Cyclosporiase : un autre agent pathogène nouveau
CMAJ 1997;157:296
© 1997 Deborah Jones
La cyclosporiase est causée par la présence, chez les êtres humains, de protozoaires coccidiens du genre Cyclospora. La maladie a été décrite pour la première fois en 1979, en Papouasie Nouvelle-Guinée1 et l'agent pathogène a été identifié en 19932. Transmise aux êtres humains par les aliments ou l'eau, la maladie est caractérisée par des selles aqueuses fréquentes, des symptômes pseudo-grippaux et d'autres troubles gastro-intestinaux comme la flatulence et l'éructation. L'anorexie et la perte de poids sont aussi fréquentes. S'ils ne sont pas traités, les symptômes peuvent durer de quelques jours à 1 mois ou plus et peuvent provoquer des rechutes.
Avant 1996, la plupart des cas reconnus en Amérique du Nord étaient associés à un voyage à l'étranger3. Au printemps de 1996, on a toutefois enregistré une flambée dans 20 États des États-Unis, dans le District de Columbia, en Ontario et au Québec3. À la suite d'une enquête internationale, il a été établi que des framboises importées du Guatemala avaient causé cette flambée. On a enregistré une autre flambée générale cette année. Depuis avril 1997, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis et Santé Canada ont reçu des rapports sur 20 grappes de cas dans 8 États et sur 1 grappe en Ontario qui ont représenté quelque 140 cas confirmés en laboratoire et 370 cas définis cliniquement. On a établi un lien entre ces grappes et des événements comme des réceptions ou des banquets qui ont eu lieu entre le 19 mars et le 25 mai. En outre, plus de 70 cas en apparence sporadiques et confirmés en laboratoire (non liés à des événements en particulier) ont été signalés dans 8 États des États-Unis, en Ontario et au Québec4.
La consommation de framboises fraîches semble être à l'origine de la maladie dans 7 des 15 cas analysés jusqu'à maintenant et semble avoir un lien (non significatif) avec la maladie dans 6 autres cas. Dans 2 événements reliés à la consommation de repas dans des restaurants, on a établi un lien entre la maladie et le mesclun, salade de légumes verts4.
Les framboises en cause dans la flambée de cette année provenaient encore du Guatemala. Depuis le 28 mai, les envois de framboises du Guatemala ont été interrompus aux États-Unis et, par conséquent, au Canada, car le produit importé du Guatemala passe par la Floride. Comme le fruit ne se garde pas longtemps, il est peu probable qu'il reste dans les magasins des framboises fraîches du Guatemala. Le lavage de la laitue et des fruits frais peut réduire le risque de transmission du parasite, mais les framboises sont difficiles à laver à fond à cause de leur surface à sillons et de leur fragilité. La congélation et la pasteurisation commerciales désactivent les oocystes Cyclospora. Les framboises congelées sont probablement sans danger4.
Comme le signale Osterholm5, la mondialisation de l'approvisionnement en aliments signifie qu'il n'est pas nécessaire de quitter son pays pour être victime de maladies gastro-intestinales causées par un agent pathogène inusité ou nouveau. Il est possible de vivre les joies de la diarrhée du voyageur simplement en se rendant au supermarché local ou chez le vendeur de fruits et légumes. Il est difficile de contrôler les pratiques d'irrigation, d'engraissement et de manipulation des fournisseurs d'aliments de l'étranger. Le Cyclospora et d'autres nouveaux parasites continueront d'arriver au Canada. L'utilisation de rayonnements ionisants pour pasteuriser les aliments réduira de façon spectaculaire le risque de maladies causées par la contamination bactérienne et parasitaire des aliments.
Tant que l'industrie de l'alimentation n'adoptera pas de telles pratiques, les médecins devront être à l'affût de ce nouveau parasite. Les patients qui ont une diarrhée et des symptômes gastro-intestinaux persistants, dont les symptômes gastro-intestinaux connaissent des phases de rémission et de rechute, qui sont fatigués et qui perdent du poids devraient être soumis à un examen de dépistage de ce micro-organisme. Comme il se peut que les laboratoires ne recherchent pas systématiquement la présence de Cyclospora dans les spécimens de selles qui leur sont soumis pour des tests de dépistage «oeufs et parasites», les médecins devraient indiquer leurs soupçons cliniques sur la commande. Dans la plupart des cas, la maladie réagit bien à l'administration de triméthoprimesulfaméthoxazole 2 fois par jour pendant 7 jours5.
Les fournisseurs de soins de santé et les patients peuvent trouver d'autres renseignements sur le site Web du CDC à l'adresse www.cdc.gov/ncidod/diseases/cyclospo/cyclomen.htm
Denise H. Werker, MD, MHSc
Directrice associée
Programme de formation en épidémiologie d'intervention
Laboratoire de lutte contre la maladie
Ottawa (Ont.)
Références
- Soave R. Cyclospora: and overview. Clin Infect Dis 1996;23:429-37.
- Ortega YR, Sterling CR, Gilman RH, Cama VA, Diaz F. Cyclospora species: a new protozoan pathogen of humans. N Engl J Med 1993;328:1308-12.
- Herwaldt BL, Ackers ML, and the Cyclospora Working Group. An outbreak in 1996 of cyclosporiasis associated with imported raspberries. N Engl J Med 1997;336:1548-56.
- Update: outbreaks of cyclosporiasis -- United States and Canada, 1997. MMWR 1997;46:521-3.
- Osterholm MT. Cyclosporiasis and raspberries: lessons for the future [editorial]. N Engl J Med 1997;336:1597-9.
- Hoge CW, Shlim DR, Ghimire M, Rabold JG, Pandey P, Walch A, et al. Placebo-controlled trial of co-trimoxazole for cyclospora infections among travellers and foreign residents in Nepal. Lancet 1995;345:691-3.
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