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Rapport d'enquête sur la divulgation non autorisée de renseignements diplomatiques sensibles

Le 22 mai 2008

Le très honorable Stephen Harper
Premier ministre du Canada
80, rue Wellington
Ottawa (Ontario)
K1A 0A3

Monsieur le Premier ministre,

Le 5 mars 2008, vous m’avez demandé d’entreprendre une enquête interne de sécurité sur des allégations de divulgations non autorisées d’information diplomatique de nature délicate. 

Le Bureau du Conseil privé a donc mené une enquête approfondie sous la direction du directeur des Opérations de la sécurité. Cette enquête est maintenant terminée.

Le rapport ci-joint fait état des constatations et des conclusions de cette enquête et propose des recommandations visant à réduire à l’avenir les risques de divulgation non autorisée d’information diplomatique de nature délicate. 

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de mes sentiments les meilleurs.

Kevin G. Lynch


Table des matières

1.  Introduction

2.  Portée et objectifs

3.  Méthodologie

4.  Résultats et analyse

5.  Conclusions

6.  Mesures correctives immédiates

7.  Recommandations

Annexe : Chronologie des faits importants


1. Introduction

Le 5 mars 2008, le premier ministre a demandé au greffier du Conseil privé de mener une enquête de sécurité interne en réponse à des allégations de divulgation non autorisée par M. Ian Brodie, chef de cabinet du premier ministre, et M. Michael Wilson, ambassadeur du Canada aux États-Unis, d’information sur la position supposée des candidats aux présidentielles américaines relativement à l’Accord de libre-échange nord‑américain (ALENA). Le premier ministre a demandé que l’enquête porte aussi sur la divulgation non autorisée d’un rapport diplomatique établi par le Consulat général du Canada à Chicago.
 
Selon les allégations, M. Brodie avait révélé aux médias que le camp de la sénatrice Clinton avait appelé l’ambassadeur Wilson pour rassurer le Canada quant à la position de la sénatrice sur l’ALENA, et l’ambassadeur Wilson, quant à lui, avait divulgué aux médias que le camp du sénateur Obama avait pris contact avec l’ambassade pour clarifier la position du sénateur sur l’ALENA. De plus, le 2 mars 2008, l’Associated Press détenait une copie non autorisée d’un rapport diplomatique portant sur une rencontre entre un conseiller du sénateur Obama et le consul général du Canada à Chicago.

Le greffier du Conseil privé a demandé au directeur des Opérations de la sécurité du Bureau du Conseil privé (BCP) de diriger l’enquête. Détaché de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), le directeur des Opérations de la sécurité est un officier supérieur détenant le grade de surintendant principal et possède une vaste expérience du travail d’enquête. 

Vu la portée et la complexité de l’enquête, et le volume de renseignements à examiner, le directeur des Opérations de la sécurité a engagé deux enquêteurs professionnels de BMCI Investigations & Security Ltd. Forts d’une vaste expérience, ils se spécialisent tous deux dans les enquêtes intérieures et internationales sur les allégations d’activités criminelles, de fraude, d’abus de confiance, de divulgation non autorisée de renseignements officiels, de détournement de fonds publics et d’autres actes de cette nature. Très au fait du travail au sein des forces de police et de sécurité nationales, ils comprennent en profondeur les complexités des enquêtes administratives. L’un des deux enquêteurs a travaillé de nombreuses années dans le domaine de la sécurité interne au Service canadien du renseignement de sécurité, et l’autre, ancien conseiller en éthique de la GRC, a occupé la charge d’enquêteur pour le Tribunal of Inquiry into Complaints concerning some Gardai of the Donegal Division, en Irlande.

Pour l’examen des données électroniques et des relevés de communications, le directeur des Opérations de la sécurité s’est fait seconder par la Direction générale de la sécurité et du renseignement du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI), par la Division de l’informatique et des services techniques et la Division des services des télécommunications du BCP, et par les agents de sécurité de quatre autres ministères fédéraux.

2. Portée et objectifs

L’enquête comportait deux volets : (1) une enquête sur les présumées divulgations d’information par le chef de cabinet du premier ministre et l’ambassadeur du Canada aux États-Unis relativement aux positions supposées des candidats démocrates aux présidentielles américaines sur l’ALENA (« présumées divulgations verbales »); (2) une enquête sur la divulgation à l’Associated Press d’un rapport diplomatique canadien sur la rencontre du 8 février 2008 entre un conseiller du sénateur Obama et le consul général du Canada à Chicago (« divulgation non autorisée du rapport diplomatique »).

L’enquête visait, au moyen d’entrevues, de recherches, d’évaluations et d’autres méthodes d’investigation, à :

  • déterminer la chronologie des faits pertinents qui ont précédé et suivi les divulgations de l’information;
  • déterminer aussi précisément que possible la ou les sources de ces divulgations, c’est‑à-dire, plus particulièrement :
    • d’où ou de qui l’information est provenue, où ou à qui elle a été envoyée, et sous quelle forme (papier, électronique, verbale, etc.);
    • qui a reçu copie de toute note, courriel ou autre document portant sur ces divulgations, ou a autrement eu accès à cette information;
  • conduire à la production d’un rapport d’enquête;
  • déboucher sur des recommandations qui réduiront les risques que ces incidents se reproduisent.

3. Méthodologie

L’enquête a été effectuée de manière exhaustive, systématique et impartiale afin qu’elle atteigne les objectifs fixés, en conformité avec les pratiques prescrites par l’Association des examinateurs certifiés de fraude et l’Institut des vérificateurs internes. Les normes généralement reconnues ont été respectées, de façon à ce que soient recueillies suffisamment de preuves empiriques pertinentes pour permettre de juger de la véracité des allégations donnant lieu au présent rapport.

Les enquêteurs ont eu recours aux méthodes suivantes : étude de la documentation source; interrogation approfondie des personnes ayant eu un accès direct à l’information; collecte et analyse de données sources fiables; examen des remarques obtenues de diverses sources secondaires lors de rencontres.

3.1 Méthodes d’enquête

Au cours de l’enquête, 36 personnes d’intérêt ont été interrogées, à Ottawa et à Washington; il s’agissait de responsables travaillant pour le Cabinet du premier ministre (CPM), le BCP, l’Administration centrale du MAECI à Ottawa, l’ambassade à Washington, le consulat général à Chicago, et le Cabinet du ministre des Affaires étrangères. Ont ainsi été interrogés :

  • 9 responsables du CPM, dont M. Ian Brodie, chef de cabinet du premier ministre;
  • 7 responsables du BCP;
  • 1 responsable de l’Administration centrale du MAECI;
  • 12 responsables de l’ambassade à Washington, dont M. Michael Wilson, ambassadeur du Canada aux États‑Unis;
  • 4 responsables du consulat général à Chicago, dont M. Georges Rioux, consul général du Canada à Chicago, et M. Joseph de Mora, consul, Relations politiques et économiques et Affaires publiques, et auteur du rapport diplomatique;
  • 3 responsables du Cabinet du ministre des Affaires étrangères.

Les enquêteurs ont utilisé lors des entrevues un questionnaire uniforme qu’ils avaient élaboré au préalable. Plusieurs responsables ont été interrogés à deux reprises.

Par ailleurs, le BCP a invité trois journalistes de CTV News concernés par les présumées divulgations verbales à parler aux enquêteurs, mais CTV News a décliné l’offre en leur nom.

Dans le cadre de l’enquête, les relevés des appels téléphoniques passés par les personnes d’intérêt sur leur téléphone conventionnel ou leur téléphone cellulaire, du 8 février au 3 mars 2008 inclusivement, ont été examinés. On y cherchait des preuves de communication avec les médias ou d’autres personnes. Ont également été scrutés les relevés des télécopies faites par les personnes d’intérêt pendant la même période.

De même, tous les courriels touchant les divulgations et retrouvés dans les boîtes aux lettres électroniques de ces mêmes personnes ont été examinés afin de déterminer qui savait quoi et à quel moment, et si des transmissions répréhensibles ont eu lieu.

Enfin, les boîtes aux lettres électroniques (classifiées, non classifiées et BlackBerry™) des fonctionnaires fédéraux et des employés ministériels qui ont reçu le rapport diplomatique original de Chicago ont été examinées. Cette recherche a servi à vérifier à quels autres destinataires le rapport a été transmis, et à déterminer si ces transmissions auraient dû avoir lieu ou non. Pour de plus amples détails, voir la partie 4.2.2

4. Résultats et analyse

La chronologie des principaux événements visés par l’enquête se trouve en annexe.

4.1 Présumées divulgations verbales

L’enquête révèle que M. Brodie se trouvait à l’ambassade du Canada à Washington le 25 février 2008. Il croit qu’une discussion informelle s’y est déroulée au sujet de l’ALENA, et qu’il a entendu dire qu’une prise de contact avait eu lieu avec le camp d’un des candidats aux présidentielles. Il se rappelle avoir entendu dire qu’il ne fallait pas s’en faire sur la question de l’ALENA, et se souvient que quelqu’un a dit : « Nous le tenons de l’un des camps » [traduction]. M. Brodie a mentionné qu’on parlait alors aux nouvelles des remarques de la sénatrice Clinton sur la renégociation de l’ALENA, ce qui l’a amené à présumer que c’était de son camp dont il s’agissait.

Le lendemain 26 février, à Ottawa, tandis qu’il participait au huis clos à l’intention des médias pour le budget de 2008, M. Brodie s’est arrêté pour parler à un journaliste de CTV News. Dans un courriel envoyé par la suite à M. Brodie, ce journaliste a affirmé qu’il croyait que M. Brodie avait mentionné durant le huis clos « que l’ambassadeur Wilson avait reçu un message du camp de la sénatrice Clinton selon lequel il ne fallait pas prendre au pied de la lettre la rhétorique anti-ALENA de la sénatrice » [traduction]. M. Brodie se rappelle avoir parlé du budget au journaliste, mais il ne se souvient pas de lui avoir parlé de l’ALENA. Comme l’ont fait les autres représentants du gouvernement, M. Brodie a parlé aux médias présents au huis clos en tenant pour acquis qu’il le faisait à titre d’information seulement, et que ses propos ne lui seraient pas attribués.

Tous les journalistes présents au huis clos se sont engagés par écrit à ne pas enlever, divulguer ni communiquer avant la fin du huis clos les documents, le matériel ou l’information mis à leur disposition. Ils ont également accepté que « des fonctionnaires du ministère des Finances [seraient] sur place au huis clos des médias pour répondre aux questions à titre d’information seulement (aucune attribution de l’information ni indice de source) ». On pourrait faire valoir que les remarques faites par M. Brodie ne sont pas couvertes pas ces interdictions, puisqu’il n’est pas un fonctionnaire du ministère des Finances, mais les enquêteurs ont appris au cours des entrevues que tous les participants aux huis clos admettent et respectent généralement le fait que les règles ci-dessus s’appliquent à tous les propos tenus par les responsables du gouvernement et les employés de cabinets ministériels.

C’est seulement le 28 février que M. Brodie a entendu parler du rapport diplomatique de Chicago; un collègue du CPM l’en a informé, puis lui en a fourni une copie plus tard ce jour-là. C’est alors que M. Brodie a pris connaissance du rapport pour la première fois.

Le 27 février 2008, le bureau de CTV News à Washington a tenté de prendre contact avec Michael Wilson à l’ambassade pour lui parler urgemment, sans attribution. L’ambassadeur, qui à ce moment prenait part à des réunions d’affaires à Ottawa, a accepté de rappeler le journaliste de CTV News à Washington. Ce dernier lui aurait dit que le « chef de cabinet du premier ministre » avait affirmé que l’ambassadeur avait reçu un appel de l’équipe de la sénatrice Clinton au sujet de l’ALENA. M. Wilson a catégoriquement nié cette affirmation, expliquant que si l’ambassade a pour rôle de prendre contact avec le camp des différents candidats, les camps, eux, ne contactent pas l’ambassade.

L’ambassadeur a aussi révélé aux enquêteurs que, durant cette conversation, il a tenté de détourner le journaliste de la piste Clinton, puisque, ayant lu le rapport diplomatique de Chicago sur la réunion du 8 février, il présumait que c’était ce document qui était à la source des affirmations de M. Brodie. Afin de détromper le journaliste, et comme il était entendu qu’il ne serait pas cité, l’ambassadeur a reconnu que le Canada avait pris contact avec d’autres camps, dont, récemment, celui du sénateur Obama.

Pour ce qui est de M. Brodie, aucune preuve ni témoin ne confirme ou n’infirme ce qu’il soutient avoir dit au journaliste d’Ottawa au huis clos sur le budget de 2008.  Cependant, selon la chronologie des événements,  il semble qu’il a probablement discuté avec ce journaliste du sujet de l’ALENA. De plus, compte tenu de ce que, selon l’équipe d’enquête, il savait à ce moment, il est possible qu’il ait divulgué que des responsables canadiens à Washington avaient eu des contacts avec le camp de la sénatrice Clinton sur la question de l’ALENA – une information qui s’avèrerait erronée.

Il semble que le journaliste d’Ottawa a ensuite rapporté cette information à son collègue de Washington, qui a subséquemment communiqué avec l’ambassadeur Wilson, comme on le décrit ci-dessus. Selon les constatations des enquêteurs, il semble probable que la conversation entre le journaliste et l’ambassadeur le 27 février, que celui-ci croyait confidentielle, a amené le journaliste à mettre davantage l’accent sur le sénateur Obama dans le reportage diffusé ce soir‑là. L’ambassadeur a informé les enquêteurs qu’il avait clairement dit au journaliste qu’il n’avait pas été appelé par le camp de la sénatrice Clinton ni par aucun autre camp de candidat aux présidentielles. Pourtant, dans le reportage finalement diffusé, CTV News a affirmé que le gouvernement canadien avait été contacté par les deux camps au sujet de l’ALENA.

L’ambassadeur et le journaliste de Washington se sont reparlés au téléphone le 28 février 2008. L’ambassadeur a fait cet appel en présence d’un responsable du BCP, qui n’a donc entendu que les paroles de l’ambassadeur pendant la conversation. Ce dernier affirme avoir répété au journaliste qu’aucun camp n’avait pris contact avec lui ou son personnel à l’ambassade pour parler de l’ALENA. Il croit qu’il a alors peut-être précisé que le Canada avait entrepris d’appeler directement un conseiller du sénateur Obama, mais il nie catégoriquement avoir donné les noms des personnes concernées, ou avoir mentionné Chicago. Les souvenirs du responsable du BCP présent concordent avec ceux de l’ambassadeur Wilson.

4.2 Divulgation non autorisée du rapport

Ce volet de l’enquête porte sur le rapport diplomatique : entre les mains de qui se trouvait-il, à quel moment, et quel lien faut-il voir avec la chronologie des questions des médias à son sujet? Et particulièrement, comment le rapport, ou son existence et son contenu, ont-ils été portés à la connaissance des médias et d’autres parties non autorisées?

4.2.1 Origine et diffusion du rapport

Le 13 février 2008, M. de Mora, consul, Relations politiques et économiques et Affaires publiques, a utilisé le système non classifié du MAECI pour envoyer du consulat à Chicago le rapport diplomatique sur la rencontre entre le conseiller du sénateur Obama et le consul général Rioux. Le rapport a été envoyé aux destinataires sur une liste créée par l’ambassade à Washington pour la distribution des rapports concernant l’élection présidentielle aux États-Unis. La liste comptait 232 adresses au total. De ce nombre, 212 étaient au MAECI, huit au BCP, quatre appartenaient à d’autres ministères fédéraux [ministère de la Défense nationale (MDN), Ressources naturelles Canada (RNCan), Industrie Canada (IC) et Citoyenneté et Immigration Canada (CIC)], et huit étaient à l’extérieur du gouvernement du Canada. Parmi ces huit adresses externes, cinq étaient l’adresse électronique personnelle de membres du personnel de l’ambassade déjà compris dans les 212 adresses du MAECI, et les trois autres étaient celles de responsables canadiens employés à la Banque du Canada, à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international.

L’Associated Press détenait une copie de ce rapport diplomatique le 2 mars 2008. Par contre, comme l’explique la partie 4.2.3, il semblerait que des renseignements au sujet de la rencontre entre le conseiller du sénateur Obama et le consul général Rioux aient été connus des médias avant cette date, peut-être même dès le 28 février.

4.2.2 Vérification des transmissions électroniques et des télécommunications

Compte tenu de la vaste distribution du rapport diplomatique, l’interrogation de tous les destinataires aurait nécessité beaucoup plus de ressources et de temps que ce qui était prévu. Afin de mener une enquête exhaustive qui soit également rapide et économique, le directeur des Opérations de la sécurité du BCP a conclu qu’un examen des transmissions électroniques et des télécommunications de tous les destinataires au sein du gouvernement du Canada constituerait un mécanisme de filtrage efficace. Toute activité hors de l’ordinaire a été relevée et enquêtée, puis, s’il y avait lieu, les enquêteurs ont interrogé la personne concernée.

À la demande du BCP, la Direction de la sécurité technique et de la sécurité de l’information (IST) du MAECI a effectué une recherche dans les 212 boîtes aux lettres du MAECI qui ont reçu le rapport diplomatique de Chicago entre le 13 février et le 2 mars 2008. Le rapport a été distribué à l’administration centrale du MAECI à Ottawa, à toutes les missions aux États-Unis, à un certain nombre de missions au Mexique, et à plusieurs missions ailleurs dans le monde.

À l’administration centrale du MAECI, le travail de recherche a consisté à repérer, à vérifier et à charger les bandes de sauvegarde afin de rétablir la base de données du système de courriel pour la période visée, puis à reconstituer chacune des boîtes aux lettres à examiner. Dans les missions à l’étranger, les bases de données du système de courriel ont dû être rétablies et exportées vers le personnel de l’IST à l’administration centrale.

Les mêmes vérifications ont été effectuées dans les boîtes aux lettres d’autres réseaux du gouvernement du Canada qui avaient reçu le rapport original, soit ceux du BCP, du MDN, de RNCan, d’IC et de CIC.

Une recherche avancée par mot-clé a permis de repérer le rapport et les mentions de celui-ci. Les messages électroniques ainsi relevés ont été examinés en vue principalement de déterminer si le rapport ou l’information qu’il contenait avaient été transmis à d’autres.

La recherche dans les boîtes aux lettres a révélé que dans la grande majorité des cas, le rapport de Chicago n’avait pas été retransmis. Dans la plupart des cas de retransmission, il avait été transmis par des personnes qui figuraient sur la liste de distribution originale, avec leurs commentaires, à d’autres personnes dont le nom apparaissait sur la liste de distribution originale.

La recherche a également permis de constater que le rapport avait été envoyé à plusieurs adresses qui ne faisaient pas partie de la liste de distribution originale. Dans un cas, un destinataire dans un autre consulat canadien aux États-Unis a retransmis le rapport à sept de ses collègues au sein du même consulat. Dans quelques cas, le document a été retransmis à des adresses à l’extérieur du réseau du gouvernement canadien, y compris deux cas de retransmission d’un compte de bureau à un compte personnel. Selon les recherches et les entrevues ultérieures, rien n’indique qu’il y aurait eu d’autres retransmissions. On a également conclu que parmi les retransmissions à des adresses à l’extérieur du réseau gouvernemental, aucune n’était la source de la divulgation non autorisée du rapport.

Une copie du rapport a également été versée dans le système automatisé de stockage des textes du MAECI, auquel tous les employés ont accès. On a vérifié si le rapport avait été extrait du système avant la fuite. Le rapport a effectivement été consulté dans le système, mais seulement après sa divulgation.

Pendant l’enquête, certains ont évoqué les noms de quelques citoyens américains ne travaillant pas pour le gouvernement du Canada qui auraient pu être en contact avec des représentants canadiens ayant accès au rapport. Même si le champ de l’enquête ne s’étendait pas à ces citoyens américains, des entrevues et un examen approfondi des relevés des appels téléphoniques, des envois de télécopies et des messages électroniques, ainsi que de la correspondance électronique, ont permis d’enquêter sur les interactions entre ces citoyens et les employés du gouvernement canadien ou les employés de cabinets ministériels. Ces vérifications n’ont révélé aucune irrégularité ni conduite répréhensible de la part des responsables ou des employés des cabinets ministériels.

4.2.3 Possession ou connaissance du rapport par les médias

Le 2 mars 2008, l’Associated Press a publié une information selon laquelle elle avait obtenu une copie du rapport diplomatique et a communiqué avec le porte-parole de l’ambassade pour lui demander ses commentaires. Le porte-parole a refusé de commenter le document sans l’avoir vu, de sorte que l’Associated Press lui a envoyé par courriel une retranscription de la télécopie qu’elle avait reçue. La retranscription reproduit fidèlement le rapport, à l’exception de six divergences typographiques mineures.

Cette information donne à penser que l’Associated Press a bel et bien reçu le rapport intégral par télécopieur. La provenance de la télécopie reste inconnue. L’idée de s’adresser à l’Associated Press dans le cadre de l’enquête a été envisagée, puis écartée parce que la sphère de compétence des enquêteurs ne s’étend pas au territoire des États-Unis.

Il semblerait, toutefois, que les médias aient été au courant de la rencontre entre le conseiller du sénateur Obama et le consul général Rioux à une date antérieure. En effet, certains indices laissent croire que le 28 février 2008 au soir, le bureau de Washington de CTV News a informé l’ambassadeur qu’une source soi-disant américaine avait révélé l’identité du responsable canadien ayant tenu des discussions avec le camp du sénateur Obama et qu’il s’agissait du chef de mission (consul général) à Chicago.

Selon les résultats de l’enquête, le 28 février 2008 en après-midi, un collaborateur d’une publication américaine en ligne qui couvrait la campagne de la sénatrice Clinton a adressé la question suivante par courriel au porte-parole de l’ambassade à Washington : « Est-ce qu’un conseiller, employé ou adjoint du sénateur Obama a parlé au consul à Chicago, ou à un membre quelconque du personnel du consul, de la position du sénateur à l’égard de l’ALENA, ou a prononcé des mots de la teneur de ceux que cite CTV? »[traduction]

Vu la formulation très précise et détaillée de la question, il appert que son auteur possédait alors, sinon le rapport lui-même, du moins l’information selon laquelle le conseiller du sénateur Obama et M. Rioux s’étaient rencontrés.

Le 29 février, CTV News a nommé le conseiller du sénateur Obama qui avait discuté de la question de l’ALENA avec le consul général à Chicago.

5. Conclusions

5.1 Présumée divulgation verbale par M. Brodie

Le 26 février 2008, M. Brodie a parlé à un journaliste de CTV News basé à Ottawa pendant le huis clos prébudgétaire, en tenant pour acquis qu’il le faisait à titre d’information seulement, sans attribution.

Aucune preuve ni témoin ne confirme ou n’infirme les propos échangés entre les deux. Cependant, à la lumière des constatations des enquêteurs, il semble que M. Brodie ait probablement discuté avec ce journaliste du sujet de l’ALENA et qu’il est possible qu’il ait évoqué des contacts entre le camp de la sénatrice Clinton et l’ambassade à Washington. Rien n’indique que M. Brodie a divulgué quoi que ce soit concernant le sénateur Obama ou son camp.

Rien de ce que M. Brodie peut avoir dit pendant le huis clos n’a révélé quoi ce soit au sujet du rapport diplomatique, dont il n’a eu connaissance que le 28 février. Aucun élément de preuve ne démontre que M. Brodie a divulgué des renseignements classifiés.

5.2 Présumée divulgation verbale par l’ambassadeur Wilson

L’ambassadeur Wilson a parlé par téléphone à deux reprises (les 27 et 28 février) à un journaliste du bureau de Washington de CTV News en se fiant que ses propos ne lui seraient pas attribués.

L’ambassadeur Wilson reconnaît avoir dit au journaliste que le gouvernement canadien avait été en communication avec tous les camps dans la course présidentielle, y compris celui du sénateur Obama, mais l’ambassadeur est convaincu de ne pas avoir parlé de Chicago ni de la rencontre dans cette ville entre le conseiller du sénateur Obama et le consul général du Canada. La deuxième conversation téléphonique a eu lieu en présence d’un responsable du BCP, qui a entendu les paroles de l’ambassadeur. Ses souvenirs concordent avec ceux de l’ambassadeur. Aucun élément de preuve ni témoin n’est venu contredire la teneur de l’échange entre l’ambassadeur et le journaliste.

L’enquête n’a pas permis d’établir que l’ambassadeur Wilson a révélé quelque information que ce soit au sujet du rapport diplomatique ou de la position des candidats à la présidence des États-Unis à l’égard de l’ALENA, quoique ses propos aient sans doute aidé le journaliste à suivre la piste conduisant au camp du sénateur Obama. Aucun élément de preuve ne démontre que l’ambassadeur Wilson a divulgué des renseignements classifiés.

5.3 Divulgation non autorisée du rapport diplomatique

L’Associated Press avait en main le 2 mars une copie non autorisée du rapport diplomatique. Or, certains indices laissent croire que les médias avaient connaissance du rapport ― ou du moins des renseignements concernant la rencontre entre le conseiller du sénateur Obama et le consul général du Canada ― avant cette date, peut-être dès le 28 février.

L’enquête n’a pas permis de déterminer qui a divulgué le rapport, à qui, ni s’il y a eu plus d’une fuite.

Le rapport diplomatique original a été incorrectement classifié, et la liste de distribution n’était pas assez restreinte.

6. Mesures correctives immédiates

Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) admet que ce rapport diplomatique aurait dû être classifié en raison de la nature délicate de son contenu, et que la liste de distribution aurait dû être beaucoup plus restreinte.

6.1 Nouveaux protocoles de rapport du MAECI à l’intention des missions canadiennes aux États-Unis

Au lendemain de la fuite du rapport diplomatique, le sous-ministre adjoint du MAECI pour l’Amérique du Nord a tenu une téléconférence avec les chefs de mission aux États-Unis le 6 mars 2008. Il a été question des pratiques en matière de rapports et de la nécessité de demander aux gestionnaires de rappeler aux employés l’importance de protéger les renseignements sensibles. Cette téléconférence a été suivie, le 7 mars 2008, d’un message de l’administration centrale du MAECI donnant à toutes les missions canadiennes aux États-Unis l’instruction d’observer les protocoles suivants pour les rapports politiques sur l’élection présidentielle américaine :

  • les rapports ordinaires non classifiés sur des sources publiques doivent être envoyés par le système de courriel non classifié et ne pas comporter d’opinions exprimées par des individus, de renseignements sensibles sur le plan politique, ni d’analyses ou de commentaires;
  • les messages envoyés par le système non classifié doivent inclure une liste de distribution standard (aucune liste invisible de destinataires en copie, aucune boîte aux lettres partagée) et être transmis seulement à des adresses du gouvernement du Canada (aucune adresse externe);
  • tout rapport concernant des opinions émises par des individus ou des questions délicates sur le plan politique, de même que toute analyse et tout commentaire, doit être correctement classifié et envoyé à une liste de distribution très restreinte au moyen du système de courriel classifié; et toute citation attribuée à un individu doit porter la mention « MERCI DE PROTÉGER CETTE INFORMATION » afin de rappeler aux lecteurs de protéger la source.

7. Recommandations

  1.  Les destinataires des rapports diplomatiques dans tous les ministères et les cabinets ministériels devraient se voir rappeler périodiquement le caractère sensible de ces documents et la nécessité de les protéger en conséquence.

  2. Le MAECI devrait étendre les protocoles qu’il a mis en place depuis la fuite du rapport diplomatique à tous les rapports sensibles, et pas seulement à ceux sur l’élection américaine, et en assurer la mise en application à l’échelle du Ministère, y compris dans toutes les missions canadiennes à l’étranger.

    Il est recommandé que le MAECI renforce les mesures de protection de l’information qu’il a mises en place depuis l’incident. En particulier, il devrait étendre les protocoles améliorés décrits à la partie 6.1 à tous les rapports sensibles, et pas seulement à ceux sur l’élection américaine, et en assurer la mise en application à l’échelle du Ministère, y compris dans toutes les missions canadiennes à l’étranger. Il devrait également mettre en place un système de surveillance du traitement, de la transmission et de l’entreposage des renseignements sensibles, et prendre les mesures qui s’imposent lorsque des documents sont envoyés au moyen d’un système dont le niveau d’accréditation n’est pas suffisant.

  3. Tout futur engagement signé par les représentants des médias avant l’admission à un huis clos prébudgétaire devrait indiquer clairement que les propos tenus par les responsables du gouvernement du Canada et les employés de cabinets ministériels sont à titre d’information seulement et qu’ils ne doivent pas leur être attribués.

    Le huis clos prébudgétaire est assujetti à des règles de confidentialité très strictes et vise à permettre aux journalistes d’assimiler le contenu des documents budgétaires et de préparer leurs reportages en présence de responsables fédéraux et d’employés de cabinets ministériels qui leur fournissent des explications sur des mesures budgétaires complexes. Les responsables tiennent pour acquis qu’ils le font à titre d’information et que leurs propos ne leur seront pas attribués. Ces règles sont généralement comprises et respectées tant par les représentants des médias que par les responsables du gouvernement. Cependant, afin de clarifier encore davantage ces règles pour tous les intéressés, il est recommandé que tout futur engagement signé par les représentants des médias indique clairement que les propos tenus par les responsables du gouvernement du Canada et les employés de cabinets ministériels sont à titre d’information seulement et qu’ils ne doivent pas leur être attribués.

  4. Le MAECI devrait aussi offrir davantage de formation aux gestionnaires et aux employés sur les procédures et les responsabilités relatives à la classification des renseignements ainsi qu’au traitement et à la protection des documents sensibles, et ce, de manière à mieux cibler les groupes qui produisent et/ou transmettent de tels documents.

Il est recommandé que cette nouvelle formation comprenne un cours en ligne à l’intention de tous les utilisateurs sur la sécurité des réseaux.

Annexe : Chronoligie des faits importants

Date (2008)

Heure

Faits, actions ou constatations

8 février

 

Un conseiller du sénateur Obama rencontre à Chicago le consul général du Canada à Chicago, Georges Rioux. Le consul Joseph de Mora est également présent.

 

14 h 39

L’ambassade du Canada à Washington fournit à M. de Mora une liste d’adresses auxquelles sera envoyé le rapport diplomatique sur la réunion.

12 et 13 février

 

M. de Mora rédige le rapport diplomatique sur la rencontre du 8 février.

13 février

10 h 51

M. Rioux apporte quelques modifications mineures au rapport et l’approuve.

 

12 h 17

M. de Mora envoie, sans classification, le rapport diplomatique sur la réunion du 8 février aux 232 adresses électroniques fournies par l’ambassade du Canada à Washington.

Du 14 au 19 février

 

Les deux candidats démocrates soulèvent le sujet de l’ALENA juste avant les primaires du Wisconsin, fixées au 19 février. L’ALENA demeure un enjeu important jusqu’aux primaires suivantes (Texas, Ohio, Vermont et Rhode Island), prévues pour le 4 mars.

21 février

 

Le ministre du Commerce international, David Emerson, aurait fait la déclaration suivante : « Il n’y a aucune raison de modifier l’ALENA [...] Le discours tenu actuellement par les candidats à l’investiture semble plaire aux partisans de leur parti. Il est toutefois peu probable qu’ils tiennent encore ces propos le jour de l’élection générale. » [traduction] (Doug Palmer, Reuters, « Canada dismisses U.S. campaign talk of NAFTA change », le 21 février, 21 h 03)

25 février

 

Ian Brodie, le chef de cabinet du premier ministre, se rend à Washington pour assister à différentes séances d’information. Tous ceux qui étaient présents affirment qu’il n’a pas eu de séance sur l’ALENA, mais que des sujets qui retenaient alors l’attention de la capitale et des médias, y compris les propos de ministres canadiens concernant l’ALENA, ont été abordés. Toutefois, il croit qu’une discussion informelle s’y est déroulée au sujet de l’ALENA, et qu’il a entendu dire qu’une prise de contact avait eu lieu avec le camp d’un des candidats aux présidentielles. Il se rappelle avoir entendu dire qu’il ne fallait pas s’en faire sur la question de l’ALENA, et se souvient que quelqu’un a dit : « Nous le tenons de l’un des camps. » [traduction] M. Brodie a mentionné qu’on parlait alors aux nouvelles des remarques de la sénatrice Clinton sur la renégociation de l’ALENA, ce qui l’a amené à présumer que c’était de son camp dont il s’agissait.

26 février

En
avant‑midi

Un huis clos est organisé à l’intention des médias sur le budget de 2008. Les journalistes qui souhaitent y assister doivent signer un engagement dans lequel il est indiqué, notamment, que « [d]es fonctionnaires du ministère des Finances […] seront sur place au huis clos à l’intention des médias pour fournir des renseignements à titre d’information seulement, sans aucune attribution. »

 

13 h 30 -15 h 30

Ian Brodie assiste au huis clos. Il discute du budget avec un reporter d’Ottawa attaché à la chaîne CTV, mais il ne se souvient pas qu’il ait jamais été question de l’ALENA. M. Brodie a fait la déclaration suivante aux enquêteurs : « Nous sommes là pour fournir de l’information aux journalistes, et non pas pour être cités. »[traduction]

 

En soirée

Selon les médias, le reporter d’Ottawa aurait, peu de temps après le huis clos, pris la parole devant une classe d’étudiants en journalisme à l’Université Carleton. Il aurait alors parlé de son entretien avec M. Brodie.

 

En soirée

Au cours d’un débat en soirée entre les aspirants à l’investiture démocrate, les sénateurs Obama et Clinton évoquent la possibilité de retirer les États-Unis de l’ALENA si leurs revendications à propos des normes du travail et des normes environnementales n’étaient pas entendues.

27 février

En
avant‑midi

Un représentant du CPM (employé 1 du CPM) découvre l’existence du rapport diplomatique de Chicago lors d’une conversation avec un analyste du BCP, qui propose de lui en remettre copie. L’employé 1 du CPM le montrera par la suite à un collègue du CPM (employé 2 du CPM).

 

14 h 16 -15 h

La salle des nouvelles de CTV à Washington communique avec l’ambassade du Canada pour discuter en confidence avec l’ambassadeur Michael Wilson, avec promesse de ne pas le citer dans un reportage en primeur.

 

15 h 42

En voyage à Ottawa pour une réunion, l’ambassadeur Wilson rappelle le reporter de CTV à Washington. Selon  l’ambassadeur, voici ce qu’aurait dit son interlocuteur : « J’ai appris d’un haut responsable du gouvernement qu’un représentant de la sénatrice Clinton a communiqué avec vous pour vous aviser qu’il serait question de l’ALENA, qui allait devenir un enjeu plus important dans la campagne, et qu’il vous fallait prendre en compte à cet égard les tensions croissantes à l’approche des primaires du 4 mars. » [traduction] L’ambassadeur Wilson soutient avoir répondu ceci : « C’est faux, je n’ai reçu aucun appel de la sorte. » [traduction]   Le reporter aurait répliqué : « Oh, voilà qui est embêtant, car cette information provient d’une personne haut placée au gouvernement. Pour être franc avec vous, c’est le chef de cabinet du premier ministre qui en est la source. » [traduction] L’ambassadeur a fourni les explications suivantes aux enquêteurs : « Il était déterminé à rendre cette histoire publique et je me suis dit que s’il la présentait de cette façon, nous allions nous retrouver dans l’embarras. J’ai donc tenté de rectifier les faits qu’il m’avait jusque-là présentés. Je lui ai dit : " À l’ambassade, notre tâche consiste à établir des liens, à communiquer avec des gens de différents milieux aux États-Unis. Nous communiquons avec les différents camps afin de prendre les devants. Les équipes des candidats ne communiquent pas avec nous, elles n’essaient pas de nouer des liens : elles sont bien trop occupées pour cela. C’est pourquoi nous en prenons l’initiative." » Croyant que sa conversation avec le reporter était confidentielle, il lui aurait expliqué que « [c]es entretiens ont eu lieu dans le cadre d’une discussion générale avec les différents camps. Ils étaient trois à ce moment-là. Aussi nous sommes-nous récemment entretenus avec l’équipe du sénateur Obama. » [traduction] Il aurait ajouté qu’il ne pouvait lui préciser les dates, étant donné qu’il n’y avait pas participé.

 

En soirée

Au bulletin de nouvelles de CTV, on rapporte qu’ « [u]n haut dirigeant du camp Obama a téléphoné à l’ambassadeur du Canada aux États-Unis, Michael Wilson, pour l’aviser que le sénateur allait critiquer l’ALENA. » [traduction] On ajoute que « [s]elon des sources de bas échelon, il est possible que l’équipe Clinton ait également envoyé un message semblable à Ottawa, ce qu’a catégoriquement nié un porte-parole de la sénatrice. » [traduction]

28 février

 

1) Le reportage de CTV est repris par des médias de partout au pays de même que des États-Unis. 2) Le réseau ABC annonce que l’ambassade canadienne conteste les allégations de la chaîne CTV selon lesquelles un représentant du sénateur Obama aurait communiqué avec l’ambassadeur Wilson pour l’aviser que les propos tenus contre l’ALENA dans le cadre de la campagne ne devaient pas être pris au sérieux. 3) La chaîne CTV publie une déclaration pour indiquer qu’elle maintient ses allégations. 4) La chaîne CTV affirme avoir discuté avec le conseiller du sénateur Obama de son entretien avec le consul général du Canada à Chicago. Le conseiller aurait refusé de confirmer que cet entretien avait eu lieu.

 

12 h 36

L’ambassade du Canada à Washington publie une déclaration : « L’ambassade du Canada confirme qu’aucun représentant des candidats à l’élection présidentielle n’a communiqué avec l’ambassadeur ou un de ses employés pour discuter de l’ALENA. La nouvelle à cet effet que le réseau de télévision canadien CTV a diffusée hier soir est fausse; le reportage est erroné. Aucun représentant des candidats à l’élection présidentielle n’a communiqué avec l’ambassadeur Wilson ou n’a téléphoné à l’ambassade au sujet de l’ALENA, ni avant, ni après le débat en Ohio. » [traduction]

 

14 h 35

L’employé 2 du CPM (voir le 27 février, en avant-midi) avise M. Brodie qu’il a obtenu le compte rendu d’une rencontre s’étant déroulée à Chicago avec un membre du camp Obama.

 

15 h 27

Une demande de renseignements d’un représentant de la presse américaine est présentée à l’ambassade canadienne. On lui pose la question suivante : « Est-ce qu’un conseiller, employé ou adjoint du sénateur Obama a parlé au consul à Chicago, ou à un membre quelconque du personnel du consul, de la position du sénateur à l’égard de l’ALENA, ou a prononcé des mots de la teneur de ceux que cite CTV? » [traduction]

 

15 h 28

L’employé 2 du CPM envoie le rapport diplomatique à M. Brodie.

 

15 h 43

M. Brodie reçoit un courriel du reporter de CTV News à Ottawa avec qui il s’était entretenu lors du huis clos pour le Budget : « Lors du huis clos il me semble que vous avez dit que l’ambassadeur Wilson avait reçu un message du camp Clinton selon lequel il ne fallait pas prendre au pied de la lettre la rhétorique anti-ALENA de la sénatrice. Vous ai-je bien compris? Ou s’agissait-il du camp Obama? » [traduction]

 

16 h

L’ambassadeur Wilson s’entretient une deuxième fois avec le correspondant de CTV à Washington. L’ambassadeur croit une fois de plus que ses propos ne seront pas cités. Il affirme à nouveau que le camp Obama n’a pas communiqué avec lui. Selon lui, il n’a jamais été question de Chicago, du conseiller du sénateur Obama ni du consul général Rioux pendant ses deux entretiens téléphoniques avec un journaliste de CTV. Son interlocuteur lui indique alors que le reporter de CTV à Ottawa lui a communiqué ce renseignement, qu’il aurait obtenu auprès de M. Brodie.

 

17 h 30

Un reporter d’ABC à Washington communique avec le consulat du Canada à Chicago dans l’espoir de s’entretenir avec le consul général et cite le nom du conseiller du sénateur Obama qui a rencontré M. Rioux.

 

Après    21 h 05

Selon l’ambassadeur Wilson, le représentant du bureau de CTV News à Washington aurait laissé sur son répondeur un message dans lequel il mentionne qu’une source américaine aurait confirmé qu’un appel avait été fait au chef de mission à Chicago, et qu’il tentait de joindre (en l’appelant par son nom) le conseiller du sénateur Obama qui avait discuté avec le consul général à Chicago.

 

23 h - 23 h 25

Au bulletin de nouvelles de fin de soirée, CTV s’en tient à son histoire de la veille et signale que « ce matin, l’ambassade canadienne a démenti la nouvelle […], et pourtant, hier encore, l’une des principales sources de cette nouvelle, qui occuperait un poste de haut niveau à l’ambassade canadienne à Washington, donnait des détails à CTV au sujet de cet appel téléphonique et allait même jusqu’à fournir une chronologie des événements. Cette source a indiqué depuis qu’il y avait probablement eu un malentendu. » [traduction]

29 février

 13 h 23

ABC News rapporte qu’« une source proche du Cabinet du premier ministre du Canada » [traduction] l’aurait informé que la communication initiale aurait eu lieu entre le conseiller économique principal du sénateur Obama (ABC donne le nom de cette personne) et le consul général du Canada à Chicago. On poursuit en disant que « selon cette source, l’ambassadeur Wilson aurait exagéré les propos échangés entre le camp Obama et le représentant canadien lors de discussions qui ont eu lieu au cours de la semaine avec Ian Brodie, chef de cabinet du premier ministre, qui serait responsable de la fuite à CTV. » (Jennifer Parker, « Clinton Campaign Demands Obama Answers on NAFTA », ABC News, le 29 février 2008).

2 mars

12 h - 13 h 34

L’Associated Press (AP) communique avec le porte-parole de l’ambassade et l’informe qu’elle a en main la copie d’une note de service et demande des commentaires sur le contenu. À la demande de l’ambassade, l’AP lui envoie une retranscription de cette note. L’AP signale qu’un mot de la retranscription est illisible et demande des précisions sur ce mot. Cette note de service est en fait un rapport diplomatique du MAECI, daté du 13 février.

3 mars

En
avant‑midi

AP publie la nouvelle au sujet du rapport du MAECI (Nedra Pickler, Associated Press, « Un conseiller d’Obama nie les déclarations relatives à l’ALENA » [traduction],
3 mars 2008; AP, « Extrait du rapport diplomatique du Canada » [traduction], 3 mars 2008.

 

14 h 09

L’ambassade du Canada à Washington fait la déclaration suivante : « L’ambassade canadienne et nos consuls généraux aux États-Unis communiquent sur une base régulière avec tous les candidats aux élections présidentielles américaines et font rapport périodiquement sur ces contacts aux représentants concernés. Dans son récent rapport, le consul général de Chicago ne laissait entendre d’aucune façon que le sénateur Obama et les membres de son équipe tenaient en privé un discours différent de celui qu’ils tiennent en public, notamment à l’égard de l’ALENA. Nous regrettons sincèrement les conclusions qui ont pu être tirées à cet effet. Le peuple américain est en voie d’élire un nouveau président et parmi les deux partis politiques il a le choix de candidats de fort calibre. Le Canada ne s’interposera pas dans ce processus électoral. Nous sommes impatients de travailler avec la personne qui sera élue par le peuple américain à établir des rapports plus solides que jamais entre notre pays et un voisin qui est à la fois un ami et un partenaire. » [traduction]

5 mars 

14 h 15 - 15 h

En réponse à une question posée à la Chambre des communes pour savoir si une enquête serait effectuée pour trouver la source de la fuite, le premier ministre déclare que « le greffier du Conseil privé, de concert évidemment avec le ministère des Affaires étrangères, a ordonné une enquête de sécurité interne sur cette question. Selon les résultats de cette enquête et les conseils juridiques que nous recevrons, nous prendrons toutes les mesures jugées nécessaires pour aller au fond des choses. » (Hansard, 5 mars 2008)

7 mars

 

L’enquête commence par les premières entrevues.