I

INTRODUCTION

Le contexte général du renouveau

En ma qualité de chef de la fonction publique, je suis heureux de présenter ce Deuxième rapport annuel au Premier ministre sur la fonction publique du Canada. L'obligation de soumettre un rapport annuel constitue l’une des nouvelles dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique entrée en vigueur dans sa forme modifiée au printemps 1993.

Conformément aux exigences de la loi, le présent rapport décrit l’état de la fonction publique tel que je le perçois. Il traite de certains des principaux événements ayant marqué la fonction publique au cours des 18 derniers mois  1 et il résume la progression du processus de réorganisation et de renouveau à long terme. Le rapport me donne en outre l’occasion d’exposer les futurs enjeux pour la fonction publique, tant à court qu’à long terme.

On ne peut situer le rapport et évaluer convenablement « l’état actuel de la fonction publique » que dans le contexte du changement et du renouveau permanents que connaît la fonction publique du Canada depuis une décennie, sinon beaucoup plus. 2  Le dernier grand projet dans ce domaine fut Fonction publique 2000, lancé en 1989 par le Premier ministre  3  de l'époque, M. Mulroney. Le processus de réforme et de renouvellement à l’échelle de la fonction publique visait à préparer cette dernière à relever les défis du XXIe siècle. En 1992, le premier rapport annuel du greffier sur la fonction publique portait essentiellement sur ce point. 4

Les principes directeurs et les principaux objectifs de Fonction publique 2000 étaient énoncés dans le Livre blanc sur le renouvellement de la fonction publique du Canada   5  produit par le gouvernement en 1990. Le nouveau gouvernement accepte, dans les grandes lignes, les principes et les valeurs de Fonction publique 2000 qui y sont formulés et consistant notamment à reconnaître la valeur d'employés compétents et adaptables, à mettre l’accent sur le service, et à privilégier l’innovation et l’apprentissage constants au sein des organisations. Les principes et les valeurs en question demeurent des repères valables pour orienter la transformation et le renouveau de la fonction publique.

Le processus de changement quasi permanent qui caractérise la fonction publique depuis quelques années n'est unique ni au Canada ni à l’administration fédérale. En effet, les fonctions publiques du Royaume-Uni, de l’Australie, de la France, de la Nouvelle-Zélande et de plusieurs provinces canadiennes ont, elles aussi, fait l’objet de réformes importantes. Plus récemment, le vice-président Gore lançait aux États-Unis un nouveau projet de grande envergure qui va dans le même sens. 6 Quoique différentes sous certains angles, ces diverses interventions traduisent la volonté des gouvernements de s’adapter aux forces du changement qui ont transformé les économies et les sociétés du monde entier. Elles ont en outre plusieurs caractéristiques communes: une plus grande souplesse de l’organisation, un investissement dans les ressources humaines, la modernisation des services et des systèmes du personnel, la volonté de consulter et une ouverture aux idées venues de l’extérieur du gouvernement. 

Ce n’est qu’en replaçant le processus actuel de renouveau de la fonction publique dans ce contexte international que nous sommes pleinement en mesure de cerner les défis que le Canada doit relever et les changements qu’il faudra apporter pour que notre fonction publique puisse demeurer une institution nationale efficace.

Le scepticisme croissant qui se manifeste au Canada à l’égard de l’utilité des institutions, y compris la fonction publique, est l’un des principaux facteurs avec lesquels il faut aujourd’hui composer. Ce phénomène touche le secteur public de nombreux pays et aussi bien les politiques que les fonctionnaires doivent en tenir compte. En ma qualité de chef de la fonction publique, je me réjouis des réactions du nouveau gouvernement. Le Premier ministre a en effet fait clairement savoir, tant à l’intérieur du gouvernement que publiquement, qu’il apprécie et respecte la fonction publique et qu’il s’attend à ce que les ministres perpétuent la tradition en entretenant avec leurs fonctionnaires des rapports étroits et loyaux. C'est tout à fait ce type de rapports que mes collègues hauts fonctionnaires et moi avons entretenu avec le Premier ministre.

Les contraintes constantes imposées par les compressions budgétaires concourent en outre à créer un climat propice au renouveau et influant sur les conditions de travail des employés. Depuis 1984, les budgets de fonctionnement des ministères ont subi une douzaine de réductions successives. Cette diminution continuelle de ressources a fait que l'efficacité est devenue plus qu’un objectif; c’est devenu une nécessité. Toutefois, dans de nombreux domaines, nous avons virtuellement atteint un point au-delà duquel on ne pourra plus continuer à offrir les programmes et les services actuels sans une injection de ressources supplémentaires. C’est ce qui a incité le gouvernement à lancer les examens de programmes et d’efficacité 7   annoncés récemment. Si les ressources financières n’existent plus ou viennent à manquer à l’avenir, il sera nécessaire pour les gouvernements de repenser ce qu’ils font et la façon dont ils le font. Dans la même optique, l’étude des chevauchements et du double emploi entre les administrations fédérale et provinciales a pour objet d’aboutir à des décisions concernant ce que les gouvernements doivent faire, à quels niveaux et au moyen de quels mécanismes de prestation.

Les gouvernements, tant au Canada qu’à l’étranger, sont confrontés aux nouveaux enjeux que posent les politiques sanitaires et sociales, le développement économique à l’heure de la mondialisation, et les besoins de citoyens victimes de changements d’ordre environnemental et autres sur lesquels ils ont peu d'influence. 8   À l’échelon fédéral, la fonction publique est le principal instrument dont se sert le gouvernement pour faire face aux problèmes qui surgissent. Or, le gouvernement n’est en mesure de satisfaire pleinement les besoins des citoyens que s’il peut compter sur les meilleurs conseils et la meilleure aide, les idées les plus novatrices et les programmes les plus efficaces. Le Premier ministre s’est engagé à établir un véritable partenariat avec la fonction publique et son message a été fort bien accueilli par tous les fonctionnaires. La fonction publique est en train de relever ce défi avec tout le talent qu’on lui connaît.

La dernière année a été difficile pour les fonctionnaires. Le changement provoque toujours du stress et, durant l’an dernier, la fonction publique du Canada a subi certains des plus importants changements organisationnels de son histoire. Or, dans la mesure où le changement au sein du gouvernement peut être contrôlé, il relève largement de décisions et de responsabilités politiques. Je me dois cependant d’expliquer au public et à mes collègues fonctionnaires les réalisations de la dernière année et de dire pourquoi, à mon avis, les divers changements ont rendu la fonction publique plus apte que jamais à aider notre gouvernement à régler les grands problèmes de l’heure au Canada. 

Je suis fier de la conscience professionnelle et du sens des responsabilités dont les fonctionnaires de tous les ministères et organismes gouvernementaux ont fait preuve en dépit des changements qui leur ont été imposés au cours des neuf derniers mois. Malgré la confusion et l’incertitude qu’engendre inévitablement le changement organisationnel, malgré les craintes qu’ils pouvaient entretenir au sujet de leurs emplois et de leurs carrières, les fonctionnaires ont continué de remplir leur rôle avec la compétence et le dévouement auxquels les Canadiens se sont toujours attendus. On a continué de fournir des services dans des centaines de bureaux fédéraux dans tout le pays, de livrer les chèques à temps et de faire preuve d’autant de minutie et de compétence qu’auparavant pour conseiller ministres et sous-ministres. De plus, lorsqu’il est arrivé au pouvoir, le nouveau gouvernement a pu compter sur une fonction publique loyale et experte, prête à le servir. À elles seules, ces constatations illustrent la qualité des hommes et des femmes qui font partie de cette institution nationale.


1 Plus précisément, le présent rapport porte sur la période qui s'est écoulée depuis la présentation du premier rapport, soit le 30 juin 1992. Je m'attends toutefois à ce que les rapports futurs soient déposés à la fin des exercices financiers (c.-à-d. le 31 mars) et couvrent l’année civile précédente (31 décembre).
2 Signalons les importantes réformes apportées dans la foulée du rapport Glassco de 1963 ainsi que les travaux des commissions Lambert et D'Avignon à la fin des années 1970.
3 Voir le communiqué de presse du Premier ministre daté du 12 décembre 1989.
4 Voir au Fonction publique 2000: Premier rapport annuel au Premier ministre sur la fonction publique du Canada, Paul M. Tellier, greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet, Ottawa, 1992.
5 Fonction publique 2000: Le renouvellement de la fonction publique du Canada, Ottawa, 1990.
6 Voir Report of the National Performance Review, « From Red Tape to Results: Creating a Government that Works Better and Costs Less », Washington, 1993.
7 Voir Le plan budgétaire, février 1994, p. 31.
8 Je songe, par exemple, au défi que constitue pour le gouvernement fédéral et celui de Terre-Neuve la crise du secteur de la pêche à la morue de Terre-Neuve.

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