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CMAJ 1997;156(4):471

© 1997 Association médicale canadienne


Muscle miracle dont la grosseur atteint à peine celle du poing, le coeur inspire depuis des siècles les rêveries des poètes et, depuis la découverte de la circulation sanguine par Harvey, les recherches des scientifiques. Au cours des dernières décennies, les sciences ont réalisé des progrès révolutionnaires. Mon père est mort subitement il y a presque 30 ans : il avait 47 ans seulement et j'en étais à ma dernière année de faculté de médecine. Souffrant d'angine caractéristique, il avait reçu quelques cachets de nitroglycérine quelques mois plus tôt. C'est avec un pincement de coeur que je me rends compte comment il aurait été traité aujourd'hui. Que personne ne nie que la pratique de la médecine joue un rôle dans l'espérance de vie.

C'est dans le domaine de la chirurgie que les progrès spectaculaires ont été le plus visibles. Le University of Alberta Hospital d'Edmonton a célébré récemment le legs du Dr John Callaghan qui, en 1956, a réalisé la première intervention chirurgicale à coeur ouvert réussie au Canada (page 549). À l'époque, l'appareil coeur­poumon «ressemblait à un ramassis de restes oubliés sur les tablettes» de la quincaillerie locale. L'Institut de cardiologie de l'Université d'Ottawa fait aujourd'hui l'essai d'un nouveau coeur artificiel (page 553). La juxtaposition de ces 2 dispositifs donne une idée de l'ampleur des progrès réalisés en si peu de temps.

La prévention et les soins actifs ont aussi fait des progrès. Pour ce qui est de la prévention, un personnage de Mark Twain, Pudd'nhead Wilson, a assez bien résumé la situation en disant que «la seule façon de se garder en santé est de manger ce qu'on n'aime pas, de boire ce qui ne vous plaît pas et faire ce qui vous assomme»[1]. Dans le présent numéro (page 527), William Dafoe et Patricia Huston passent en revue les programmes de réadaptation cardiaque et démontrent que l'exercice et la modification des facteurs de risque peuvent avoir une incidence énorme sur la survie à long terme. Dans le secteur des soins critiques, de nombreuses interventions peuvent faire une différence. Bill Williams (page 509) souligne qu'il est vital de réduire le temps écoulé entre l'apparition d'un infarctus aigu du myocarde et l'administration d'agents thrombolytiques. L'atteinte ischémique du tissu du myocarde est réversible entièrement au cours des 20 premières minutes et en partie au cours des 3 à 6 premières heures. Jafna Cox et ses collaborateurs (page 497) présentent des données probantes convaincantes pour démon-trer que dans les hôpitaux au Canada, la période écoulée entre l'arrivée du patient et l'administration d'agents thrombolytiques est d'une longueur inacceptable.

Mon père aurait-il survécu s'il était tombé malade aujourd'hui? Il aurait eu certainement une meilleure chance -- à la fois de prévenir sa maladie et de la faire traiter avec succès. Nous entendons souvent dire que la médecine fait peu de différence. C'est entièrement faux. -- JH

Référence

  1. Twain M. Nouveau calendrier de Pudd'nhead Wilson. Dans : Le tour du monde d'un humoriste, 1897.


| JAMC le 15 février 1997 (vol 156, no 4) |
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