Agence de santé publique du Canada / Public Health Agency of Canada
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Volume 19, No 1- 2000

 

 

Agence de santé publique du Canada

Utilisation du frottis de Papanicolaou au Canada : Estimation basée surune population admissible rajustée en fonction des antécédents d'hystérectomie

Judy A. Snider et Janet E. Beauvais


Résumé

L'Enquête nationale sur la santé de la population (ENSP) de 1994 a confirmé que la tendance dans l'utilisation du frottis de Papanicolaou (test de Pap) n'a pas changé au cours des dix dernières années; 15 % des Canadiennes ont déclaré n'avoir jamais subi ce test et 15 % ont déclaré ne l'avoir pas subi au cours des trois années précédant l'Enquête. La plupart de ces femmes sous-desservies peuvent être qualifiées de défavorisées. En 1994, le taux de prévalence global de l'hystérectomie au Canada était de 16,3 % et il grimpait à 30 % dans le groupe des 35 à 55 ans. Les taux d'hystérectomie varient en fonction de facteurs sociodémographiques; les femmes ayant des niveaux de revenus et de scolarité plus bas sont proportionnellement plus nombreuses à subir cette intervention. Nous avons rajusté la population de femmes de l'ENSP, en soustrayant la proportion estimative de celles qui déclaraient avoir subi une hystérectomie, en vue de déterminer la population réelle à risque de développer un cancer du col utérin. Le pourcentage absolu de femmes ayant subi un test de Pap a augmenté (de 7 à 25 %); l'amélioration relative était beaucoup plus élevée. En rajustant la population admissible, on pourrait permettre aux programmes de dépistage de mieux estimer la taille de la population qu'ils sous-desservent.

Mots clés : Canada; cervical cancer screening; hysterectomy; Pap smear utilization; sociodemographic


Introduction

Le cancer du col utérin demeure une maladie importante du fait que, même si elle peut en grande partie être prévenue, elle continue d'affliger un grand nombre de Canadiennes chaque année. On estime qu'en 1997, le cancer du col utérin sera diagnostiqué chez 1 300 Canadiennes et qu'environ 390 d'entre elles en mourront1. Le test de Pap a été adopté il y a environ 50 ans pour déceler les lésions précancéreuses, mais il continue d'être sous-utilisé par certains segments de la population.

À l'occasion de deux ateliers nationaux2,3, on a discuté du dépistage du cancer du col utérin en général et reconnu de façon plus particulière la nécessité de mieux caractériser et recruter les femmes qui n'ont jamais ou n'ont pas régulièrement subi de test de Pap. Dans une étude récente4, il a été estimé que la proportion des femmes n'ayant jamais été soumise au test était demeurée stable à environ 15 % entre 1985 et 1994, et que 15 % des femmes de plus de 18 ans n'avaient pas subi de test dans les trois années précédant la dernière enquête.

On a beaucoup travaillé à caractériser les femmes sous-desservies4-6 et l'on a constaté qu'il s'agit généralement de femmes défavorisées sur le plan économique ou social. Malheureusement, ces études n'ont pas établi de distinction entre les femmes qui ont besoin de subir des tests de dépistage, mais n'y accède pas, et les femmes qui ne sont pas admissibles aux services de dépistage, notamment celles qui ont subi une hystérectomie totale, avec amputation du col, pour des affections bénignes ou celles qui n'ont jamais eu de relations sexuelles2. Les femmes inadmissibles sont essentiellement celles qui ont subi une hystérectomie, mais quelques autres - celles qui ont eu un cancer gynécologique diagnostiqué auparavant - sont également exclues de bien des programmes organisés de dépistage7,8.

L'hystérectomie est l'une des interventions chirurgicales les plus souvent pratiquées au Canada9. Les tendances dans le nombre des hystérectomies pratiquées au cours des 25 dernières années, selon les données sur l'hospitalisation10, révèlent que les taux d'incidence culminent dans le groupe des 40 à 44 ans. Il importe de signaler que le taux d'hystérectomie a diminué avec les années, passant de 2 419 pour 100 000 femmes au début des années 70 à 1 284 pour 100 000 femmes en 1990 (figure 1)10.


FIGURE 1
Tendances dans l'incidence de l'hystérectomie, par groupe d'âge
de 5 ans, 1969-1990, Canada

Source : Findlater R. Analyse statistique spéciale de Statistique Canada, comme publiée dans sa thèse (annexe F) [Référence 10]


   

La présente étude a pour but d'estimer les taux d'utilisation du test de Pap au Canada, en faisant les rajustements nécessaires pour tenir compte des femmes qui ne sont plus à risque de développer un cancer du col utérin parce qu'elles ont subi une hystérectomie et en utilisant les données sur la prévalence de l'hystérectomie recueillies dans le cadre d'une enquête canadienne récente. Bien qu'il existe de nombreuses estimations de la prévalence de l'hystérectomie10-15, les données présentées dans cette étude-ci décrivent plus particulièrement la prévalence de l'hystérectomie dans différents groupes sociodémographiques. Les taux rajustés d'utilisation du test de Pap donnent une meilleure idée de la proportion de femmes qui demeurent sous-desservies et qui ont besoin d'être ciblées par les programmes de dépistage du cancer du col utérin.

Méthodes

Nous nous sommes servis de deux sources de données pour les analyses effectuées dans le cadre de cette étude : les fichiers de données publiques de l'Enquête nationale sur la santé de la population (ENSP) et les résultats de l'analyse des données de propriété du Sondage Santé Canada (SSC). Ces deux enquêtes ont été effectuées au téléphone et elles excluait certaines populations, dont les habitants des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon. L'ENSP excluait également les régions éloignées du Québec et de l'Ontario, ainsi que les réserves des Premières Nations.

L'ENSP est une étude longitudinale qui recueille de l'information sur le même échantillon de répondants tous les deux ans depuis 1994 et ce, pour une période de 20 ans. Les méthodes d'échantillonnage et d'enquête ont déjà été décrites en détail16. L'échantillon de résidents invités à participer comprenait 8 848 femmes de 18 ans et plus. On a posé à ces répondantes plusieurs questions concernant la santé préventive; on leur a notamment demandé si elles avaient déjà subi un test de Pap et la date de leur dernier test (annexe).

Le SSC (enquête numéro 11, juillet-août 1994), qui était une enquête transversale, a permis d'interviewer 1 382 femmes de 15 ans et plus sur différents sujets liés à la santé ainsi que sur des facteurs sociodémographiques. Cette enquête comportait des questions soumises par Santé Canada sur les antécédents d'hystérectomie ou d'ovariectomie (annexe). Le SSC a utilisé une technique d'échantillonnage aléatoire stratifié à deux degrés. On a fixé des quotas pour chaque province, proportionnellement à la part de la population canadienne qu'elle représentait. Des techniques d'enquête téléphonique à composition aléatoire ont été appliquées pour sélectionner les ménages, et un répondant a été choisi au hasard dans chacun de ces ménages. D'autres détails sur les méthodes d'échantillonnage et d'enquête sont fournis ailleurs17.

Avant de rajuster les taux d'utilisation des tests de Pap fournis par l'ENSP à la lumière des taux d'hystérectomie du SSC, nous avons comparé les caractéristiques des répondantes de ces deux enquêtes. Au besoin, nous avons créé des variables calculées pour permettre le regroupement des valeurs des données en catégories comparables à celles utilisées pour les résultats du SSC.

Les variables suivantes dans l'ensemble de données de l'ENSP ont été classées dans de nouvelles catégories correspondant le plus possible aux données du SSC : les provinces ont été reconverties en régions et le niveau de scolarité a été divisé en deux catégories, soit «moins que le secondaire» et «secondaire ou plus», pour compenser les différences dans la classification. Le revenu du ménage dans l'ENSP est une variable calculée dont les valeurs limites correspondaient à celles du SSC, aux trois niveaux de revenu les plus bas. Il a été impossible de recoder la valeur limite entre les deux niveaux les plus élevés; par conséquent, la limite maximale pour les niveaux de revenu de l'ENSP est de 80 000 $, et il est de 75 000 $ dans le cas du SSC. La répartition des femmes par âge, région, revenu du ménage et niveau de scolarité était semblable dans les deux enquêtes (tableau 1). À l'aide du SAS18, nous avons effectué des analyses à une variable et à deux variables des données de l'ENSP.

TABLEAU 1

Proportion de femmes ayant répondu à chaque
question, par âge, région, revenu du ménage et
niveau de scolarité
a

 

ENSP (%)

SSC (%)

ÂGE (ans)
15-24

16,4

12,4

25-34

20,9

17,7

35-44

20,7

21,3

45-54

14,6

15,3

55-64

11,3

12,7

65+

16,0

21,0

RÉGION
Atlantique

8,3

8,7

Québec

25,3

24,3

Ontario

37,9

36,7

Prairies

15,9

18,4

Colombie-Britannique

12,6

12,0

REVENU DU MÉNAGE
Moins de 20 000 $

24,0

28,0

20 000-30 000 $

13,2

18,8

30 000-50 000 $

27,7

28,1

50 000-75 000 $ (SSC)/
50 000-80 000 $ (ENSP)

23,6

15,1

Plus de 75 000 $ (SSC)/
plus de 80 000 $ (ENSP)

11,6

   9,3

NIVEAU DE SCOLARITÉ
Moins que le secondaire

33,4

26,4

Secondaire ou plus

66,6

73,3

a Les totaux peuvent ne pas égaler tout a fait 100 % en raison de
l'arrondissement des chiffres.

   

Nous avons rajusté les taux globaux pour les tests de Pap tirés de l'ENSP en soustrayant la proportion estimative de femmes ayant subi une hystérectomie, de la population totale indiquée dans cette enquête. Nous avons répété ces calculs en vue de rajuster les taux en fonction de la date du plus récent test que les répondantes avaient indiqué avoir subi, soit dans l'année ou dans les trois années ayant précédé l'enquête. Nous avons également rajusté les taux en fonction des indicateurs sociodémographiques suivants : âge, région du Canada, revenu du ménage et niveau de scolarité.

Nous avons calculé de façon exacte les intervalles de confiance binomiaux à 95 % pour toutes les proportions, à l'aide d'Epi Info 619. Comme l'ENSP utilise un vaste échantillon, les intervalles de confiance étaient petits pour les tests de Pap déclarés par les répondantes. Les intervalles de confiance du plus modeste SSC étaient plus grands et faisaient état d'une plus importante variation dans la prévalence ponctuelle de l'hystérectomie. En présentant les taux d'utilisation des tests de Pap rajustés en fonction des données sur l'hystérectomie (figure 2), nous avons utilisé les intervalles de confiance à 95 % du SSC pour calculer les limites de confiance.

Résultats

En tout, 16,3 % des femmes de 15 ans et plus qui ont répondu au SSC ont déclaré avoir subi une hystérectomie, avec ou sans ovariectomie. Moins de 1 % des femmes de moins de 35 ans avaient subi une hystérectomie; cependant, la proportion de celles qui avaient subi cette intervention augmentait brusquement entre 35 et 55 ans. Près du tiers des femmes avaient, à 55 ans, subi une hystérectomie (tableau 2). La prévalence de l'hystérectomie au Canada variait d'une région à l'autre; la région de l'Atlantique affichait le taux le plus élevé, et les régions du Québec et des Prairies avaient les taux les plus bas.


TABLEAU 2

Prévalence de l'hystérectomie, par âge, région,
revenu du ménage et niveau de scolarité,
selon le SSC

 

Pourcentage de
femmes ayant
déclaré avoir subi
une hystérectomie

(Intervalle
de confiance
à 95 %)

ÂGE (ans)
TOTAL (données brutes)

16,3

(14,1-18,6)

15-24

0,0

(0,0-0,0)

25-34

0,6

(0,0-2,9)

35-44

10,0

(6,4-14,4)

45-54

26,8

(20,1-34,0)

55-64

30,6

(23,0-38,8)

65+

29,6

(23,6-35,8)

RÉGION
Atlantique

27,5

(18,7-37,5)

Québec

13,4

(9,6-18,0)

Ontario

16,3

(12,7-20,1)

Prairies

13,8

(9,3-19,2)

Colombie-Britannique

18,9

(12,7-26,7)

REVENU DU MÉNAGE
Moins de 20 000 $

20,2

(16,0-25,4)

20 000-30 000 $

18,9

(13,4-25,1)

30 000-50 000 $

12,4

(8,8-16,8)

50 000-75 000 $

13,3

(8,2-19,6)

Plus de 75 000 $

18,6

(11,0-27,7)

NIVEAU DE SCOLARITÉ
Moins que le secondaire

21,2

(16,6-26,3)

Secondaire ou plus

14,9

(12,5-17,6)


   

On observe également des variations dans la prévalence de l'hystérectomie selon le revenu du ménage et le niveau de scolarité; en général, les taux les plus élevés étaient observés chez les femmes ayant les niveaux de revenu et de scolarité les plus bas. Malheureusement, les estimations ponctuelles sont un peu instables, à cause de la petite taille de l'échantillon utilisé pour le SSC. Les grands intervalles de confiance associés au pourcentage élevé d'hystérectomies déclarées dans la région de l'Atlantique l'illustrent bien.

La proportion des répondantes de l'ENSP qui avaient subi un test de Pap au cours de l'année précédant l'enquête est ventilée par groupe d'âge dans la figure 2. L'utilisation du test de Pap culmine dans le groupe des 25 à 34 ans et diminue progressivement dans chaque groupe d'âge subséquent. Comme le montrent les résultats répartis par niveau de revenu et de scolarité (tableau 3), un pourcentage plus faible de femmes moins fortunées et instruites ont subi un test de Pap.


FIGURE 2
Proportion des femmes ayant déclaré avoir subi un test de Pap, par groupe d'âge,
non rajustée et rajustée selon qu'elles ont subi une hystérectomie, Canada

* Avant l'Enquête nationale sur la santé de la population (ENSP)


TABLEAU 3

Proportion de femmes ayant déclaré avoir subi
un test de Pap, non rajustée et rajustée selon
qu'elles ont subi une hystérectomie, par région,
revenu du ménage et niveau de scolarité

 

Pourcentage non
rajusté de femmes
ayant déclaré avoir
subi un test de Pap
dans l'ENSP

Pourcentage rajusté
de femmes ayant
déclaré avoir subi un
test de Pap

 

Au cours de
l'année précédant l'Enquête

Au cours
des 3
années
précédant l'Enquête

Au cours
de l'année précédant
l'Enquête

Au cours
des 3
années
précédant l'Enquête

RÉGION
Atlantique

47,0

67,2

64,8

92,6

Québec

42,9

62,5

49,6

72,2

Ontario

44,3

67,7

52,9

80,9

Prairies

50,3

74,1

58,3

86,0

Colombie-Britannique

46,1

68,6

56,9

84,3

REVENU DU MÉNAGE
Moins de 20 000 $

47,3

56,2

59,3

70,5

20 000-30 000 $

49,4

62,8

60,9

77,5

30 000-50 000 $

55,1

70,8

62,9

80,8

50 000-80 000 $

57,3

75,6

66,1

87,2

plus de 80 000 $

56,9

74,7

69,9

91,8

NIVEAU DE SCOLARITÉ
Moins que le secondaire

31,1

51,0

39,4

64,7

Secondaire ou plus

50,7

73,6

59,5

86,5


   

Après avoir soustrait de la population totale de femmes la proportion estimative de celles qui avaient subi une hystérectomie, nous avons obtenu une population cible rajustée pour l'utilisation du test de Pap. Dans tous les groupes d'âge supérieurs à 35 ans, le rajustement engendre une augmentation du taux d'utilisation du test (figure 2). Par exemple, le taux de l'année précédant l'enquête a augmenté de près de 10 %, passant de 45,7 % avant le rajustement à 54,6 % après le rajustement. L'augmentation la plus marquée, soit de 18 %, a été observée dans le groupe des 45 à 54 ans.

Dans le cas des tests subis au cours des trois années précédant l'enquête, les estimations globales rajustées sont passées de 68,1 % à 81,3 %. Après avoir rajusté les données pour tenir compte de l'hystérectomie, on constate que le taux pour l'intervalle de trois ans est d'environ 100 % des Canadiennes admissibles dans le groupe des 45 à 54 ans représenté dans l'échantillon de l'ENSP. Cependant, compte tenu de la variation possible dans les résultats du SSC, cette proportion pourrait tomber à 93,4 %.

Les taux d'utilisation du test de Pap ont également été rajustés séparément par région, par revenu et par niveau de scolarité. Il n'a pas été possible de subdiviser ces catégories encore plus, notamment par âge. Le tableau 3 montre que c'est dans la région de l'Atlantique que la différence a été la plus grande entre les taux non rajustés et les taux rajustés; pour les trois années précédant l'enquête, l'augmentation a été de 25 %. Les différences entre les taux non rajustés et rajustés, selon le revenu, étaient assez constantes, se situant entre 8 % et 13 % pour l'année précédant l'enquête et entre 10 % et 17 % pour les trois années précédant l'enquête.

Discussion

Les taux d'utilisation du test de Pap ont augmenté après le rajustement des estimations de la population qui risque effectivement de développer le cancer du col utérin. Les résultats de cette analyse tendent à démontrer qu'avant le rajustement, le test de Pap était surtout utilisé dans le groupe de 25 à 34 ans. Cependant, après avoir rajusté les données de manière à exclure les femmes qui avaient déclaré avoir subi une hystérectomie, on a constaté que le test était le plus utilisé dans le groupe des 45 à 54 ans. Plusieurs raisons peuvent expliquer le taux élevé estimé dans ce groupe d'âge, notamment le fait que les femmes à la périménopause consultent leur médecin et subissent un test de Pap, ou le fait que les femmes assujetties à une hormonothérapie substitutive sans avoir subi d'hystérectomie soient suivies. Cette tendance dans l'utilisation coïncide avec la tendance observée par les programmes établis de dépistage de l'Islande20 et du Victorian Cervical Cytology Registry de l'Australie21, selon lesquels le groupe des femmes de 45 à 54 ans est celui qui présente les taux les plus élevés pour les tests de Pap. Dans ces deux pays, on exclut les femmes inadmissibles, notamment celles qui ont subi une hystérectomie, de la population admissible au moment du calcul des taux d'utilisation du test de Pap.

L'analyse des résultats de l'ENSP a également permis de constater que 32 % des femmes n'avaient pas subi de test au cours des trois années précédant l'enquête. Ce taux tombe à 18 % lorsqu'on le rajuste pour tenir compte de la prévalence de l'hystérectomie. Cependant, même si le taux d'hystérectomie atteint presque 30 % chez les femmes de 65 ans et plus, le taux rajusté confirme néanmoins une sous-utilisation inacceptable. Bien qu'une proportion plus grande de femmes défavorisées aient subi une hystérectomie, les taux rajustés d'utilisation des tests de Pap dans ce groupe demeurent inférieurs à ceux des femmes ayant un niveau de scolarité et un revenu plus élevés. Le rajustement de la population cible n'a pas réduit l'écart dans l'utilisation du test entre les femmes des niveaux sociodémographiques supérieurs et celles des niveaux inférieurs.

Si l'on examine les données par région géographique, on observe une plus grande variation après le rajustement, en raison de la grande différence qui existe dans les taux de prévalence de l'hystérectomie. Ces écarts régionaux ressemblent à ceux qui ont été observés par Gentleman et coll.9 et Miller et coll.11. Dans la première de ces études, qui repose sur les données les plus récentes (1988-1990), l'incidence de l'hystérectomie, normalisée selon l'âge, est d'environ 50 % plus élevée dans les provinces de l'Atlantique que dans le reste du Canada.

Notre étude comporte un certain nombre de limites. L'auto-déclaration ou la non-déclaration peuvent avoir biaisé les résultats. L'utilisation de données auto-déclarées peut avoir faussé les estimations relatives à la clientèle des programmes de dépistage, comme l'ont signalé Gordon et coll.22, qui ont constaté que les répondantes avaient tendance à sous-estimer le temps écoulé depuis le dernier test, alors que le dépistage ne différait pas sensiblement de celui effectué par examen du dossier. Peu de données d'enquête ont été recueillies sur l'hystérectomie, et on ignore dans quelle mesure ces questions ont fait intervenir un biais lié à l'auto-déclaration. De plus, il a été impossible de déterminer si les femmes qui disaient avoir subi cette intervention avaient eu en fait une hystérectomie totale, avec amputation du col, ou une hystérectomie sous-totale.

Les deux enquêtes excluaient les femmes des Premières Nations, des territoires du Nord et des régions éloignées, ainsi que les femmes sans le téléphone. Ces exclusions peuvent occasionner une sous-estimation du nombre de femmes qui n'ont jamais subi de test de Pap et, par le fait même, une surestimation de l'utilisation de ce test. Il est également possible que la petite taille de l'échantillon du SSC ait produit des taux d'utilisation rajustés très variables pour certains groupes sociodémographiques et qu'elle ait exclu la possibilité de vérifications plus approfondies. Enfin, la méthode simplifiée d'utiliser les intervalles de confiance à 95 % du SSC peut avoir occasionné une sous-estimation des intervalles de confiance réels.

Les points forts de notre étude sont que les deux enquêtes utilisées sont récentes et que la SSC est la première enquête pancanadienne à avoir recueilli des données sur l'hystérectomie. L'avantage de cet ensemble de données est qu'il fournit certaines précisions sociodémographiques sur les femmes qui ont subi une hystérectomie. Ce genre d'information détaillée n'a jamais été recueilli auparavant et il n'a jamais non plus été modélisé. Les estimations de la prévalence provenant de cette enquête concordent généralement avec les résultats publiés d'études qui ont modélisé la prévalence de l'hystérectomie en se servant de données annuelles sur les interventions pratiquées dans les hôpitaux10-15.

Conclusion

Les résultats de cette étude révèlent qu'une forte proportion de Canadiennes ont subi une hystérectomie et sont inadmissibles aux tests de Pap courants effectués dans le cadre des programmes de dépistage du cancer du col utérin. En excluant ces femmes de la population admissible, on obtient des taux d'utilisation supérieurs à ceux qui sont actuellement signalés. Ce type de rajustement produit une estimation plus exacte de la proportion de femmes qui sont admissibles au test de Pap, mais demeurent sous-desservies.


Enquête nationale sur la santé de la population 1994
Mesures préventives de santé

PHP-Q3

Avez-vous déjà passé un test Pap?
__ Oui
__ Non (Passez à la section suivante)
__ NSP (Passez à la section suivante)

PHP-Q3a

À quand remonte la dernière fois?
(Ne lisez pas la liste. Ne chochez qu'une seule réponse.)
__ Moins de 6 mois
__ 6 mois, mais moins de 12 mois
__ 1 an, mais moins de 3 ans
__ 3 ans, mais moins de 5 ans
__ 5 ans ou plus

 

Sondage Santé Canada
Enquête #11, juillet-août 1994
Hys1. Avez-vous déjà subi une hystérectomie ou une opération pour enlever un ou deux ovaires?
__ Oui
__ Non

Hys2.

(si OUI...) Est-ce que c'était pour faire l'ablation de...
1. Votre utérus
2. Votre utérus et d'un ovaire
3. Votre utérus et les deux ovaires
4. Un ovaire seulement
5. Les deux ovaires

RÉPONSE FOURNIE SPONTANÉMENT
__ Incertaine



Références

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Références des auteures

Judy A. Snider et
Janet E. Beauvais, Division de la prévention, Bureau du cancer, Laboratoire de lutte contre la maladie, Santé Canada, Ottawa (Ontario)

Correspondance : Judy Snider, Division de la prévention, Bureau du cancer, Laboratoire de lutte contre la maladie, Indice de l'adresse : 0602E2, Pré Tunney, Ottawa (Ontario)  K1A 0L2; Télécopieur : (613) 941-5497; Courrier électronique : judy_snider@phac-aspc.gc.ca

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Dernière mise à jour : 2002-10-02 début