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Prudence et bonne politique budgétaire


Dans son édition du 17 octobre, La Presse plaçait à la une un textede son chroniqueur financier, M. Claude Picher, qui accuse l’ancien ministredes Finances, l’honorable Paul Martin, de s’être livré à un « habilecamouflage financier » (« De la prudence au camouflage », La Presse,p. A1). Tout en reconnaissant que « la légendaire prudence »de M. Martin « a joué un rôle clé » dans « leredressement des finances publiques canadiennes », M. Picher affirmeque pour l’exercice 2001-2002, l’ancien ministre des Finances est passé dela prudence au camouflage.

Selon M. Picher, si le budget fédéral de 2001-2002 se termine par unsurplus de 8,9 milliards de dollars, alors que M. Martin ne prévoyaitaucun surplus quand il a déposé son budget le 10 décembre 2001, c’est que l’ancienministre se serait livré à « un tripotage des chiffres ».M. Picher soutient que le ministre des Finances de l’époque se serait fondésur des prévisions économiques « volontairement pessimistes » alorsqu’il connaissait, au moment où il a déposé son budget, des prévisions dusecteur privé « beaucoup plus proche[s] de la réalité ».

Cette accusation de camouflage est grave, non fondée et injuste envers M.Martin et le gouvernement du Canada.

Comme l’indiquent les documents budgétaires de décembre 2001, lesprévisions du secteur privé dont fait état M. Picher étaient fondéessur les résultats d’un sondage mené en octobre 2001 auprès desprévisionnistes. À l’époque, la moyenne de leurs prédictions annonçaitune croissance du PIB canadien de 1,5 % pour 2001 et 2002. Or, StatistiqueCanada annonçait, le 30 novembre 2001, que le PIB du troisième trimestre 2001était en baisse de 0,2 % par rapport au trimestre précédent, soit lapremière contraction trimestrielle de l’économie depuis 1992. Étant donnéle contexte changeant, le ministère des Finances a de nouveau consulté leséconomistes du secteur privé au début de décembre pour obtenir leur opinionsur les rajustements à effectuer (voir Le plan budgétaire de 2001,p.157). Les hypothèses sur lesquelles se basait le budget, soit une croissancedu PIB de 1,3 % en 2001 et de 1,1 % en 2002, étaient le reflet de cesnouvelles consultations.

On ne doit pas oublier que la conjoncture économique était on ne peut plusincertaine à l’époque. Il y avait aussi le contexte préoccupant de l’après-11septembre 2001. M. Claude Picher lui-même écrivait, le 8 décembre 2001, que « l’économiecanadienne est entrée en récession (...) L’impact négatif sur les financespubliques devrait surtout se faire sentir au cours de la deuxième moitié de l’exercice »(« Un budget sans surprise », La Presse, p.E3). Le 11 décembre2001, il ajoutait qu’« avec ses maigres réserves, le ministre n’aplus qu’à croiser les doigts en espérant que la récession ne dure pas troplongtemps » « Pulvérisée, la marge de manoeuvre », LaPresse, A1). En écrivant cela, M. Picher faisait preuve d’une saineprudence et ne se livrait à aucun camouflage.

Heureusement, le Canada s’est tiré du ralentissement économique mieux quetout autre pays du G7 : le Fonds monétaire international (FMI) estime quela croissance de son PIB en 2002 sera de 3,4 %, soit nettement supérieureau 1,1 % prévu par le secteur privé au moment du budget. C’estlargement ce qui explique que le gouvernement du Canada a dégagé un surplus de8,9 milliards de dollars en 2001-2002.

Pendant ce temps, selon le FMI, la croissance du PIB ne sera que de2,2 % aux États-Unis en 2002 et de 1,4 % en moyenne pour les pays duG7. Le gouvernement fédéral américain anticipait, lors du dépôt du budget2001-2002, un surplus de 230 milliards de dollars US; il prévoitmaintenant un déficit de 165 milliards de dollars US. En Europe, laFrance, l’Italie, l’Allemagne et le Portugal ont des problèmes importantsde trésorerie. On le voit, les effets de balancier en matière budgétaire sontterribles et commandent la plus grande prudence. Notre surplus, qui représenteà peine 5 % des recettes fédérales, fondrait comme neige au soleil sinous relâchions cette prudence, alors que l’endettement fédéral de536 milliards de dollars est plus de deux fois supérieur à celui desprovinces.

M. Picher reproche au gouvernement du Canada de ne pas en faire assez pouraider les gouvernements provinciaux. Je tiens à dire, comme ministre desAffaires intergouvernementales, que la prudence budgétaire du gouvernement duCanada ne l’empêche pas d’aider les provinces du mieux qu’il le peut dansles circonstances. Les transferts fédéraux aux provinces augmenterontannuellement de 6 % au cours des prochaines années alors que la hausseannuelle des revenus du gouvernement fédéral ne devrait être que de 2 %.Le gouvernement du Canada a dit et répète que, s’il trouve la marge de manœuvrepour faire plus lors du prochain budget, il le fera. Plutôt qu’une questionde soi-disant déséquilibre fiscal, c’est une question de responsabilitéfédérale.

Le gouvernement du Canada aide les provinces en partie par les transferts,mais surtout en favorisant la bonne santé économique du pays. Si le Canada apu échapper au ralentissement économique en ce début de décennie, c’estpour une bonne part parce que la Banque du Canada a pu baisser les taux d’intérêtau bon moment. Elle a pu le faire notamment parce que les finances publiques,autant fédérales que provinciales, étaient plus saines qu’il y a dix ouvingt ans. Après tout, le surplus fédéral est une excellente nouvelle pourtous les Canadiens, situation financière que leur envieraient les contribuablesdes autres pays.

En ce qui a trait à l’année 2002-03, La revue financière d’août2002 du ministère des Finances du Canada nous indique que l’excédentbudgétaire fédéral pour les cinq premiers mois de l’exercice 2002-2003(4,6 milliards de dollars) est moindre que la moitié des surplusenregistrés à pareille date l’an dernier (11,4 milliards dedollars). Bien qu’il soit difficile de prévoir maintenant le soldebudgétaire de fin d’année, ces résultats montrent que la situationfinancière du gouvernement du Canada est moins favorable cette année qu’ellene l’était l’année dernière.

Aussi, avec l’incertitude des marchés et le risque de guerre, l’actuelministre des Finances, l’honorable John Manley, entend maintenir la «légendaire prudence » budgétaire qui a si bien servi le Canada et qu’alouangée à juste titre M. Picher.




Lettre ouverte que le ministre Stéphane Dion a fait parvenir aux journauxle 18 octobre 2002.

Pour informations :

André Lamarre
Conseiller spécial
Téléphone : (613) 943-1838
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