Thérapie inotrope par pulsations dans les cas d'insuffisance cardiaque chronique

Source: Adamopoulos S, Piepoli M, Qiang F et al : Effects of pulsed Beta-stimulant therapy on Beta-adrenoceptors and chronotropic responsiveness in chronic heart failure. Lancet 1995; 345 : 344-349

Sommaire : Journal de l'Association médicale canadienne 1996; 154: 211


La baisse de la capacité d'augmenter la fréquence cardiaque pour réagir à l'exercice chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque chronique est liée à la rétrorégulation des récepteurs Beta-adrénergiques. Cette rétrorégulation peut être causée par une hyperactivation persistante du système sympathique qui entraîne la tolérance à la Beta-stimulation. Des chercheurs pensent qu'une stimulation par pulsations plutôt que continue pourrait améliorer le rendement cardiaque et réduire au minimum la rétrorégulation chez les patients qui ne peuvent se livrer à des activités de conditionnement physique. Des essais de thérapie de longue durée aux Beta-stimulants ont toutefois connu peu de succès, surtout à cause de la tolérance aux médicaments et de la fréquence accrue d'arythmie ventriculaire. Des chercheurs en Angleterre et en Italie ont posé comme hypothèse que les périodes de perfusion des médicaments utilisés au cours d'études sur des sujets humains étaient trop longues et ont utilisé une thérapie inotrope par pulsations pour imiter la stimulation produite par de brèves périodes d'exercice.

Dix patients atteints d'insuffisance cardiaque chronique ont été jumelés selon l'âge et la gravité de la maladie à 10 sujets témoins. Après 2 à 4 semaines d'évaluation, les patients du groupe de traitement ont reçu des perfusions intraveineuses de dobutamine d'une durée de 30 minutes, 4 jours par semaine pendant 3 semaines. La dose a été titrée de façon à maintenir la fréquence cardiaque du patient à un niveau de 70 % à 80 % du maximum du niveau de référence au cours de l'exercice. Le premier et les deux derniers jours de la perfusion, on a augmenté la dose pour que le coeur atteigne sa fréquence de pointe. On a évalué les membres du groupe de traitement avant et après les 3 semaines de perfusion et 6 semaines plus tard. Les sujets témoins ont été évalués avant et après 6 semaines d'activité physique normale.

Après 3 semaines de traitement, les patients du groupe de traitement ont vu leur tolérance à l'exercice augmenter de 25 % (p < 0,001) et leur absorption d'oxygène de pointe augmenter de 10 % (p < 0,05). Leur fréquence cardiaque de base et au cours de l'infusion submaximale de dobutamine a diminué et l'écart entre la fréquence cardiaque de base et la fréquence de pointe s'est creusé. La concentration de noradrénaline plasmatique au repos a diminué chez les sujets du groupe de traitement, mais la clairance de la noradrénaline n'a pas changé. Les résultats relatifs à la variabilité de la fréquence cardiaque ont indiqué aussi une atténuation des pulsions sympathiques. Une augmentation importante (p < 0,05) de la densité des Beta-adrénorécepteurs lymphocytaires après la thérapie a indiqué une augmentation du nombre de récepteurs. Une augmentation importante (p < 0,05) du débit cardiaque au cours de la stimulation submaximale, attribuable principalement à une augmentation du débit systolique, a été accompagnée d'une diminution de la résistance périphérique. Les patients du groupe de traitement ont affirmé que leurs symptômes s'étaient améliorés pour la peine. Six semaines après la période d'intervention, la tolérance à l'exercice et la faculté de réponse chronotrope chez ces patients avaient diminué mais demeuraient quand même très supérieures au niveau de référence. Les sujets témoins n'ont montré aucun changement au niveau de la tolérance à l'exercice ou de la fonction autonome.

Les chercheurs ont conclu que de brèves perfusions intermittentes de dobutamine peuvent améliorer les symptômes chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque chronique tout en évitant la rétrorégulation des Beta-récepteurs et que l'absence d'arythmie ventriculaire aurait alors été attribuable à un rétablissement de l'équilibre autonome. La thérapie inotrope par pulsations peut se révéler particulièrement utile pour traiter l'insuffisance cardiaque chronique chez les patients incapables de se livrer à des activités de conditionnement physique.


| JAMC le 15 janv. 1996 (vol 154, no 2) |
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