CMAJ 1997;156:1367
© 1997 Association médicale canadienne
Nous félicitons le ministre de la Santé David Dingwall, ses collègues parlementaires et le Sénat du Canada d'avoir fait passer la santé des Canadiens avant les intérêts financiers de l'industrie du tabac. Le 16 avr., le Sénat a adopté par 75 voix contre 1, sans amendement, le projet de loi C-71, Loi réglementant les produits du tabac. La loi interdit la plupart des activités de pu-blicité et restreint la promotion que font les fabricants de produits du tabac à l'occasion d'événements sportifs et culturels. Elle donne aussi au gouvernement fédéral le pouvoir de réglementer le contenu des produits du tabac et oblige les acheteurs à présenter sur demande une carte d'identité avec photo. Le temps n'est pas encore venu toutefois où nous pourrons relâcher notre vigilance : les magouilles et le lobbying de coulisse reprendront de plus belle pour tenter maintenant de conclure des marchés avec le ministre de la Santé. L'escarmouche s'est conclue en faveur du bien pour l'instant, mais le mal rôde toujours.
Dans ce numéro, nous analysons les répercussions du tabac et d'autres substances sur les jeunes du Canada. Christine Poulin et David Elliott ont sondé plus de 3000 élèves du premier et du deuxième cycles du secondaire en Nouvelle-Écosse en 1991 et en 1996. Leur sondage a révélé que la consommation de cigarettes, d'hallucinogènes et de stimulants a augmenté considérablement (page 1387). Plus de la moitié des élèves avaient consommé de l'alcool, un tiers d'entre eux avaient fumé des cigarettes et un autre tiers, du cannabis au cours des 12 mois qui ont précédé le sondage de 1996. Les élèves ont aussi avoué avoir consommé du LSD (12 %) et d'autres drogues dures au cours de la même période et plus du cinquième d'entre eux avaient consommé de l'alcool, du tabac et du cannabis.
Pour Poulin et Elliott, la signification réelle de ces résultats, c'est le point où ils placent les répondants dans un continuum de risque. Par exemple, un faible pourcentage seulement des élèves qui buvaient ont connu des problèmes multiples par la suite. Des stratégies différentes d'éducation sur les drogues s'imposent si l'on veut répondre à des catégories différentes de risques.
Même si l'alcool, le tabac et le cannabis sont très répandus dans notre société, nous prêchons l'abstinence comme norme lorsqu'il s'agit d'éduquer les jeunes au sujet des risques posés par la consommation de drogues. Il n'est pas étonnant que les risées et l'incrédulité accueillent souvent nos messages. En fait, comme le signale Patricia Erickson (page 1397), il se peut que les programmes d'éducation qui ne visent qu'à prévenir la consommation ne servent qu'à pointer les utilisateurs du doigt et à les dissuader de demander de l'aide.
Des programmes de réduction des préjudices ont été efficaces auprès des consommateurs de drogues injectées. Ces programmes remplacent le message de l'abstinence par des mesures concrètes d'aide qui prennent la forme d'échanges d'aiguilles, de vaccination contre l'hépatite B, de dépistage précoce de l'infection par le VIH, etc. Ils mettent aussi les utilisateurs en contact avec des médecins et des infirmières, ce qui permet de commencer la réadaptation. Comme le suggèrent Poulin, Elliott et Erickson, le moment est venu d'appliquer les principes de la réduction des préjudices dans les programmes scolaires d'éducation sur les drogues. Face aux adolescents, l'honnêteté est la vertu primordiale et il faut viser avant tout à aider vraiment. Les belles paroles ne donnent tout simplement pas de résultat.
Même si la prestation des soins de santé incombe en grande partie aux provinces, la question occupera l'avant-scène au cours des élections fédérales qui s'annoncent. Charlotte Gray (page 1433) présente un compte rendu sur les questions de soins de santé que nos partis fédéraux vont débattre. Les médecins doivent intervenir dans le débat et Mme Gray définit bien les enjeux. -- JH
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