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 Sommet des Amériques 2001

Discours du Premier ministre Jean Chrétien à l'occasion de la remise des prix de la Fondation Appeal of Conscience

Le 1er octobre 2002
New York (É.-U.)

J'aimerais pour commencer remercier Henry Kissinger de ses paroles aimables. Henry Kissinger est bien sûr un homme d'État de très grande envergure, et c'est un honneur pour moi de partager cette tribune avec lui.

La Fondation Appeal of Conscience s'est donnée pour mission d'encourager et de valoriser les qualités associées aux plus grands hommes d'État, c'est-à-dire le leadership au service du bien commun.

Il est bon pour les leaders qui ont de lourdes responsabilités de recevoir des encouragements et des pressions de la part d'organisations comme la vôtre. Vous nous aidez à donner le meilleur de nous-mêmes et vous insistez pour que nous fassions la promotion de valeurs et de normes universelles.

C'est un grand honneur et un privilège pour moi d'accepter ce prix au nom du peuple canadien, car l'honneur que vous me faites lui appartient en réalité.

Ma conscience et mes valeurs sont identiques aux siennes : liberté et justice, tolérance et dignité humaine, compassion et générosité, prospérité et équité.

La tradition veut que les dirigeants canadiens incarnent ces valeurs tout en préconisant des approches progressistes axées sur la collaboration sur la scène internationale. Je me suis fait un devoir au cours des neuf dernières années de tenter de perpétuer cette tradition.

Que ce soit dans des situations comme dans les Balkans, dans la guerre contre le terrorisme, dans le dossier de l'aide à l'Afrique ou à l'égard de l'environnement mondial.

Depuis que je suis premier ministre, j'ai été témoin de la période d'euphorie et de foi dans de nouvelles possibilités qui a suivi la fin de la guerre froide, puis j'ai vu émerger une nouvelle menace mondiale, celle de la terreur.

Le terrorisme incarne le mal absolu. Il n'a aucune justification morale ni conscience. Pas en Irlande, pas en Amérique du Sud ou centrale, pas au Moyen-Orient. Nulle part. Le terrorisme frappe toujours des innocents : individuellement ou en groupe, à un arrêt d'autobus, dans une gare ou dans leurs maisons, ou encore, comme le 11 septembre l'an dernier, dans deux des tours les plus prestigieuses d'une des villes les plus extraordinaires au monde.

Le terrorisme est une attaque contre les valeurs civilisées et il appelle une riposte ferme et déterminée de la part des sociétés civilisées.

L'une des principales obligations d'un gouvernement est d'assurer la sécurité de ses citoyens. Au lendemain des événements du 11 septembre, le Président Bush a très bien servi le peuple américain à cet égard. Il a su démontrer détermination et retenue comme chef d'État. Il a su former une coalition internationale unie dans un même but et dégager un consensus remarquable sur la nécessité d'efforts conjoints et coordonnés pour vaincre le terrorisme.

Le Canada est au premier plan de cette coalition. La campagne internationale en Afghanistan confirme le bien-fondé de l'approche multilatérale à l'égard des questions internationales que privilégient depuis longtemps les Canadiens.

Dans ce monde complexe qui est le nôtre, il est dans notre intérêt à tous d'utiliser le pouvoir et le poids moral des institutions internationales. L'action collective produit, selon moi, une plus grande sécurité à long terme qu'une action unilatérale.

Dans le même ordre d'idées, je considère que l'ONU a un rôle vital à jouer dans la situation actuelle en Irak.

La meilleure façon d'assurer le respect du droit international c'est de travailler avec l'ONU et par son entremise. C'est aussi la meilleure façon de s'occuper des États qui soutiennent le terrorisme ou qui tentent de produire des armes de destruction massive. Et il faut s'en occuper.

Il faut maintenir la pression sur Saddam Hussein pour qu'il accepte sans conditions les inspections de l'ONU, et lui montrer clairement que la communauté internationale est bien déterminée à faire respecter les résolutions de l'ONU.

Cependant, il nous faut aussi reconnaître que pour assurer notre paix et notre sécurité, il ne suffira pas de recourir aux armes ni d'améliorer les services de renseignement et la coopération. Il faudra aussi agir collectivement pour atténuer la pauvreté et le désespoir.

Selon la stratégie nationale de sécurité récemment rendue publique par le Président Bush : « un monde dans lequel certains vivent dans le confort et l'abondance [...] alors que la moitié de l'humanité vit avec moins de deux dollars par jour, n'est ni juste ni stable. La pauvreté [...] la faiblesse des institutions et la corruption peuvent rendre les États fragiles vulnérables aux réseaux terroristes. »

Pour des milliards de personnes dans le monde, les principaux dangers mortels indépendants de leur volonté sont la famine, la maladie, la faiblesse de l'économie, les gouvernements ineptes ou corrompus, et les conflits régionaux entre groupes qui se disputent des terres et des ressources insuffisantes.

Il est bien sûr juste de favoriser le développement humain dans les pays pauvres. Mais en aidant ces pays à échapper à la pauvreté, nous favorisons en même temps notre propre sécurité. Nous instaurons aussi des conditions propices à une prospérité mondiale plus vaste.

En effet, la mondialisation doit être mise au service des pauvres et non seulement des riches.

Le Plan d'action pour l'Afrique adopté cette année au Sommet du G8 en Alberta illustre parfaitement bien cette philosophie.

Le Plan d'action représente la conclusion d'un nouvel accord entre l'Afrique et le monde industrialisé.

Un accord dans le cadre duquel les dirigeants africains progressistes se sont engagés à promouvoir la bonne gouvernance, à extirper la corruption et à appuyer la démocratie.

En retour, les dirigeants du G8 se sont engagés à accroître l'aide au développement et la coopération technique ainsi qu'à encourager le commerce et l'investissement.

Car l'Afrique a été le continent négligé depuis la fin de la guerre froide. Il est essentiel que le monde industrialisé reprenne conscience de ses besoins.

La moitié de la population subsaharienne vit avec moins de un dollar par jour. Le pouvoir d'achat moyen a régressé de 20 p. 100 par rapport à ce qu'il était il y a 20 ans quand l'Afrique était déjà considérée comme pauvre.

Vingt-cinq millions d'Africains sont séropositifs et condamnés à une mort certaine s'ils n'ont pas accès à des traitements améliorés. Ils vont laisser 40 millions d'enfants orphelins.

L'aide accrue promise par les dirigeants du G8 est un élément de réponse, de même que l'engagement des Africains envers la saine gouvernance et l'État de droit.

Mais l'Afrique ne se redressera pas à moins que nous n'unissions nos efforts pour créer des conditions favorables à l'épargne intérieure, à l'investissement et au commerce.

Cela signifie ouvrir nos marchés aux biens que les Africains peuvent produire le plus facilement, tels que les produits agricoles, les textiles et les vêtements.

À compter du 1er janvier 2003, le Canada supprimera les droits de douane et les contingents applicables à presque tous les produits en provenance des pays les moins avancés de l'Afrique et d'ailleurs.

Mais si vous me permettez de vous parler en toute franchise, le plus gros obstacle rencontré par les pays pauvres est celui des énormes subventions que l'Union européenne et les États-Unis versent à leurs agriculteurs.

Ces subventions font baisser les prix et empêchent effectivement toute concurrence de la part des pays pauvres. Je suis conscient des pressions politiques exercées au niveau national en faveur de telles subventions.

Mon propre gouvernement a dû faire face à une telle situation quand il a décidé d'abandonner les droits de douane et les contingents. Mais nous l'avons fait parce qu'il était juste de le faire. Et parce que le libre-échange est le gage d'une plus grande prospérité pour toutes les parties à la longue.

Songez que l'an dernier, les subventions à l'agriculture de l'Union européenne et des États-Unis se sont chiffrées à plus de 300 milliards de dollars. Par contraste, l'aide à l'étranger des pays industrialisés n'a atteint que 50 milliards de dollars.

Notre conscience nous dicte de commencer à supprimer sans tarder ces subventions injustes qui faussent le marché.

À propos de responsabilités mondiales, je m'en voudrais de ne pas mentionner le changement climatique.

Ce phénomène engendre de nouveaux problèmes sur les plans de la santé, de l'économie et de l'environnement qui menacent de devenir des enjeux critiques pour les prochaines générations.

Ici encore, les intérêts nationaux seraient mieux servis par la coopération multilatérale.

C'est la raison pour laquelle notre gouvernement demandera au Parlement du Canada de voter la ratification du Protocole de Kyoto sur les changements climatiques. Nous avons entrepris d'élaborer une stratégie de mise en oeuvre en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre d'ici l'année 2012.

Bien que les États-Unis aient décidé de lutter contre le changement climatique en dehors du cadre de Kyoto, j'espère néanmoins que nos deux pays trouveront des façons de collaborer pour relever ce défi au cours de cette période.

À mon avis, dans l'intérêt de la santé et du mieux-être des générations à venir, le monde entier doit s'engager collectivement dans cette lutte et saisir les occasions qu'elle offre de susciter de nouvelles technologies et de nouveaux investissements.

Pour conclure, je voudrais insister sur trois questions d'importance primordiale : premièrement, la sécurité face à la terreur; deuxièmement, le développement dans les pays pauvres; troisièmement, la sécurité environnementale de la planète.

La prospérité, la sécurité, la santé et l'espoir du monde entier nécessitent une action collective à l'égard de ces questions.

Il nous faut reconnaître qu'agir dans l'intérêt général et respecter notre espace commun constituent les meilleurs moyens de servir l'intérêt à long terme de chacun de nous individuellement.

En termes simples, je peux affirmer à la Fondation Appeal of Conscience que suivre sa conscience c'est rentable.

Au nom des Canadiens, je continuerai de préconiser une action collective sur chacun de ces fronts pendant le temps qu'il me reste comme Premier ministre.

Je tiens à vous remercier encore une fois pour cet honneur ainsi que pour vos propres efforts louables dans ces domaines et à l'égard de certaines autres questions cruciales qui se posent à l'humanité. Merci beaucoup.

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