-Madame la Présidente, en ma qualité de député représentant une partie du Canada, je suis heureux et fier d'intervenir à la Chambre ce matin pour proposer la deuxième lecture du projet de loi C-220 que j'ai élaboré après avoir consulté des milliers de Canadiens.
Ce projet de loi vise la création d'une commission sur les prix de l'énergie qui réglementerait le prix de vente de l'essence en gros et au détail. La réglementation des prix préviendra les augmentations abusives qui font grimper le coût de la vie et nuisent aux activités commerciales.
Le projet de loi favorisera une certaine uniformité raisonnable des prix d'une province à l'autre, compte tenu des coûts de production et de distribution. La réglementation aura aussi pour effet de diminuer le risque de collusion dans la fixation des prix et d'empêcher les fournisseurs principaux de fixer des prix excessifs.
En outre, le projet de loi associe le contrôle des prix à la concurrence. Les enquêtes sur les infractions présumées à la Loi sur la concurrence en matière de fixation du prix de l'essence seront déférées par le Tribunal de la concurrence à la commission, qui fera enquête et présentera un rapport au tribunal avant que celui-ci rende un jugement ou une ordonnance sur l'affaire.
Ce projet de loi est extrêmement opportun et important. Je demande à tous les députés de l'appuyer de toutes les façons possibles parce qu'il concerne la détermination du prix de l'essence et la consommation d'énergie par les Canadiens. Que vous soyez un agriculteur, un homme d'affaires ou un consommateur, l'énergie et l'essence sont des éléments fondamentaux de notre bien-être économique.
Notre climat est très froid. Nous avons besoin de plus d'énergie pour nos industries et pour le transport de nos biens et services d'une région à l'autre du pays. Le transport des marchandises demande de l'énergie; de l'essence, du pétrole.
C'est un élément clé de notre économie. Néanmoins, le gouvernement n'a pris aucune initiative pour que les consommateurs, les agriculteurs et les gens d'affaires soient traités équitablement par les compagnies pétrolières, et les parlementaires n'ont nullement exprimé le souhait de voir une telle situation se réaliser.
Bien au contraire. Les parlementaires et le gouvernement ont étudié le dossier et déclaré qu'il n'y avait que cinq compagnies pétrolières au Canada, lesquelles essentiellement fixent le prix de l'essence, et qu'on devrait leur laisser faire ce qu'elles voulaient. Il est plus important de réglementer tous les autres aspects de notre vie, même si ce sont des choses qui touchent, non pas l'ensemble du pays ou l'économie en général, mais plutôt 0,1 p. 100 d'une organisation donnée ou de ceci ou de cela.
Je demande aux parlementaires et au gouvernement canadien de penser à l'incidence du prix de l'essence au Canada, et plus particulièrement à son évolution au cours des derniers 30 ou 35 jours. Dans la plupart des régions, le prix de l'essence a augmenté de 10 centimes le litre, ce qui, si on exclut les taxes, représente pour les compagnies pétrolières une augmentation de 30 p. 100 de leurs revenus nets.
Il y a eu une augmentation de 30 p. 100 sur 30 jours, et qu'a fait le gouvernement? Il a choisi de l'ignorer. Il a laissé tomber les Canadiens. Il a fermé les yeux sur cette tentative notoire de la part des compagnies pétrolières d'escroquer les consommateurs canadiens en ce qui concerne une denrée absolument nécessaire, un élément de base de notre économie, en fait, le moteur de notre économie. Le fait que ce soit une ressource non renouvelable ne l'a même pas fait sourciller.
Un seul de ces dix centimes d'augmentation représente 375 millions de dollars que les compagnies pétrolières vont chercher dans la poche des Canadiens. Si cette augmentation de 10 centimes le litre est maintenue au cours de l'année prochaine, c'est presque 4 milliards de dollars qu'elles iront chercher.
Et comment cela se fait-il? Les compagnies pétrolières disent que le prix du brut a augmenté, passant en 30 jours de 18 $ US le baril à 23 $ US. Il y a du vrai là-dedans. Le prix a augmenté. Toutefois, remettons les choses dans leur contexte et voyons comment a évolué le prix quotidien moyen au Canada.
Depuis 1990, le prix quotidien moyen du brut diminue d'une année sur l'autre. En 1992, il était d'environ 20,58 $ US le baril. En 1996, jusqu'à la mi-avril, il n'était pas de 20,58 $, mais 50 centimes de moins le baril. Et pourtant le prix de l'essence a augmenté. Mes
renseignements sur le prix quotidien moyen de l'essence me viennent d'Énergie et Mines.
Cette année le prix du baril est inférieur de 50 centimes à ce qu'il était il y a quatre ans, et depuis cette époque, il a même été plus bas à certains moments. Pourtant, les sociétés pétrolières prétendent que le prix du brut a augmenté et que, par suite, elles sont obligées de remonter leurs prix et d'exploiter les Canadiens vu que le gouvernement refuse de répondre de quelque façon que ce soit.
Ensuite, elles donnent comme excuse qu'elles ne font pas beaucoup de bénéfices. Voyons ce qu'il en est. En 1994, les bénéfices de la Compagnie pétrolière impériale ont augmenté de 29 p. 100 par rapport à 1993. Ceux de Shell, de 43 p. 100. En 1995, les bénéfices de la Compagnie pétrolière impériale ont augmenté de 43 p. 100 par rapport à l'année précédente, qui était une de ses années records. Shell, qui avait eu une année record en 1994, a vu ses bénéfices augmenter de 63 p. 100 en 1995. En dépit de cela, la Compagnie impériale a 452 employés de moins et Shell, 471 employés de moins.
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Au cours du premier trimestre de cette année, avant que ne se répercutent les augmentations de prix du baril de brut, la Compagnie pétrolière impériale affichait une augmentation des bénéfices de 300 p. 100 par rapport au premier trimestre de l'année dernière, qui était l'année record de la compagnie.
Lorsqu'on leur dit cela, elles répondent: «C'est parce que nous avons eu une remise d'impôts.» Lorsqu'on prend en considération la remise d'impôts, payée par les contribuables canadiens, on constate que l'augmentation des bénéfices est encore de 15 p. 100. Par conséquent leur explication ne tient pas.
Des employés de la Compagnie pétrolière impériale m'ont dit que, en dépit des profits records, ils ont été convoqués dans les bureaux de direction de tout le pays pour se faire dire que, dans les prochains 18 mois, la compagnie allait se débarrasser d'encore 10 p. 100 de ses employés, non pas simplement par attrition, c'est-à-dire démissions et départs en retraite, mais par l'élimination des 10 p. 100 les moins productifs parmi les employés de la compagnie.
Quel genre de compagnie est-ce cela? Quel réponse le gouvernement va-t-il donner aux sociétés pétrolières qui nous exploitent à la pompe, qui font des profits records et qui licencient à tour de bras, autre que: Nous sommes tous dans le même bateau? C'est notre pays. Notre économie est en difficulté. Pourquoi ne feraient-elles pas leur part en investissant une partie de leur argent dans les salaires de leurs employés ou dans leur maintien au travail? Pourquoi ne réinvestiraient-elles pas une partie de cet argent dans des projets d'immobilisation ou d'exploration dans les collectivités où les profits sont réalisés. Ensuite, elles pourraient partager le reste des bénéfices avec qui bon leur semble. Cela nous serait égal.
Que ces sociétés fassent preuve de responsabilité. Qui dirige dans ce pays? L'autre raison pour laquelle on parle de l'augmentation du prix de l'essence, c'est qu'une nouvelle hausse est annoncée chaque jour. Il faut nous adapter aux fluctuations du prix de l'essence. Durant la guerre du Golfe, en 1990, on parlait d'une réserve de 90 jours. Oui, on pouvait compter sur une réserve de 90 jours avant que les prix augmentent. Or, la récente augmentation a été l'affaire de 90 heures, pas 90 jours: une véritable tentative d'escroquerie!
Et qu'advient-il des milliers de produits tirés d'un baril de pétrole? Car un baril de pétrole ne donne pas que de l'essence. On peut en faire 10 000 produits différents. La moitié des choses que l'on trouve à la Chambre des communes sont des produits dérivés du pétrole brut. Qu'il s'agisse de vêtements, de verres en plastique, de caméras de télévision, de magnétoscopes, de refrigérateurs ou de cuisinières, ce sont tous des dérivés du pétrole.
Les prix de ces produits ne fluctuent pas toutes les minutes ni d'une région à l'autre. Il faut responsabiliser les sociétés pétrolières et leur demander de justifier leurs augmentations devant une commission. Je suis moi-même un entrepreneur. Je n'ai rien contre le fait que les entreprises réalisent des bénéfices tant qu'elles n'exploitent pas les gens, tant qu'elles peuvent justifier les prix qu'elles pratiquent. Le le problème de fond n'est pas là. Ces sociétés ne justifient pas les hausses qu'elles décrètent.
Elles se lancent dans des comparaisons. Elles donnent pour toute réponse que le prix de l'essence est beaucoup plus élevé dans d'autres pays qu'au Canada. Elles fournissent une liste des pays industrialisés avec les prix de l'essence qui y sont pratiqués. Dans l'ensemble des pays industrialisés, le prix de l'essence y est supérieur au nôtre partout sauf aux États-Unis.
J'ai demandé à l'Institut des producteurs de pétrole et aux sociétés pétrolières combien de ces pays produisaient du pétrole. Le seul producteur net de pétrole sur la liste est le Canada. Pourtant, à une exception près, nos prix de l'essence sont les plus bas.
J'ai demandé que l'on me fournisse une comparaison entre les pays qui sont producteurs de pétrole. On m'a répondu qu'on n'avait pas de liste de ce genre mais qu'on allait se renseigner pour moi. Ce ne sera pas nécessaire, car nous avons déjà cette liste. Si on enlève les taxes, tous les pays producteurs du monde, qu'il s'agisse du Mexique, du Venezuela et des pays du Moyen-Orient, vendent leur essence à des prix bien inférieurs à ceux du Canada. Notre essence est la plus chère de tous les producteurs nets de pétrole au monde. Et pourquoi en est-il ainsi? C'est parce que nous n'obligeons pas les sociétés pétrolières à justifier leurs hausses de prix.
La réponse la plus ridicule que j'aie jamais entendue de la part des sociétés pétrolières, c'est que les prix étaient à la hausse parce que l'Iraq peut inonder le marché. Il n'est pas nécessaire d'être un économiste patenté pour saisir le ridicule d'un tel argument. Si une plus grande production est offerte sur le marché, si l'offre augmente, la demande baisse, et il en va de même du prix. On prend les gens pour des idiots au Canada. Je ne pense pas que les gens apprécient ce type de réponse ridicule de la part des sociétés pétrolières.
Nous devons voir ce qui est important pour les Canadiens, pour le Canada. Un récent sondage, paru le 22 avril dans le Leader Post de Regina, demandait si le gouvernement fédéral devrait réglementer le prix de vente au détail de l'essence. Sur les 3 786 répondants, 3 519, soit 93 p. 100, ont dit que oui et 267, soit 7 p. 100, ont répondu non.
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La Saskatchewan produit 15 p. 100 de tout le pétrole au Canada. Or, on s'aperçoit que le prix de l'essence dans la région de Regina, où se trouve une raffinerie, est supérieur à celui dans les endroits qui doivent faire venir le produit raffiné. Lorsqu'on tient compte de la différence dans les taxes, le prix de l'essence dans cette région est le plus élevé de tout le pays.
Pourquoi? La période d'ensemencement de printemps approche et les agriculteurs achètent leur essence en gros. Les compagnies pétrolières se disent donc: «Volons les agriculteurs. Le député néo-démocrate de Regina-Lumsden soulève sans cesse cette question dans tout le pays. Bridons-le un peu et estampons les consommateurs de sa province. Il y a un gouvernement néo-démocrate en Saskatchewan. C'est un des trois gouvernements provinciaux au Canada qui ont réussi à équilibrer leur budget en ayant quand même un régime d'imposition équitable et en protégeant les programmes sociaux. Tirons-leur un peu la bride et secouons-les un peu.»
Je demande aux parlementaires d'envisager de créer une commission d'examen des prix de l'énergie pour que les compagnies pétrolières puissent témoigner devant cette commission dans le but de justifier leurs augmentations. De même, les gouvernements devraient se présenter devant la commission pour justifier les augmentations de taxes, afin de s'assurer qu'elles sont équitables à l'égard des contribuables.
Les gouvernements et les parlementaires ont des obligations. Nous devons, à bien des égards, équilibrer les pouvoirs économiques qui dirigent notre économie. Il nous incombe de protéger les consommateurs lorsqu'ils se font voler par un oligopole, un monopole ou une entreprise de façon injuste. C'est notre obligation. Nous sommes payés pour exiger que les gens qui influencent et contrôlent l'économie rendent des comptes d'une façon équitable pour les Canadiens. C'est tout ce que nous demandons aux gens d'envisager ce matin.
En réponse, on nous a demandé pourquoi nous voulions réglementer le secteur pétrolier. J'ai mentionné dans certains de mes arguments qu'il s'agit d'une ressource naturelle non renouvelable. De plus, c'est un des moteurs de notre économie. Il faut tenir compte du fait que nous réglementons toutes sortes d'autres secteurs.
Nous réglementons les communications. Le CRTC réglemente la radiotélédiffusion. Il y a 1 000 entreprises sur le marché qui pourraient nous offrir nos services de communication. On retrouve dans toutes les régions des antennes paraboliques orientables, des services de câblodistribution et un certain nombre de stations de télévision et de radio. Il est bon qu'on réglemente tout cela pour veiller à ce qu'on présente aux consommateurs une image équilibrée du monde. Le secteur des communications n'influence ni ne contrôle toute notre économie, même s'il est important pour l'économie. Il n'y a pas de doute à ce sujet. Le secteur énergétique est le principal secteur. Pourtant, nous n'en tenons aucun compte et laissons les cinq grandes compagnies pétrolières agir à leur guise.
Nous pourrions signaler au Bureau de la concurrence que nous croyons que les sociétés pétrolières manipulent les prix. En une heure, les prix de l'essence exigés à toutes les stations sont montés au même niveau. Le bureau nous répond qu'il n'a rien par écrit qui prouve qu'un président d'une société pétrolière a proposé à son homologue d'une autre société de manipuler les prix et que, faute de preuves, il ne peut rien faire. Les gens nous disent que la politique du Bureau de la concurrence est ridicule. Nous réglementons d'autres industries et entreprises au Canada dans l'intérêt des Canadiens.
Je pourrais poursuivre ainsi pendant bien longtemps. J'ai en main des renseignements qui, selon moi, intéresseraient les députés, mais je sais que mon temps de parole est pratiquement écoulé. Je n'ignore pas que le ministre de la Santé a très hâte d'en entendre davantage. Il me tarde également de le rencontrer pour lui transmettre davantage d'informations, s'il le désire, au sujet des soins de santé en particulier. Je peux lui offrir certains conseils là-dessus également.
À ce stade-ci, je voudrais demander le consentement unanime pour que la Chambre décide, par vote, de renvoyer le projet de loi C-220 au Comité permanent de l'industrie.
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La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il unanimité pour que le projet de loi soit renvoyé plutôt à un comité?
Des voix: Non.
M. Solomon: Madame la Présidente, c'est dommage que certains députés ne veuillent pas donner leur consentement. Je demande donc le consentement unanime pour que l'objet du projet de loi soit renvoyé au Comité permanent de l'industrie.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il unanimité pour que l'objet du projet de loi soit renvoyé au Comité permanent de l'industrie?
Des voix: Non.
M. Solomon: Madame la Présidente, je remarque que la députée libérale de Dauphin-Swan River n'a pas donné son consentement. C'est déplorable. Je suis né à Dauphin et je reçois toutes sortes d'appels de ses électeurs qui disent que nous devrions effectuer un examen.
Enfin, je demande aux députés de donner leur consentement unanime pour que ce projet de loi fasse l'objet d'un vote.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il unanimité pour que le projet de loi fasse l'objet d'un vote?
Des voix: Non.
Mme Marlene Cowling (secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources naturelles, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse de pouvoir participer au débat sur la création d'une commission sur les prix de l'énergie.
Le député de Regina-Lumsden nous donne l'occasion de discuter du prix d'un produit indispensable dans notre vie quotidienne, l'essence. Le député a tout à fait raison. Le prix des produits pétrolier influe sur tous les coûts, au Canada. Les frais de transport ont une incidence sur le coût de toutes nos activités et celui de presque tous les produits et services que nous achetons ou vendons.
Moi qui viens d'une localité rurale du Manitoba, je sais que cela est particulièrement vrai en agriculture. Le carburant constitue une
partie importante des facteurs de production agricole. La plus petite fluctuation du prix peut avoir des conséquences considérables sur les résultats financiers. Le gouvernement le sait, et c'est pourquoi il n'a pas augmenté les taxes sur l'essence au dernier budget. Le prix des aliments, des vêtements et du logement, et même le coût de la recherche et de la conservation d'un emploi sont tributaires du prix du carburant qui alimente littéralement notre économie.
Je suis tout à fait d'accord avec le député de Regina-Lumsden lorsqu'il dit que le prix du carburant doit être raisonnable et abordable. Cependant, nos vues divergent sur plusieurs points importants.
L'article 8 du projet de loi stipule que quiconque vend de l'essence doit faire approuver le prix par le gouvernement. Ce n'est pas du tout ce que les Canadiens veulent. Les contribuables ne veulent pas d'un nouvel appareil bureaucratique pour régler ce qui apparaît comme un problème. Ils ne veulent pas d'une nouvelle police de l'essence qui surveille qui paie combien et pour quel produit.
Si le projet de loi était adopté, le gouvernement fédéral serait obligé de s'ingérer dans un domaine de compétence provinciale, de s'immiscer inutilement dans des marchés concurrentiels et d'engager de grandes dépenses aux frais des contribuables.
Je puis assurer les députés que ni la ministre des Ressources naturelles, ni le ministre de l'Industrie ne peuvent appuyer cette idée d'une commission sur les prix de l'énergie. C'est que toutes les études concluent que la réglementation des prix ne donne tout simplement aucun résultat.
Depuis 20 ans, les gouvernements de toutes les provinces, sauf une, ont laissé tomber la réglementation des prix de l'essence, l'ont rejetée ou ont refusé de l'envisager. La seule exception est l'Île-du-Prince-Édouard et où l'essence se vend-elle le plus cher, si on fait abstraction des taxes? À l'Île-du-Prince-Édouard.
Dans l'île-du-Prince-Édouard, en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, au Québec, en Ontario et au Manitoba, des commissions, des groupes de travail et des comités législatifs ont étudié la question des prix de l'essence et les propositions de réglementation. Le gouvernement fédéral a lui aussi étudié la question à fond. Voici quelques conclusions des rapports d'étude.
En 1987, une commission d'enquête sur les prix de l'essence au Manitoba a déclaré:
La réglementation des marchés de l'essence au moyen d'audiences et d'organismes n'est pas souhaitable. Les marchés du brut et de l'essence sont en perpétuelle transformation, ce qui rend la réglementation impossible et entraîne des distorsions, puisque les prix ne pourraient pas être rajustés assez rapidement.
Cette forme de réglementation imposerait un prix à tous les acteurs sur le marché par la contrainte de la loi.Les Canadiens estiment que la contrainte, par la loi ou autrement, n'a pas sa place dans leur pays.
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En 1986, dans un rapport sur l'industrie pétrolière, la Commission sur les pratiques restrictives du commerce parlait du labyrinthe de restrictions qui succède inévitablement à l'adoption d'une nouvelle réglementation sur les prix:
De telles restrictions, au niveau des installations, des heures et des types de ventes, empêchent l'industrie de s'adapter pour répondre à la demande des consommateurs et de pratiquer les prix plus bas qui rendent possibles la distribution de l'essence à moindre coût et les pressions de la concurrence.
Les formes variées que revêt l'offre de produits pétroliers de par le pays, tant chez les indépendants que chez les entreprises intégrées, montrent qu'il est intéressant de laisser chacun libre de répondre aux besoins des consommateurs comme il l'entend et de chercher toujours à attirer les clients en leur offrant ce qu'ils veulent.Offrir aux clients ce qu'ils veulent, non ce qu'un gouvernement, un comité ou une commission sur les prix de l'énergie pensent que les clients veulent.
Ce qui frappe, c'est que ces nombreux rapports n'ont rien perdu de leur pertinence. Les conclusions des analyses, des évaluations et des études s'appliquent aussi bien aujourd'hui qu'il y a 10 ou 20 ans. La grande différence, c'est que, aujourd'hui, les Canadiens sont plus conscients qu'il est plus avantageux de compter sur le secteur privé pour obtenir les produits et les services qu'ils veulent, quand ils les veulent et à un prix qui leur convient. Les marchés de l'essence ont aujourd'hui toutes les caractéristiques d'un marché concurrentiel.
Un des rôles de Ressources naturelles Canada est de fournir aux Canadiens des données à jour. Le ministère surveille constamment les prix d'un bout à l'autre du pays pour recueillir des faits pertinents au sujet du marché de l'essence.
Le gouvernement fédéral a déjà créé un organisme dont la vocation est de surveiller la concurrence et d'enquêter sur les plaintes: le Bureau de la politique de concurrence. Les commerçants et les consommateurs peuvent y dénoncer les pratiques anticoncurrentielles.
La loi interdit aux détaillants de se liguer pour fixer les prix de l'essence à un niveau pouvant réduire ou éviter la concurrence, de tenter d'amener d'autres détaillants à modifier leurs prix au moyen d'ententes, de menaces ou de promesses, ou de persuader des fournisseurs de cesser d'approvisionner les détaillants qui abaissent leurs prix. Tout Canadien peut signaler des délits présumés au Bureau de la politique de concurrence en composant un numéro de téléphone sans frais, par courrier ou par télécopieur.
À propos du projet de loi, je tiens à attirer l'attention sur trois faits principaux. La question des prix des produits pétroliers relève des gouvernements provinciaux. Les organismes de réglementation des prix ont toujours, par le passé, favorisé une hausse plutôt qu'une baisse des prix. Le plus important, c'est qu'il est indéniable que nous avons une concurrence solide sur le plan de la commercialisation des produits pétroliers. C'est pour ces raisons convaincantes que, en 1996, les consommateurs et les contribuables canadiens bien informés n'envisagent pas une commission sur les prix de l'énergie, n'en veulent pas et n'en ont pas besoin.
Peu de consommateurs sont entièrement satisfaits du prix et de la qualité des produits et des services qu'ils achètent. Nous aimerions tous payer l'essence moins cher, c'est certain.
Cependant, d'après les études effectuées au cours des 20 dernières années sur les prix de l'essence, la conclusion est claire, nette et simple: les Canadiens ne veulent surtout pas, en 1996, d'une police des prix pétroliers et d'une commission sur les prix de l'énergie.
Le gouvernement libéral s'intéresse à l'avenir, non au passé. Nous ne voulons pas une bureaucratie plus lourde, mais allégée. Nous ne voulons pas des marchés fermés, mais ouverts. Nous ne voulons pas réduire les choix, mais les multiplier.
[Français]
M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Madame la Présidente, d'entrée de jeu, je vous avoue qu'après avoir écouté attentivement les deux précédents discours de nos collègues des deux autres partis, nous ne pouvons, malheureusement, même avec l'amitié que nous avons pour notre collègue de Regina-Lumsden qui a déposé le projet de loi, accorder notre appui au projet de loi C-220 pour les différentes raisons que je vais énumérer pendant mon discours.
(1130)
Rappelons tout simplement que ce projet de loi qui a pour but de constituer une commission sur les prix de l'énergie afin de régulariser le prix de vente, en gros et au détail, de l'essence, est, selon nous, et selon ce que j'ai constaté du parti gouvernemental, une ingérence flagrante et injustifiée du gouvernement dans le processus normal du libre marché à l'établissement des prix. Cela va, entre autres, à l'encontre de la tendance mondiale à laisser le marché fixer les prix, dans ce cas-ci, au niveau de l'essence.
D'une part, l'histoire nous apprend que la fixation d'un prix plafond en matière d'essence peut être dangereux et créer même certains cas graves de pénurie, puisque les pétrolières ont tendance à vendre moins, et c'est normal, lorsque les prix sont peu élevés, alors que la demande, elle, augmente. À ce moment-là, ils stockent les produits. Il découlerait alors de ces pénuries des problèmes de quotas, des problèmes de files d'attente et aussi des problèmes de corruption, comme on a pu l'observer dans certains pays d'Amérique du Sud et certains pays d'Asie.
Il est à noter, par ailleurs, que l'imposition d'un prix plafond par la commission pourrait aussi engendrer un ralentissement économique chez les producteurs pétroliers des provinces de l'Ouest.
À titre d'exemple de tentative de contrôle de prix de l'essence qui fut un échec, nous n'avons qu'à penser à la Politique nationale sur l'énergie-et plusieurs s'en rappellent de l'autre côté-de l'ex-premier ministre Pierre Elliott Trudeau pendant la crise du pétrole qui avait soulevé un mécontentement général à l'époque, est-il utile de le rappeler?
En effet, chaque fois que le gouvernement fédéral est intervenu dans le secteur pétrolier ou le secteur énergétique, comme dans le cas du tokamak de Varennes, le Québec a été perdant. S'il y avait création d'une commission sur les prix de l'énergie, comme le souhaite mon collègue en présentant le projet de loi C-220, cette commission devrait, en plus d'étudier le prix de l'essence, élargir peut-être son mandat et se pencher sur les injustices faites au Québec par les interventions fédérales passées. Peut-être que cette commission pourrait recommander à la Chambre une généreuse compensation, comme celle versée aux provinces Maritimes pour l'harmonisation de la TPS.
Nous tenterons maintenant de trouver le montant de cette compensation. Un exemple de ces injustices qui pourraient être étudiées par cette commission, c'est sans aucun doute les effets de la fameuse ligne Borden décrétée par le gouvernement fédéral au cours des années 1960. On se rappellera que la politique énergétique de la ligne Borden bloqua systématiquement le développement de la production pétrolière montréalaise produite à partir des importations du Venezuela et du Moyen-Orient en fermant complètement le marché des provinces situées à l'ouest de cette ligne et ce, afin de protéger l'exploitation du pétrole de l'Ouest.
Mais lorsque le prix mondial commença à s'élever rapidement entre 1973 et 1977, cette politique fut abolie avec comme résultat le déferlement de la production pétrolière de Sarnia et des Prairies vers l'est entraînant la mort de la plupart des usines montréalaises de raffinerie et la perte de plusieurs milliers d'emplois. En plus des raffineries qui disparurent à cause de cette politique totalement injuste envers le Québec, c'est toute notre industrie pétrochimique qui fut lourdement affectée.
Encore aujourd'hui, le Québec, particulièrement la région montréalaise, souffre des conséquences de cette politique mise de l'avant par le gouvernement fédéral de l'époque. Le Québec n'a jamais reçu, à ce moment-là, de compensation pour ses pertes fort lourdes, comme les Maritimes en sont bénéficiaires présentement pour la TPS. Peut-être y aurait-il lieu que la commission que souhaite créer mon collègue en présentant le projet de loi C-220 se penche sur cette question de compensation, si jamais elle voit le jour.
Je pourrais aussi citer le développement des sables bitumineux de l'Athabasca sur lesquels cette commission pourrait se pencher, car il ne faudrait certainement pas qu'elle se limite à la fluctuation actuelle des prix de l'essence seulement. Il serait nécessaire qu'elle analyse les investissements qui sont faits pour produire de l'essence présentement au Canada. Elle devrait peut-être se pencher aussi sur le fameux dossier d'Hibernia, cette histoire à dormir debout qui a coûté aux contribuables québécois et canadiens des sommes astronomiques. C'est un autre exemple d'intervention fédérale ratée dans le domaine de l'énergie qui a eu de lourdes conséquences sur l'économie en général. Ce projet a été lancé avant les élections fédérales de 1989, et maintenant, le gouvernement actuel veut s'en retirer.
(1135)
Le gouvernement, au moment des élections, avait décidé de s'en retirer. Cependant, aujourd'hui, il a assumé depuis ce temps-là, 25 p. 100 des coûts de production. Le montant prévu à cette fin s'élevait à plus d'un milliard de dollars, mais cette subvention ne suffisait pas. Le gouvernement actuel s'est, en plus, engagé à offrir des garanties de prêts correspondant à 40 p. 100 des prêts de construction, et ce, jusqu'à concurrence de 1,66 milliard de dollars.
Promesse fut faite de ne plus souscrire l'argent des contribuables dans cette aventure. Mais promesse fut faite sur la TPS et non respectée, promesse fut faite sur les hélicoptères et non respectée,
promesse fut faite au sujet de l'aéroport Pearson et non respectée, promesse fut faite par le gouvernement Clark sur le plafonnement du prix de l'essence-sur laquelle on les a battus-mais non respectée, donc ce qui est arrivé. Pourtant, le gouvernement fédéral a probablement été cité hors contexte ou a oublié cette promesse-là aussi et a continué d'investir de plus belle dans ce gouffre financier.
La commission sur les prix de l'énergie que souhaite voir créer mon honorable collègue aurait du pain sur la planche si nous lui accordions le mandat d'étudier ce dossier.
Mais je reviens au projet Hibernia. Ottawa investissait par la suite 350 millions de dollars en rachetant les 25 p. 100 des parts de Gulf dans le projet Hibernia. Ottawa, en plus, finançait les parts acquises par la compagnie Murphy. De surcroît, il accordait des déductions et des crédits d'impôt à Murphy, Mobil et Chevron, des pétrolières milliardaires, pour réduire leur impôt sur le revenu-pauvres elles-et le gouvernement leur prêtait de l'argent sans intérêt pour leur assurer des avantages au cas où elles ne pourraient se prévaloir de ces déductions et de ces crédits.
Chevron et Mobil profitèrent chacune de 40 millions de prêts sans intérêt du gouvernement fédéral. Ainsi, pendant que le gouvernement fédéral augmentait la taxe sur les prix de l'essence, il dilapidait les fonds publics dans un gouffre financier énorme. L'augmentation de la taxe sur l'essence sert, entre autres, à combler les pertes accumulées dans le projet Hibernia.
Je doute fort qu'une intervention fédérale en matière de prix de l'essence puisse régler quelque problème que ce soit et être la moindre garantie de plus de justice. Je doute fort de plus que la création de cette commission puisse offrir aux contribuables québécois ou canadiens une certaine stabilité des prix de l'essence. Je reconnais cependant la bonne volonté de mon collègue. Mais comme le proverbe l'affirme: «Le passé est garant de l'avenir». Je préfère, et de beaucoup, que le gouvernement fédéral ne pose aucun geste dans des domaines qui, de toute façon, ne le concernent pas.
Au moment de la mise en marché du projet Hibernia, les grands conseillers du gouvernement fédéral prévoyaient que le prix du baril de pétrole atteindrait les 70 $. Nous avons payé, en tant que contribuables, des milliards de dollars pour faire face à leurs prévisions erronées.
Nous, Québécois et Québécoises, souhaitons le plus possible que ce gouvernement n'intervienne pas, ou s'il intervient, qu'il le fasse uniquement avec l'accord des gouvernements des provinces et que les provinces puissent avoir leur mot à dire quant à la nomination des commissaires, le fonctionnement et le mandat de cette commission. Toutes les sommes investies dans Hibernia, des milliards de dollars en pure perte, auraient pu être consacrées à diminuer la taxe sur l'essence, offrant ainsi aux contribuables un répit justifié.
Le ministre des Finances affirmait mardi dernier en présentant son projet d'harmonisation de la TPS, ou plutôt son projet de cachette de la TPS, que le Canada se devait d'aider les régions et les provinces qui en ont le plus besoin, qu'un partage plus équitable des richesses serait éminemment souhaitable. Qu'il nous en fasse la preuve maintenant.
Si c'est pour gaspiller ces sommes énormes dans des projets farfelus comme Hibernia, mieux vaut diminuer la taxe sur l'essence. Si ce n'est pour offrir une juste compensation aux régions ou une compensation aux Maritimes, mieux vaut diminuer le taux de taxation sur l'essence.
Si ce gouvernement prétend vouloir offrir un Canada plus juste, eh bien, tout simplement qu'il nous en fasse la preuve en investissant de façon plus légitime ces sommes-là. Qu'il fasse payer leur juste part d'impôt à ces compagnies pétrolières qui, trop souvent, bénéficient d'exemptions fiscales souvent aussi injustifiées.
Finalement, que ce gouvernement laisse aux provinces la responsabilité de leurs juridictions et aux marchés, le loisir de fixer le prix. Donc, que le fédéral s'occupe de ses oignons.
(1140)
[Traduction]
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de traiter du projet de loi d'initiative parlementaire C-220, Loi sur la Commission sur les prix de l'énergie.
S'il était adopté, ce projet de loi constituerait une commission sur les prix de l'énergie afin de réglementer le prix de vente en gros et au détail de l'essence. L'objet de la réglementation des prix de l'essence est d'éviter une augmentation abusive de ceux-ci qui aurait pour effet d'augmenter le coût de la vie et de décourager l'activité commerciale. D'où le projet de loi et la justification donnée par le député de Regina-Lumsden pour mettre sur pied une commission sur les prix de l'énergie.
Moi aussi je suis extrêmement préoccupé par les prix de l'essence. Chaque fois que je m'arrête dans une station-service ou que je fais livrer de l'essence en vrac à mon exploitation agricole, je m'inquiète réellement des prix de l'essence. Je me demande parfois pourquoi ils sont aussi élevés.
Ce projet de loi n'apporte certainement pas la solution au problème. Il s'agit là d'une solution typique du NPD, une solution socialiste au problème. Cette solution n'est tout simplement pas pratique. On l'a déjà essayée pour d'autres produits et dans d'autres pays. Ce genre de mesure s'est soldée par un échec total. En fait, comme l'a dit la députée libérale qui a pris la parole précédemment, la réglementation entraîne souvent des prix plus élevés. De toute évidence, ce projet de loi ne représente pas la solution.
La constitution de cette commission sur les prix de l'énergie offrirait encore une autre occasion de faire des nominations teintées de favoritisme. Un organisme de ce genre emploierait assurément des fonctionnaires bien rémunérés et financés par les contribuables. Il n'y a pas d'autre moyen de faire fonctionner une commission comme celle-là.
Les Canadiens n'ont pas besoin d'une administration publique plus coûteuse. Il faut réduire la taille du gouvernement. Nous avons besoin de réduire les dépenses publiques et non de constituer d'autres organismes pour permettre au gouvernement en place de faire des nominations partisanes. C'est clairement la voie à éviter.
Je voudrais rappeler quelques chiffres cités par Michael Ervine, président de QIS Solution Inc., lorsqu'il a comparu sur ce sujet devant le Comité des ressources naturelles de la Chambre des communes. M. Ervine a fait remarquer que le prix moyen de
l'essence ordinaire s'établit aujourd'hui à environ 55 cents le litre au Canada. Sur ce montant, environ 15 cents représentent le coût du pétrole brut même. Par ailleurs, il faut compter 30 cents le litre pour la taxe qui est imposée sur ce type de carburant à la pompe. La taxe imposée à la pompe accapare donc 30 cents. Les pétrolières ne touchent que 10 cents le litre pour raffiner le pétrole, le transporter, louer l'équipement et vendre le produit. Sur le prix de 55 cents le litre, seulement 10 cents doivent vraiment servir à couvrir tous ces coûts.
Quand on effectue la ventilation des prix de l'essence, on s'aperçoit que la composante fiscale est la plus importante. Y a-t-il une solution pratique à ce problème? Il existe une manière très efficace pour le gouvernement ou le Nouveau Parti démocratique de s'attaquer au problème, qu'ils attribuent aux prix élevés de l'essence. Encore une fois, moi aussi je trouve qu'ils sont élevés. Je le pense chaque fois que j'achète un litre d'essence pour un véhicule agricole ou pour mon automobile. La solution la plus efficace consiste à réduire la composante fiscale.
(1145)
Tout le monde sait qu'en Saskatchewan, les taxes sur l'essence sont élevées. Je répète que la solution consiste à réduire la composante fiscale qui représente plus de la moitié du prix total de l'essence.
Comment peut-on réduire la composante fiscale? Il n'y a qu'une façon de le faire. Il faut réduire les dépenses publiques, de manière que le gouvernement n'ait pas à imposer des taxes à des niveaux aussi ridicules.
Le député de Regina-Lumsden a certainement raison sur un point. Le prix de l'essence est trop élevé. Il est plus élevé qu'il ne devrait l'être. De toute évidence, les taxes sont trop élevées. C'est sur ce problème que le député devrait faire porter ses efforts.
Le Leader Post de Regina a réalisé un sondage auquel le député a fait allusion. Environ 93 p. 100 des répondants se sont dits en faveur de ce type de commission. Lorsque nous consultons les citoyens sur une question donnée, il est important de faire un travail préparatoire avant le sondage. Ce travail consiste à faire connaître toute l'information avant de procéder au sondage.
Je me demande si, dans ce cas-ci, le Leader Post ou le député de Regina-Lumsden ont fait leur travail et diffusé l'information que je viens de donner sur le coût de l'essence. Je me demande s'ils ont dit que les taxes directes représentent plus de la moitié du prix. Ont-ils fait leur travail en faisant savoir que ce sont les taxes qui constituent le problème?
Je ne suis pas certain que l'essence coûte plus cher qu'il ne faut, même si on tient compte de la forte proportion de taxes. Je ne dis pas que le prix n'est pas trop haut, mais la solution ne réside pas dans la création d'une commission sur les prix de l'énergie. Il faut plutôt veiller à ce que nous ayons des lois équitables et fermes sur la concurrence, des lois qui soient appliquées.
Depuis dix ans, il y a eu des progrès. L'organisme chargé de la Loi sur la concurrence a accompli des progrès. La loi actuelle est bien meilleure que l'ancienne. La Loi sur la concurrence et ceux qui l'appliquent ont beaucoup fait pour faciliter la tâche à ceux qui veulent dénoncer des situations où il ne semble pas y avoir une concurrence juste. Je suis sûr que bien des consommateurs ont signalé que le prix de l'essence était trop élevé.
Il est facile de téléphoner au Bureau de la politique de concurrence par une ligne téléphonique gratuite 800 pour lui signaler des problèmes de concurrence et lui dire que des sociétés ne pratiquent pas des prix équitables.
Il y a eu des progrès. Je ne saurais pas dire si, effectivement, le prix de l'essence est trop élevé, mais il est clair que les taxes sont beaucoup trop lourdes. Elles représentent plus de la moitié du prix de détail, mais il y a aussi des redevances et d'autres taxes qui sont englobées dans le prix.
La solution est de veiller à ce que nous ayons une bonne loi solide sur la concurrence. Qu'on renforce la Loi sur la concurrence s'il le faut, et qu'on l'applique.
Il m'est impossible d'appuyer le projet de loi. Les autres députés réformistes se prononceront comme bon leur semble. Certains d'entre eux seront peut-être d'accord, mais j'en doute fort, étant donné les faits en cause.
Pour ma part, je n'appuierai pas le projet de loi. Les autres députés réformistes prendront leur propre décision. À mes yeux, il s'agit d'une solution socialiste, bureaucratique, qui ne marchera pas. Il faut plutôt faire appel au Bureau de la politique de concurrence.
(1150)
M. John Maloney (Erie, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole à la Chambre ce matin au sujet du projet de loi C-220, Loi sur la Commission sur les prix de l'énergie, présenté par mon collègue, le député de Regina-Lumsden. Je tiens à le remercier de la recherche et du travail qu'il a consacrés au projet de loi C-220 afin de le présenter le 4 mars dernier. C'est un député travailleur et sincère.
Le projet de loi, tel que libellé, vise à constituer une commission sur les prix de l'énergie qui donnerait au gouvernement central le droit et le pouvoir de régulariser le prix de l'essence d'un bout à l'autre du pays. Sauf erreur, la commission approuverait les prix de vente en gros et au détail de l'essence dans tout le Canada. Personne, en effet, ne pourrait vendre de l'essence à un prix qui ne serait pas approuvé par la commission.
Je voudrais tout d'abord faire remarquer que c'est la concurrence dans un marché sans entrave plutôt que la réglementation qui permet les prix les plus bas possible, tant pour les consommateurs que pour les acheteurs industriels d'essence. La concurrence est vue comme un moyen plutôt qu'une fin en soi. Ce n'est que par le processus de concurrence que les ressources sont réparties de façon impartiale, et les gains d'efficacité qui en résultent ont pour effet de faire baisser les prix.
Telle est actuellement l'opinion du gouvernement et de la majorité de nos partenaires commerciaux. Au moment où les Canadiens
tâchent d'améliorer leur position concurrentielle sur les marchés internationaux, nous devons éviter la réglementation qui, de par sa nature même, mène au genre d'inefficacités dans la production et dans la distribution qui finissent par provoquer une augmentation du prix des intrants et des coûts de distribution.
Parlant de réglementation, il vaut la peine de noter qu'au sommet économique tenu à Toronto en juin 1988, les pays du G-7 se sont pour la première fois donné explicitement pour objectif d'intensifier les efforts individuels et collectifs en vue de supprimer les contrôles et les obstacles inutiles à l'exercice des forces du marché concurrentiel et de compter sur la concurrence accrue pour en arriver à une économie efficiente et souple.
La réforme des secteurs réglementés de nos économies respectives figure au premier plan des plans d'action économique depuis dix ans. Il est généralement entendu que moins de réglementation est préférable à plus de réglementation. Les obstacles sont supprimés au sein des secteurs industriels, entre les marchés et à travers les frontières nationales. Cela a encouragé les échanges commerciaux, tant dans la direction nord-sud que dans la direction est-ouest. Les Canadiens ont donc de meilleures chances d'accroître leur richesse.
Le projet de loi C-220 et la commission ont comme objectif de contrer les augmentations déraisonnables du prix de l'essence. De plus, ils visent à préserver une uniformité raisonnable des prix de l'essence d'une province à l'autre, compte tenu des coûts de production et de distribution. Dans son projet de loi, mon collègue propose de soustraire à l'autorité de la commission les acheteurs qui concluent des contrats d'approvisionnement portant sur la livraison de l'essence dans leurs véhicules ou dans leurs réservoirs.
Le projet de loi laisse entendre que nous devons régulariser le prix de l'essence au Canada. On a beaucoup parlé à la Chambre et dans les médias du prix de l'essence sur certains marchés locaux du Canada. Avant de décider si l'adoption de règlements fédéraux permettra de régler ces programmes locaux, ne devrions-nous pas nous demander si le prix de l'essence s'est considérablement accru ou si une réglementation plus sévère de cette industrie contribuera vraiment à améliorer la situation?
En fait, le prix réel de l'essence, exception faite de toutes les taxes, est à la baisse depuis 1990. De plus, il n'y a pas d'écarts importants dans le prix de base de l'essence, exception faite des taxes et du taux de change, entre les États-Unis et le Canada. Dans les circonstances, devrions-nous, en tant que législateurs, imposer à l'industrie une structure qui empêchera tant les consommateurs que les entreprises de profiter de tous les avantages que comportent la concurrence réelle et la vente au détail de l'essence?
Par ailleurs, le dépôt de ce projet de loi semble quelque peu prématuré. Je me suis laissé dire par des représentants d'Industrie Canada, de Ressources naturelles Canada et de l'Institut canadien des produits pétroliers qu'ils auront bientôt terminé une analyse régionale de la concurrence au niveau des produits pétroliers. Cette analyse va porter sur les prix de divers marchés urbains et régionaux afin de cerner les facteurs clés de la compétitivité dans des certains marchés canadiens.
Je voudrais maintenant citer à mes collègues un certain nombre d'avantages de la compétition. Les consommateurs ne pourraient plus bénéficier des guerres de prix qui font actuellement rage entre les détaillants d'essence ni des avantages que présente l'arrivée d'un nouveau concurrent qui baisse ses prix pour s'approprier une partie du marché.
Les prix à la consommation tendent à être plus bas lorsqu'ils sont fixés par les marchés plutôt que par les gouvernements. En prenant, en juillet 1991, la décision de mettre fin à son régime de fixation des prix de l'essence, le gouvernement néo-écossais s'est trouvé à reconnaître que la fixation des prix devrait être laissée aux forces concurrentielles du marché. Lorsqu'on a cessé de réglementer les prix et après qu'un nouvel indépendant fut arrivé sur le marché, les prix de l'essence en Nouvelle-Écosse sont tombés de 58,9c. à 52,9c. ce qui constitue une baisse très importante.
(1155)
Il est bien connu que les stations-service affichent leurs prix sur de grandes enseignes situées sur leur terrain afin d'en informer les automobilistes et leurs concurrentes. Comme l'essence est fondamentalement un produit homogène, les automobilistes estiment que toutes les marques se valent plus ou moins. Les exploitants de station-service ne demandent pas un prix plus élevé que leurs concurrents parce qu'ils craignent de perdre des clients. Pour des raisons similaires, ils savent que s'ils baissent leur prix, ils seront imités. Au bout du compte, le même volume d'essence leur rapportera moins d'argent.
Les détaillants qui surveillent leurs concurrents et qui prennent d'eux-mêmes les décisions qui servent le mieux leurs intérêts ne font que suivre une simple logique économique.
À plus grande échelle, une telle commission enlèverait aux producteurs pétroliers le goût d'être plus efficaces. Les mesures de contrôle des prix font que les entreprises cherchent moins à s'adapter promptement aux variations de la demande ou à mettre au point de meilleures méthodes de distribution. Il est plus facile pour les entreprises qui connaissent des hausses de coût de demander à l'organisme de réglementation de hausser le prix contrôlé que d'essayer de réduire leurs frais d'exploitation.
Lorsque les prix sont contrôlés au niveau des détaillants, ceux-ci risquent de ne pas faire bénéficier les consommateurs de tout rabais qu'ils auront pu obtenir des manufacturiers et cela ,de peur de violer la loi. Les détaillants sont donc limités dans leurs tentatives pour être agressivement concurrentiels.
Les marchés concurrentiels n'entraînent pas de frais d'administration pour les gouvernements ni de frais liés au respect de nouvelles lois pour les entreprises visées, des coûts qui finiraient par être assumés par les consommateurs.
Je veux maintenant parler d'un autre aspect du projet de loi qui me préoccupe, soit l'opportunité de soulever, à ce moment-ci de
notre histoire, une autre question ayant des répercussions sur la Constitution canadienne. La réglementation des produits pétroliers relève de la compétence des provinces. Actuellement, le gouvernement fédéral n'intervient pas dans ce secteur. Cela pourrait fort bien être une faille irréparable du projet de loi proposé par mon collègue.
Je voudrais maintenant parler de la Loi sur la concurrence, mesure législative qui, au Canada, régit les activités commerciales ayant des répercussions sur la concurrence. Il s'agit d'une loi-cadre d'application générale qui vise presque tous les secteurs de l'économie canadienne, dont le secteur manufacturier, celui des ressources et celui des services. Cette loi a des répercussions sur la vie quotidienne de tous les Canadiens, car elle maintient et encourage la concurrence sur les marchés et vise à garantir aux consommateurs des prix concurrentiels ainsi qu'une gamme diversifiée de produits et services.
Comme le député le sait sans doute, en 1994, en réponse aux inquiétudes soulevées quant à la fixation des prix de l'essence, le ministre de l'Industrie a chargé le directeur des enquêtes et recherches du Bureau de la politique de concurrence d'examiner les dispositions de la Loi sur la concurrence, afin de déterminer leur efficacité à empêcher les comportements anticoncurrentiels dans l'industrie pétrolière.
Dans un rapport à ce sujet, le directeur a répondu qu'il applique activement la Loi sur la concurrence en surveillant l'évolution de la situation sur les marchés et en examinant les plaintes des consommateurs et des membres de l'industrie afin de déterminer s'il existe des preuves d'une activité anticoncurrentielle.
Il y aura toujours sur les marchés des fluctuations attribuables à la concurrence et à d'autres facteurs, mais le directeur estime que les dispositions de la loi suffisent à empêcher des comportements anticoncurrentiels par rapport aux prix de l'essence.
Le directeur examine régulièrement la loi, et le ministre proposera des modifications s'il le juge opportun. Le rapport susmentionné est public, et j'encourage les députés que cela intéresse à le lire. J'invite aussi quiconque a de l'information sur une activité anticoncurrentielle qui a cours à la porter à l'attention du directeur.
La loi permet de résoudre les problèmes relatifs à la concurrence qui se posent sur les marchés de produits pétroliers. En fait, le 26 janvier, le juge David Dempsey a imposé une amende de 50 000 $ à la société Mr. Gas Limited, trouvée coupable d'avoir usé de menaces pour influencer à la hausse les prix demandés par l'un de ses concurrents, la société Caltex Petroleum Incorporated, en septembre 1992, dans la région d'Ottawa.
Il convient de signaler que, contrairement à ce que laisse entendre le projet de loi C-220, la fixation de prix anticoncurrentielle est généralement considérée comme une infraction criminelle en vertu de la Loi sur la concurrence et que, de ce fait, c'est un tribunal pénal relevant du procureur général du Canada qui en est saisi.
Jusqu'à maintenant, le tribunal de la concurrence ne s'est prononcé que sur des questions de nature civile. Les questions relatives à la fixation des prix dont le tribunal peut être saisi résultent habituellement de mesures disciplinaires ou punitives prises par des sociétés qui dominent un marché plutôt que d'une collusion criminelle entre concurrents.
En conclusion, je continue de penser que les prix de l'essence devraient être fixés dans un marché concurrentiel. Les problèmes de comportement anticoncurrentiel pourront être réglés grâce à la Loi sur la concurrence.
(1200)
[Français]
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est rayé du Feuilleton.