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 Sommet des Amériques 2001

 UNE DÉCLARATION DU
PREMIER MINISTRE JEAN CHRÉTIEN
à l’occasion de la deuxième lecture du projet de loi C-24,

Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l’impôt sur le revenu

(Financement politique)

Le 11 février 2003
Ottawa (Ontario)

Je prends la parole en Chambre aujourd’hui pour proposer la deuxième lecture d’un projet de loi qui changera la façon de faire la politique dans ce pays.

Un projet de loi qui remédiera à la perception que l’argent est roi. Que les grandes compagnies et les gros syndicats ont trop d’influence en politique.

Un projet de loi qui réduira le cynisme à l’égard de la politique et des politiciens.

Un projet de loi sévère mais juste.

Les Canadiens et Canadiennes exigent plus de transparence, d’ouverture et d’imputabilité. Ils l’exigent dans le secteur de la santé, et nous avons répondu à leur attente la semaine dernière.

Les Canadiens l’exigent de la part de leurs politiciens en ce qui concerne leurs activités de financement, et ce projet de loi satisfait à cette attente.

Ce projet de loi prévoit la pleine divulgation de toutes les contributions et dépenses de plus de 200 $, à tous les niveaux. Pas seulement de la part des partis nationaux et des candidats en période d’élections. Mais aussi de la part des associations de circonscription, des candidats à l’investiture et des aspirants à la direction.

Nous donnons suite aux recommandations du directeur général des élections, M. Jean-Pierre Kingsley, un haut fonctionnaire du Parlement du Canada. Ces recommandations étaient le fruit d’une carrière en tant que gardien du processus démocratique au Canada. Une carrière qui lui a valu le respect et la reconnaissance non seulement des Canadiens et de cette Chambre, mais aussi de pays qui en sont encore à l’apprentissage difficile de la démocratie et qui l’ont consulté sur la manière d’instaurer des élections véritablement démocratiques et équitables. Je tiens à rendre hommage à M. Kingsley et à le remercier pour son excellent travail.

Grâce à ces nouvelles règles, fini les trous noirs où disparaissent les contributions aux campagnes. Plus de dons sans reçu ni de dépenses non comptabilisées.

Il suffit de regarder ce qui se passe chez nos voisins du Sud pour voir l’impact de l’argent en politique. Les nombreux millions de dollars recueillis pour obtenir un seul siège au Sénat. Les énormes contributions versées aux comités d’action politique.

Un aspirant candidat à un poste élu est jugé d’abord sur sa capacité de recueillir d’énormes quantités d’argent. Et non sur son intelligence ou ses qualités de leader. C’est ce qu’ils appellent « the money primary » ou les « primaires financières », Monsieur le Président. Et cela se passe en coulisse. Bien avant qu’une seule idée soit formulée. Avant qu’un seul discours ne soit prononcé. Avant qu’un seul suffrage ne soit exprimé.

Nous ne voulons pas en venir là au Canada. Ce projet de loi mettra en place un système entièrement différent. Une institution typiquement canadienne. Un système qui constituera un modèle pour les démocraties.

Depuis de nombreuses années, les dépenses électorales sont plafonnées au Canada. Ce projet de loi plafonne le financement. Il plafonne les contributions aux partis politiques, aux candidats, aux aspirants à l'investiture et à la direction. Il impose la pleine divulgation.

Je n'étais pas toujours d'accord avec René Lévesque.

Mais il ne fait aucun doute que la loi sur le financement des partis qu'il a fait adopter au Québec a servi de modèle de démocratie. Elle a bien fonctionné. Ce projet de loi s'inspire de ce modèle et en corrige certaines lacunes.

Les contributions individuelles à un parti politique seront plafonnées à 10 000 $ par année. Ce montant correspond en gros, en dollars courants, au plafond de 3000 $ fixé dans la loi québécoise de 1977.

Cette loi s'inscrit dans le prolongement de la loi manitobaine adoptée il y a quelques années pour interdire les contributions d'entreprises et de syndicats à la caisse électorale des partis politiques.

À part une toute petite exception, que j’expliquerai dans un instant, les sociétés et les syndicats ouvriers n'auront pas le droit de contribuer à la caisse électorale des partis politiques, des candidats ou des aspirants à l’investiture dans une circonscription ou à la direction d’un parti.

Nous sommes tous conscients de la perception que les contributions des entreprises et des syndicats achètent de l'influence. Je ne crois pas que ce soit le cas. Et ne je crois pas qu'aucun d'entre nous dans cette Chambre sente qu'il ou elle a subi une influence abusive.

Cependant, et c'est un point très important que nous devons tous reconnaître, nous tous ici présents, nous nous sommes rendus coupables un jour ou l'autre d'avoir lancé l'accusation que les contributions d'entreprises ou de syndicats influencent nos adversaires – très souvent à la légère. Et les médias encore plus.

C'est très mauvais pour le processus politique. C'est très mauvais pour la démocratie.

Le projet de loi s'attaque de front à cette question. Je crois fermement que l'élimination des contributions aux partis politiques par les entreprises et les syndicats renforcera grandement la culture politique au Canada.

Monsieur le Président, les députés soutiennent qu'il ne faut pas les empêcher d'accepter des contributions très limitées des entreprises locales de leurs circonscriptions.

En fait, aux dernières élections, la contribution moyenne de ce type était de 450 $. On ne peut clairement pas considérer que de telles contributions puissent influencer indûment les décisions.

Par conséquent, le projet de loi permet aux entreprises et aux syndicats de contribuer pour un montant maximum de 1000 $ par année à un candidat ou à une association de circonscription. Mais pas à un parti national.

C'est un compromis acceptable je crois. Mais le fait d'aller plus loin diminuerait gravement l'utilité de ce projet de loi. Mille dollars par année sur une période de quatre ans c'est 4000 $.

Aucune entreprise ne devrait pouvoir verser plus que cela à un parti politique par l’entremise d'une association de circonscription.

Il ne faudrait pas recréer au niveau des circonscriptions ce que nous tentons d'éliminer au niveau national.

En effet, une des grandes frustrations de ceux qui travaillent à une véritable réforme du financement des partis politiques constitue la présence d'échappatoires qui permettent de contourner la loi.

La nécessité d'éviter de telles échappatoires dès le début du projet de loi de même que le cynisme public qu'elles engendrent justifie la sévérité du projet de loi devant nous.

Les partis politiques sont essentiels au processus démocratique. Nous le savons tous dans cette Chambre. Nous savons tous qu’ils ont besoin d'argent pour fonctionner. L'argent aussi est essentiel en démocratie.

Le principe du financement public est établi depuis très longtemps au Canada. Sous la forme de crédits d'impôt pour les contributions individuelles aux partis politiques. Et du remboursement aux partis et aux candidats d'un pourcentage de leurs dépenses électorales.

Afin de compenser la perte des contributions d'entreprises et de syndicats, ce projet de loi augmente sensiblement le financement public du processus politique.

Le crédit d'impôt maximum pour les contributions individuelles est porté de 200 $ à 400 $.

Le pourcentage des dépenses électorales des partis nationaux remboursé passera de 22,5 % à 50 %.

Les candidats eux-mêmes reçoivent le remboursement de la moitié de leurs dépenses s’ils obtiennent plus de 15 % des voix. Le projet de loi ramène le seuil à 10 %.

Chaque parti politique recevra 1,50 $ par année par vote reçu aux dernières élections générales.

La hausse du crédit d’impôt individuel, l’augmentation du remboursement et la subvention directe aux partis compenseront la perte des contributions d’entreprises et de syndicats. Elles seront remplacées par un financement public – le seul moyen de mettre fin à la perception que le pouvoir de l’argent influence les décisions gouvernementales.

Et tout cela coûtera environ 65 cents par Canadien en dehors des années électorales. Et un peu plus d’un dollar par Canadien les années d’élection.

C’est un faible prix à payer pour aider à améliorer notre démocratie. Et c’est un très bon investissement de fonds publics.

Je sais que certains ont laissé entendre que la subvention aux partis politiques signifie que l’argent d’un contribuable pourrait servir à financer un parti avec lequel il n’est pas d’accord. En réalité, le 1,50 $ va au parti pour lequel cette personne a voté à l’élection précédente.

Et si quelqu’un change d’avis après une élection, si une personne se rend compte qu’elle a commis une erreur en votant, par exemple, pour l’Alliance canadienne, le 1,50 $ par année ne représente que 6 $ au total sur quatre ans.

Cette personne peut compenser pour son erreur en versant une contribution personnelle d’au plus 10 000 $ par année au parti de son choix. Et cette personne bénéficiera de l’augmentation du crédit d’impôt maximum. De sorte que l’argument voulant que l’argent du contribuable serve à appuyer un parti avec lequel il n’est pas d’accord ne résiste pas à l’examen.

Grâce à ce projet de loi, les élections seront financées à hauteur de près de 90 % par l’État. Le Canada deviendra ainsi un modèle de démocratie dont nous pourrons tous être fiers.

Je sais que certains députés se préoccupent des répercussions de ce projet de loi sur le fonctionnement interne des partis. Il faut comprendre que ces questions ne sont pas de nature législative. Il appartient aux partis de les régler. Il n’y a pas lieu de recourir à la législation pour réglementer le fonctionnement interne des partis politiques.

Monsieur le Président, ce projet de loi est long. Il contient de nombreux articles. Il est possible que le libellé de certaines dispositions puisse avoir des conséquences non voulues. Je souhaiterais alors que le Comité propose les amendements appropriés.

Par contre, les principes de base du projet de loi sont fondamentaux aux yeux du gouvernement. J’entends par cela la divulgation et l’imputabilité, l’interdiction touchant les contributions des entreprises et des syndicats, l’exception de 1000 $ mise à part, le plafonnement des contributions individuelles et le régime de financement public.

En contribuant à la caisse électorale des partis politiques, les entreprises et les syndicats faisaient preuve de leur sens des responsabilités sociales. Je les en remercie, et tous les partis politiques les remercient. J’espère que dans l’avenir, ils prendront l’argent qu’ils auraient versé aux partis politiques et qu’ils le donneront plutôt aux oeuvres de bienfaisance et aux universités.

 

Monsieur le Président, la démocratie est une réalité vivante. L’histoire du monde nous apprend qu’elle est également fragile. Il faut l’entourer de soins, l’encourager, la promouvoir et la défendre.

Je sais qu’il n’existe aucune « démocratie parfaite » selon les philosophes. C’est vrai bien sûr. Toute société est une oeuvre en devenir. Mais le critère véritable d’après lequel on doit juger une démocratie vivante comme le Canada, c’est la mesure dans laquelle nos institutions cherchent à être à la hauteur de nos idéaux. Car c’est en continuant de nous mesurer à nos idéaux que nous réaffirmons leur pouvoir de nous inspirer.

Je considère que ce projet de loi répond à ce critère, Monsieur le Président.

C’est pourquoi ce projet de loi vise à rendre le Canada plus ouvert. À supprimer les obstacles qui entravent les femmes et les membres des minorités religieuses ou ethniques. Les pauvres et les défavorisés. Et en définitive à veiller à ce que leur voix puisse se faire entendre aussi fort que celle de tous les autres.

Monsieur le Président, j’approche du quarantième anniversaire de ma première élection à cette Chambre en 1963. J’ai eu l’honneur d’être élu député à 12 reprises. Et je sais pouvoir parler au nom de chacun et chacune des députés ici présents quand j’affirme qu’à chaque fois, j’ai été rempli d’un sentiment de révérence pour le système démocratique.

Ce projet de loi ne répudie nullement le système qui nous a permis à moi et à tant d’autres de servir ce grand pays. Au contraire, il y rend hommage, en tentant d’y insuffler une nouvelle énergie, une nouvelle vigueur, une nouvelle pertinence, en léguant à la prochaine génération une tradition démocratique ni fatiguée, ni usée, mais rajeunie et bien vivante. Sûrement pas parfaite, mais meilleure, et digne de son nom – le plus beau, le plus fragile, le plus précieux dans toutes les langues : la DÉMOCRATIE.

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