatchewan (qui compte environ 1 million d'habitants);
  • les provinces de la côte Est, soit Terre-Neuve-et-Labrador (qui compte environ 500 000 habitants) et, dans une moindre mesure, la Nouvelle-Écosse (qui compte environ 900 000 habitants).

En revanche, les recettes provinciales tirées du pétrole, du gaz et de la production de minéraux sont relativement modestes dans les autres provinces, dont les deux plus peuplées, soit l'Ontario (où l'on recense approximativement 13 millions d'habitants) et le Québec (qui en compte environ 7,6 millions).

Je crois savoir que la production gazière et pétrolière du Brésil est aussi concentrée dans trois États côtiers, notamment ceux de Rio de Janeiro, d'Espirito Santo et potentiellement de São Paulo.

Cependant, tous ces États sont beaucoup plus peuplés que leurs équivalents canadiens : à elle seule, la population de l'État de São Paulo dépasse celle du Canada en entier.
Par conséquent, des recettes de l'exploitation des ressources relativement modestes au Brésil se traduisent par des gains par habitant bien moins importants pour les États brésiliens que pour les provinces canadiennes.


Disparités économiques et financières au Canada

Fait no 5 : La concentration de ressources pétrolières dans certaines provinces canadiennes engendre des disparités économiques et financières interrégionales relativement importantes, du moins selon les normes de la plupart des pays membres de l'OCDE.

Ainsi, le rôle que jouent les recettes de l'exploitation des ressources naturelles dans les disparités financières interrégionales occupe une bien plus grande place dans l'opinion publique canadienne que dans celle de la plupart des pays.


Décentralisation financière au Canada

Fait no 6 : Le système financier fédéral du Canada est également très décentralisé.

Dans le contexte de ce système, les gouvernements provinciaux jouissent d'une grande autonomie au plan de leurs dépenses et de leur capacité de générer des revenus.

Ils sont principalement responsables de secteurs stratégiques importants, dont la santé, l'éducation et les services sociaux, de même que les routes et autres infrastructures provinciales.

Ils ont aussi accès à toutes les principales sources d'imposition, par exemple l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés, les taxes de vente et les cotisations sociales, à peu près sur la même base que le gouvernement fédéral. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, ils ont également l'accès exclusif aux recettes de l'exploitation des ressources naturelles et aux autres revenus qui s'y rapportent.

Par ailleurs, les provinces perçoivent leurs propres impôts. Elles demeurent donc pleinement responsables de leurs politiques fiscales vis-à-vis de leurs contribuables. 

Par exemple, contrairement au Brésil (et à nombre d'autres fédérations en Amérique latine et en Europe), il n'existe, pour ainsi dire, aucun partage des recettes entre les gouvernements canadiens, c'est-à-dire qu'un gouvernement prélève un impôt, mais ne partage pas une part fixe des recettes qui en découlent avec un autre ordre de gouvernement.

Étant donné que les provinces peuvent percevoir leurs propres recettes plus facilement que dans la plupart des autres fédérations, les transferts fédéraux aux provinces et aux administrations locales sont relativement bas comparativement à ceux de la plupart des autres fédérations, bien qu'ils aient connu récemment une hausse appréciable et soient devenus prévisibles et à long terme après une décennie de changements annuels ponctuels qui ont compliqué la planification financière des provinces. 

Par conséquent, les provinces canadiennes s'appuient sur leurs propres recettes de l'exploitation des ressources naturelles pour financer la grande majorité de leurs dépenses importantes.

Cette décentralisation fiscale marquée constitue l'un des éléments fondamentaux du fédéralisme canadien bien qu'elle accentue des disparités fiscales interprovinciales relativement importantes.


Péréquation et ressources naturelles

Fait no 7 : La péréquation des recettes de l'exploitation des ressources naturelles au Canada demeure une question d'opinion publique.

Pour faire face aux défis posés par les disparités fiscales relativement importantes au Canada, on a recours, depuis un demi-siècle, à un programme de péréquation officiel dont les principes généraux sont inscrits dans notre Constitution depuis 1982.

Aux termes du programme, le gouvernement fédéral (et non les provinces mieux nanties) effectue des transferts aux provinces moins bien nanties pour veiller à ce qu'elles soient en mesure d'offrir des services publics comparables à ceux des provinces bien nanties en prélevant des niveaux comparables d'impôts. 

Pendant la plus grande partie des cinquante dernières années, le Programme de péréquation a suscité très peu de divergences intergouvernementales grâce à une formule par laquelle toutes les provinces étaient traitées équitablement.

Bien entendu, les provinces bénéficiaires de transferts ont souvent soutenu que le programme n'était pas assez généreux tandis que les autres affirmaient le contraire.

Cependant, la plupart du temps, les provinces, et la population canadienne dans l'ensemble, étaient généralement satisfaites du programme.

Il est toutefois arrivé que le programme de péréquation du Canada suscite des opinions divergentes, souvent avec l'augmentation marquée du prix des produits de base et  l'augmentation des recettes de certaines provinces qui en découlaient et qui accroissaient les disparités fiscales entre les provinces. 

On a, notamment, souvent soutenu qu'une trop grande péréquation des recettes de l'exploitation des ressources naturelles pourrait faire en sorte que les gouvernements provinciaux propriétaires de ces ressources soient moins encouragés à les exploiter.

Plus récemment, les gouvernements fédéraux du Canada ont réagi aux pressions exercées sur le système de péréquation par l'augmentation des recettes de l'exploitation des ressources naturelles en effectuant une série de changements ponctuels.

On a jugé que ces changements nuisaient à la formule de longue date du programme et qu'ils faisaient des distinctions inéquitables entre les provinces.

Lorsque le nouveau gouvernement du Canada, dirigé par le Premier ministre Stephen Harper, est arrivé au pouvoir en 2006, il a immédiatement vu la nécessité de rétablir l'équilibre des relations fiscales au Canada et, notamment, de privilégier une approche de principe à l'égard de la péréquation en général et de la péréquation des recettes de l'exploitation des ressources naturelles en particulier.

Dans le contexte du plan élargi qu'il a décrit dans son budget de 2007 pour rétablir l'équilibre fiscal, le gouvernement du Canada a de nouveau fondé le programme de péréquation sur une formule tout en respectant les ententes en suspens. Par exemple :  

  • il a honoré l'engagement qu'il a pris de soustraire les recettes de l'exploitation des ressources naturelles des calculs de péréquation sans pour autant réduire les transferts à aucune province;

  • il a fait en sorte que l'on veuille toujours exploiter les ressources naturelles en veillant à ce que toutes les provinces reçoivent un résidu fiscal de l'exploitation de leurs ressources;

  • pour assurer l'équité entre les provinces qui reçoivent des transferts au titre de la péréquation et celles qui n'en reçoivent pas, il a également fixé un * plafond + pour éviter qu'une province qui reçoit des transferts ait une meilleure capacité fiscale globale qu'une province qui n'en reçoit pas;

  • pour assurer une transparence et une responsabilité accrues de la gestion du programme, il a aussi grandement simplifié ce dernier conformément aux recommandations d'un groupe d'experts indépendant.

Au Canada, la plupart des observateurs se sont montrés favorables au retour d'une péréquation fondée sur des principes, y compris au chapitre des recettes de l'exploitation des ressources naturelles.


Conclusion

En faisant ces remarques, je suis consciente du fait qu'il est toujours un peu délicat de faire des comparaisons entre les pays, alors je me suis contentée de parler de notre façon de faire les choses au Canada. J'espère que vous me ferez part de votre expérience afin que nous puissions situer nos propres défis dans un contexte plus vaste.

Je suis particulièrement intéressée à mieux connaître les défis auxquels le Brésil est confronté au chapitre, entre autres, des relations intergouvernementales et des arrangements fiscaux, notamment pour ce qui est du traitement des recettes de l'exploitation des revenus, et à savoir comment il s'y prend pour les relever.

Je vous remercie.

 

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Mise à jour : 2007-07-16 Avis importants