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07/04/1997

Rapport de la Commission des revendications des Indiens à la suite de l'Enquête sur la revendication de droits fonciers issus de traités par une bande de la Saskatchewan

Ottawa (7 avril 1997) - La Commission des revendications des Indiens (la CRI ou la Commission) a récemment publié son rapport sur la revendication, par la Nation crie de Lucky Man, de droits fonciers issus des traités. Lorsqu'une Première nation fait ce genre de revendication, elle prétend en fait ne pas avoir reçu toutes les terres auxquelles elle avait droit en vertu d'un traité conclu avec le Canada. Les revendications de droits fonciers issus des traités peuvent être assez compliquées, nécessitant l'examen d'un grand nombre de questions de fait et de droit.

Dans la cas présent, il a été demandé à la Commission de faire une enquête pour déterminer si le gouvernement du Canada a satisfait à ses obligations en constituant une réserve suffisamment grande pour la Nation crie de Lucky Man. La revendication de cette nation découle d'événements qui remontent à la fin du 18e siècle. Lucky Man était un sous-chef sous les ordres du légendaire Big Bear, qui comptait parmi les chefs cris les plus puissants et qui était bien connu pour la fermeté de ses prises de position contre les atteintes du gouvernement aux droits et à l'autonomie autochtones. En 1879, lorsque Big Bear a refusé de signer le traité 6, vingt familles, affamées et désespérant d'obtenir des annuités de traité, se sont séparées de la bande de Big Bear et ont donné leur adhésion au traité 6, avec Lucky Man comme nouveau chef.

Comme ces gens étaient principalement des chasseurs de bisons des prairies, ils n'ont pas immédiatement choisi des réserves pour s'y établir, mais ont plutôt cherché à conserver leurmode de vie traditionnel en chassant le bison dans le sud-ouest de la Saskatchewan et aux États-Unis. À cette époque, toutefois, les troupeaux de bisons étaient en voie de disparition, et les agents du gouvernement distribuaient des vivres aux Indiens pour les empêcher de mourir de faim. Le gouvernement différait parfois la remise des vivres pour inciter les Indiens à choisir des réserves et à s'y installer. Dans ces circonstances, Lucky Man indiqua, en 1880, qu'il était intéressé à obtenir une réserve dans le nord, dans les limites prévues au traité 6, près de Battleford, en Saskatchewan. En 1882, cependant, il fit savoir qu'il préférerait un secteur avoisinant les collines du Cyprès, dans les limites du traité 4. Son groupe et lui ont tout de même continué à chasser, et ne se sont rendus au nord de Battleford qu'en 1883, escortés par la Police à cheval du Nord-Ouest.

En 1884, la bande de Lucky Man s'est partagée en deux groupes. Une partie de la bande s'est installée sur une réserve avec la bande de Little Pine, bien que, à la demande de Little Pine, la réserve n'ait pas été arpentée cette année-là. Un autre groupe, dont Lucky Man lui-même, a continué à suivre Big Bear. Ce dernier groupe était présent pendant la Rébellion du Nord-Ouest, en 1885, quand un certain nombre de colons blancs et de membres du clergé ont été tués lors du massacre du lac Frog. Dans les remous provoqués par la Rébellion, Lucky Man s'est enfui auxÉtats-Unis, et la réserve indienne (RI) 116 n'a pas été arpentée avant 1887, pour les bandes de Little Pine et de Lucky Man. Certains membres de la bande de Lucky Man habitent encore aujourd'hui dans la RI 116, même si, selon les dispositions de l'Entente de règlement de 1989, il a été constitué une nouvelle réserve accordant à la Première nation suffisamment de terres pour les besoins de ses habitants, dont le nombre a été établi à 60 en 1980.

Pour juger de la validité de la revendication de la Nation crie de Lucky Man concernant des droits fonciers issus des traités, la Commission devait considérer une question fondamentale : quelle date convient-il de retenir pour le recensement de la population de la Première nation aux fins des droits fonciers issus des traités? La Première nation proposait trois dates possibles, soit 1880, 1882 et 1883, pour lesquelles le nombres de bénéficiaires variait entre 366 et 872. Le Canada, pour sa part, proposait deux dates : 1887 et 1980. En 1887, la population de la Première nation s'élevait à 62 personnes, et en 1980, elle s'élevait à 60.

Suivant le traité 6, le Canada doit assigner les réserves à chaque bande après avoir consulté les membres des bandes «quant au site que l'on pourra trouver le plus convenable pour eux». La Commission a conclu que cette consultation prévue par le traité ne consiste pas simplement à demander à la bande d'indiquer de façon générale une région dans laquelle elle souhaiterait se voir assigner une réserve. Il faut plutôt que le Canada et la bande arrivent à un accord de volontés ou à un consensus quant aux terres particulières à réserver à l'usage et au profit de la bande. Le fait que le Canada ait procédé à un arpentage et le fait que la bande ait accepté la réserve constituent des preuves irréfutables que les deux parties se sont mises d'accord pour que les terres arpentées soient traitées comme une réserve indienne aux fins du traité. La Commission en a donc déduit comme principe général que l'interprétation la plus raisonnable du traité 6 était la suivante : pour une bande indienne, les droits fonciers issus des traités devraient être fondés sur la population de la bande au moment du premier arpentage, à moins que des circonstances particulières ne donnent lieu, par ailleurs, à une injustice évidente.

Dans le cas présent, la Commission a conclu que la date à retenir pour le recensement de la population aux fins des droits fonciers issus des traités était celle du premier arpentage de la RI 116, c'est-à-dire 1887. La Commission a estimé qu'en 1880, en 1882 et en 1883, le Canada et la bande n'étaient pas arrivés à l'accord de volontés ou au consensus requis sur le choix d'un site particulier. En 1884, la bande a demandé que l'arpentage soit remis à plus tard, puis la rébellion de 1885 et ses conséquences ont provoqué un nouveau report de l'affaire. Pour ces raisons, la Commission a déterminé que s'il a fallu attendre en 1887 avant que le Canada procède à l'arpentage de la RI 116 et à la constitution d'une réserve pour la bande, il n'y a tout de même pas eu d'injustice manifeste, dans les circonstances.

La Commission recommande que les parties procèdent à d'autres recherches pour déterminer la population exacte de la bande en 1887 et ses droits fonciers selon la formule du traité 6 prévoyant 128 acres par personne. Dans le cadre de cette enquête, la Commission n'avait pas à quantifier les droits fonciers non respectés de Lucky Man, le cas échéant. Si les deux parties n'arrivent pas à négocier un règlement de ces droits non respectés, la Première nation aura encore la possibilité de demander une nouvelle enquête sur cet aspect de la revendication.

La CRI a été créée en 1991 pour faire enquête, à la demande des Premières Nations, sur les revendications particulières rejetées par le gouvernement fédéral ou sur les revendications particulières acceptées par le gouvernement fédéral mais dont les critères d’indemnisation retenus sont contestés par les Premières Nations touchées. En outre, la CRI offre des services de médiation, après entente des parties, à toute étape du processus de règlement des revendications.

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