[Traduction]
[Français]
Groupe no 2: Les motions nos 2 à 10 et la motion no 19.
[Traduction]
Groupe no 3: Les motions nos 11 à 14. Groupe no 4: La motion no 15.
[Français]
Groupe no 5: La motion no 16.
[Traduction]
Groupe no 6: La motion no 18.
[Français]
Groupe no 7: La motion no 20.
[Traduction]
Les députés peuvent consulter les modalités de vote sur les motions de chacun des groupes au bureau de la Chambre. La présidence rappellera ces modalités à la Chambre au moment du vote.
Le débat porte maintenant sur les motions nos 1 et 17.
M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.) propose:
Motion no 1
Que le projet de loi C-72 soit modifié par suppression de l'article 2.
Motion no 17
Que le projet de loi C-72 soit modifié par suppression de l'article 10.-Monsieur le Président, nous en sommes à l'étape du rapport du projet de loi C-72. Il est clairement impossible de l'adopter. Même si le premier ministre se dégonfle à la dernière minute et ne déclenche pas des élections, il sera très difficile d'adopter ce projet de loi.
Je voudrais rappeler brièvement l'historique du projet de loi C-72. Après les élections d'octobre 1993, les opinions étaient partagées dans les Prairies quant à la façon de commercialiser le blé et l'orge. Le ministre a beaucoup tardé à agir. Enfin, en 1995, il a mis sur pied le groupe sur la commercialisation du grain de l'Ouest qui, au milieu de 1996, a remis son rapport sur les modifications proposées à la Commission canadienne du blé.
Le ministre n'était pas content du rapport, qui recommandait une plus ample consultation et une campagne de lettres. Ce n'est qu'en décembre 1996, plus de trois ans après avoir été élu, que le ministre a déposé un projet de loi à la Chambre.
La première lecture a eu lieu en décembre 1996, mais le projet de loi n'a été renvoyé au comité qu'à la fin de février ou au début de mars. Il y a eu des audiences en coup de vent dans les Prairies et, dans la troisième semaine de mars, le gouvernement n'a accordé que trois jours pour l'étude détaillée du projet de loi.
Enfin, en ce jour qui est sans doute l'avant-dernier avant la prorogation de la Chambre, nous voici à l'étape du rapport. Il reste encore l'étape de la troisième lecture et celle du Sénat. Il est clair que la Chambre devrait siéger encore plusieurs semaines si l'on voulait que le projet de loi C-72 ait la moindre de chance d'être adopté.
Qu'une chose soit bien claire: le projet de loi n'est qu'un piètre rafistolage d'une Commission canadienne du blé qui est terriblement dépassée. En le rédigeant, les libéraux n'ont tenu aucun compte des conseils du secteur agricole. Ils ont refusé de discuter honnêtement des excellents amendements proposés au comité par les réformistes. Ce sont des amendements qui recueillaient l'appui de nombreuses associations agricoles et de la majorité des agriculteurs des Prairies.
Les libéraux n'ont laissé d'autre choix aux réformistes que de s'opposer au projet de loi. Nous ne voulons pas l'adopter parce que nous ne voulons pas décevoir encore plus les agriculteurs qui ont été si souvent trahis par les gouvernements libéraux et conservateurs.
Nous nous opposons au projet de loi, et nous voterons contre, mais ce n'est pas pour cette raison qu'il ne sera pas adopté au cours de la 35e législature. La vraie raison pour laquelle cette mesure va mourir au Feuilleton, c'est que les libéraux et le ministre de l'Agriculture savent pertinemment que c'est un projet de loi de troisième ordre. Ils ont peur de l'adopter et que les agriculteurs ne constatent à quel point il est minable.
Les libéraux auraient pu faire adopter le projet de loi C-72 s'ils l'avaient vraiment voulu. Je suis plutôt estomaqué que le ministre de l'Agriculture ait déclaré publiquement que l'opposition a retardé l'adoption du projet de loi C-72. Nous savons fort bien que, avec la majorité qu'ils détiennent au Parlement, les libéraux peuvent faire adopter tout ce qui leur chante. Ce sont les libéraux qui dressent le menu législatif. Ils inscrivent les mesures d'initiative ministérielle à l'ordre du jour. Ils ont recours à l'attribution du temps de même qu'à la clôture beaucoup trop souvent. En accusant l'opposition d'avoir retardé l'adoption du projet de loi C-72, le ministre dépasse tout ce que l'on peut imaginer de sottises et de mensonges. Il bascule dans le désespoir et l'insolite, qu'il pousse à l'extrême.
(1055)
Voyons ce que prévoit le projet de loi, même s'il ne sera pas adopté. À l'article 2, on dit que le projet de loi s'appliquera dans toutes les provinces. Nous avons demandé aux ministres de l'Agriculture du Manitoba et de l'Alberta s'ils avaient été consultés au sujet de l'article 2, dont nous débattons dans le cadre de l'étude de ce groupe d'amendements proposés au projet de loi C-72. Les deux ministres ont affirmé que jamais les provinces n'ont été consultées à propos de l'article 2.
L'article 10 et d'autres dispositions du projet de loi donnent au ministre pleine emprise sur la commission. De toutes les discussions tenues dans les provinces des Prairies, il est ressorti que la commission devait rendre des comptes aux agriculteurs et être davantage dirigée par ceux-ci. Le projet de loi ne tient aucunement compte de ces recommandations. Je crois même que le projet de loi C-72 donne au ministre encore plus d'emprise sur la Commission canadienne du blé qu'il n'en a actuellement.
Les gestes et les paroles du ministre sont clairs. Il dit qu'il ne fait pas confiance aux agriculteurs des provinces des Prairies pour gérer leur propre Commission canadienne du blé. Par conséquent, examinons les pouvoirs auxquels le ministre s'agrippe. Le ministre choisira le directeur général ou le président du conseil, en passant par-dessus la tête des administrateurs, même si certains d'entre eux sont élus par les agriculteurs. Le ministre nommera le directeur général au conseil d'administration, lui donnant ainsi le droit de vote, ce qui placera le directeur général dans une grave situation de conflit d'intérêts.
Maintes fois, des groupes d'agriculteurs nous ont fait savoir que le directeur général de la commission devrait être choisi par la commission et devrait rendre des comptes à la commission, que c'est elle qui devrait l'engager, qu'elle devrait fixer son salaire et qu'elle devrait mettre fin à son emploi si elle le jugeait utile.
Le ministre a le pouvoir de nommer tous les membres du conseil d'administration intérimaire et de dire à ce dernier comment choisir leurs successeurs. Ce n'est pas de la démocratie. C'est l'arrogance libérale à son meilleur. Ce serait une bonne planque.
Le ministre et les personnes qu'il nomme jettent tous les plans d'un conseil partiellement élu. Cela me rappelle les pensions bien grasses que les députés libéraux se sont prévues. S'ils définissent les règles, s'ils prennent les décisions, les agriculteurs n'ont plus qu'à attendre patiemment de voir quel genre de commission sortira de tout cela, quels en seront les administrateurs, et quelles règles, lignes directrices et règlements seront mis en place pour l'élection et la nomination des futurs administrateurs de la commission.
Ce qui est encore plus troublant, c'est que le ministre peut congédier les administrateurs et les employés qui, à son avis, ne servent pas les intérêts supérieurs de la société. Dans ce cas, les agriculteurs qui payent pour la commission sont laissés pour compte. Il semble étrange que les employés puissent être congédiés dans l'intérêt supérieur de la société plutôt que des agriculteurs. Il s'ensuit que les agriculteurs ont les mains liées. Ils ne sont pas en mesure de vraiment apporter ou de faire apporter à la commission les changements qu'ils estiment utiles.
Le ministre refuse d'agréer à la demande des agriculteurs de passer seulement s'ils le veulent par la commission, même pour l'orge. Il y a un consensus. Maints sondages ont montré que la majorité des producteurs d'orge des Prairies veulent une Commission canadienne du blé à participation volontaire et cela, même pour le blé organique. Beaucoup de producteurs de cultures organiques et leurs associations estiment que la Commission canadienne du blé n'est pas le meilleur office de commercialisation qui soit pour les produits organiques.
Le ministre est allé à l'encontre de la recommandation de son propre groupe spécial sur la commercialisation du grain de l'Ouest en niant la capacité de la commission de devenir, même le moindrement, un office volontaire de commercialisation des produits dont la mise en marché est mieux assurée par d'autres avenues que par la Commission canadienne du blé.
Ce faisant, le ministre a défié le souhait des agriculteurs et les résultats de son propre sondage Angus Reid qui révélaient que les producteurs d'orge réclamaient majoritairement une Commission canadienne du blé volontaire. En outre, le ministre va autoriser la Commission canadienne du blé à faire des achats au comptant dans un environnement monolithique où les éleveurs de bétail peuvent être ruinés par des prix artificiels des aliments pour animaux et des représailles internationales pour pratiques commerciales déloyales. C'est ce qu'on nous a dit lorsque nous avons parcouru les Prairies. Le ministre n'a rien fait pour régler ce problème dans les amendements au projet de loi que le gouvernement a présentés au comité.
(1100)
Le gouvernement est disposé à assujettir d'autres cultures au monopole. Cette mesure ne serait pas très bien acceptée par les agriculteurs. En fait, s'il y a actuellement quelques agriculteurs qui vendent leurs produits de l'autre côté de la frontière et si des produits agricoles comme le colza étaient désormais assujettis au monopole de la Commission canadienne du blé, je crois qu'il y aurait une guerre civile dans les Prairies et non pas seulement quelques agriculteurs qui envoient des camions chargés de leurs produits de l'autre côté de la frontière, aux États-Unis, en guise de protestation.
De toute évidence, le ministre ne comprend pas les besoins ni les souhaits de la majorité des producteurs des Prairies.
Le ministre agit comme le capitaine du Titanic, avec tellement d'arrogance qu'il file à toute vapeur, aveuglément, en direction des glaciers. En ce qui concerne le tarif du nid-de-Corbeau, ses réalisations sont pitoyables. En matière de transport du grain, elles sont catastrophiques. Par rapport à la Commission canadienne du blé, elles sont lamentables et dangereuses. Il est responsable de l'absence de prise de mesures depuis trois ans et demi. Il est responsable de la dissension qui existe dans les Prairies au sujet de la Commission canadienne du blé. Il est responsable de ce ramassis d'erreurs qu'est le projet de loi C-72.
Les réformistes ont préconisé des modifications constructives à la Commission canadienne du blé. L'avenir que nous envisageons pour la commission donnerait à celle-ci une bonne chance non seulement de s'en tirer, mais aussi de devenir un organisme de commercialisation de première classe, administré par des agriculteurs et dont les activités auraient de fortes chances d'être couronnées de succès au cours du XXIe siècle.
Durant la prochaine campagne électorale, nos opposants seront les libéraux et les néo-démocrates qui laisseront entendre que le Parti réformiste veut éliminer la commission. C'est faux, tout comme leurs allégations selon lesquelles nous porterions atteinte à l'assurance-maladie et aux pensions des aînés. Dans notre document intitulé Nouveau départ, nous avons démontré que leurs allégations concernant l'assurance-maladie, les soins de santé et les pensions des aînés sont fausses. Leurs affirmations au sujet de la Commission canadienne du blé sont également fausses.
Les mesures que nous proposons sont les seules qui rétabliront la paix dans un milieu agricole extrêmement divisé. Ce sont les seules mesures qui garantiront la rentabilité future de la commission, dans un climat où les agriculteurs voudront commercialiser leurs produits par l'entremise de la commission, au lieu d'être obligés de le faire, comme le proposent les députés d'en face.
Le projet de loi à l'étude ne peut être adopté à la Chambre des communes. C'est une question sur laquelle chaque parti devrait faire connaître sa position, et je remercie la Chambre de m'en avoir donné l'occasion.
[Français]
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, c'est avec un vif intérêt que j'interviens sur le projet de loi C-72 modifiant en profondeur la Loi régissant la Commission canadienne du blé, communément appelée la CCB.
Il faut bien situer ce projet de loi dans le contexte actuel. Cependant, il faudrait faire un léger retour. Lorsque le gouvernement a créé la Commission canadienne du blé, le Canada, comme tous les pays de ce monde, vivait une grave crise économique. Il faut se situer autour des années 1930, il y a plus de 65 ans, lorsque le gouvernement canadien a créé la Commission canadienne du blé, durant la grande famine où les hommes et les femmes devaient travailler souvent uniquement pour se nourrir. Plusieurs crevaient de faim. C'est ce qu'on a appelé la grande dépression.
Les agriculteurs de l'Ouest avaient beaucoup de difficulté à joindre les deux bouts. Ils restaient souvent collés avec leur récolte, ne pouvant la vendre à un juste prix. Le gouvernement, en bon père de famille, a créé la Commission canadienne du blé avec le droit, le monopole. Toutes les céréales devaient passer par la Commission canadienne du blé.
Donc, à l'époque, la création et la présence de la Commission canadienne du blé étaient justifiées, tout comme je crois que sa présence serait justifiée aujourd'hui, sauf que le gouvernement, au fil des ans, a perdu contact avec la base, et encore davantage celui qui a la gouverne du pays présentement. Le Parti libéral est coupé littéralement de la base. On dirait qu'il n'a d'oreille que pour les financiers, que pour ceux qui contribuent à sa caisse électorale.
Effectivement, les agriculteurs de l'Ouest sont forts mécontents. J'écoutais mon collègue du Parti réformiste qui disait: «Vous voulez la guerre dans l'Ouest, vous allez l'avoir avec les producteurs céréaliers tellement ils sont mécontents.»
(1105)
Je crois bien qu'il a exagéré. Il n'y aura pas de guerre, peut-être une guerre verbale, bien sûr, mais cela ne frappera pas tellement fort. Je peux vous dire que de tous les amendements, et de toutes les discussions que nous avons tenues lors des échanges au Comité permanent de l'agriculture, rares sont ceux qui ont été retenus. Pourtant, nous avions des motions fort intéressantes, mais les libéraux, à l'exception d'une seule, après avoir consulté «Dieu le père», c'est-à-dire le ministre lui-même, sont revenus, 48 heures plus tard, pour adopter la motion visant que 10 agriculteurs soient élus, et là, on a inclus dans la loi le chiffre 10.
Il y a 60 ans, la Loi sur la Commission canadienne du blé était justifiée et à propos. Je crois qu'elle l'est encore aujourd'hui, mais il faudrait que le gouvernement se réveille, apporte quelques modifications-un bon nombre de motions sont présentées-et en accepte quelques-unes.
Il faut rappeler également que la Commission canadienne du blé exerce un monopole, dans le sens qu'un producteur céréalier qui demeure à la frontière des États-Unis n'aurait pas le droit, comme il ne l'avait pas antérieurement d'ailleurs, de vendre sa récolte ou une partie de sa récolte à un prix supérieur à ses voisins américains.
La Commission canadienne du blé s'engage à acheter l'orge et le blé de tout producteur céréalier enregistré et évidemment, son jeu, je dis bien son jeu, entre guillemets, est de trouver le prix le plus élevé possible, soit à l'intérieur ou à l'extérieur du pays, pour la revente de ce blé et de cette orge.
Tout le blé et l'orge destinés à la consommation humaine doivent être transigés par la Commission canadienne du blé. Même au Québec, si vous avez besoin d'une quantité de farine, de blé pour la consommation humaine, non pas pour l'alimentation du bétail, il faut passer par la CCB, la Commission canadienne du blé.
Le conseil d'administration sera formé de 15 membres. Là, il y a déjà un avantage. Avant, c'était quatre ou cinq, il y en avait tout le temps un ou deux qu'il fallait renommer. Mais souvent, on a vu la Commission canadienne du blé être dirigée par trois personnes. Maintenant, il y en aura 15, dont 10-et cela, c'est un acquis de l'opposition, du Bloc québécois, appuyé en ce sens par le Parti réformiste. Nos amis libéraux ne voulaient pas l'inclure dans la loi, donc, après 48 heures de réflexion, après avoir consulté «Dieu le père», ce dernier a dit: «Oui, ça gronde tellement dans l'Ouest qu'on va leur donner le chiffre 10.»
Je préférais le chiffre 12, bien sûr, et le Parti réformiste préférait également 12, mais le Parti libéral voulait se garder la possibilité de récompenser les «patroneux», parce que les cinq autres postes à combler seront nommés par le gouverneur en conseil. J'ai posé une question aux hauts fonctionnaires, ce qui a déplu, bien sûr, au secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture, en lui demandant: «Peut-on connaître le salaire des personnes qui siègent présentement à la Commission canadienne du blé?» J'invite tous mes collègues à la Chambre à bien écouter.
Monsieur le Président, c'est peut-être votre salaire, soi dit en passant, mais savez-vous que le président de la Commission canadienne du blé gagne pas mal plus cher que vous, et il n'a pas à subir le test de l'électorat? Son salaire peut varier entre 115 000 $ et 144 000 $. Je vous promets, et vous pouvez le vérifier, ce n'est pas un bleu qui est là, c'est un rouge. Son adjoint a un salaire entre 110 000 $ et 129 000 $ et les commissaires reçoivent entre 110 000 $ et 129 000 $ eux aussi. Si bien que c'est souvent un endroit privilégié pour placer un député de qui on veut obtenir le comté, ce qui se fera, d'ailleurs, dans les quelques semaines et quelques jours qui vont suivre, lorsque le premier ministre déclenchera les élections, dimanche.
(1110)
Peut-être qu'un jour, le député de Malpèque siègera sur une de ces commissions, à 144 000 $ par année, sans test de l'électorat, parce qu'il sait très bien qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, le vent souffle et, semble-t-il que le vent conservateur, à l'Île-du-Prince-Édouard, souffle très fort. Il serait peut-être intéressé à s'accrocher à un emploi comme celui-là.
Le secrétaire parlementaire sourit; je sais qu'il a déjà pointé ces nominations, mais c'est ça, le patronage. C'est dans ce sens que nous, du Bloc québécois, avons toujours dénoncé, avec vigueur d'ailleurs, les fameuses nominations.
Dans ma circonscription, savez-vous qui siège à titre de présidente du conseil d'arbitrage à l'assurance-emploi?
Des voix: Non.
M. Chrétien (Frontenac): La soeur de la candidate libérale dans Frontenac-Mégantic.
Des voix: Ah, ah!
M. Chrétien (Frontenac): C'est une belle jeune fille qui a été nommée récemment par les bons offices de ce gouvernement. Lorsqu'on dit qu'on cherche la compétence, il faut la mettre, elle aussi, entre guillemets, car la condition sine qua non, c'est que la personne doit être libérale.
Un autre point qui cloche dans la réforme de la Commission canadienne du blé, c'est qu'on y inclut toutes les provinces. Le député de Malpèque a appuyé cela, sachant très bien qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, il ne se cultive pas beaucoup de blé et d'orge, mais plutôt des patates. Lorsque j'ai demandé au secrétaire parlementaire s'il prenait l'engagement que le quart des membres de la Commission canadienne du blé seraient des Québécois ou des Québécoises, il m'a répondu: «Mais non, vous ne produisez presque pas de blé ou d'orge, au Québec.» Pourquoi vous nous embarquez à l'intérieur de cette Commission, alors, puisqu'en principe, il n'y aurait que trois provinces et une petite partie de la Colombie-Britannique-mettez-en trois et demie, si vous voulez-où on cultive le blé et l'orge avec intérêt et en quantité industrielle?
Nous avons présenté des amendements, et je terminerai sur ces points, fort positifs pour améliorer la Loi sur la Commission cana-
dienne du blé, et pour donner, non pas satisfaction aux politiciens libéraux, mais aux producteurs céréaliers de l'Ouest. On a finalement accepté d'inclure le chiffre 10 qui représente le nombre de représentants élus, soit dit en passant. Mais je rappelle que le président-directeur général, celui qui détiendra le vrai pouvoir à la Commission canadienne du blé, sera nommé par le gouvernement, et ça, je ne le prends pas.
L'opposition officielle votera contre le projet de loi C-72 dans son ensemble, bien qu'il appuie le premier groupe de motions présentées par le Parti réformiste.
[Traduction]
M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je trouve que le débat déraille quelque peu. Au lieu d'entendre parler de la valeur du projet de loi, des consultations qui se sont tenues ou des efforts qui ont été déployés pour veiller à ce que toutes les personnes concernées aient leur mot à dire, je n'entends que des attaques à profusion. Peut-être est-ce à cause des élections qui approchent.
J'ai entendu le député réformiste proposer, il y a quelques instants, un nouveau départ. À leur arrivée à la Chambre des communes, les députés réformistes ont dit qu'ils allaient travailler d'une façon raisonnable, présenter leurs points de vue et débattre des questions en fonction de leur valeur. Toutefois, c'est bien la dernière chose qu'ils ont faite, semble-t-il, depuis un an. C'était triste à voir quand ils ont lancé des attaques et utilisé des arguments afin, peut-être, d'en tirer des avantages politiques. La réalité, c'est que l'on se préoccupait gravement de l'administration et de la régie de la Commission canadienne du blé et que des changements devaient être apportés à la loi régissant la commission.
Il ne fait pas de doute que nous avons tenu des audiences d'un bout à l'autre des Prairies pour nous assurer que les centaines de personnes et d'organismes concernés puissent faire valoir leur point de vue afin que nous ayons une bonne idée des changements à apporter à la loi. Le ministre a alors décidé de structurer les recommandations, d'écouter les intéressés et de leur donner l'occasion de répondre de nouveau. La prochaine étape du processus consistait à présenter les recommandations du groupe d'étude au public pour que celui-ci puisse faire des commentaires.
(1115)
Tout cela prend du temps, et c'est pourquoi le ministre n'a pas précipité les choses. Il a pris le temps d'examiner attentivement les sujets de préoccupation qui lui avaient été signalés et d'élaborer une série d'excellentes mesures. De cette façon, l'examen de la structure de la commission du blé s'est fait de façon appropriée, en tenant compte des recommandations que les intéressés avaient formulées. Ces mesures ont été structurées et réunies dans un projet de loi que le Comité de l'agriculture est allé présenter dans les Prairies pour entendre les préoccupations des agriculteurs de l'Alberta, notamment de Peace Valley, de la Saskatchewan, du Manitoba et que de tous les grands organismes à Ottawa. Il a fait un excellent travail de consultation en écoutant les récriminations des groupes intéressés.
Le gouvernement a proposé plusieurs amendements, à ce moment-là, pour tenir compte de toutes les questions soulevées par les gens et les grands organismes. Toutes le questions ont été traitées. Très franchement, mettre sept à douze mois à écouter les revendications des gens et à les transposer dans un projet de loi n'est pas une mince affaire. J'ai été très déçu de voir l'opposition attaquer en comité les fonctionnaires qui avaient pourtant fait un travail rigoureux. S'est-elle attaquée à la valeur même des propositions? Non. C'est tout simplement que l'opposition n'aimait pas le projet de loi.
Je suis convaincu que, peu importe ce que l'on aurait pu proposer, le Parti réformiste s'y serait opposé de toute manière. C'était leur position dès le départ. Même si certaines idées très valables ont été mises de l'avant, les réformistes n'ont jamais voulu admettre qu'il y avait quelque chose de positif. La petite politique pratiquée en l'occurrence n'est pas ce qu'il faut retenir du processus.
Cependant, nous étudions deux propositions d'amendement. La première élimine la mention que la Loi sur la Commission canadienne du blé lie Sa Majesté du chef du Canada ou d'une province. Cette disposition a été incluse pour plus de clarté étant donné que, selon l'interprétation juridique de la loi, celle-ci lie déjà les provinces. Il demeure important que tous les participants de l'industrie sachent que la loi lie les provinces. De cette façon, on peut assurer le maintien des méthodes de vente qu'a toujours suivies la Commission canadienne du blé. C'est la raison pour laquelle cette disposition a été incluse. La supprimer irait carrément à l'encontre de la nature même du projet de loi. Par conséquent, nous ne pouvons pas appuyer des changements à cette disposition.
Le paragraphe 18(1) de la Loi sur la Commission canadienne du blé dit actuellement ceci:
Le gouverneur en conseil peut, par décret, donner des instructions à la Commission sur la manière d'exercer ses activités et ses attributions.On propose les modifications suivantes à l'article 18 de la loi:
(1.1) Les administrateurs veillent à la mise en oeuvre des instructions données à la Commission, mais ils ne peuvent être tenus pour responsables des conséquences qui en découlent si, ce faisant, ils observent l'article 3.93.
(1.2) La Commission est, lorsqu'elle observe les instructions qu'elle reçoit, présumée agir au mieux de ses intérêts.(1120)
Le pouvoir de donner des instructions existe déjà dans la Loi sur la Commission canadienne du blé. Ce projet de loi n'affaiblit pas les pouvoirs déjà conférés à la Commission canadienne du blé par le Parlement. C'est pourquoi il faut maintenir le pouvoir du gouvernement de donner des instructions à la Commission canadienne du blé. Ce pouvoir n'a été utilisé que très rarement, et il n'y a aucune raison de croire qu'il sera utilisé plus souvent à l'avenir.
Les dispositions de l'article 10 du projet de loi visent simplement à garantir que de telles instructions seront observées, le cas échéant, et que les dirigeants, administrateurs et employés ne seront pas tenus responsables des conséquences pouvant découler de l'exécution des instructions données à la Commission par le gouvernement. Aux termes de l'alinéa 3.93(1)a) du projet de loi, les dirigeants, administrateurs et employés doivent agir avec intégrité et de bonne foi au mieux des intérêts de la Commission. L'article 10 précise que, en observant les instructions du gouvernement, les administrateurs agissent au mieux des intérêts de la Commission.
Nous devons nous assurer que les gens qui travaillent pour une société de ce genre sont protégés du point de vue juridique tant qu'ils agissent de bonne foi et respectent la loi. Nous ne pouvons pas appuyer les amendements proposés par le Parti réformiste à ce moment-ci.
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je parlerai aujourd'hui du projet de loi C-72, à l'étape de la deuxième lecture, que les libéraux ont déposé et qui vise à modifier la Commission canadienne du blé.
Je suis franchement étonné que ce projet de loi se soit rendu jusqu'à la Chambre. Cela n'aurait jamais dû être. Ce projet de loi n'aura pas les résultats escomptés par les agriculteurs de l'Ouest et il n'apportera pas davantage les changements que le gouvernement libéral avait envisagé d'apporter à la Commission.
Il est apparu clairement à l'étape de l'étude en comité et tout au long de l'étude article par article que ce projet de loi est une très mauvaise mesure législative. La Chambre n'aurait jamais dû en être saisie, et je suis déçu qu'elle l'ait été. Le projet de loi ne fait pas du tout, entre autres, ce qu'avait recommandé le groupe qui a examiné la Commission canadienne du blé et est allé un peu partout dans l'Ouest. Le groupe avait recommandé que la Commission rende des comptes aux agriculteurs.
À première vue, le projet de loi oblige la Commission, dans une certaines mesure, à rendre des comptes, mais bien peu. Il est évident que le gouvernement et les personnes qu'il nommera au sein de la Commission en auront le contrôle.
Les amendements que nous, réformistes, avons proposés auraient donné des résultats si le gouvernement ne les avait pas rejetés. Ils auraient contribué, dans une certaine mesure du moins, à remédier à certains problèmes. Il faut cependant reconnaître que ce projet de loi est lui-même irrécupérable.
Ce projet de loi ne fera évidemment pas l'objet d'un vote à la Chambre, et c'est très bien ainsi. Il sera rejeté. Peu importe que le prochain gouvernement soit dirigé par M. Preston Manning, parM. Chrétien ou par quelqu'un d'autre, nous devrons reprendre le travail. Je me rends compte que j'ai désigné certains députés par leur nom, mais je m'abstiendrai de le faire.
Cette mesure législative ne fait pas ce que veulent les agriculteurs. Une étude menée par le gouvernement de la Saskatchewan montre que 56 p. 100 des agriculteurs veulent avoir le choix de commercialiser leurs produits par l'entremise de la commission ou directement, d'eux-mêmes ou par l'intermédiaire d'une société céréalière, aux États-Unis ou dans d'autres pays. Cette mesure ne donne pas suite aux résultats de l'étude.
(1125)
La mesure ne correspond pas non plus aux résultats du plébiscite réalisé en Alberta, qui a montré que 66 p. 100 des agriculteurs de cette province veulent un double système de commercialisation, comme on l'appelle communément, c'est-à-dire le choix de commercialiser leurs produits par l'intermédiaire de la Commission du blé, d'une société céréalière ou de toute autre manière.
C'est ce que le groupe de consultation mis sur pied par le gouvernement a recommandé. Le groupe avait recommandé que l'orge soit vendue librement et que les agriculteurs aient le choix de la vendre par l'intermédiaire de la Commission ou sur le marché libre, au Canada ou à l'étranger. Le gouvernement n'a pas donné suite aux recommandations de son propre groupe de consultation.
Un sondage réalisé dans ma circonscription, Végréville, par TeleResearch Inc., a révélé qu'environ 85 p. 100 des agriculteurs interrogés par cette maison de sondage sérieuse-et j'avais déposé son rapport au comité afin que le gouvernement puisse en prendre connaissance-sont favorables à un système qui leur laisse le choix, à la commercialisation double, soit par l'intermédiaire de la Commission ou de leur propre initiative, dans le cas de l'orge. Dans le cas du blé, la proportion était un peu moins élevée, mais pas de beaucoup. Dans la circonscription de Beaver River, un pourcentage encore plus élevé d'agriculteurs voulaient avoir le choix et ne voulaient pas d'un monopole.
Ce projet de loi ne répondra pas aux voeux des agriculteurs de Végréville, ma circonscription, ni des agriculteurs de Beaver River, la circonscription de Deb Grey.
Le vice-président: Une fois de plus, le député ne respecte pas les usages de la Chambre. Aurait-il l'obligeance de ne pas désigner les députés par leur nom, mais par leur circonscription.
M. Benoit: Monsieur le Président, je m'en excuse. Je ne sais pas ce que j'ai aujourd'hui à citer des noms. Voici trois ans et demi que je suis à la Chambre et je n'ai jamais cité un nom. C'est probablement le dernier jour de séance de la Chambre et voilà que je commence à citer des noms. Peut-être est-ce à cause de l'imminence de la campagne électorale.
Si quelqu'un doit s'excuser, c'est au gouvernement libéral de le faire pour avoir prétendu que cette mesure législative répond aux souhaits des agriculteurs. Les députés ont examiné les amendements dont nous sommes saisis aujourd'hui; ils ne vont pas améliorer le projet de loi ou le rendre plus acceptable.
La plupart des agriculteurs veulent une Commission canadienne du blé qui leur rende des comptes. Et ce, que les agriculteurs soient en faveur du monopole de la Commission du blé, comme ils le sont majoritairement, ou qu'ils soient en faveur d'un double système de commercialisation qui permette aux agriculteurs de passer ou non par la Commission. Dans un cas comme dans l'autre, ce qu'ils
veulent, c'est une Commission qui leur rende des comptes. Or, cette mesure législative ne fait pas ça.
Le projet de loi prévoit un conseil d'administration partiellement élu. En comité, le Bloc a proposé que 12 sur 15 administrateurs du conseil soit élus. Les libéraux sont revenus avec un chiffre de 10 et c'est ce chiffre qui figure dans le projet de loi. Nous avons un conseil d'administration dont 10 membres-ce qui est du moins une majorité-sont élus. Quelle différence cela fait-il, s'ils n'ont pas le pouvoir d'apporter les changements qui devraient être apportés à la Commission? On leur accorde un pouvoir très limité. Le gouvernement garde la haute main sur la Commission en vertu de cette mesure législative. Les membres du conseil d'administration n'ont pratiquement aucun pouvoir pour ce qui est de changer la nature de la Commission et de donner aux agriculteurs le choix quant à la façon dont ils veulent commercialiser leur grain.
Le gouvernement empêche la chose en partie parce que le président du conseil et le président sont désignés. Le gouvernement peut garder le contrôle en partie grâce à ces désignations, mais aussi grâce à un mécanisme de sélection qui permet d'empêcher tout changement auquel la Commission canadienne des grains s'oppose pour une raison quelconque.
(1130)
Même si la majorité du conseil d'administration appuie ces changements, si la Commission canadienne des grains, qui relève du ministre, décide qu'il ne devrait pas y avoir de changements, il n'y en aura pas. De toute évidence, ces changements ne sont pas ce que les agriculteurs veulent, et c'est ce que nous constaterons pendant la campagne électorale.
Je pense que l'on s'en rendra très bien compte à ce moment-là. Ce n'est pas ce que veulent les agriculteurs. Le gouvernement libéral entendra ce message bien plus clairement qu'il ne l'a fait jusqu'à présent, lors de la campagne électorale.
Parmi les autres points sur lesquels nous avons travaillé au comité, citons l'absolution en matière de responsabilité que la mesure donne à la gestion de la Commission et même aux employés.
Si j'étais employé de la Commission canadienne du blé, pas un des commissaires, pas un des membres nommés du conseil d'administration, pas le président de ce conseil nommé également, ni le président nommé aussi, non, si j'étais un simple employé-et il y a de nombreuses personnes compétentes qui travaillent pour la Commission-, je serais inquiet de cette mesure législative. Les avis juridiques qu'on nous a donnés ne sont pas clairs. Il semble que cette mesure pourrait facilement être interprétée comme pouvant rendre les employés responsables d'erreurs faites par les membres du conseil d'administration ou les gestionnaires de la Commission.
Cette mesure législative n'aurait jamais dû être présentée à la Chambre. Je suis au moins heureux qu'elle ne sera jamais mise aux voix, parce que, franchement, elle ne le mérite pas.
M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, le représentant du Parti réformiste tente de m'accuser de ne pas être un agriculteur de l'Ouest. Je dois admettre que je ne suis pas un agriculteur de l'Ouest.
J'ai longtemps côtoyé les agriculteurs de l'Ouest et je suis parfaitement en mesure de parler de cette merveilleuse institution que l'on appelle la Commission canadienne du blé. J'aimerais relever certains points du député de Végréville. Il prétend que les producteurs n'exercent aucun contrôle et que les agriculteurs n'ont pas de choix. Bien au contraire, ils ont le choix et c'est justement le but du présent projet de loi. Celui-ci deviendra une loi habilitante, qui donnera plus de choix aux producteurs et plus de souplesse à la Commission.
Une voix: Vous ne l'avez pas lu.
M. Easter: Le député affirme que je ne l'ai pas lu. Je lui citerai une passage du projet de loi qui montre bien que le conseil d'administration exerce un contrôle très serré sur la Commission canadienne du blé. Le paragraphe 3.9(2) précise que «le président est le premier dirigeant de la commission; à ce titre, il assure, au nom du conseil, la direction et la gestion des activités et des affaires courantes de celle-ci. Sous réserve des résolutions du conseil, il est investi à cet effet des pouvoirs qui ne sont pas expressément réservés au conseil ou au président de celui-ci par la présente loi ou les règlements administratifs de la Commission».
Ce paragraphe explique clairement quel pouvoir exerce le conseil sur le premier dirigeant et le président de la Commission. C'est un projet de loi habilitante que présente le gouvernement et je suis fier de dire, en ma qualité de membre du Comité de l'agriculture, que nous avons consulté les producteurs et apporté des changements en fonction de leurs commentaires.
Ce projet de loi fait suite à tout un exercice de consultation et de prise en considération des opinions exprimées. Le projet de loi C-72 propose de modifier la Commission canadienne du blé et de lui donner les outils nécessaires afin qu'elle devienne une meilleure institution de commercialisation pour les producteurs céréaliers de l'Ouest.
(1135)
Étant donné que j'ai été président du Syndicat national des cultivateurs, j'ai toujours eu des opinions bien arrêtées au sujet de la Commission canadienne du blé. J'ai eu l'occasion de l'étudier et de me rendre à ses bureaux. J'ai écouté les producteurs au cours des vingt dernières années. Ils m'ont fait savoir qu'ils appuyaient cette institution de commercialisation.
La Commission canadienne du blé fonctionne bien; elle maximise les profits des producteurs sur le marché international. Elle a instauré un système qui permet aux agriculteurs de concurrencer les produits des autres pays sur le marché international au lieu de se faire concurrence entre eux. Le travail de la Commission repose sur les trois piliers suivants: le guichet unique, la mise en commun des bénéfices et les garanties du gouvernement.
Je demande aux députés réformistes d'écouter attentivement ce que je vais dire. Je sais qu'ils ne veulent pas entendre parler des bonnes choses et des bons arguments que propose notre gouvernement. Je vais citer les propos de Robert Carlson, du National Farmers Union, aux États-Unis, lorsqu'il a comparu devant le Comité de l'agriculture de la Chambre des représentants. Se plaignant de ce qu'il n'y avait pas chez eux d'organisme de commercialisation de ce calibre, il a dit: «Du point de vue de l'agriculteur qui veut jouer le jeu de la concurrence, nous n'avons pas, aux États-Unis, de véhicule comparable à la Commission canadienne du blé qui donne aux producteurs le pouvoir de commercialiser leur grain
sur le marché international. En gros, nous nous contentons de vendre notre récolte à l'entreprise locale de stockage de grains qui nous offre le meilleur prix et ensuite nous ne nous y intéressons plus.
«Le commerce d'exportation est dominé par un petit nombre de grosses compagnies qui cherchent à acheter à bas prix et à vendre cher pour accroître les revenus de leurs propriétaires qui ne sont généralement pas les mêmes personnes que celles qui ont produit les céréales dont elles font le commerce.
«Le but déclaré des partisans du libre-échange dans le secteur agricole est de faire le commerce de céréales, sans frontières nationales, sans subventions internes, sans quotas ni droits de douane, et sans mécanismes permettant de fixer un prix commun tels que les ECE. Ce serait un monde formidable pour les négociants en grain, mais un monde bien triste pour les producteurs qui deviendraient économiquement très vulnérables.»
Selon lui, il arrive souvent que les producteurs de différents pays «s'attaquent les uns aux autres au nom du libre-change» quand ils pensent que les autres bénéficient d'un avantage qu'ils n'ont pas. En guise de conclusion, il a dit: «Si nous détruisons les diverses institutions que les agriculteurs de divers pays ont édifié pour survivre économiquement, il ne restera rien d'autre que des agriculteurs exposés aux éléments au milieu des ruines des structures qui, jadis, leur donnaient du pouvoir et les protégeaient contre les géants qui dominent le marché.»
M. Carlson a tout dit. Il a parlé de la Commission canadienne du blé, cette structure qui donne du pouvoir aux producteurs. En tant que gouvernement, nous sommes à la recherche des instruments qui donneront plus de souplesse à la Commission. Je suis convaincu que l'approche proposée, en ce qui a trait aux membres du conseil d'administration, est la meilleure, puisqu'elle nous permet de nommer des personnes pour leur compétence en matière de commercialisation. J'ai cependant cédé sur ce point après que les producteurs m'aient dit qu'ils voulaient élire à la commission une majorité de producteurs afin de pouvoir gérer leurs propres affaires grâce à cette mesure habilitante. Nous avons cédé, et dix producteurs seront élus à la commission.
Il est évident, à regarder cette mesure législative, que nous avons écouté les producteurs et que nous avons accédé à leurs désirs. Je recommande aux réformistes qui s'en prennent constamment à la commission de lire ce document, à savoir le rapport annuel de la Commission canadienne du blé, qui, publication après publication, explique clairement comment la Commission canadienne du blé fournit tous les renseignements voulus. Aucun courtier en grains international ne fournit ce genre de renseignements. Il indique où se situent les marchés. Il publie les prix définitifs payés et montre clairement que, si on la compare aux autres organismes de commercialisation existant dans le monde, la Commission canadienne du blé est parfaitement en mesure de maximiser les prix et les revenus que les producteurs tirent du marché.
(1140)
Il s'agit, par cette mesure législative, de faire en sorte que la Commission canadienne du blé soit en mesure de poursuivre sa mission au siècle prochain, en conférant, grâce à une loi habilitante, plus de pouvoirs aux producteurs afin qu'ils puissent déterminer leur destinée avec l'assurance et l'appui du gouvernement canadien qui entend seconder leurs efforts en vue de bâtir le genre d'économie et de prospérité que les producteurs peuvent apporter à ce grand pays.
M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de voir qu'il y a des agriculteurs de l'autre côté de la Chambre. Il n'y a pas très longtemps, il y a eu un débat sur l'agriculture à la Chambre et il y avait de notre côté quelque 15 agriculteurs. Chez nos vis-à-vis, on retrouvait quelque 15 à 18 avocats.
C'est une partie du problème qui se pose. Les avocats, les bureaucrates et les politiques disent toujours aux agriculteurs ce qui est bon pour eux, plutôt que ce soit le contraire. C'est à la base du problème.
Je voudrais aborder une observation que le secrétaire parlementaire a faite. Il a déclaré que les députés réformistes ne voteraient probablement pas en faveur de ce projet de loi, peu importe son contenu. Lorsque j'ai entendu parler pour la première fois de certaines des modifications en ce qui concerne les administrateurs élus, j'ai envisagé très sérieusement d'appuyer le projet de loi. J'ai fait un sondage dans ma circonscription qui montrait très clairement que la majorité des agriculteurs souhaitaient continuer de traiter avec le monopole qu'est la Commission canadienne du blé.
Je suis heureux d'être membre d'un parti dans lequel je peux voter selon les souhaits de mes électeurs sans craindre d'en subir les conséquences. J'ai songé à voter en faveur du projet de loi C-72 jusqu'à ce que je commence à examiner ses dispositions. À ce moment-là, j'ai changé d'idée.
Je suis heureux de savoir qu'on n'adoptera pas ce projet de loi au cours de la 35e législature. C'est une bonne chose. J'ai parlé à beaucoup de gens et aucun des deux côtés n'est heureux. Les partisans d'un double système de commercialisation pensent que le projet de loi ne va vraiment pas assez loin. Par contre, le Saskatchewan Wheat Pool, le SNC et d'autres groupes pensent qu'il va trop loin.
Il est évident que la question est loin d'être réglée. Il faut en parler et la réexaminer au cours de la 36e législature.
Le problème dans le secteur de l'agriculture ne se limite pas à la Commission canadienne du blé. Il y a beaucoup d'autres questions qu'on doit régler pour rendre l'agriculture viable au cours du siècle prochain. C'est le cas, par exemple, de la question des transports.
Nous pourrions penser à ce qui s'est passé l'hiver dernier alors que le grain était paralysé dans l'ouest du pays. Le ministre a fait très peu pour résoudre ces problèmes. C'est un autre cas où le ministre n'a absolument pas assumé ses responsabilités.
Le député libéral de Souris-Moose Mountain a présenté un projet de loi d'initiative parlementaire qui donnerait davantage de responsabilités aux chemins de fer. C'est une bonne chose. J'aime cette façon de penser.
L'autre problème réside dans le fait que le gouvernement n'a pas mis en place un système dans le cadre duquel on pénaliserait les chemins de fer qui ne transportent pas le grain comme ils sont censés le faire et qui les récompenserait lorsqu'ils s'acquittent bien de leurs tâches. C'est un problème auquel il faut s'attaquer.
J'appuie le député de Souris-Moose Mountain. Bien entendu, lorsque ces choses se produisent, le gouvernement nous accuse de rechercher la confrontation et de critiquer toutes les mesures législatives présentées.
Je voudrais parler de la consultation un instant. Je trouve intéressant que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire ait formé un comité chargé de parcourir le pays pour consulter les agriculteurs et écouter les associations agricoles. Le ministre n'a pas apprécié le rapport qu'il lui a présenté. Il n'a pas donné suite aux recommandations de son comité.
(1145)
Cela me rappelle un grand nombre d'autres comités qui ont été créés au cours de la législature actuelle et de législatures antérieures. Certains membres bien pensants parcourent le pays, écoutent les gens et font des recommandations, mais le gouvernement de l'heure n'y donne aucune suite. On dépense des millions de dollars pour toutes sortes de rapports qui finissent sur les tablettes. J'estime qu'il s'agit là d'un grave problème.
Les agriculteurs de la circonscription de Moose Jaw-Lake Centre seront d'accord avec moi pour dire que la première modification à apporter à la commission du blé serait l'élection de tous les membres du conseil d'administration. Les gens conviennent que cela serait amplement suffisant pour l'instant. D'autres modifications pourraient être apportées plus tard, mais, avec celle-ci, nous aurons du moins une certaine emprise sur les administrateurs. Ils seront tenus de nous rendre des comptes. S'ils ne respectent pas les désirs de la majorité que nous formons, ils seront remplacés. Cette façon de faire se rapproche beaucoup de celle qui existe à la Chambre. C'est le bon côté de notre système.
Si, le 2 juin, les Canadiens ne sont pas en accord avec les politiques du gouvernement, ils le remplaceront.
M. Benoit: C'est une hypothèse merveilleuse.
M. Kerpan: Assurément. Le député de Végréville sourit et a toutes les raisons de le faire.
C'est une bonne chose que ce projet de loi ne soit pas adopté cette semaine. Nous présumons tous que des élections seront déclenchées ce week-end. C'est bien aussi. Pour ceux d'entre nous qui reviendront à la Chambre pour la 36e législature, il sera primordial que, en tant que Parlement, et non seulement en tant que gouvernement et opposition, nous collaborions pour résoudre les questions qui existent dans l'ouest ainsi que partout ailleurs au Canada.
Au cours des trois dernières années et demie, le ministre de l'Agriculture a très peu agi à l'égard des questions importantes. Peut-être y aura-t-il un nouveau ministre de l'Agriculture au cours de la 36e législature. Peut-être viendra-t-il d'un autre parti.
Je crois fermement qu'il y a de l'espoir pour l'agriculture dans notre pays et qu'elle connaîtra un brillant avenir, mais il faudra agir à partir de la base.
[Français]
Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le vice-président: La mise aux voix porte sur la motion no 1. Plaît-il à la chambre d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le vice-président: Le vote par appel nominal sur la motion est différé. Le résultat du vote s'appliquera aussi à la motion no 17.
[Traduction]
M. Strahl: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y aurait peut-être consentement unanime pour que l'on décide que la motion no 2 a été proposée et appuyée.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour autoriser un député présent à la Chambre à proposer et appuyer la motion?
Des voix: Non.
[Français]
Le vice-président: J'ai demandé le consentement unanime de la Chambre pour que quelqu'un d'autre présente la motion.
[Traduction]
Le député de Fraser Valley-Est a demandé le consentement unanime, mais il a été refusé. La motion no 2 n'est donc pas à l'étude. Il en va de même pour la motion no 3.
M. Strahl: Monsieur le Président, je crois que, du côté du gouvernement, on a accepté d'étudier un autre projet de loi à ce moment-ci. Nous devions débattre du projet de loi C-65 et c'est pourquoi mon collègue de Kindersley-Lloydminster n'est pas à la Chambre. Je pensais que c'était entendu.
(1150)
Si nous poursuivons le débat sur ce projet de loi, je demanderai de nouveau le consentement unanime pour que la motion inscrite au nom du député de Kindersley-Lloydminster puisse être proposée et appuyée à ce moment-ci.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour autoriser quelqu'un d'autre à proposer la motion?
Des voix: D'accord.
Une voix: Non.
M. Keyes: Monsieur le Président, je me demande si nous pouvons obtenir le consensus unanime pour suspendre les travaux pendant cinq minutes, afin de clarifier cette question et d'accélérer le rythme par la suite.
[Français]
Des voix: D'accord.
(La séance est suspendue à 11 h 51.)
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour ajourner le débat sur le projet de loi C-72 et pour aborder l'étude du projet de loi C-65.
Je pense que le député invoque le Règlement à juste titre, car il s'agit d'une motion à l'étape du rapport qui porte sur le projet de loi C-72.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Avant de passer à un autre recours au Règlement, je rappelle que le député a demandé le consentement unanime. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, j'ai deux rappels au Règlement.
À cause de problèmes de communication entre les partis, j'ai demandé le consentement unanime pour que la motion inscrite au Feuilleton au nom du député de Kindersley-Lloydminster puisse être proposée et appuyée même si le député n'était pas présent. Le consentement unanime a été refusé. Par conséquent, la motion a été rayée du Feuilleton.
Nous ne discutons plus de ce projet de loi, mais je me demande si nous pouvons obtenir le consentement unanime pour que la motion puisse rester au Feuilleton jusqu'à ce que nous débattions ce projet de loi ultérieurement.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
M. Strahl: Madame la Présidente, je dois demander le consentement unanime pour que tous les amendements au projet de loi C-65 inscrits au nom de divers députés soient considérés comme ayant été proposés et appuyés globalement, que les députés se trouvent à la Chambre ou non. Un grand nombre de députés vont parler de différentes motions.
(1200)
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Il y a 115 motions d'amendement inscrites au Feuilleton à l'étape du rapport du projet de loi C-65.
Les motions nos 29, 39 et 114 sont inscrites uniquement au nom du député de Nunatsiaq, qui vient de remettre sa démission. Elles ne peuvent donc pas être mises à l'étude.
Les autres motions seront regroupées aux fins du débat de la manière suivante.
Le premier groupe comprend les motions nos 1, 3, 4, 6, 7, 11, 19, 25, 27, 50, 54, 56 à 60, 62, 63, 65, 66 et 82 à 109.
[Français]
Groupe no 2: Les motions nos 2, 15, 16, 17, 21, 24, 26, 34, 35, 44, 45, 49, 55, 64, 74 et 81.
[Traduction]
Le groupe no 3 est constitué des motions nos 5, 8, 9, 10, 12, 13, 14, 18, 20, 22, 23, 31, 32, 46, 47, 51, 52, 61, 67, 68, 69, 70, 75, 79, 80, 110, 111 et 115.
[Français]
Groupe no 4: Les motions no 28, 29, 30, 33, 53, 71, 72, 76, 77, 78 et 112.
[Traduction]
Le groupe no 5 comprend les motions nos 36 à 43, 48, 73, 113 et 114.
On peut consulter les modalités du vote sur les motions de chaque groupe au bureau de la Chambre. La présidence les rappellera aux députés au moment du vote.
Je mets maintenant en délibération les motions nos 1, 3, 4, 6, 7, 11, 19, 25, 27, 50, 54, 56, 57, 58, 59, 60, 62, 63, 65, 66, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103, 104, 105, 106, 107, 108 et 109.
M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD) propose:
Motion no 1
Que le projet de loi C-65, au préambule, soit modifié par substitution, à la ligne 28, page 1, de ce qui suit:
«retarder la prise de mesures pour»
Motion no 63
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par adjonction, après la ligne 43, page 22, de ce qui suit:
«h.1) une indication et une estimation de l'impact sur les communautés installées sur le territoire où l'on retrouve l'espèce, sur les travailleurs qui s'y trouvent et sur les usagers du territoire;»M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.) propose:
Motion no 3
Que le projet de loi C-65, dans le préambule, soit modifié par adjonction, après la ligne 3, page 2, de ce qui suit:
«la conservation se trouvera améliorée en raison de la sensibilisation du public chez lequel les considérations socio-économiques sont réunies à une éthique de l'environnement afin de réaliser un développement durable;»
Motion no 25
Que le projet de loi C-65, à l'article 8, soit modifié par adjonction, après la ligne 11, page 9, de ce qui suit:
«(1.1) Il demeure entendu que pour l'application du paragraphe (1), les «coûts» s'entendent des coûts supportés par une personne ou un organisme en raison d'une perte commerciale découlant de la mise en oeuvre d'un programme ou d'une mesure relatif à des activités de conservation des espèces sauvages touchant des biens-fonds dont la personne ou l'organisme est propriétaire.»
Motion no 27
Que le projet de loi C-65, à l'article 8, soit modifié par substitution, à la ligne 25, page 9, de ce qui suit:
«ou de la mesure et celles concernant la notification écrite à donner aux personnes qui seront directement touchées par le programme ou la mesure.»
Motion no 56
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 40 et 41, page 21, de ce qui suit:
«l'espèce est réalisable au point de vue technique, biologique et socio-économique. Il donne avis de ses»
Motion no 59
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 1 à 3, page 22, de ce qui suit:
«(5) Si le rétablissement de l'espèce est réalisable au point de vue technique, biologique et socio-économique, le plan de rétablissement doit traiter des»
Motion no 101
Que le projet de loi C-65, à l'article 69, soit modifié par substitution, à la ligne 23, page 36, de ce qui suit:
«dées dans le cadre du paragraphe 60(3). Au moment d'accorder un redressement en vertu du présent article, il tient compte des facteurs scientifiques et socio- économiques.»L'hon. Sergio Marchi (ministre de l'Environnement, Lib.) propose:
Motion no 4
Que le projet de loi C-65, au préambule, soit modifié par substitution, aux lignes 6 et 7, page 2, de ce qui suit:
«et appuyés; les intérêts-notamment socio-économiques-des communautés doivent être pris en compte lors du développement et de la»
Motion no 58
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié :
a) par substitution, à la ligne 40, page 21, de ce qui suit:
«l'espèce est réalisable au point de vue techni-»
b) par substitution, à la ligne 2, page 22, de ce qui suit:
«réalisable au point de vue technique et biologi-»
c) par substitution, à la ligne 15, page 23, de ce qui suit:
«de l'espèce est irréalisable au point de vue»
Motion no 62
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié :
a) par substitution, à la ligne 22, page 22, de ce qui suit:
«succès, notamment sur le plan socio-économique, de chacune des activités de recher-»
b) par substitution, à la ligne 40, page 22, de ce qui suit:
«cle 7 ou 8 en vue de promouvoir des actions volontaires ou des efforts»
c) par adjonction, après la ligne 43, page 22, de ce qui suit:
«h.1) une indication des terres faisant partie de l'habitat de l'espèce qui, pour l'application de l'alinéa 110.1(1)d) de la Loi de l'impôt sur le revenu, sont désignées comme fonds de terre sensible sur le plan écologique et dont le don peut constituer une déduction fiscale;»
Motion no 90
Que le projet de loi C-65, à l'article 60, soit modifié par substitution, dans la version anglaise, à la ligne 12, page 34, de ce qui suit :
«(b) caused or will cause significant harm to an individ-»
Motion no 98
Que le projet de loi C-65, à l'article 67, soit modifié par adjonction, après la ligne 10, page 36, de ce qui suit:
«(1.1) Dans toute action en protection, est réputée avoir exercé toute la diligence voulue la personne qui se livre légalement à une activité dont elle n'a aucune raison de croire qu'elle est susceptible de toucher l'individu, à l'habitat essentiel ou à la résidence en question.»
Motion no 102
Que le projet de loi C-65, à l'article 69, soit modifié par substitution, à la ligne 23, page 36, de ce qui suit:
«dées dans le cadre du paragraphe 60(3). Il tient alors compte des facteurs scientifiques et socio-économiques.»M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.) propose:
Motion no 6
Que le projet de loi C-65, dans le préambule, soit modifié par adjonction, après la ligne 19, page 2, de ce qui suit:
«les mesures prises en vertu de la présente loi doivent l'être en fonction des conséquences sociales et économiques qu'elles ont sur les groupes touchés;»
Motion no 7
Que le projet de loi C-65, dans le préambule, soit modifié par adjonction, après la ligne 19, page 2, de ce qui suit:
«le ministre compétent suspend l'application des dispositions de la présente loi relatives aux plans de rétablissement et d'aménagement s'il est démontré au ministre compétent que des mesures visant à protéger certaines espèces sauvages sont prises par des propriétaires de biens-fonds ou par toute autre parties intéressées ou que de telles mesures seront prises par ces parties dans un délai raisonnable, la suspension de l'application de certaines dispositions de la présente loi a pour but de renforcer la coopération entre les différentes paties intéressées,»
Motion no 11
Que le projet de loi C- 65, à l'article 2, soit modifié par adjonction, après la ligne 36, page 4, de ce qui suit:
«propriétaire d'un fonds de terre» Comprend toute personne qui loue un fonds de terre du gouvernement fédéral.»
Motion no 19
Que le projet de loi C-65 soit modifié par adjonction, après la ligne 10, page 7, de ce qui suit:
«3.3 Par dérogation à toute autre disposition de la présente loi, ne s'applique pas à un propriétaire d'un fonds de terre toute disposition de la présente loi-à l'exception des articles 31 à 33-ou toute disposition d'un règlement ou d'un arrêté d'urgence pris en vertu de la présente loi qui aurait pour effet d'entraîner pour celui-ci une dépense d'argent ou une perte financière quelconque.»
Motion no 54
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 33 à 37, page 21, de ce qui suit:
«(3) Lorsque le ministre compétent reçoit, dans les douze mois suivant l'inscription de l'espèce comme espèce menacée, en voie de disparition ou disparue du pays, une requête signée par la majorité des propriétaires de fonds de terre visés à l'alinéa 39b) lui demandant de tenir une ou plusieurs audiences publiques concernant l'élaboration du plan de redressement, le ministre doit :
a) tenir au moins une audience publique à cet effet au lieu et dans le mois indiqués dans la requête;
b) aviser les signataires de la requête de la date et du lieu de l'audience publique.
(3.1) Le plan de rétablissement est établi :
a) dans un délai de trois mois suivant la fin de la dernière audience publique tenue en vertu du paragraphe (3);
b) à défaut d'audience publique tenue en vertu du paragraphe (3), dans l'année suivant l'inscription de l'espèce comme espèce menacée, en voie de disparition ou disparue du pays.»
Motion no 66
Que le projet de loi C-65, à l'article 39, soit modifié par substitution, aux lignes 17 à 20, page 23, de ce qui suit:
«39. Le plan de rétablissement est élaboré en consultation avec:
a) toute personne que le ministre compétent croit directement touchée ou intéressée;
b) tout propriétaire d'un fonds de terre directement touché qui a indiqué par écrit au ministre compétent son désir d'être consulté à cet égard.»
Motion no 87
Que le projet de loi C-65 soit modifié par adjonction, après la ligne 23, page 33, de ce qui suit:
«59.1 Le ministre, par arrêté, suspend, pour une durée déterminée, l'application des dispositions de la présente loi relatives aux plans de rétablissement et d'aménagement ou certaines de celles-ci, s'il est démontré au ministre que des mesures visant à protéger une espèce inscrite comme espèce menacée, en voie de disparition ou disparue du pays sont prises par des propriétaires de biens-fonds ou par toutes autres parties intéressées ou que de telles mesures seront prises par ces parties dans un délai raisonnable.»M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.) propose:
Motion no 50
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié:
a) par adjonction, après la ligne 10, page 21, de ce qui suit:
«(1.1) Le ministre compétent tient au moins une séance publique dans la région visée par le plan de rétablissement afin d'entendre les observations des personnes intéressées à collaborer à l'élaboration du plan de redressement.
(1.2) Le ministre compétent fait publier dans la Gazette du Canada et dans un quotidien ou un hebdomadaire de circulation générale dans la région visée par le plan de rétablissement, au moins soixante jours avant le début de toute audience publique tenue par le ministre dans ladite région en vertu du paragraphe (1.1), un avis comportant les éléments suivants :
a) la mention que le ministre compétent doit élaborer un plan de redressement et tenir une audience publique à cet égard;
b) la date, l'heure et le lieu de l'audience;
c) la mention que toute personne intéressée à collaborer à l'élaboration d'un tel plan doit transmettre au ministre compétent, sous forme électronique ou autre, au moins trois jours ouvrables avant le tenue de l'audience publique, un avis indiquant son nom et son adresse et le fait qu'elle est touchée ou intéressée.
b) par adjonction, après la ligne 26, page 21, de ce qui suit:
d.1) toute autre personne ou organisation qui transmet au ministre compétent, sous forme électronique ou autre, au moins trois jours ouvrables avant le début de l'audience visée au paragraphe (1.1) un avis indiquant son nom et son adresse et le fait qu'elle est touchée ou intéressée.»
Motion no 57
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 40 et 41, page 21, de ce qui suit:
«l'espèce est possible au point de vue technique, socio- économique et biologique.»
Motion no 60
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 2 et 3, page 22, de ce qui suit:
«possible au point de vue technique, socio-économique et biologique, le plan de rétablissement doit traiter des»
Motion no 65
Que le projet de loi C-65, à l'article 38, soit modifié par substitution, aux lignes 11 à 16, page 23, de ce qui suit:
«(7) Le plan de rétablissement peut comporter des mesures limitées à l'interdiction des activités qui influent directement sur les individus de l'espèce ou leur résidence si le rétablissement de l'espèce est impossible au point de vue technique, socio-économique ou biologique.»
Motion no 82
Que le projet de loi C-65, à l'article 51, soit modifié par substitution, aux lignes 32 et 33, page 28, de ce qui suit:
«paragraphe (3), procéder, durant les heures nomrales d'affaires, à la visite de tout lieu, s'il a des motifs raisonnables et probables de croire que s'y»
Motion no 83
Que le projet de loi C-65, à l'article 51, soit modifié par substitution, à la ligne 17, page 29, de ce qui suit:
«l'autorisation écrite et attestée par témoins du propriétaire ou du locataire du local»
Motion no 84
Que le projet de loi C-65, à l'article 52, soit modifié par substitution, aux lignes 38 et 39, page 29, et aux lignes 1 à 3, page 30, de ce qui suit:
«matière de perquisition et de saisie à l'égard d'un bâtiment seulement s'il a l'autorisation écrite et attestée par témoins du propriétaire ou du locataire de ce bâtiment.»
Motion no 85
Que le projet de loi C-65, à l'article 57, soit modifié par substitution, aux lignes 1 et 2, page 32, de ce qui suit:
«57. (1) Le ministre compétent accuse réception de la demande et en fait parvenir une copie par courrier recommandé à chaque personne à qui la demande impute la perpétration de l'infraction, dans les vingt jours»
Motion no 89
Que le projet de loi C-65, à l'article 60, soit modifié par substitution, aux lignes 27 à 36, page 33, et aux lignes 1 à 3, page 34, de ce qui suit:
«a) le ministre compétent n'a pas rempli les obligations que la présente loi lui impose;»
b) il existe des motifs raisonnables et probables de croire qu'il y a collusion entre le ministre compétent et une personne à laquelle une infraction à la présente loi est imputée.»M. Mike Scott (Skeena, Réf.) propose:
Motion no 86
Que le projet de loi C-65, à l'article 59, soit modifié par substitution, aux linges 14 à 17, page 33, de ce qui suit:
«copie du rapport envoyée à ces dernières doit mentionner les nom et adresse de l'auteur de la demande.»
Motion no 88
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 60.
Motion no 91
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 61.
Motion no 92
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 62.
Motion no 93
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 63.
Motion no 94
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 64.
Motion no 95
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 65.
Motion no 96
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 66.
Motion no 97
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 67.
Motion no 99
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 68.
Motion no 100
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 69.
Motion no 103
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 70.
Motion no 104
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 71.
Motion no 105
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 72.
Motion no 106
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 73.
Motion no 107
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 74.
Motion no 108
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 75.
Motion no 109
Que le projet de loi C-65 soit modifié par suppression de l'article 76.(1205)
M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Madame la Présidente, nous faisons aujourd'hui un pas important en procédant à l'étude du premier projet de loi fédérale jamais présenté pour la protection des espèces en voie de disparition.
Il s'agit d'une mesure importante. Le gouvernement croit que prévenir la disparition d'espèces est un objet honorable, car cela assurera que nos enfants et nos petits-enfants reçoivent en héritage un pays aussi riche en espèces sauvages que celui que nous connaissons aujourd'hui.
De plus, en prévenant la disparition d'espèces animales, nous veillons également à conserver un environnement sain pour nous-mêmes. Il peut parfois paraître sans rapport que l'ours grizzly ou la pie-grièche migratrice disparaissent, mais ces phénomènes peuvent en eux-mêmes devenir des indicateurs des dommages que nous causons et qui touchent les êtres humains et l'ensemble de la planète.
Certains ont dit que le projet de loi va trop loin et qu'il accorde une valeur trop élevée à la nature. Le gouvernement n'est pas d'accord. D'autres disent qu'il ne va pas assez loin pour pourvoir aux besoins des espèces en voie de disparition. Là encore, le gouvernement n'est pas d'accord. Le projet de loi tâche d'établir un équilibre entre les divers intérêts sur la planète. Le gouvernement du Canada croit que nous sommes parvenus à un juste équilibre.
La mesure à l'étude est fondée sur la prémisse que l'on peut concilier les besoins de l'économie et ceux de l'environnement, que l'on peut protéger les espèces en voie de disparition et conserver quand même les emplois et une économie saine et florissante. Cela traduit l'engagement du gouvernement envers le développement durable.
Le projet de loi reconnaît aussi que la nature subit bien des influences. Les hommes et les emplois font aussi partie de l'équation. La perte d'emplois susciterait du ressentiment et de la méfiance. Il nous faut agir avec le consentement de la population si nous voulons qu'elle accepte des lois protégeant l'environnement.
Cette mesure législative comporte cinq grands volets. Premièrement, le projet de loi créé un groupe indépendant de spécialistes, de scientifiques, chargés de faire le point sur la situation des espèces en péril au Canada.
Le projet de loi tente de retrancher toutes les considérations politiques du processus de détermination des espèces menacées. Il convient de noter que le gouvernement se fondera sur des données scientifiques, et non des considérations politiques, des ouï-dire ou des opinions mal informées, pour déterminer quelles espèces sont menacées, quelles espèces ont besoin de protection et ce que nous pouvons faire pour les protéger.
Ce groupe indépendant et autonome de spécialistes s'appellera le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada ou le COSEPAC. Ses travaux seront fondés sur vingt années d'expérience, ce qui devrait donner une certaine capacité juridique à l'organisation.
Le COSEPAC fera des recommandations au gouvernement, qui dressera une liste des espèces devant être protégées immédiatement. Le comité comptera sur la compétence de ses membres ainsi que les connaissances traditionnelles des autochtones canadiens pour évaluer et déterminer les espèces à inscrire sur sa liste.
Chaque année, la liste officielle des espèces en péril au Canada sera publiée. En fait, la liste a été diffusée la semaine dernière. Le tableau qu'elle brosse prouve à quel point cette mesure législative est nécessaire. Le COSEPAC nous a appris que le nombre d'espèces en péril au Canada a considérablement augmenté au cours de la dernière année, passant de 276 à 291. Quinze espèces ont été ajoutées à cette liste en l'espace d'une année seulement. Nous ne pouvons plus tolérer cet état de choses.
Si la Loi sur la protection des espèces en péril au Canada avait été en vigueur lorsque a paru la liste du COSEPAC, on aurait pu s'en inspirer pour exiger des plans de rétablissement pour toutes les espèces considérées comme menacées ou en voie de disparition. Ces plans de rétablissement auraient été mis en oeuvre en temps opportun. Tous les intéressés, y compris les propriétaires terriens, les entreprises, les particuliers et le gouvernement, auraient participé au développement et à la mise en oeuvre des plans. Sans cette mesure législative, l'avenir de ces espèces est en suspens.
Ensuite, le projet de loi reconnaît qu'aucun gouvernement ne peut à lui seul s'occuper de toutes les espèces en voie de disparition. Les poissons nagent et les oiseaux volent sans se préoccuper des frontières politiques. C'est pourquoi des partenariats s'imposent et pourquoi il importait beaucoup que tous les gouvernements s'entendent sur un accord national pour la protection des espèces en péril, à Charlottetown, au début d'octobre 1996.
En octobre, les gouvernements fédéral et provinciaux se sont engagés à adopter des mesures législatives complémentaires et à établir des programmes pour la protection des espèces en voie de disparition. L'accord prend appui sur la législation qui existe déjà dans quatre provinces, à savoir: le Nouveau-Brunswick, le Manitoba, l'Ontario et le Québec.
En outre, le projet de loi établit un conseil de ministres comme mécanisme de collaboration entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux dans le but d'empêcher que des espèces disparaissent par suite de l'activité humaine.
Avec ce projet de loi, le gouvernement fédéral fait sa part. La mesure législative respecte les rôles traditionnels et constitutionnels que chacun des gouvernements joue dans la protection et la conservation de la faune. De nouvelles dispositions reconnaissent de façon plus claire les pouvoirs provinciaux et territoriaux dans la gestion des espèces animales en voie de disparition.
(1210)
Troisièmement, les espèces fauniques qui traversent les frontières internationales sont mieux protégées. Le projet de loi reconnaît l'importance de travailler en collaboration avec d'autres pays pour assurer la conservation des espèces en voie de disparition.
Lors des audiences de notre comité, nous avons appris que le grizzli se déplace du nord du Manitoba jusqu'au sud de l'Alberta et de la Colombie-Britannique. Il est protégé aux États-Unis, mais au Canada, il ne le serait que dans le parc national Banff. Le projet de loi à l'étude aidera à résoudre des problèmes comme celui-là. Il nous permettra aussi de prendre des mesures immédiates pour protéger des espèces fauniques exposées à un danger imminent lorsqu'elles traversent nos frontières.
Ce mois-ci, le ministre de l'Environnement a signé une entente-cadre de coopération avec le département américain de l'Intérieur, pour assurer la protection et le rétablissement des espèces fauniques en péril. Cette entente permet de mettre à profit les excellentes relations que nous entretenons avec les États-Unis, pour la gestion des espèces fauniques qui traversent les frontières.
Ensemble, nos deux pays assurent la gestion de plusieurs espèces d'oiseaux migrateurs et autres. Le programme de rétablissement de la grue blanche d'Amérique, qui a été couronné de succès, est reconnu dans le monde entier comme un exemple parfait de coopération et de partenariat entre deux pays poursuivant un objectif commun.
Les autorités de nos deux pays ont accepté d'échanger de l'information, de travailler ensemble à l'élaboration de plans de rétablissement et d'instaurer un partenariat entre tous les paliers de gouvernement, le secteur privé et la population, pour la conservation des espèces fauniques et des écosystèmes dont elles dépendent. Un plan de travail sera présenté au ministre de l'Environnement et au secrétaire de l'Intérieur, en décembre prochain.
Le projet de loi mise sur les efforts déployés volontairement par une vaste gamme de Canadiens, dont bon nombre ont appuyé le ministre de l'Environnement lorsqu'il a déposé le projet de loi en octobre dernier. Le gouvernement du Canada sait qu'il est nécessaire et avantageux de travailler ensemble, au nom de nos semblables. C'est une excellente nouvelle. Lorsqu'il y va de la protection d'un oiseau qui couve ses oeufs sur un rocher, les Canadiens ne veulent pas de chamaillerie politique au sujet du secteur de compétence dont relève le rocher. Ils veulent que nous nous assurions que l'oiseau puisse vivre et voler librement. La nature doit avoir préséance sur nos querelles de compétence.
Quatrièmement, le projet de loi permettra à la population de participer davantage à notre projet, celui de mieux protéger les espèces. Les Canadiens peuvent participer à toutes les étapes du processus, en proposant des espèces à inclure sur la liste, en élaborant et en mettant en oeuvre des plans de rétablissement et en participant à l'application de la loi.
Toute l'information sur le travail effectué en application de la loi sera disponible grâce à l'établissement d'un registre public. Ce projet de loi permettra à tous les Canadiens de juger si les espèces sont protégées de la disparition et si les préoccupations économiques et sociales liées aux ressources, aux usagers et aux collectivités sont traitées de manière équitable.
Parmi les partenaires essentiels à l'effort national, on compte les provinces, les territoires, les propriétaires de terres privées, les agriculteurs, l'industrie, les milieux environnementaux et scientifiques, les peuples autochtones et les particuliers. Tous ont une importante contribution à apporter. Sont particulièrement importants les peuples autochtones dont la gérance des terres a toujours compris la protection de la faune.
Le gouvernement du Canada reconnaît l'importance de l'importante contribution que les agriculteurs, les éleveurs et les propriétaires fonciers ont apporté à la protection des espèces menacées de disparition au Canada. L'opération relative à la chouette des terriers dans les Prairies est un des nombreux exemples qui montrent de quelle manière le secteur agricole a collaboré avec les pouvoirs publics et les groupes environnementaux pour protéger les espèces menacées d'extinction. La Loi sur la protection des espèces en péril au Canada favorise justement la conclusion de ce genre de partenariat.
Les particuliers pourront demander la tenue d'une enquête et auront accès aux tribunaux pour intenter une action en protection s'ils estiment que les mesures ne sont pas adéquatement appliquées. Ils pourront intenter des poursuites au civil pour forcer le gouvernement à remplir ses obligations. Ainsi, le gouvernement sera forcé de rendre des comptes. Aux États-Unis, quand le gouvernement ne remplit pas ses obligations environnementales, les citoyens interviennent pour le forcer à le faire. Toutefois, si nos pouvoirs publics font leur travail, les citoyens n'auront pas à les poursuivre.
J'admets que cette disposition du projet de loi a été critiquée parce qu'elle nous approche trop du modèle américain. Aux États-Unis, d'aucuns ont dit que le droit du public de poursuivre le gouvernement pour des questions environnementales a freiné le développement, entre autres choses. Cependant, comparer le projet de loi dont nous sommes saisis à la loi américaine, c'est un peu comme comparer des pommes et des oranges.
Des mesures de sauvegarde contre les demandes futiles ou vexatoires ont été prévues dans le projet de loi. Avant d'intenter une action, l'intéressé doit demander au gouvernement d'ouvrir une enquête et prouver ensuite devant le tribunal que le gouvernement a agi d'une manière déraisonnable. Cette disposition constitue une bonne protection contre les demandes futiles.
Enfin, le projet de loi est l'aboutissement de consultations qui ont duré plus de deux ans et demi. Des réunions publiques ont été tenues d'un océan à l'autre. Des documents de discussion ont été publiés et un groupe de travail environnemental et industriel a passé près d'un an à l'élaboration de propositions clés, dont 80 p. 100 se reflètent dans ce projet de loi. Nous avons entendu les représentants des secteurs de la pêche et des forêts et avons tenu compte de leurs préoccupations. En outre, 94 p. 100 des Canadiens appuient le projet de loi. Le gouvernement a reçu près de 80 000 lettres et pétitions sur le sujet. La participation du public a été et demeure un des éléments clés de la mesure législative.
(1215)
Le projet de loi prévoit un examen dans trois ans pour permettre au gouvernement du Canada d'évaluer les premiers progrès et d'apporter les modifications nécessaires à la loi.
Avec les amendements proposés aujourd'hui, nous voulons que la protection des espèces menacées au Canada soit juste, équitable et équilibrée. Pendant que le gouvernement surveillera les menaces possibles à la faune et prendra les mesures correctives nécessaires, les Canadiens, de leur côté, surveilleront le gouvernement. Ils ne le laisseront pas, pas plus que l'industrie, revenir en arrière, et ils ont bien raison. Ils tiendront tous les législateurs responsables de leurs actes. Pour les générations futures, nous devons faire en sorte que la faune qui existe au Canada au XXe siècle soit encore là au XXIe siècle et au-delà.
La semaine dernière seulement, des experts nous ont dit que le monarque, un papillon connu de tous les enfants canadiens, était en danger. La Chambre ne pouvait recevoir message plus clair. Nous avons besoin du projet de loi et nous en avons besoin dès maintenant.
Le gouvernement du Canada tient à protéger efficacement les espèces menacées dans notre pays. J'exhorte tous les députés à appuyer le projet de loi.
[Français]
M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi C-65, mais vous noterez que je prends la parole en remplacement de ma collègue de Laurentides, parce que le projet de loi devait être adopté hier et ma collègue de Laurentides a dû se rendre dans son comté pour régler certaines choses aujourd'hui.
Je suis content qu'on ait obtenu le consentement unanime pour que les propositions d'amendement qui sont enregistrées au nom de la députée de Laurentides soient bel et bien enregistrées à son nom, puisque c'est elle qui a fait tout le travail, et c'est un excellent travail.
J'en reviens maintenant aux propos sur le projet de loi C-65. Voilà que nous revenons à la Chambre pour l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-65, Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada.
Ce projet de loi est l'aboutissement d'une promesse des libéraux dans leur fameux livre rouge, un livre rouge présenté depuis maintenant près de trois ans et demi. Il a fallu tout ce temps aux libéraux pour pondre ce projet de loi, alors que la vice-première ministre en faisait, dès son élection, un cheval de bataille. Aujourd'hui, les libéraux ramènent ce projet de loi uniquement pour démontrer qu'ils portent un certain intérêt aux espèces et, par ricochet, à l'environnement. Pourquoi? Parce que le bilan des libéraux en matière d'environnement est fort mince, pour ne pas dire inexistant. Ils doivent déposer quelque chose sur la table, à la dernière minute, pour bien paraître avant le déclenchement des élections.
Les libéraux, qui avaient promis mer et monde en environnement, tombent aujourd'hui bêtement dans des manoeuvres électoralistes. Dans tous les dossiers environnementaux, notamment dans celui sur la réduction des gaz à effet de serre, les libéraux ont marqué le pas. De la vice-première ministre au ministre actuel, les libéraux ont été incapables de livrer la marchandise. Tous les groupes environnementaux sont d'accord sur la piètre performance des gens d'en face en environnement.
De l'autre côté de la Chambre, on parle, on tient de beaux discours, on a même dit à plusieurs reprises, sur des tribunes internationales, que le Canada jouait un rôle de leader mondial en environnement. Quelle farce. Quelle mascarade de la part des libéraux.
Le plus grand rôle qu'ils ont tenu est sans conteste celui de motormouth, qu'on pourrait traduire en français par «gros parleur, petit faiseur». Voilà leur bilan: rien que des paroles et des paroles, qui n'ont eu aucun effet bénéfique pour l'environnement. Si leur bilan est chétif, il faut certainement regarder-et je vois la Présidente sourire-du côté de l'influence des ministres seniors, des ministres ayant du poids au sein du Cabinet. Ainsi, il apparaît clairement que les ministres associés aux affaires, à l'économie et à la finance sont ceux qui mènent au sein du Cabinet et qui, conséquemment, relèguent aux oubliettes le ministre de l'Environnement et toute cette question.
Il est aussi important de regarder l'influence des lobbies en cette matière. Là aussi, il est clair que les groupes environnementaux et les écologistes ne feront pas le poids devant le monde des affaires et de l'industrie. Malheureusement, les ministres influents du Cabinet sont directement branchés sur ces lobbies de l'industrie et des affaires. Ces ministres leur accordent toute leur attention, toutes leurs oreilles.
Je voyais récemment un reportage sur l'importante question de la réduction des gaz à effet de serre. Ottawa a formé un groupe diversifié afin qu'il lui soumette des propositions pour diminuer ces gaz.
(1220)
Ce groupe de travail, dont plusieurs groupes environnementaux faisaient partie, s'est littéralement fait fermer les portes de plusieurs avenues de réduction, particulièrement les avenues proposant des mesures contraignantes et une possible taxe sur le carbone. Ces propositions furent totalement mises à l'écart à la suite des pressions de l'industrie regroupées dans un important lobby nommé Friday Group. On n'entendit plus parler que de mesures volontaires et la taxe sur le carbone disparut.
Pendant ce temps, on voyait le premier ministre lui-même sur des tribunes albertaines en compagnie de la ministre des Ressources naturelles de cette province et des hauts dirigeants de l'industrie. Suivi le pacte fiscal de près de six milliards de dollars accordés à cette même industrie.
En regardant ce reportage, on comprend bien maintenant pourquoi le Canada ne peut atteindre ses objectifs de réduction et ainsi remplir ses engagements pris lors du Sommet de Rio.
Le projet de loi C-65 émane d'une proposition législative de l'ex-ministre publiée en août 1995. À partir de ce moment, un groupe de travail fut formé, incluant des associations ayant des intérêts divergents-des écologistes, des industries-autour d'une même table, pour une rare fois. Un travail très important fut réalisé par ce groupe et un rapport fut remis au ministre. Par ailleurs, un accord fut signé à Charlottetown entre le ministre fédéral et les ministres provinciaux et territoriaux concernant la protection des espèces. Cet accord national fut signé en octobre 1996.
Enfin, le ministre déposait, à la Chambre, son projet de loi, le 31 octobre 1996. C'est à ce moment que commença la saga du projet de loi C-65, un long cheminement marqué principalement par le mécontentement de tous et par l'improvisation et l'incompétence du ministre et de la secrétaire parlementaire.
Dès le dépôt du projet de loi, les environnementalistes et les groupes sont venus dire au gouvernement que le projet de loi C-65 était nettement insuffisant et le qualifiaient de très petit pas pour la protection des espèces. Les groupes ont immédiatement entrepris leur démarche de pression auprès du ministre afin de modifier le projet pour le rendre plus conforme à leur vision. Les groupes voulaient que le fédéral se donne tous les pouvoirs sur les espèces, de même que sur les habitats, peu importe les juridictions de territoire ou leur propriété.
Les groupes environnementaux ont cette vision que le gouvernement fédéral doit être le protecteur national et que, de ce statut, le fédéral doit faire fi des autres juridictions. Selon mon opinion, les groupes devraient quelque peu changer leur vision sur cette question, car le fédéral est loin de recevoir la note de passage en matière d'environnement.
De plus, les coupures au sein du ministère dénotent le peu d'importance qu'accordent les libéraux à l'environnement. De par son éloignement du terrain des vaches, permettez-moi l'expression, le fédéral ne constitue certes pas le palier idéal. Il n'est pas plus apte non plus à protéger et à conserver l'environnement.
Vous devinerez que pour nous, députés du Québec, il est difficile d'acheter la vision nationale de ces groupes. Nous avons, au Qué-
bec, des lois et des règlements en environnement qui sont tout à fait convenables, et ce, depuis 1989. Certains de nos règlements et certaines de nos lois furent même pris en exemple par le fédéral. Alors, pour nous, tout ce qui signifie empiétement, ingérence et dédoublement est inacceptable.
En plus des groupes environnementaux insatisfaits, l'industrie ajoutait également son mécontentement. Dans le domaine des mines, des forêts et de l'agriculture, les intervenants dénonçaient vigoureusement le projet de loi.
À cette voix, ajoutons celle des autochtones qui disaient que leurs compétences et leurs connaissances n'étaient pas reconnues par le projet de loi. Enfin, les provinces et les territoires unissaient leurs voix dans une lettre adressée au ministre afin de dénoncer le non-respect du principe de l'accord national, de même que l'ingérence du fédéral dans leur champ de compétence. Ce n'est pas juste le Québec qui l'a demandé.
À la suite de ce mécontentement généralisé, le comité a entrepris l'étude article par article. Une centaine d'amendements furent déposés par des députés de tous les partis. Les amendements du Bloc québécois visaient principalement le respect des juridictions. Nous voulions que les provinces puissent gérer et contrôler leurs espèces sur leur territoire.
(1225)
Malheureusement, tous nos amendements furent défaits par la majorité libérale du comité. Menée par la secrétaire parlementaire qui, elle aussi, a cette vision nationale et cette vision canadienne de l'environnement, la majorité libérale a rejeté nos suggestions, préférant se rabattre sur des accords d'équivalence et des ententes avec les provinces pour gérer les espèces, mais toujours avec le fédéral qui tient le gros bout du bâton.
Pour nous, c'est inacceptable. Bien que la liste des espèces du Québec soit, à ce moment-ci, assez restreinte, le Québec possède la législation pour s'occuper efficacement de cette question. D'ailleurs, le ministre du Québec, qui a vivement dénoncé le projet, mentionnait que l'accord national devait permettre au fédéral et aux provinces de s'entendre sur des espèces à protéger, point à la ligne. C'était ça, l'accord.
Dès que le fédéral commence à jouer dans les habitats, les habitats essentiels, les résidences, il commence à pénétrer sur des territoires qui ne sont pas de sa juridiction. Enfin, les amendements que nous soumet aujourd'hui le ministre ne corrigent d'aucune façon la question des empiétements. Les députés du Bloc québécois seront contre ces amendements, contre le projet de loi, entendu que nos amendements seront, comme d'habitude, rejetés par les libéraux.
Je croyais que l'entente de Charlottetown visait à permettre une collaboration entre les provinces et le fédéral. On voit qu'encore une fois, le fédéral, à la veille des élections, est en train d'empiéter sur les juridictions québécoises, et ce n'est pas de cette façon qu'on va régler le dilemme.
[Traduction]
M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Madame la Présidente, le projet de loi C-65 est un exemple flagrant des préjugés qu'a le gouvernement libéral contre les gens qui vivent de la terre. Il les considère tous comme des êtres irréfléchis, irresponsables et insensibles que le gouvernement tout-puissant doit empêcher de détruire l'environnement, d'exterminer toute forme de vie animale ou végétale et, en plus de cela, de tirer sur leurs voisins déplaisants avant le petit-déjeuner avec leurs armes à feu non enregistrées.
Le projet de loi C-65 écarte la collaboration en faveur de la coercition de la part de l'élite urbaine, qui se croit moralement et intellectuellement supérieure aux agriculteurs, aux éleveurs et aux propriétaires de terrains boisés. Au lieu de consulter les habitants des régions rurales et de collaborer avec eux, le gouvernement a choisi de les menacer avec des amendes et des peines d'emprisonnement.
Les nombreux amendements proposés montrent à quel point ce projet de loi est imparfait. J'attire l'attention de la Chambre sur la motion no 86. Cette motion concerne l'alinéa 59(3)b), qui interdit au gouvernement de divulguer le nom du plaignant dans une action relative à l'environnement.
C'est si scandaleux que j'ai d'abord cru qu'il s'agissait d'une erreur d'impression. Cela ressemble tout à fait aux propositions faites par les provinces concernant l'établissement de lignes téléphoniques pour dénoncer les fraudeurs de l'aide sociale. Dans une société civile, il est fondamental que les accusateurs ne puissent pas garder l'anonymat, sauf dans les cas où la divulgation de leur identité pourrait mettre leur vie en danger. Je ne crois pas qu'un agriculteur accusé d'avoir tué un renard véloce engagerait un tueur pour éliminer son accusateur. Le droit d'un accusé de faire face à ses accusateurs est un principe de justice fondamental. Même les meurtriers ont ce droit.
Si on garantit l'anonymat, rien n'empêchera une personne, que ce soit un environnementaliste ou un voisin mécontent, de déposer une plainte vexatoire. Une personne qui dénoncerait sournoisement une autre personne qui pourrait fort bien ne pas avoir enfreint cette loi ne s'exposerait à aucune pénalité, à aucun sacrifice économique ni même à aucune marque de désapprobation de la part de la collectivité. Je ne comprends pas comment cette disposition a pu échapper au comité.
(1230)
Les motions nos 88, 91 à 100 et 104 à 109 visent à éliminer les articles 60 à 76 du projet de loi. Ce sont les articles qui donnent aux simples citoyens le droit d'intenter des poursuites au civil s'ils croient que le Service canadien de la faute fait preuve de laxisme dans l'exécution de ses fonctions.
Lorsque l'État présente un projet de loi visant à protéger ce qu'il estime être l'intérêt supérieur de la société, il doit prévoir dans ce projet de loi toutes les mesures nécessaires pour en assurer l'efficacité et non pas déléguer des pouvoirs à des individus qui peuvent très bien avoir leurs visées personnelles.
Nous n'avons pas besoin d'un gouvernement de style procédurier comme aux États-Unis. Ces articles ouvrent la porte au harcèlement des propriétaires terriens par des groupes écologistes radicaux. Il est déraisonnable et injuste de s'attendre à ce que des agriculteurs, des grands éleveurs et des propriétaires de boisés, dont beaucoup doivent se débattre pour assurer leur subsistance, se défendent contre de riches groupes de protection de l'environnement, dont beaucoup reçoivent des fonds du gouvernement.
Parmi les articles visés, j'attire particulièrement votre attention sur l'article 65, qui permet à des tiers d'intervenir dans une action, tenez-vous bien, «pour assurer une représentation appropriée et équitable de tous les intérêts privés et publics en cause». Rien que ça! Cette disposition a été formulée par un gouvernement qui n'a discuté de la documentation qui a servi à la préparation du projet de loi que dans des villes.
Voici ce que disait Nancy Greene Raine de ces petites consultations à la libérale: «Il y a tout lieu de s'attrister quand des mesures législatives peuvent être rédigées sans que les personnes touchées aient leur mot à dire.»
Je voudrais revenir un peu en arrière et parler de l'article 52. Cet article autorise les perquisitions sans mandat. Cela me paraît familier. Je serais presque porté à croire que cet article a été rédigé par le ministre de la Justice, dont le dédain bien connu pour les procédures équitables et les droits individuels est illustré par les dispositions très semblables du projet de loi C-68. Le ministre et le gouvernement n'aiment peut-être tout simplement pas les habitants des régions rurales. Peut-être aussi les libéraux sont-ils en plein délire autocratique.
L'un des pires éléments du projet de loi C-65, c'est qu'il n'existe aucune disposition claire sur l'indemnisation du propriétaire terrien qui perdrait une partie ou la totalité de ses moyens de subsistance-par exemple à cause de l'obligation d'enclore des points d'eau-en raison d'une action intentée par le gouvernement ou par de simples citoyens au nom d'une espèce menacée. Cela aussi est caractéristique de l'attitude du gouvernement envers les citoyens ordinaires.
Si un gouvernement encourage les Canadiens à dénoncer leurs voisins ou à intenter des poursuites judiciaires contre eux au nom de l'intérêt supérieur, ce même gouvernement devrait, en toute équité, prévoir des mesures qui permettent aux personnes visées par des poursuites de recouvrer tous leurs frais juridiques lorsqu'ils sont innocentés d'une accusation d'infraction à la loi.
L'absence de dispositions permettant de traiter équitablement ces personnes pourrait, en fin de compte, mettre en danger les espèces animales que le projet de loi vise précisément à protéger. La Chambre doit savoir qu'aux États-Unis, des sociétés immobilières font déjà paraître de la publicité qui atteste de l'absence d'espèces menacées sur des terres à vendre. Comment peuvent-elles en être aussi sures? Pourquoi tiennent-elles à ce que ces terres n'abritent aucune espèce menacée? Peut-être quelqu'un est-il intervenu en catimini pour faire en sorte qu'il ne reste aucune espèce menacée sur ces terrains. Si la société immobilière a pris la peine d'attester de l'absence d'espèces menacées sur ces terrains, c'est peut-être parce que personne ne voudrait les acheter sachant qu'il s'y trouve, par exemple, des rats-kangourous.
À cause de cela, les Américains ont aujourd'hui fortement l'impression que leur loi de protection de l'environnement, vieille de 21 ans, n'a profité qu'à une espèce de prédateurs, à savoir les avocats, mais pas aux espèces menacées.
(1235)
En janvier, le député de Davenport aurait déclaré ce qui suit: «Si nous voulons que la population accepte ce genre de réglementation, nous devons y aller en douceur au début.» Voilà qui en dit long. L'inquiétant dans tout cela n'est pas tellement le côté sournois des propos du député, mais le fait qu'il croit probablement sincèrement que le projet de loi C-65 représente vraiment une approche raisonnable et pondérée.
Je voudrais prendre les quelques instants qu'il me reste pour citer quelques extraits de mémoires présentés au comité permanent par l'association canadienne des éleveurs de bovins. Ce passage est très révélateur: «Le projet de loi dont le comité est saisi équivaut à une approche à l'américaine de la protection des espèces menacées. Il repose principalement sur la réglementation et la coercition et contient très peu de dispositions qui encouragent la coopération et le partenariat volontaires. Selon nous, la loi dans sa forme actuelle créera un conflit entre les propriétaires fonciers et les groupes de conservation et elle nuira à la survie de la faune sur les terres privées.»
Plus loin dans le même mémoire, on peut lire ce qui suit: «Ce projet de loi empiète sur les droits des Canadiens, en particulier sur leur droit de posséder des biens et d'en jouir. Nous croyons que l'érosion du droit à la propriété est nuisible pour la faune et les espèces menacées. Par ailleurs, la manière dont le gouvernement a protégé jusqu'ici les espèces qui relèvent directement de son autorité et qui ne se trouvent pas sur des terres privées, notamment la morue de l'Atlantique et le saumon du Pacifique, n'inspire guère confiance quant à sa capacité de maintenir et de mettre en oeuvre des mesures de protection à long terme.
[Français]
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la Présidente, le gouvernement joue un jeu enfantin, présentement, à quelques heures du déclenchement des élections.
Il amène à la Chambre des projets de loi qui, il le sait très bien, vont mourir au Feuilleton lors du déclenchement des élections, prévu pour dimanche après-midi à Shawinigan.
Il y a à peine quelques minutes, nous discutions d'un projet de loi, semble-t-il très attendu des producteurs céréaliers de l'Ouest, le projet de loi C-72, promis avec le nez de Pinocchio qu'il serait adopté en cette Chambre lors de la 35e législature, et qui va mourir au Feuilleton.
Quelques heures plus tard, pour se donner une belle jambe, le ministre de l'Environnement présente le projet de loi C-65 qui, à première vue, semble louable. Mais lorsqu'on regarde les points l'un après l'autre, on s'aperçoit que, encore une fois, le gouvernement fait fausse route.
Je vous lis le titre de la loi et vous allez comprendre que c'est très louable: Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada. Est-ce que vous êtes contre cela? Bien sûr que non, et moi non plus. Mais lorsqu'on regarde le projet de loi C-65, article par article,
on se rend bien compte que le ministre de l'Environnement fait fausse route, et je vous dis pourquoi.
Tout d'abord, je vous donne un exemple. Le gouvernement a établi des actions dites positives envers certaines espèces en voie de disparition. Écoutez bien, je vous donne l'exemple de la morue.
Il y a à peine trois ans, le ministre des Pêches de ce gouvernement, prévoyant que la morue, dans le golfe et sur la côte atlantique, était en voie de disparition, a pris une action positive: interdiction de pêcher la morue. Exactement ce qu'il fallait faire.
Cependant, quelques années plus tard, à la veille du déclenchement des élections, les morues se sont multipliées par un chiffre effarant. La longueur des morues est telle qu'on ne peut même plus les mettre dans notre assiette tellement elles ont profité. Donc, à quelques jours des élections, le ministre des Pêches autorise la pêche à la morue. Ça, c'est intelligent. Pour se gagner des votes, c'est intelligent, mais pour l'environnement, pour les morues qui sont en voie de disparition, ce n'est par vargeux.
(1240)
Je vais vous donner un autre exemple. Le faucon pèlerin est l'oiseau le plus rapide au monde. Lorsqu'on regarde des films d'époque ou de l'Antiquité, on voit le faucon pèlerin dressé pour aller attaquer un adversaire par un geste du propriétaire, et c'est très bien. Il est en voie de disparition ici. Ce n'est pas parce qu'on défait ses nids ou qu'on le tue-le problème est beaucoup plus profond que cela-c'est à cause de l'environnement, des gaz que nous rejetons dans l'atmosphère, des métaux lourds, notamment le mercure. Le résultat est que la maman pond des oeufs, et l'écail étant ultra mince, lorsque vient le temps d'incuber les oeufs, les parents les écrasent. C'est dû à un problème de pollution.
Qu'a fait la vice-première ministre pendant les 18 mois au cours desquels elle occupait la fonction de ministre de l'Environnement? Rien dans ce domaine. Que fait le nouveau ministre de l'Environnement, toujours bien vêtu, dans ce dossier? Rien. Là, il voudrait protéger les espèces en voie de disparition. Mais ce qu'il a oublié, c'est qu'il a été devancé par quatre provinces, le Québec, l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick, qui ont déjà leurs propres règles, leurs propres lois pour protéger les espèces en péril. Maintenant, il voudrait faire des chevauchements, dédoubler les ministères, dédoubler les réglementations et dire ensuite que cela va coûter moins cher. Ça, c'est intelligent.
En 1989, l'Agence de protection fut créée au Québec, non pas par un parti souverainiste, mais par Robert Bourassa lui-même qui faisait partie de la même équipe que les libéraux. Voyez-vous, on va dédoubler encore. Le Québec, l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick représentent au moins 60 p. 100 du territoire canadien. C'est encore une fois non intelligent de la part du ministre de l'Environnement.
Ce qui est pire, c'est que le gouvernement fédéral va s'approprier des domaines qui ne relèvent pas de sa compétence. Ce n'est pas rare que le fédéral, avec ses gros sabots, arrive dans le champ des provinces et disent: «Ôtez-vous de là, c'est moi qui arrive». Par exemple, il va s'occuper des espèces transfrontalières.
Je vous donne un exemple. C'est un animal qui peut changer de province ou de pays. Prenons l'exemple des lièvres. Le territoire d'un lièvre, c'est connu si vous étudiez le mode de vie des lièvres, n'est guère plus d'un kilomètre carré. Cependant, si votre lièvre est près de la frontière américaine, il ne pourrait pas arriver de temps en temps qu'il traverse la frontière sans visa? Oui. Je prends l'exemple du lièvre, parce que le territoire du lièvre est très petit.
Prenons maintenant le cas d'un loup. Le territoire d'un loup, d'un coyote, est 100 fois plus grand, donc 100 kilomètres carrés. Alors, un loup est appelé à voisiner le côté américain, le côté québécois et le côté ontarien. Donc, il deviendrait une espèce qui pourrait être incluse dans les espèces transfrontalières. Or, c'est inadmissible, puisque ce n'est pas un oiseau migrateur comme le canard.
J'ouvre une parenthèse pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent à la maison. Vous savez que si vous allez à la chasse, l'automne, à la perdrix, au lièvre, à l'ours noir ou au chevreuil, vous devez avoir un permis du Québec. Mais si vous désirez aller à la chasse au canard ou à l'oie blanche, il faut se présenter au bureau de poste-au bureau de poste, c'est intelligent encore-et acheter un permis dit fédéral pour les oiseaux migrateurs. Je conviens que les oiseaux migrateurs doivent être gérés, en tout cas dans notre système actuel, par le fédéral. Mais le lièvre, le renard, le loup, l'ours noir et le chevreuil relèvent des provinces.
(1245)
Un autre point qui me chicote touche les fameuses nominations. Vous le savez, et je vous vois encore sourire, je suis allergique au patronage et aux fameuses nominations faites, soit par le gouverneur en conseil ou encore, comme on le dit si bien dans le projet de loi C-65, sur recommandation de notre bon ministre de l'Environnnement qui ne connaît pas grand-chose pour sauver justement les espèces en voie de disparition. Il n'écoute que ses fonctionnaires. C'est lui qui aura la charge de nommer les neuf membres qui siégeront sur ce fameux comité.
Bien sûr, ils seront rémunérés-rien ne se crée et rien ne se perd-après avoir été nommés pour récompense politique, comme ça s'est produit dans ma circonscription: la présidente du conseil d'arbitrage à la Commission d'assurance-emploi-vous savez de qui il s'agit, je crois l'avoir dit hier-est la petite soeur de la candidate libérale dans le comté de Frontenac-Mégantic. Elle est peut-être compétente, mais elle est d'abord et avant tout libérale.
Auparavant, il y avait un président qu'on a dû remplacer par quelqu'un d'autre pour une raison majeure. Mais on n'a pas tenu de concours, et on a dû procéder de la même façon dans votre circonscription, pour nommer le directeur du scrutin des prochaines élections qui seront annoncées dimanche pour le 2 juin prochain.
C'est encore une fois scandaleux qu'on se serve de nominations dites partisanes pour protéger les espèces en voie de disparition.
Ici, dans le projet de loi C-65, on parle également de terres domaniales. Je respecterais que le ministre de l'Environnement dise «sur mes terres au Canada». Par exemple, dans le parc de la Mauricie ou dans le parc Forillon en Gaspésie, qu'on dise qu'on ne tuera pas l'orignal ou la perdrix sur ces terres, d'accord; mais si
l'orignal ou la perdrix sort de ces terres, eh bien, écoutez, ce gouvernement fédéral n'a pas acheté le pays.
Sur ma ferme, chez nous, il y a des chevreuils qui y viennent, et pendant la saison de la chasse, l'ami du directeur de scrutin de ma circonscription vient chasser le chevreuil chez nous. Alors, quand le chevreuil traverse de l'autre côté de la rue, il n'est plus sur ma terre, et je ne peux pas dire au chasseur: «Va le tuer, il est là-bas», mais plutôt: «Tu as le droit de chasser, mais chez nous seulement.»
Alors, que le gouvernement fédéral se mêle de ses affaires, qu'il protège les animaux en voie de disparition, oui, mais qu'il regarde d'abord où est le bobo pour après essayer de guérir le problème.
[Traduction]
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir à l'étape du rapport du projet de loi C-65 sur le groupe d'amendements no 1.
Les amendements du groupe no 1 portent sur trois points de préoccupation majeurs. Premièrement, l'approche choisie pour protéger les espèces en voie de disparition privilégie l'application de sanctions plutôt que la coopération.
Deuxièmement, l'indemnisation. On ne prévoit aucune forme d'indemnisation acceptable.
Troisièmement, la possibilité de perquisition et saisie. Le projet de loi donne le droit à quiconque d'intenter une action contre une personne qui, à son avis, a causé une atteinte à une espèce en voie de disparition.
Ces amendements portent sur ces trois points. Plusieurs ont été proposés par moi-même, d'autres par le député de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, notre porte-parole pour l'environnement, le député de New Westminster-Burnaby, le député de Skeena, et d'autres députés réformistes.
(1250)
Plusieurs amendements dans ce groupe viennent du gouvernement, ce qui montre que ce projet de loi n'a pas été bien pensé. C'est une chose que nous avons constatée lorsque nous avons examiné le projet de loi et les amendements proposés par d'autres députés. Ce groupe d'amendements porte sur les trois grands sujets de préoccupation de cette mesure législative.
Pour commencer, je voudrais dire quelques mots au sujet du projet de loi C-65, Loi sur la protection des espèces en péril. Je ne crois pas que qui que ce soit trouve à redire quant à l'intention de ce projet de loi. Le gouvernement a présenté cette mesure législative dans le souci de protéger les espèces menacées de disparition-un souci que nous partageons tous.
Toutefois, quand on examine le projet de loi de façon réaliste et qu'on y pense bien, s'il devait être adopté, même avec les amendements que nous examinons aujourd'hui, les risques seraient probablement plus grands pour les espèces en voie de disparition que s'il n'y avait pas de loi. Je m'explique.
Imaginons qu'un agriculteur, un éleveur, un travailleur forestier ou le propriétaire d'une terre à vocation commerciale à la périphérie d'une ville trouve sur sa terre une espèce en voie de disparition ou un habitat où pourraient vivre des individus d'une espèce en voie de disparition qui inscrite sur la liste.
Par exemple, il se peut qu'on trouve sur leur propriété une espèce menacée ou un habitat qui pourrait accueillir une espèce menacée. La personne visée sait que la loi en vigueur est sévère et qu'elle ne pourra pas simplement faire preuve de coopération pour la protection de cette espèce. Elle risque une amende de 1 million de dollars ou même plus, et on pourrait la forcer à assumer les frais de cour si des poursuites étaient intentées contre elle.
On pourrait forcer cette personne à clôturer une portion de sa terre pour la protection de cette espèce, à ses frais et sans indemnisation. Un dénonciateur anonyme, peut-être un voisin avec qui elle a eu maille à partir, pourrait la dénoncer aux autorités sans qu'elle sache jamais de qui il s'agit. De l'avis des députés, que fera-t-elle à la perspective de devoir assumer de tels coûts, amendes et procédures?
Dans bien des cas, des gens dans cette situation croiront qu'il n'y a pas de chances à prendre, même s'ils préféreraient contribuer à protéger cette espèce. Faire vivre leur famille est plus important que protéger l'habitat d'une espèce en péril. Dans bien des cas, je pense qu'ils détruiraient l'habitat et peut-être même l'espèce.
Ce n'est pas ce que je veux et je suis sûr que ce n'est pas ce que veut le gouvernement. Toutefois, c'est exactement ce que ferait probablement la mesure législative, si elle était adoptée. C'est inacceptable et nous devons faire quelque chose pour empêcher cela.
Certains des amendements que les réformistes ont proposés aideraient considérablement s'ils étaient adoptés. Les amendements que je propose portent sur la question de l'approche coopérative. Plusieurs de mes amendements proposent que si le propriétaire ou l'utilisateur d'une propriété qui abrite une espèce en péril ou a un habitat pour une espèce en péril peut démontrer qu'il protégera volontairement l'espèce, en collaboration avec d'autres personnes intéressées, on éviterait d'avoir recours aux parties punitives du projet de loi, qui sont d'ailleurs l'essentiel de celui-ci. Cela donnerait une certaine protection contre le gouvernement qui a eu la main passablement lourde avec ce projet de loi.
(1255)
J'ai présenté des amendements dans le domaine de l'indemnisation, tout comme le député de New Westminster-Burnaby. Ces amendements feraient que le propriétaire ou l'utilisateur d'un terrain n'aurait à supporter entièrement les frais encourus.
Le projet de loi contient des mesures inhabituelles et inacceptables en matière de perquisition et de saisie. Il permet également à un accusateur anonyme de dénoncer un voisin. Les députés de Swift
Current-Maple Creek-Assiniboia, de Skeena et d'autres ont proposé des amendements qui aideraient dans ces domaines.
La mesure législative n'a pas été mûrement réfléchie. Son intention est bonne, mais pas sa réalisation. Le mieux à faire serait de l'annuler. Le parti qui formera le gouvernement après les élections pourra alors s'attaquer à la question de manière plus efficace. C'est ce qui arrivera si c'est le Parti réformiste qui forme le prochain gouvernement. J'espère que les libéraux feront de même s'ils reviennent au pouvoir.
Il y a plus de 100 amendements qui ne résoudront pas convenablement toutes les questions qu'il faut régler.
Au nom de tous ceux qui dépendent de la terre pour gagner leur vie-qu'il s'agisse d'agriculteurs, d'éleveurs, d'exploitants forestiers ou miniers, ou encore de gens qui ont des propriétés commerciales aux abords des villes-et qui pourraient se trouver dépouillés par la mesure proposée, je dis reléguons ce projet de loi aux oubliettes. Si la majorité tient à l'adopter, alors qu'elle accepte au moins les amendements que nous avons proposés. Au moins ils réduiraient les conséquences fâcheuses de la mesure.
[Français]
M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre quelques minutes pour intervenir sur le projet de loi C-65, quoique tout le monde dans cette Chambre sache évidemment que ce que nous sommes en train de faire, c'est de garder la Chambre occupée.
On s'attend à ce que les élections soient déclenchées incessamment, et aujourd'hui, hier, avant-hier et depuis une semaine, le gouvernement tente par tous les moyens possibles de gagner du temps, de faire passer le temps. Donc, aujourd'hui, il nous présente ce projet de loi qui, on le sait très bien, ne dépassera pas l'enceinte de cette Chambre. Jamais ce projet de loi n'aura l'occasion d'être sanctionné et d'être mis en vigueur.
Quoiqu'il contienne un mécanisme d'inscription sur la liste des espèces désignées, de même qu'un processus pour veiller au rétablissement des espèces en péril, ce projet de loi contient plus de cent articles qui devraient être revus complètement, retournés à la table à dessin, parce qu'il ne répond nullement aux attentes des gens consultés.
Le comité a consulté beaucoup d'organismes. Par contre, on n'a pas tenu compte de ces consultations. Ce sont des consultations bidon qui ont été tenues. Les revendications, les observations des organismes n'ont pas été prises en compte. Ce n'est pas la première fois que ce gouvernement agit de la sorte. On l'a vu d'ailleurs avec d'autres projets de loi où, pour lui, la consultation n'est qu'une forme, soit pour dépenser de l'argent ou faire dépenser de l'énergie à des gens. Cela coûte très cher en temps. Est-ce qu'on tient compte de ces opinions-là? Absolument pas.
(1300)
Ce projet de loi devrait être révisé entièrement pour d'autres raisons également. Ce n'est pas seulement une question de consultation. Ce projet de loi ne respecte pas une autre belle promesse faite par ce gouvernement et surtout par ce premier ministre qui, dans le discours du Trône du 27 février 1996, disait, et je cite: «Le gouvernement fédéral proposera aux provinces une formule de partenariat considérablement améliorée dans des domaines, tels que la gestion de l'environnement et l'habitat des poissons d'eau douce.»
Ce que fait le gouvernement, c'est précisément le contraire des propos du premier ministre. Au lieu d'intégrer les instances provinciales dans le processus de désignation et de rétablissement des espèces menacées ou en voie de disparition, ce gouvernement les exclut. C'est encore une belle promesse non tenue.
Le projet de loi C-65 ne fait absolument rien en ce sens, pire, les agissements du ministre libéral de l'Environnement sont des plus douteux. Il convoque d'abord une rencontre des ministre provinciaux de l'Environnement pour leur soutirer un accord de principe sur la protection des espèces menacées. À peine quatre semaines plus tard, il dépose son projet de loi qui, à bien des égards, va complètement à l'encontre de l'accord de principe qu'il avait obtenu à ce moment-là.
Je vais vous citer les paroles du ministre de l'Environnement du Québec, même s'il a participé à ces rencontres, même s'il a signé l'accord. Dans un communiqué, il disait: «Nous ne pouvions rester indifférents au fait que cet accord ouvre la porte au chevauchement entre l'éventuelle législation fédérale et la loi déjà en vigueur depuis 1989 au Québec, une loi qui fonctionne bien et qui donne de très bon résultats. Nous risquons de vivre de nouvelles lourdeurs administratives plutôt que de consacrer nos énergies à ce qui nous tient réellement à coeur, le sort des espèces menacées.» Voilà ce qu'écrivait le ministre québécois de l'Environnement au ministre fédéral de l'Environnement.
En cours de route, les événements lui ont donné raison, on n'a qu'à voir le projet de loi actuel. Il multiplie continuellement les chevauchements. Ce que le Québec reproche principalement à ce projet de loi, c'est que le fédéral change complètement, à tout bout de champ, les règles du jeu en établissant plus que le territoire sur lequel se trouve une espèce. Cela a aussi aussi son importance aux fins de déterminer la juridiction applicable. Il tente même de s'arroger plus de pouvoirs en élargissant la portée de la définition de «territoire fédéral».
Le projet de loi lie les gouvernements fédéral et provincial, alors que plusieurs provinces s'opposent à ce projet de loi. Encore une fois, le fédéral veut imposer sa juridiction, alors qu'il avait plutôt promis une harmonisation. Donc, ce projet de loi menace directement les compétences de juridiction provinciale sous prétexte de vouloir rencontrer les exigences de la Convention internationale sur la biodiversité. Le gouvernement libéral tente de s'ingérer dans le champ de compétence des provinces.
(1305)
Ce gouvernement multiplie les chevauchements. Dans tous les domaines, notamment dans le développement régional, il y a une grande incursion du fédéral. On passe par-dessus la tête des provinces, on négocie directement avec les municipalités et les organis-
mes, qu'ils soient communautaires, humanitaires ou touristiques. On se fout de la compétence des provinces.
Ce projet de loi est également inquiétant, puisqu'il prévoit la possibilité, pour le fédéral, de négocier, et je le répète, directement avec les administrations municipales. Cela donne au ministre le pouvoir de s'ingérer en matière d'environnement puisque la mise en oeuvre, et je dis bien la mise en oeuvre, de mesures et de programmes reliés à des activités de conservation des espèces sauvages peut couvrir un vaste éventail d'activités, sans nécessairement respecter les pouvoirs constitutionnels.
Plus particulièrement, le ministre pourra outrepasser les gouvernements provinciaux en négociant encore une fois directement avec les municipalités. D'ailleurs, le Bloc québécois a déposé à cet effet plusieurs amendements qui consistent à impliquer davantage les instances provinciales. Par contre, la majorité libérale a ignoré ces amendements.
J'aimerais également vous entretenir du pouvoir discrétionnaire que ce projet de loi accorde au ministre. En effet, le ministre de l'Environnement devient le maître d'oeuvre de l'application de ce projet de loi. Il a la possibilité de décider des nominations au Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Il a l'autorité de décider de l'inscription d'espèces. Il a l'autorité de mettre en oeuvre le plan de redressement ou de ne pas le faire. Donc, toutes les décisions lui appartiennent.
En ce qui concerne le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, le ministre verra lui-même à sa composition. On sait qu'il sera composé de neuf membres et que le ministre aura la latitude de nommer qui il veut. C'est, encore une fois, une structure où ce gouvernement pourra récompenser des amis du régime, ceux qui remplissent les caisses électorales du Parti libéral, ou encore peut-être, réconforter des candidats libéraux défaits aux élections.
[Traduction]
M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je participe au débat sur le projet de loi C-65 et sur les amendements. Avant d'offrir une analyse critique de ce projet de loi, je tiens à dire que le Parti réformiste et moi-même sommes catégoriquement en faveur de la protection responsable des espèces en péril. Cependant, nous n'appuyons pas le projet de loi C-65 dans sa forme actuelle. Quand je parle du projet de loi, je parle également des amendements qui s'en viennent.
Avant d'expliquer pourquoi nous prenons cette position, permettez-moi de dire à la Chambre que cette mesure législative a déclenché un tollé général, tant dans ma circonscription qu'ailleurs au Canada.
(1310)
Je veux citer M. Roy Staveley, vice-président directeur par intérim de la B.C. Hydro: «J'aimerais maintenant aborder la question de la participation publique. B.C. Hydro convient que les Canadiens devraient avoir la possibilité de mettre en commun leurs connaissances et de participer aux efforts de protection et de rétablissement des espèces en danger. La façon la plus efficace de procéder est de s'en tenir à un processus ouvert et transparent. Nous trouvons que la Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada devrait renfermer davantage de dispositions prévoyant la consultation des parties en cause, du début jusqu'à la fin du processus, c'est-à-dire de l'inscription d'une espèce sur la liste à l'élaboration et à la mise en oeuvre du plan de rétablissement de cette dernière.
«La meilleure façon de protéger les espèces en danger est de collaborer avec les intervenants clés. Cependant, selon sa formulation actuelle, le projet de loi entraîne un chevauchement des pouvoirs de réglementation fédéraux, provinciaux et territoriaux, ce qui n'est conforme ni à la tendance à l'harmonisation et à l'action intergouvernementale en matière de protection environnementale ni à l'accord national et ce qui entraînera sans doute des conflits de compétences, des dédoublements, des difficultés d'exécution et d'administration, ainsi que de la confusion dans la population et une répartition inefficace des ressources déjà rares.»
J'aime bien comment l'honorable Stephen Kakfwi, ministre des terres et des ressources renouvelables du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, résume la situation: «Le problème fondamental du projet de loi déposé au Parlement, c'est qu'il n'est pas conforme à l'esprit et à l'objectif du travail remarquable accompli par tous les paliers de gouvernement, dont le gouvernement fédéral, en vue d'adopter une approche nationale coopérative pour défendre les intérêts des espèces menacées de disparition. L'ironie, c'est que les meilleures intentions ont été affirmées, mais que ce projet de loi détruira peu à peu les meilleurs plans.»
Le tollé s'est aussi manifesté à l'échelle locale, dans Cariboo-Chilcotin. Permettez-moi de lire à la Chambre certaines lettres que j'ai reçues. Un résident de Williams Lake affirme: «Ce projet de loi apaisera bien peu nos inquiétudes quant aux espèces menacées, mais il déclenchera une guerre judiciaire et ouvrira la porte aux groupes qui se moquent de son impact socio-économique ou du tort qu'il pourrait causer aux moyens de subsistance des travailleurs forestiers, des agriculteurs, des éleveurs, des mineurs et des autres travailleurs. Les tribunaux et les avocats feront choux gras de ce projet de loi.»
Le conseil municipal de Quesnel a adopté une résolution pour exprimer son opposition au projet de loi C-65 parce qu'il ne fait pas obligation de tenir compte des répercussions socio-économiques et communautaires, d'offrir une solution de rechange aux travailleurs touchés dans les communautés et qu'il ne garantit aucunement que les travailleurs, les collectivités et les autres parties intéressées participeront à l'élaboration du plan de redressement.
Le conseil du village de Clinton a déclaré que le projet de loi C-65 suscitait des préoccupations majeures pour les grandes industries de la Colombie-Britannique, surtout dans les secteurs des forêts et des mines. Ces deux secteurs sont le nerf de l'économie de la Colombie-Britannique et ils seront durement touchés par la mise en oeuvre du projet de loi C-65. Le conseil est d'avis qu'Ottawa devrait écouter.
Je ne peux qu'abonder dans le même sens que le conseil. Ottawa devrait écouter ce que les Canadiens pensent du projet de loi C-65. Les citoyens et les municipalités que je viens juste de citer ont des préoccupations légitimes et ils ont raison de s'inquiéter. Ils savent que le projet de loi C-65 est une mauvaise mesure législative et ils
souhaitent que le gouvernement écoute ce qu'ils ont à dire et réagisse à leurs préoccupations.
Un certain nombre des raisons pour lesquelles le projet de loi C-65 est une mauvaise mesure législative ont déjà été invoquées dans les déclarations que je viens de lire, mais j'aimerais insister sur certaines d'entre elles. C'est pour ces raisons que le Parti réformiste ne saurait accepter le projet de loi dans sa forme actuelle.
Premièrement, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, qui comprendrait neuf membres, tous nommés par le ministre, déterminera les espèces en péril, l'étendue du danger et l'habitat à considérer comme essentiel, puis conseillera le ministre sur les mesures à prendre pour la récupération de certaines espèces.
(1315)
Rien ne garantit que les parties intéressées participeront à l'élaboration du plan de redressement. Il s'ensuit que les propriétaires de terres privées pourraient être forcés de prendre des dispositions particulières à l'égard de certaines espèces en péril. C'est ainsi qu'un éleveur pourrait devoir séparer par une clôture une partie de ses terres afin de protéger une espèce en péril faisant son nid au sol contre les animaux qui paissent dans les environs. Malheureusement, le projet de loi C-65 n'offre aucune indemnisation à l'éleveur pour l'utilisation de son matériel, pour son temps, pour le fait qu'il doive laisser dormir une terre productive ou encore pour la diminution de la valeur de sa propriété.
À ce propos, permettez-moi d'exposer à la Chambre une situation qui s'est produite en Ontario il y a environ cinq ans.
Mme Strumillo-Orleanowicz possédait une propriété non bâtie de 100 acres près de Smiths Falls, en Ontario. Pour monter une affaire, elle avait projeté de se départir d'un terrain constructible. Malheureusement, la ministre des Ressources naturelles lui a refusé sa permission. Pourquoi? Le voisin de Mme Strumillo-Orleanowicz possédait à côté de sa propriété des terrains habités par la pie-grièche migratrice, une espèce en voie de disparition. Pour aider à protéger cet oiseau, la province a désigné 123,5 acres en tant qu'habitat essentiel de cette pie. Ainsi, Mme Strumillo-Orleanowicz ne pouvait céder ses terrains ni les exploiter pour réaliser des profits. Les créanciers ont saisi la propriété et elle a tout perdu. Le gouvernement ne l'a pas indemnisée.
La deuxième lacune du projet de loi C-65, c'est qu'il menace les droits et le gagne-pain de propriétaires de terrains responsables en élargissant les droits des groupes militants de s'adresser aux tribunaux pour empêcher la mise en valeur des ressources. Chose intéressante, ceux qui dénoncent un voisin peuvent demeurer complètement anonymes et ainsi, l'accusé ne peut confronter l'accusateur.
Par exemple, aux termes de l'article 60 de la loi, un bureaucrate ou un militant écologiste peut poursuivre un travailleur forestier, un éleveur, un propriétaire de terrain ou une entreprise qui, selon lui. a causé une atteinte importante à une espèce en voie de disparition ou à son habitat. Il se peut donc que les tribunaux soient inondés de poursuites contre des propriétaires de terrains.
Comment ces propriétaires vont-ils faire face à la possibilité d'être poursuivis devant les tribunaux? Leur réaction sera négative et ce sont les espèces en voie de disparition qui seront les perdantes en fin de compte. Ainsi, selon des éleveurs de bétail qui ont témoigné devant le comité de l'environnement, les propriétaires de terrains devront envisager sérieusement des façons d'éviter d'être exposés à des poursuites et de perdre des revenus à la suite des restrictions imposées en ce qui concerne l'utilisation de leurs terrains. La solution la plus évidente et la moins coûteuse consistera à éliminer tout habitat faunique sur leur terrain et, plus particulièrement, tout habitat qui attire des espèces qu'on pourrait considérer à un moment donné comme menacées ou en voie de disparition. Tout semble indiquer que la législation américaine sur les espèces en voie de disparition a déjà eu cet effet non désiré dans certaines régions des États-Unis.
La troisième lacune du projet de loi C-65 réside dans le fait qu'il foule aux pieds des principes fondamentaux de justice. Par exemple, aux termes du projet de loi, les autorités peuvent saisir des biens privés sans dédommagement, si on considère que la propriété en question est un habitat essentiel pour une espèce en voie de disparition.
De plus, le projet de loi C-65 donne la possibilité aux bureaucrates de procéder à des perquisitions et de saisir des biens privés sans mandat, si les circonstances l'exigent. C'est une disposition très inquiétante alors que le gouvernement est prêt à faire fi des droits et privilèges historiques des gens pour imposer son propre point de vue sur la façon dont les choses devraient se passer. Cette disposition est tout à fait inacceptable pour les Canadiens.
Le Parti réformiste a soumis 42 amendements au projet de loi C-65. Aux termes de ces amendements, le ministre devrait examiner les répercussions socio-économiques avant de recommander que des mesures ne soient prises. Nous voudrions qu'on prévoie un dédommagement, qu'on s'engage à préserver les espèces en voie de disparition et qu'on obtienne la coopération de tous les intéressés.
(1320)
[Français]
M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi C-65, Loi sur la protection des espèces en péril au Canada.
Quoiqu'il existait quelques lois fédérales qui permettaient au gouvernement fédéral d'intervenir en faveur de la protection de ces espèces, aucune législation fédérale directement vouée à la protection des espèces menacées n'était cependant en vigueur. Ce n'était pas le cas, pourtant, pour la province de Québec qui avait, elle, sa propre loi depuis 1989, ainsi que dans d'autres provinces comme l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick.
On avait mis en place un organisme, en 1978, qui regroupait certains organismes, comme des agences gouvernementales, des provinces, certains territoires, quatre organismes fédéraux et trois organismes de conservation nationaux.
Or, avant que ce projet de loi ne soit présenté, le ministre de l'Environnement a réuni, à Charlottetown, ses homologues des provinces en vue d'élaborer ce projet de loi. On dit souvent qu'il y a eu un accord de principe. Mais quatre semaines plus tard, cet accord
de principe a été obtenu sans qu'on ait déposé le projet de loi ou les textes comme tels et l'on sait que cela différait énormément.
Le ministre du Québec, David Cliche, disait, le 26 novembre 1996, et je le cite: «Le ministre fédéral vient de déposer à la Chambre des communes un projet de loi qui inquiète énormément la province de Québec. Je tiens à le mettre en contexte parce que ceci témoigne de la difficulté des relations fédérales-provinciales. C'est ainsi que récemment, je défendais les intérêts du Québec et je représentais le Québec au niveau de l'environnement et de la faune à Charlottetown. Nous nous étions entendus, nous avions même signé un accord à cet effet-comme je le disais tout à l'heure-que si le fédéral déposait une législation visant la protection des espèces menacées de juridiction fédérale, ceci devrait se faire dans le respect des juridictions provinciales, notamment des juridictions territoriales.»
Je cite toujours M. Cliche: «Nous pensions avoir convenu avec Ottawa du principe suivant, qui est simple pourtant, et je pense que c'est là tout le problème de ce projet de loi: si nous convenons qu'une espèce est menacée, il est du ressort de celui qui a juridiction sur le territoire et l'habitat de cet animal de faire en sorte qu'il soit protégé, afin que l'animal soit bien protégé dans son habitat naturel.»
Or, on est devant un projet de loi, encore une fois, duquel, en résumé, je pourrais dire ceci: le gouvernement fédéral tente de s'octroyer une juridiction provinciale, tout simplement pour raffermir son option centralisatrice et dominatrice par la justification de la Convention sur la biodiversité. On s'aperçoit que tel n'est pas le cas. On tente de limiter, d'établir une loi qui ne respecte pas ce qui existe déjà dans les provinces. Encore une fois, dans un autre domaine, nous allons nous retrouver avec deux lois qui vont tout simplement nous apporter des problèmes quant à l'application.
(1325)
Quels sont les problèmes majeurs qu'on retrouve présentement? Il y en a quatre. Le premier: on dit que le projet de loi C-65 menace directement la compétence des juridictions provinciales. C'est le fond du problème de cette loi. On vient tout simplement dans une juridiction qui appartient aux provinces et on tente, par ce projet de loi, de dicter à la province ce qu'elle devrait faire dorénavant.
En effet, sous prétexte de vouloir rencontrer les exigences de la Convention internationale sur la biodiversité, comme je l'ai dit il y a un instant, le gouvernement libéral tente de s'ingérer dans les champs de compétence provinciale. C'est le premier problème rencontré avec cette loi.
Le deuxième problème: le projet de loi C-65 ne respecte pas le partage des pouvoirs prévu dans la Constitution-j'en parlerai dans quelques instants-et l'interprétation qui en a toujours été faite, notamment parce qu'il repose sur une lecture beaucoup plus large de la définition de son territoire, et parce qu'il ne respecte pas la responsabilité constitutionnelle conjointe qu'il partage avec les provinces sur certaines espèces.
Le troisième problème majeur: le projet de loi C-65 octroie au ministre de l'Environnement un large pouvoir discrétionnaire, notamment celui de décider de la nomination des membres du COSEPAC. On sait que le COSEPAC est justement le comité qu'on avait mis en place en 1978, mais le travail de cet organisme était bénévole. Selon ce projet de loi, les membres de cet organisme seront payés et ils seront choisis par le ministre.
Finalement, le quatrième gros problème: le projet de loi C-65, au lieu d'intégrer les instances provinciales dans le processus de désignation de rétablissement des espèces menacées et en voie de disparition, les en exclut. Cette attitude est en complète contradiction avec les prétentions des libéraux, plus particulièrement des déclarations du ministre de l'Environnement et du premier ministre, lors du discours du Trône, qui tenaient un discours d'harmonisation et de partenariat.
On s'aperçoit, si on regarde la Constitution, comme on peut s'en douter, que la protection des espèces et de leur habitat n'est pas prévue dans le partage des compétences en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867. Ce n'est pas clair, ce n'est pas bien défini.
Cependant, en vertu de cette loi, les provinces ont juridiction sur l'administration des terres publiques appartenant à la province, qu'on retrouve à l'article 92 concernant la propriété et les droits civils, et sur toutes les matières d'une nature purement locale ou privée. Ces pouvoirs sont suffisamment larges pour permettre aux provinces de légiférer sur la faune et la flore, tant sur les terres publiques provinciales que sur les propriétés privées.
En un mot, on s'aperçoit que dans la Loi constitutionnelle de 1867, les responsabilités ne sont pas parfaitement définies. Cependant, on voit que les provinces ont autant de juridiction au niveau du territoire que le fédéral. Aujourd'hui, on dépose une loi qui élimine pratiquement complètement la responsabilité provinciale, pour établir, une fois pour toutes, comme on l'a vu dans tant d'autres lois, la responsabilité fédérale. En somme, c'est un problème de dédoublement et de gaspillage.
(1330)
Je termine en répétant, comme je l'ai dit il y a quelques instants, que les membres de ce fameux comité, en place depuis 1978, qui travaillaient bénévolement, seront dorénavant payés, ce qui devient une dépense additionnelle. De plus, ils seront choisis par le ministre.
Que la Chambre accepte de séparer la Partie III actuelle du Budget des dépenses en deux nouveaux documents, un rapport sur les plans et les priorités et un rapport de ren-
dement, que tous les ministères et organismes devront soumettre, à titre de projet pilote pour l'exercice 1997-1998, à l'examen des comités compétents:
1. dans le cas du rapport sur le rendement des ministères, à l'automne pour coïncider avec le Rapport du président sur l'examen;
2. dans le cas des Rapports sur les plans et les priorités, y compris les données financières détaillées établies en fonction de la structure des crédits en vigueur, au plus tard le dernier jour de séance précédant le 31 mars, pour renvoi aux comités et rapport à la Chambre conformément au paragraphe 81(4) du Règlement.Pour l'information de la Chambre, je crois qu'il y a eu des consultations avec le député réformiste de St-Albert et le député bloquiste de Saint-Hyacinthe-Bagot. J'ai l'autorisation signée.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter sa motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de traiter de la Loi sur la protection des espèces en péril au Canada.
En Colombie-Britannique, plus que dans toute autre province peut-être, les lois sur la protection de l'environnement, des espèces en péril et de toutes les autres espèces, notamment des ours, abondent dans le programme politique. Cette question est amplement traitée dans nos documents. Nous avons des rédacteurs pour les questions environnementales. En Colombie-Britannique, une foule de gens se préoccupent de l'environnement. C'est peut-être à cause de l'habitat de notre océan, des rivières, du saumon, ou je ne sais quoi, mais peut-être aussi de l'air salin. Quoi qu'il en soit, les gens se soucient de l'environnement.
M. Morrison: Les libéraux sont-ils en péril là-bas?
M. Strahl: Ils craignent peut-être que les libéraux soient une espèce en péril. Juste parce que nous sommes à la veille d'élections, nous ne pouvons pas le présumer. Je sais avec certitude que les conservateurs le sont, mais ne nous lançons pas dans des questions de forme.
Je voudrais mentionner deux ou trois préoccupations qu'ont les gens à l'égard des lois sur l'environnement. La vaste majorité des habitants de la Colombie-Britannique estiment que l'information publique et la sensibilisation en matière d'environnement arrivent presque en tête de la liste de leurs préoccupations sur le plan politique. Qui sait pourquoi?
Ma circonscription reçoit 60 ou 70 pouces de pluie chaque année. Toutes les activités, allant de la manutention du fumier sur les fermes laitières à la construction des chemins d'exploitation forestière dans les montagnes des environs, suscitent de graves préoccupations environnementales du fait que l'eau risque toujours d'emporter une route jusque dans le champ d'un agriculteur. Ces problèmes préoccupent les politiciens et inquiètent vraiment les gens de ma région.
D'un autre côté, certains craignent qu'une mesure législative comme celle dont nous sommes saisis n'empiète tellement sur leurs activités économiques et ne les restreigne qu'ils ont l'impression de ne jamais pouvoir se lancer dans une activité nouvelle sans être rappelés à l'ordre par le gouvernement ou critiqués pour avoir apparemment nui à l'environnement. En poussant à l'extrême, il suffirait que la population concentrée dans la vallée du bas Fraser respire pour constituer une menace pour l'environnement, mais il faut composer avec cela le mieux possible.
(1335)
Tel qu'il est proposé, le projet de loi ne représente pas la meilleure solution au problème des espèces en péril au Canada. Il est trop interventionniste. Il ne tient pas compte de l'activité économique terrestres qui ne présente pas de ans risques, que ce soit l'agriculture, l'élevage ou l'exploitation forestière.
Je voudrais citer un exemple. Avant d'être député, j'étais entrepreneur en exploitation forestière. J'ai passé toute ma vie dans la forêt, proche de l'environnement. Il y a une dizaine d'années, le problème de la chouette tachetée, par définition une espèce en péril, a causé tout un émoi dans la vallée du bas Fraser. À ceux qui l'ignorent, je précise que le territoire généralement attribué à la chouette tachetée s'étend sur toutes les forêts humides côtières du nord-ouest du Pacifique, aux États-Unis et jusqu'à quelques centaines de milles en Colombie-Britannique.
Les Américains, qui ont des lois sur la protection des espèces en péril semblables aux nôtres, ont jugé le problème de la chouette tachetée tellement grave dans ces forêts qu'ils en ont interdit l'accès. Ils ont mis un frein à l'exploitation forestière. Les villes dont c'était la principale activité sont devenues des villes fantômes. Des dizaines de milliers de travailleurs ont perdu leur emploi. Seule la chouette tachetée était heureuse. Les pertes économiques ont totalisé des milliards de dollars.
La peur entourant la chouette tachetée s'est répandue vers le nord, jusqu'en Colombie-Britannique où on a vu apparaître des patrouilles de protection de la chouette tachetée. On a engagé pour l'été des étudiants d'universités, surtout des diplômés en biologie. Deux par deux, ils se rendaient tard le soir, question de ne pas perturber l'environnement, dans les forêts que nous exploitions et ils stationnaient leurs camionnettes de camping. Ils faisaient jouer des enregistrements de hululements de chouettes tachetées. S'ils croyaient entendre une autre chouette tachetée répondre au loin, s'ils pouvaient entendre un hululement dans les environs, ils faisaient une marque sur leur carte pour indiquer qu'il y avait une autre chouette tachetée quelque part, tout près. Même s'ils ne l'avaient pas vue, ils savaient qu'elle existait. S'ils avaient entendu une chouette hululer dans la nuit, ils en concluaient qu'il fallait faire cesser d'abattre des arbres dans tout le bassin hydrographique. Qui sait s'il y avait vraiment ou non des chouettes tachetées dans le secteur? Personne ne les avait jamais vues, mais il y en avait peut-être.
Pour montrer à quel point tout cela devenait ridicule, leurs cartes indiquaient non seulement que l'habitat de la chouette tachetée s'étendait sur plusieurs centaines de milles à l'intérieur de la Colombie-Britannique, mais aussi que ces oiseaux établissaient leurs nids dans des secteurs situés entre 2 500 et 3 500 pieds d'altitude. C'est ce qui convient le mieux pour l'exploitation forestière. J'ai fait une bonne partie de ma carrière d'exploitant forestier à ces niveaux d'altitude, et jusqu'à 4 500 pieds.
C'est vraiment l'heure des confidences. Un jour, nous construisions un chemin dans une vallée où personne n'avait jamais vu de chouettes tachetées ni entendu dire qu'il s'en trouvait. Personne ne savait vraiment de quoi cet oiseau avait l'air. Nous avons trouvé par hasard un nid dans un arbre et, parole d'honneur, c'était un nid de chouette tachetée. Un tel animal existait donc, et il nichait dans cet arbre. Nous avons donc cessé d'abattre des arbres et interrompu la construction du chemin. Nous sommes descendus voir les environnementalistes au bureau du Service des forêts pour leur dire que nous avions vu une chouette tachetée. Nous étions allés au sommet de la montagne et nous avions vu une chouette tachetée.
Ils étaient pas mal excités. Cependant, après avoir consulté leurs cartes, ils nous ont dit: «Vous construisez un chemin à 4 000 pieds. Cela ne correspond pas à l'habitat des chouettes tachetées, car elles ne nichent pas au-dessus de 3 500 pieds. Il ne peut donc pas s'agir d'une chouette tachetée.» Nous leur avons soutenu qu'il s'agissait bien d'une chouette tachetée, que nous l'avions vue et qu'ils devaient venir le constater. Ils ont vérifié de nouveau sur leur carte et nous ont répondu: «Non, l'habitat de la chouette tachetée que nous avons établi ne va pas plus haut que 3 500 pieds d'altitude; il est donc impossible que votre oiseau soit une chouette tachetée. Vous pouvez faire passer votre chemin sur l'emplacement de l'arbre.» Nous avons refusé de le faire. Nous avons réussi à contourner l'arbre et avons épargné la chouette tachetée. Voilà qui montre bien à quel point il peut être ridicule parfois de demander à une société industrielle moderne de prendre les chouettes tachetées en considération. On en trouve une, et parce que l'oiseau ne correspond pas à certains critères imaginaires des environnementalistes, ces derniers ne s'en préoccupent pas.
(1340)
Un autre site où vivait une chouette tachetée se trouve dans un secteur d'exploitation forestière où j'ai passé ma jeunesse avec mes parents. Des universitaires sont venus examiner l'oiseau qui avait bâti son nid juste à côté du principal chemin forestier par où passaient de 40 à 50 chargements de billes de bois tous les jours. Les universitaires vont au pied de ce gros arbre et observent aux jumelles cette chouette tachetée qui se tire très bien d'affaire dans une zone où il se fait de l'exploitation forestière depuis 40 ans.
Ce projet de loi ne devrait pas être adopté tel quel parce qu'il a trop d'imperfections. En Colombie-Britannique, il se fait des dégâts indescriptibles. On se permet de tracer à coup de millions des routes qui traversent des vallées entières. L'entreprise que nous avons engagée a construit les routes, après quoi on est venu voir s'il y avait des chouettes tachetées. Une fois la route aménagée et les travaux terminés, on nous dit: «Je pense que j'ai entendu le hululement d'une chouette tachetée. Pas question d'exploitation forestière dans cette vallée.» Impossible de faire des affaires avec une mentalité comme celle-là.
Je me rappelle leur avoir dit: «S'il existe une espèce en péril, qu'on nous le dise, et nous allons nous débrouiller en conséquence, mais il ne faut pas imposer des règles arbitraires qui font en sorte que, après avoir dépensé beaucoup d'argent, nous ne pouvons obtenir aucune compensation. Il faut prévoir une indemnisation raisonnable dans le projet de loi pour que les agriculteurs, les éleveurs et les forestiers puissent faire leur travail tout en protégeant l'environnement.
Je ne crois pas que le projet de loi remplisse cette condition. C'est pourquoi il faut l'amender. Nous sommes heureux que le projet de loi ne puisse pas être adopté au cours de cette session-ci.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole au sujet du projet de loi C-65. Je pense que je résumerais bien ma pensée en disant, et cela a été repris par plusieurs de mes collègues également, que c'est une intrusion majeure du gouvernement fédéral, encore une fois, dans le champ de juridiction des provinces, et notamment du Québec.
D'ailleurs, je me suis référé à deux extraits de lettres que le ministre de l'Environnement du Québec a fait parvenir ici, à son honorable collègue de la Chambre des communes, dont une se rapporte à la définition des interprétations. Je cite le ministre provincial, M. Cliche, qui dit: «Ainsi, le gouvernement fédéral se définit, aux fins de la loi, un territoire domanial qui ne correspond nullement à la réalité. Il n'a jamais été compris jusqu'à maintenant que la gestion des pêches ou de la navigation sur les eaux intérieures et les eaux côtières signifiait que le gouvernement fédéral avait compétence sur l'ensemble des écosystèmes aquatiques, de même que sur le fond, le sous-sol et l'espace aérien de ces eaux.»
Voici un autre extrait de la même lettre qui, lui, se rapporte aux mesures de protection des espèces inscrites, et je cite le ministre de nouveau: «En outre, il paraît incongru, aux fins de la loi, d'assimiler les déplacements migratoires des espèces d'un pays à l'autre, ou leur répartition géographique de part et d'autre d'une frontière, de l'importation et de l'exportation des biens et services. En introduisant une nouvelle notion, celle d'espèces transfrontalières, le gouvernement fédéral pourrait s'attribuer une juridiction étendue sur la grande majorité des espèces d'une province.»
Il m'apparaît évident que le gouvernement du Québec ne voit pas d'un bon oeil ce projet de loi, pas plus que le Bloc québécois parce que, comme je viens de le dire, c'est encore une intrusion dans un domaine de compétence qui n'appartient pas au gouvernement fédéral. Mais comme toujours, le gouvernement fédéral essaie de trouver une brèche pour s'ingérer. À notre avis, ce projet de loi se trouve dans cette catégorie, c'est-à-dire celle de s'ingérer dans les compétences des provinces.
(1345)
Ce n'est pas uniquement le peuple québécois qui trouve que le projet de loi n'est pas très bon, il y en a d'autres, tels les peuples autochtones. J'ai eu le plaisir de lire le mémoire présenté par les peuples autochtones. Comme toujours, là aussi, les peuples autochtones considèrent que le projet de loi se penche très peu sur leurs besoins et qu'ils sont pas mal ignorés.
Finalement, j'ai pris connaissance de la façon dont les peuples autochtones considèrent la question des espèces menacées, parce que c'est peut-être le peuple canadien qui a provoqué l'ensemble du désastre. Leur philosophie, qu'on découvre en écoutant les discours
des aînés autochtones et des générations qui les suivent, est qu'ils considèrent la terre comme leur mère. Ils considèrent que les oiseaux, les plantes et les animaux sont leurs frères et leurs soeurs. Ils considèrent que les eaux et tous les cours d'eau sont un peu le système sanguin de la mère terre.
On s'aperçoit qu'ils ont une grande philosophie de respect de la nature et de la flore et de la faune. Ils considèrent que ce projet de loi ne les respecte pas dans leur culture et dans leur approche de l'environnement.
J'ai constaté que ce sont les pratiques de développement économique qui deviennent insoutenables pour les écosystèmes, et c'est ce qui met en péril les espèces. Ce ne sont pas les autochtones, ce ne sont pas les campeurs, ce ne sont pas les gens qui respectent la nature qui mettent en péril les espèces. Ce ne sont pas les gens qui respectent la nature qui mettent en danger les espèces menacées, ce sont beaucoup plus les façons et les pratiques de faire le développement économique.
J'ai vu des choses absolument terribles lors de mes nombreux voyages chez les autochtones, entre autres, dans des coins de pays où ces gens sont en train de revendiquer des territoires. J'ai constaté, par exemple, que dans les territoires des Nisga'a, des Chilcotin et des Carrier-Sekani, les coupes à blanc font un ravage terrible. Je pense que c'est là l'explication principale de la disparition d'espèces, soit la coupe à blanc.
Mon collègue du Parti réformiste tournait tantôt en ridicule le fait qu'on pourrait préserver un coin de forêt, parce qu'on a entendu un hibou crier. Je pense qu'il faudrait peut-être adopter une juste mesure entre les deux. Mais le fait de faire une coupe à blanc n'est rien pour préserver les espèces en voie de disparition.
C'est la même chose du côté des mines, un autre domaine de développement économique dont les nations autochtones sont victimes. Je pense, entre autres aux Dénés, dans les Territoires du Nord-Ouest, dans le Nunavut, qui sont maintenant un peu tassés, du côté des mines de diamant. Lorsqu'on procède à l'exploration minière, on met en danger la nature, la faune et la flore. Les espèces en voie de disparition sont également menacées par ce type d'exploitation.
C'est la même chose du côté de Voisey's Bay, où sont les Innu. Ils contestent les forages qui ont présentement lieu dans la région où on retrouve probablement une des mines les plus riches au monde. Encore une fois, on passe à côté des autochtones, on envahit le territoire revendiqué par les autochtones et on va piller les ressources naturelles qui s'y trouvent. Une fois les ressources naturelles pillées, une fois les forêts coupées, une fois les mines épuisées, on se retourne du côté des autochtones et on leur dit: «Maintenant, on est prêts à examiner vos revendications territoriales.» Ces exploitations minières, ces coupes à blanc ont des impacts majeurs sur les espèces en voie de disparition.
Je pourrais parler du projet hydroélectrique du Northern Flood Agreement au Manitoba au sujet duquel les Cris de cette province sont victimes. On a eu la possibilité, cette semaine, d'adopter les projets de loi C-39 et C-40 pour compenser les autochtones. Mais l'envahissement par le réseau hydroélectrique d'un bassin d'eau extraordinaire, dix fois plus grand que ce dont ils avaient besoin, fait en sorte que des groupes et des espèces seront certainement menacés par ce développement économique sans contrôle.
Je peux parler aussi des pêches intensives dans la région où se trouvent les Micmacs de la côte est, qu'on appelle d'ailleurs les peuples de l'aurore. Ils se retrouvent aujourd'hui devant des stocks de poisson presque dépourvus. Ils n'ont presque plus les moyens de pêcher, et pourtant, cela fait partie de leurs traditions.
Ce sont tous des exemples où les nations autochtones sont laissées pour compte, alors qu'elles sont préoccupées, non seulement par la nature, mais aussi forcément, par les espèces en voie de disparition. Ces nations ne s'attribuent pas la responsabilité de ces disparitions.
(1350)
D'ailleurs, je me suis employé à regarder, dans certaines communautés autochtones, leur grand respect pour l'ensemble des espèces, et particulièrement pour les espèces menacées. Par exemple, sur la réserve de la première nation de l'Île Walpole, il y a 37 variétés qui sont actuellement sur la liste des espèces en voie de disparition. Ces 37 variétés se sont regroupées, d'une façon intuitive et instinctive, à un endroit où elles sont le moins menacées, c'est-à-dire sur une réserve autochtone.
Un autre exemple que je peux mentionner, c'est Akwesasne. Ces autochtones ont investi de l'argent pour acheter une île pour protéger le grand héron bleu. Alors, on voit que les autochtones sont préoccupés par cette question et c'est dommage que, dans le projet de loi, on ne parle que brièvement, de temps à autre, dans les 19 premières pages du projet de loi, des nations autochtones, mais à la fin du projet de loi, on n'en parle plus du tout.
Donc, on reconnaît là le discours du gouvernement fédéral qui est souvent un discours fictif, rempli d'écrans de fumée, dans lequel on dit qu'il faut s'occuper des autochtones, parce que c'est important. Mais plus ça va, moins on s'en occupe et on ne tient pas compte du tout de leurs revendications et de leur importance dans un tel projet de loi.
Le Québec est à la recherche d'autonomie. Chaque fois qu'on envahit un de nos champs de juridiction, nous, on s'y oppose. C'est la même chose pour les autochtones. Ils sont très possessifs de leur autonomie gouvernementale. Ce type de projet de loi revient à leur dire: «Nous, on va faire des tests et maintenant, le gouvernement fédéral se mêle des espèces en voie de disparition. On va s'en mêler. On n'a pas besoin de vous, on s'en occupe.» Il y a donc des accrochages majeurs avec les autochtones à ce sujet, ils s'y opposent fortement.
Je trouve que le gouvernement a un lien fiduciaire avec les autochtones qui, encore une fois, se fragilise avec un projet de loi de ce type. Donc, encore une fois et comme ça arrive très souvent, le Québec et les autochtones se retrouvent du même côté dans ce débat, c'est-à-dire qu'ils ont d'énormes réserves vis-à-vis du projet de loi C-65. Des amendements ont été demandés, mais ils n'ont pas été acceptés. Donc, avec ce projet de loi, on adoptera des choses qui amèneront le gouvernement fédéral à s'ingérer dans la compétence du Québec, et les communautés autochtones, elles, seront ignorées.
Donc, pour toutes ces raisons, le Bloc québécois ne peut appuyer un tel projet de loi, parce qu'on est jaloux, contents et heureux d'avoir certaines juridictions et on ne veut pas être envahis par le gouvernement fédéral. Les nations autochtones sont dans la même barque, la même chaloupe, le même canot que nous. Elles ne veulent pas non plus voir le gouvernement fédéral leur passer
par-dessus la tête et imposer un projet de loi dans lequel il n'y a aucun partage.
C'est à peu près ce que j'avais à dire. Pour ces raisons, le Bloc québécois s'opposera naturellement au projet de loi C-65.
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Madame la Présidente, vous constaterez que ce n'est pas sans émotion que je prends la parole aujourd'hui sur un projet de loi portant sur les espèces en voie de disparition.
Comme société et comme collectivité, il faut prendre conscience de l'importance de notre écosystème. Il faut comprendre également que les humains ne sont qu'une partie intégrante de la biodiversité et que l'équilibre entre la faune, la flore et les humains est très important.
Statistiquement, on s'aperçoit qu'il y a de nombreuses espèces en voie de disparition. De nombreuses espèces sont disparues et, à ma grande crainte, de nombreuses disparaîtront encore. Cela me concerne grandement, puisque, dans 40 ans, attaquer la faune et la flore et tous ces animaux en voie de disparition aura un effet sur notre vie, bien que, bien souvent, on n'en connaisse pas toutes les espèces.
Au rythme actuel, 50 espèces par jour disparaissent dans le monde. Cinquante espèces, c'est énorme. Si on regarde le temps que cela a pris pour nous conduire au point où nous en sommes, on pourrait conclure que la fin du monde arriverait dans quelques milliers d'années, ce qui est très rapide.
(1355)
Donc, nous ne sensibiliserons jamais suffisamment la communauté internationale à l'importance de la flore.
Mais revenons à la politique et à ce projet de loi qui traite de l'importance de protéger nos espèces en voie de disparition. Oui, c'est important, mais il faut s'y prendre de la bonne façon, et au Québec, on s'est pris d'une certaine manière.
Mais encore aujourd'hui, j'ai l'impression de traiter du même sujet que d'habitude, c'est-à-dire l'ingérence du fédéral dans les champs de juridiction du Québec.
On se souviendra que l'ex-ministre de l'Environnement avait multiplié les groupes de travail et de consultation afin d'élaborer un projet de loi qui ferait du gouvernement fédéral un chef de file en la matière. Au printemps 1995, un projet de loi a été présenté par la ministre. Celui-ci a soulevé un tollé ainsi que des critiques, principalement chez les environnementalistes. L'un des principaux reproches formulés à l'endroit du projet de la ministre s'en prenait à l'application de la loi qui était restreinte aux seuls territoires fédéraux.
Ces groupes de pression environnementalistes ont fait valoir que seulement quatre provinces disposent d'une loi sur les espèces menacées et que, pour cette raison, le fédéral devrait absolument légiférer à la grandeur du Canada. À noter que le Québec a une loi sur les espèces menacées depuis 1989, ainsi que l'Ontario, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick.
Un an plus tard, l'actuel ministre de l'Environnement rencontrait les ministres provinciaux responsables de la Faune dans l'espoir de s'entendre sur un accord de principe visant à harmoniser les politiques de protection et de conservation de la faune. La rencontre a eu lieu à Charlottetown, le 2 octobre 1996. M. Cliche, le ministre de l'Environnement et de la Faune du Québec, même s'il a signé un accord de principe, a émis un communiqué de presse indépendant où il déclarait: «Nous ne pouvons rester indifférent au fait que cet accord ouvre la porte aux chevauchements entre l'éventuelle législation fédérale et la loi déjà en vigueur depuis 1989 au Québec, une loi qui fonctionne bien et qui donne déjà des résultats.»
Le Président: Cher collègue, vous disposerez encore d'environ sept minutes, si vous voulez continuer, après la période des questions orales.
Puisqu'il est presque 14 heures, nous allons passer aux déclarations de députés.