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Volume 20, No 2- 2000

 

  Agence de santé publique du Canada

Prévalence et disparités géographiques de certaines anomalies congénitales au Québec : Comparaison des méthodes d'estimation

Robert Choinière, Michel Pageau et Marc Ferland

 


Résumé

Cette étude a pour objectif d'estimer, à partir des données du fichier d'hospitalisation de MED-ÉCHO et du fichier des mortinaissances, la prévalence des anomalies congénitales au Québec. Les résultats sont d'abord comparés à ceux obtenus par le Système canadien de surveillance des anomalies congénitales (SCSAC) pour le Québec et le Canada. Ensuite, les données sont examinées selon la période et la région de résidence. Les résultats de cette étude montrent que pour les anomalies congénitales retenues, les prévalences mesurées pour le Québec à partir des données de MED-ÉCHO tendent à être inférieures à celles du Canada alors que les prévalences estimées par le SCSAC présentent pour le Québec des valeurs supérieures au Canada. Comme les données obtenues à partir de MED-ÉCHO couvrent pratiquement l'ensemble des naissances québécoises, comparativement à une couverture de 15 % pour le SCSAC, elles permettent de fournir un portrait plus précis des anomalies congénitales au Québec.

Mots clés : anomalies congénitales; disparités; estimations; évolution; prévalence; Québec


Contexte

Le Québec, dans sa politique de santé et de bien-être rendue publique en 1992, s'est donné comme un de ses objectifs de diminuer l'incidence des anomalies congénitales. Au Québec, les anomalies congénitales représentent la deuxième cause de mortalité périnatale et la sixième cause, en terme d'années potentielles de vie perdues, de mortalité prématurée1. Environ 40 % de tous les bébés décédés durant leur première année de vie et plus de 30 % des enfants admis dans un département hospitalier pédiatrique ont une malformation congénitale1. De plus, il a été démontré que les enfants naissant avec des anomalies congénitales sont beaucoup plus susceptibles que d'autres à avoir à supporter des conséquences à long terme sur leur santé, leur qualité de vie et leur survie : hospitalisations prolongées, chirurgies multiples, perturbation du développement physique, intellectuel ou moteur, et troubles respiratoires, visuels, auditifs ou de langage1-3.

En l'absence au Québec d'un système d'enregistrement et de surveillance des anomalies congénitales, on dispose de très peu d'informations précises et récentes sur la fréquence globale des naissances d'enfants atteints de malformation congénitale1,4. Il est ainsi difficile de savoir si l'objectif de réduction des anomalies congénitales que s'est fixé le Québec est en voie d'être atteint. Au Canada, les seuls travaux connus qui ont tenté d'estimer la prévalence du phénomène, mais qui comprennent des données peu représentatives pour le Québec, sont ceux de Santé Canada qui gère depuis plusieurs années, par le biais du Laboratoire de lutte contre la maladie (LLCM), le Système canadien de surveillance des anomalies congénitales (SCSAC)5.

Le SCSAC est constitué exclusivement des données des fichiers provinciaux des hospitalisations se rapportant à des cas de malformation congénitale ayant nécessité une admission à l'hôpital chez les mort-nés, les nouveau-nés et les nourrissons pendant la première année de vie6. Dans son système, le SCSAC n'inclut pas les cas associés aux interruptions médicales de grossesses pour malformation congénitale, aux fausses couches ou aux avortements, ce qui restreint la couverture de la prévalence des anomalies congénitales.

Compte tenu qu'il peut y avoir plusieurs hospitalisations par individu, le SCSAC a recours à un procédé d'appariement de façon à combiner, pour un patient, les informations compilées lors des différents séjours à l'hôpital. La procédure d'appariement mise au point pour le SCSAC se fait à l'aide de différentes variables : sexe, date de naissance, code postal de résidence et numéro d'assurance-maladie.

La partie du fichier des hospitalisations québécoises compilées par MED-ÉCHO qui est transmise à Santé Canada ne contient pas toutes les informations permettant d'identifier les individus et d'apparier les cas5. En conséquence, le LLCM a choisi d'incorporer au SCSAC les données québécoises d'hospitalisation provenant de l'Hospital Medical Records Institute (HMRI), organisme qui depuis quelques années relève de l'Institut canadien d'information sur la santé. Ces données ont l'avantage de contenir les informations requises pour l'appariement mais l'inconvénient majeur de ne couvrir qu'une faible partie des naissances survenues en milieu hospitalier au Québec. Ainsi, durant la période 1989 à 1991, seulement 15 % des naissances au Québec étaient recueillies par la banque HMRI5 alors qu'entre 1989 et 1995 la proportion de naissances vivantes enregistrée par MED-ÉCHO était de 99 %. Les données fournies par le SCSAC pour le Québec sont donc incomplètes et ne permettent pas d'estimer le nombre d'anomalies congénitales et de fournir une mesure précise de la prévalence.

La présente étude a pour objectif d'estimer la prévalence des anomalies congénitales au Québec à partir des données de MED-ÉCHO, qui sont plus complètes que celles de la banque HMRI utilisée par le SCSAC. Pour ce faire, nous avons eu accès à plusieurs variables qui ne sont pas comprises dans la version du fichier MED-ÉCHO transmise à Santé Canada. Ceci nous a permis d'utiliser des indices d'identification comparables à ceux disponibles à partir de la banque HMRI, tout en couvrant presque la totalité des naissances survenant au Québec. En combinant ces données avec celles provenant du fichier des mortinaissances, nous croyons ainsi obtenir des résultats plus précis et des taux plus robustes statistiquement puisqu'ils sont basés sur un plus grand nombre d'événements. Une méthode d'appariement différente (déterministe) mais comparable à celle employée pour construire le Système canadien de surveillance des anomalies congénitales (probabiliste) a été retenue.


Méthodes

Données

Dans le but d'estimer le plus précisément possible la prévalence des anomalies congénitales au Québec, nous avons utilisé les cas de malformation congénitale de la banque de données des hospitalisations de MED-ÉCHO et du fichier des mortinaissances puisque ceux-ci ne sont pas compris dans MED-ÉCHO. Soulignons que MED-ÉCHO est la base de données québécoises qui regroupent l'ensemble des hospitalisations de soins de courte durée et de chirurgie d'un jour survenues au Québec. Chaque enregistrement contient des renseignements nominatifs, démographiques ainsi que le diagnostic principal d'hospitalisation et la possibilité de 15 diagnostics secondaires4,7. Comme pour le SCSAC, il n'a pas été possible d'inclure les cas associés aux interruptions médicales de grossesses pour malformation congénitale, les fausses couches ou les avortements.

L'appariement des différentes données se rapportant à un individu peut se faire selon la méthode probabiliste ou la méthode déterministe, tout dépendant de la quantité et de la qualité de l'information disponible permettant d'identifier correctement les individus8. Lorsque l'on a peu d'informations permettant d'identifier un individu, comme c'est le cas pour le SCSAC, il est recommandé d'utiliser une approche probabiliste. Cette approche, comme son nom l'indique, est fondée sur des probabilités. Le SCSAC utilise, pour construire sa banque de données, une variante de cette approche qui fait appel à une pondération ad hoc basée sur un système de poids9.

Dans les cas où l'on dispose d'une grande quantité de données de bonne qualité, il est souvent préférable d'utiliser une approche déterministe où les appariements sont faits selon des critères établis par les chercheurs. L'approche déterministe a l'avantage d'être plus simple d'application tout en étant aussi performante que l'approche probabiliste10. Pour ces raisons, l'approche déterministe a été retenue pour cette étude.

Les variables retenues par le SCSAC pour effectuer l'appariement des hospitalisations et disponibles dans MED-ÉCHO sont : le sexe, la date de naissance, le code postal à 6 positions, le numéro d'assurance-maladie et les codes de la neuvième révision de la Classification internationale des maladies (CIM-9) pour le diagnostic principal et pour les 15 diagnostics secondaires. À ces variables d'identification, ont été ajoutées, de façon à maximiser les appariements, les variables suivantes : la date d'admission, la date de sortie, le numéro de dossier médical, le code de l'établissement hospitalier, le code de la municipalité, le code de la MRC (municipalité régionale de comté), le code de CLSC (centre local de services communautaires), le type de décès, le type de soins, l'état civil, le code de provenance et le code de destination.

À partir d'une procédure d'appariement déterministe, nous avons estimé le nombre d'enfants qui au cours de leur première année de vie ont été hospitalisés au moins une fois pour une anomalie congénitale en regroupant pour chaque enfant de moins d'un an ses différents dossiers d'hospitalisation. Cette opération a été effectuée pour les données d'hospitalisation des années financières 1988-1989 à 1996-1997.

La première étape a consisté à jumeler les hospitalisations à partir du numéro de dossier, puisque pour un même hôpital, un seul numéro de dossier peut être attribué à un individu, peu importe le nombre de visites effectuées. Dans une seconde étape, les hospitalisations ayant des numéros d'assurance-maladie (NAM) identiques ont été appariées, le NAM représentant un autre identificateur unique à chaque individu. Cependant, celui-ci n'est souvent disponible que plusieurs mois après la naissance de l'enfant. Il ne nous permet donc pas d'effectuer des appariements pour les visites survenant au cours des premiers mois de la vie. Enfin, dans les étapes subséquentes, quatre autres appariements ont été effectués à partir de différentes unités territoriales se rapportant au lieu de résidence des personnes hospitalisées :

  • Code postal (6 positions), date de naissance et sexe identiques
  • Code municipal, code de CLSC, date de naissance et sexe identiques
  • Code postal (3 positions), code de CLSC, date de naissance et sexe identiques
  • Code postal (3 positions), code municipal, date de naissance et sexe identiques.

Pour qu'un appariement soit accepté pour ces quatre dernières procédures de jumelage, l'on devait nécessairement retrouver les conditions suivantes : l'état civil d'une deuxième visite ne devait pas être «nouveau-né», le départ d'une première visite ne devait pas être dû à un décès, la date d'admission d'une deuxième visite ne devait pas précéder de plus d'une journée la date de sortie de la visite précédente, et si l'hôpital était le même, les numéros de dossiers ne devaient pas être différents.

Il est à noter que pour les appariements faits à partir du numéro de dossier et du NAM, lorsque la date de naissance différait entre deux visites, nous avons supposé que celle apparaissant sur la première visite était la plus précise. À l'inverse, lorsque le sexe était différent d'une visite à l'autre, nous avons retenu celui inscrit sur la visite la plus récente.

Finalement, la dernière opération nécessaire à la création du fichier des anomalies congénitales pour le Québec a été de supprimer, à partir d'informations préalablement fournies par le SCSAC, certains cas d'anomalies congénitales qui en relation avec certains diagnostics annulent le diagnostic initial d'anomalies congénitales. Ainsi, le fait de retrouver pour une même hospitalisation un de ses diagnostics en plus d'un diagnostic d'anomalies congénitales signifie qu'il y a contradiction dans les diagnostics et que cette hospitalisation, selon le SCSAC, ne devrait pas être considérée parmi les anomalies congénitales.

Le tableau 1 présente une synthèse des opérations effectuées sur l'ensemble des hospitalisations pour anomalies congénitales contenues dans la banque MED-ÉCHO et se rapportant aux nouveau-nés et aux enfants âgés de moins d'un an.

Les données sur les mort-nés ont été tirées du fichier des mortinaissances pour les années civiles 1989 à 1996. Pour les mortinaissances, il n'est toutefois pas nécessaire d'effectuer d'appariement car les cas sont uniques.



TABLEAU 1

Procédures d'appariement des 79 409 hospitalisations pour anomalies congénitales et pour d'autres codes de la CIM-9 retenus par le SCSAC, 1989 à 1995a

Procédure Hospitalisations éliminées

Nombre d'hospitalisations
après chaque étape

APPARIEMENT I
À partir du numéro de dossier et de l'hôpital
8 228 doublons éliminés

71 181

APPARIEMENT II
À partir du numéro d'assurance-maladie (NAM)
470 doublons éliminés

70 711

APPARIEMENT III
À partir du code postal (6 positions), de la date de naissance et du sexe
4 448 doublons éliminés

66 263

APPARIEMENT IV
À partir du CLSC, de la municipalité, de la date de naissance et du sexe
1 744 doublons éliminés

64 519

APPARIEMENT V
À partir du code postal (3 positions), du CLSC, de la date de naissance et du sexe
343 doublons éliminés

64 176

APPARIEMENT VI
À partir du code postal (3 positions), de la municipalité, de la date de naissance et du sexe
45 doublons éliminés

64 131

DERNIÈRE ÉTAPE
Suppression des informations ne se rapportant pas à des anomalies congénitales et corrections des diagnostics contradictoires
4 975 hospitalisations n'ayant pas de diagnostic d'anomalies congénitales

59 156
(hospitalisations pour anomalies congénitales)

a Comprend les codes d'anomalies congénitales 740,0 à 759,9 de la CIM-9 ainsi que les autres
codes retenus par le SCSAC (191,1; 216,3 228,0 255,0 à 255,9; 277,0; 284,9; 551,2).

   


Prévalences et comparaisons

Une fois terminé l'appariement des données québécoises sur les anomalies congénitales, nous avons estimé la prévalence de certaines anomalies congénitales et comparé nos résultats à ceux obtenus par le SCSAC pour le Canada et le Québec. Nous avons également examiné à partir de nos données sur le Québec, l'évolution dans le temps ainsi que, pour certaines anomalies congénitales, les disparités à l'échelle des régions sociosanitaires.

Afin de comparer nos données à celles du SCSAC, nous avons retenu, à l'instar des chercheurs du LLCM, 14 anomalies congénitales importantes, relativement communes et assez faciles à diagnostiquer5 (tableau 2).



TABLEAU 2

Codes de la neuvième révision de la classification internationale des maladies (CIM-9) pour certaines anomalies congénitales

Anomalie congénitale

Code de la CIM-9

Anencéphalie et anomalies similaires

740,0-740,2

Spina bifida

741,0-741,9

Encéphalocèle

742,0

Hydrocéphalie congénitale

742,3

Transposition des gros vaisseaux

745,1

Hypoplasie du cour gauche

746,7

Fissure palatine

749,0

Fissure palatine avec bec-de-lièvre

749,2

Fistule trachéo-osophagienne, atrésie et sténose de l'osophage

750,3

Atrésie et sténose du côlon, du rectum et du canal anal

751,2

Agénésie et dysgénésie du rein

753,0

Raccourcissement d'un membre

755,2-755,4

Anomalies congénitales de la paroi abdominale

756,7

Syndrome de Down

758,0


   

Pour chacune de ces anomalies, les taux québécois ont été calculés pour la période 1989 à 1991 et comparés à ceux du SCSAC5 pour la même période. Nous avons également comparé les taux de la période 1989 à 1991 à ceux de la période 1993 à 1995. Enfin, nous avons examiné, pour les 10 anomalies les plus fréquentes parmi les 14 retenues, les disparités régionales pour la période 1989 à 1995.

Résultats

En 1989-1991, les données tirées du SCSAC montraient que pour 9 anomalies sur 14, le Québec enregistrait des prévalences significativement supérieures à la moyenne canadienne (tableau 3). Ces résultats étaient cependant obtenus à partir de données ne couvrant que 15 % des naissances de l'ensemble du Québec et donc n'étaient pas nécessairement représentatives de la situation québécoise. Les auteurs de l'article de 1995 sur le SCSAC (rapport de la situation) ont expliqué cette limite des données : «Puisque les hôpitaux transmettent des données à l'HMRI à titre individuel, il est possible que ceux choisissant de participer soient plus spécialisés et qu'on y réhospitalise un plus grand nombre de bébés atteints d'anomalies congénitales, ce qui aurait un effet à la hausse sur les taux provinciaux.»5.

TABLEAU 3

Taux de prévalence (pour 10 000 naissances totales) de certaines anomalies congénitales
(chez les <1 an) selon la source de données, 1989 à 1991, Québec et Canada

   

Source de données

Code de la CIM-9 Anomalie congénitale

MED-ÉCHO et fichier
des mortinaissances : Québec

SCSAC5 :
Québec

SCSAC5 :
Canada

740,0-740,2 Anencéphalie et anomalies similaires

*

1,1 (-)

**

1,4  

2,4

741,0-741,9 Spina bifida   6,8     9,9  

7,8

742,0 Encéphalocèle

*

1,0 (-)

**

1,6  

1,5

742,3 Hydrocéphalie congénitale   6,8     14,6 (+)

7,7

745,1 Transposition des gros vaisseaux   4,9     15,3 (+)

4,8

746,7 Hypoplasie du cour gauche   2,6 (-)

*

8,0 (+)

3,4

749,0 Fissure palatine   6,9     11,8 (+)

7,3

749,2 Fissure palatine avec bec-de-lièvre   4,9 (-)

*

7,8  

8,2

750,3 Fistule trachéo-osophagienne, atrésie et sténose de l'osophage   3,4  

*

8,5 (+)

3,8

751,2 Atrésie et sténose du côlon, du rectum et du canal anal   5,4     13,4 (+)

5,8

753,0 Agénésie et dysgénésie du rein   5,2  

*

7,5 (+)

5,0

755,2-755,4 Raccourcissement d'un membre   5,3  

*

5,2  

4,6

756,7 Anomalies congénitales de la paroi abdominale   4,5  

*

7,3 (+)

4,7

758,0 Syndrome de Down   12,4 (-)   24,9 (+)

14,3

* Coefficient de variation supérieur à 16,5 % et inférieur ou égal à 33,3 %. La valeur doit être interprétée avec prudence.
** Coefficient de variation supérieur à 33,3 %. La valeur n'est présentée qu'à titre indicatif.
(+) (-) Taux significativement plus élevé ou plus faible que celui du Canada (p <= 0,05).

 

 

 

 

   

Les prévalences estimées à partir des données de MED-ÉCHO, qui regroupent la presque totalité des naissances au Québec, présentent un tout autre portrait. Pour aucune anomalie, le Québec n'obtient une prévalence significativement plus élevée que la moyenne canadienne. Au contraire, pour cinq anomalies, la valeur du Québec est significativement inférieure à celle du Canada.

La comparaison dans le temps des données tirées de MED-ÉCHO dénote peu de variations (tableau 4). Entre 1989 à 1991 et 1993 à 1995, seules les anomalies congénitales de la paroi abdominale ont significativement augmenté alors qu'à l'inverse, seul le taux de spina bifida a diminué.

L'analyse des données régionales faite pour la période 1989 à 1995 (tableau 5) présente certaines limites compte tenu de la forte variabilité des données représentée par le coefficient de variation. Dans six cas, on observe des valeurs significativement supérieures à la moyenne québécoise : spina bifida au Saguenay-Lac-Saint-Jean et dans la région Terres-Cries-de-la-Baie-James; hydrocéphalie congénitale pour la Côte-Nord; atrésie et sténose du côlon, du rectum et du canal anal dans le Bas-Saint-Laurent; anomalies congénitales de la paroi abdominale en Estrie; et syndrome de Down à Montréal-Centre. À l'inverse, on retrouve neuf cas, où la prévalence pour une anomalie congénitale donnée est significativement inférieure à celle de l'ensemble du Québec.

TABLEAU 4

Nombre de cas et taux de prévalence (pour 10 000 naissances totales) de certaines anomalies congénitales (chez les <1 an), 1989 à 1991 et 1993 à 1995, Québec

Code de la CIM-9 Anomalie congénitale

Nombre
de cas :

1989-1991

Nombre de cas :
1993-1995

Taux :
1989-1991

Taux :
1993-1995

Variation de 1989-1991 à 1993-1995

740,0-740,2 Anencéphalie et anomalies similaires

40

23

* 1,1

* 0,9

 
741,0-741,9 Spina bifida

194

147

6,8

5,5

742,0 Encéphalocèle

28

32

* 1,0

* 1,2

 
742,3 Hydrocéphalie congénitale

193

183

6,8

6,9

 
745,1 Transposition des gros vaisseaux

140

139

4,9

5,2

 
746,7 Hypoplasie du cour gauche

75

73

2,6

2,7

 
749,0 Fissure palatine

195

195

6,9

7,3

 
749,2 Fissure palatine avec bec-de-lièvre

140

148

4,9

5,6

 
750,3 Fistule trachéo-osophagienne, atrésie et sténose de l'osophage

97

91

3,4

3,4

 
751,2 Atrésie et sténose du côlon, du rectum et du canal anal

153

137

5,4

5,1

 
753,0 Agénésie et dysgénésie du rein

148

164

5,2

6,2

 
755,2-755,4 Raccourcissement d'un membre

150

124

5,3

4,7

 
756,7 Anomalies congénitales de la paroi abdominale

127

171

4,5

6,4

758,0 Syndrome de Down

353

332

12,4

12,5

 
* Coefficient de variation supérieur à 16,5 % et inférieur ou égal à 33,3 %. La valeur doit être interprétée avec prudence.

() / () Diminution ou augmentation significative entre les deux périodes (p <= 0,05).

   

Discussion

Les données du Système canadien de surveillance des anomalies congénitales compilées jusqu'à maintenant pour le Québec ont été tirées des dossiers de l'Hospital Medical Records Institute. Mais, compte tenu que cette source d'informations ne comptabilise qu'une faible partie des naissances du Québec, elle fournit des informations ne permettant pas d'estimer d'une façon précise la prévalence des anomalies congénitales au Québec5.

La réalisation de cette étude démontre que l'utilisation des données provenant du fichier des hospitalisations de MED-ÉCHO représente une solution intéressante pour le SCSAC. Le fichier MED-ÉCHO regroupe près de l'ensemble des naissances au Québec et contient les informations nécessaires à l'appariement des différentes hospitalisations se rapportant à un individu.

Cette étude permet ainsi pour la première fois d'estimer de façon précise la prévalence de certaines anomalies congénitales au Québec et de suivre celles-ci dans le temps. Elle permet aussi d'effectuer des comparaisons régionales et de situer le Québec par rapport à l'ensemble du Canada.

Les résultats montrent que pour les anomalies retenues, les prévalences mesurées pour le Québec tendent à être inférieures à celles du Canada et montrent peu de variations dans le temps. Compte tenu de la forte variabilité des données mesurées à l'échelle des régions, les comparaisons régionales ne permettent pas de dégager de tendance nette.

TABLEAU 5

Taux de prévalence (pour 10 000 naissances totales) de certaines anomalies congénitales
selon la région, Québec, 1989 à 1995

Région

Code de la CIM-9

741,0-741,9

742,3

745,1

749,0

749,2

Spina bifida

Hydro-
céphalie congénitale

Transpo-
sition des gros vaisseaux

Fissure palatine

Fissure palatine
avec bec-de-
lièvre

01

*

5,7

 

**

3,1

 

**

3,8

*

9,4

 

**

1,9

02

*

10,6

(+)

*

7,1

 

*

5,5

*

11,0

 

*

7,5

03

*

5,5

 

*

9,1

 

*

4,9

 

9,3

 

*

5,5

04

*

6,6

 

*

8,1

 

*

3,3

*

7,9

 

*

6,3

05

*

4,9

 

*

7,8

 

*

5,3

*

7,4

 

*

4,9

06  

4,1

(-)  

6,8

   

5,0

 

5,2

(-)  

4,4

07

*

7,4

 

**

1,6

 

*

4,1

*

4,1

(-)

*

6,2

08

*

9,6

 

**

5,1

 

**

3,8

*

8,9

 

*

6,4

09

*

10,1

 

*

14,2

(+)

**

1,0

*

10,1

 

**

8,1

10

**

4,4

 

**

4,4

 

**

0,0

**

4,4

 

**

13,3

11

*

12,5

 

**

7,5

 

**

7,5

**

7,5

 

**

1,2

12

*

8,1

 

*

6,9

 

*

5,7

*

5,4

 

*

6,0

13

*

5,4

 

*

3,2

(-)

*

3,5

*

7,1

 

*

5,1

14

*

2,5

(-)

*

5,6

 

*

5,6

*

6,4

 

*

4,2

15

*

5,7

 

*

5,5

 

*

3,2

*

4,7

 

*

4,5

16  

5,1

   

6,3

   

5,0

 

7,1

   

5,5

17

**

0,0

 

**

16,7

 

**

0,0

**

5,6

 

**

44,5

18

*

44,3

(+)

**

9,9

 

**

4,9

**

19,7

 

**

4,9

Ensem-
ble du Québec
 

6,0

   

6,6

   

5,1

 

6,9

   

5,3

* Coefficient de variation supérieur à 16,5 % et inférieur ou égal à 33,3 %. La valeur doit être interprétée avec prudence.
** Coefficient de variation supérieur à 33,3 %. La valeur n'est présentée qu'à titre indicatif.
(+)/ (-) Taux significativement plus élevé ou plus faible que celui de l'ensemble du Québec (p <= 0,05).
01 Bas-Saint-Laurent
02 Saguenay-Lac-Saint-Jean
03 Québec
04 Mauricie-Centre-du-Québec
05 Estrie
06 Montréal-Centre
07 Outaouais
08 Abitibi-Témiscamingue
09 Côte-Nord
10 Nord-du-Québec

 

TABLEAU 5

Taux de prévalence (pour 10 000 naissances totales) de certaines anomalies congénitales
selon la région, Québec, 1989 à 1995

Région

Code de la CIM-9

751,2

753,0

755,2-755,4

756,7

758,0

Atrésie et sténose
du côlon, du rectum et du canal anal

Agénésie et dys-
génésie du rein

Raccourcis-
sement d'un membre

Anomalies congénitales de la paroi abdominale

Syndrome
de Down

01

*

15,1

(+)

*

5,7

*

7,5

 

**

5,0  

*

11,9

 
02

*

5,5

 

*

9,0

*

7,1

 

*

5,9  

*

10,6

 
03

*

5,9

   

7,7

*

3,9

 

*

3,9    

12,0

 
04

*

3,8

 

*

5,1

*

2,8

(-)

*

5,3  

*

8,6

(-)
05

*

6,6

 

**

2,9

*

4,1

 

*

9,4 (+)

*

8,2

(-)
06  

5,0

   

5,5

 

4,5

    4,9    

15,9

(+)
07

**

2,5

 

**

2,9

*

3,7

 

**

2,1  

*

9,4

 
08

*

5,7

 

*

5,7

**

3,8

 

*

6,4  

*

7,7

(-)
09

**

3,0

 

**

7,1

**

6,1

 

**

8,1  

*

13,2

 
10

**

4,4

 

**

0,0

**

4,4

 

**

4,4  

**

4,4

 
11

**

3,7

 

**

3,7

**

5,0

 

**

3,7  

*

22,4

 
12

*

6,6

 

*

7,5

*

4,8

 

*

6,6    

15,6

 
13

*

4,2

 

*

5,8

*

5,1

 

**

1,9    

13,1

 
14

*

5,8

 

*

6,9

*

7,5

 

*

6,7    

11,7

 
15

*

5,5

 

*

5,7

*

3,5

 

*

4,0    

10,5

 
16  

4,1

   

5,6

 

5,0

    6,6    

11,0

 
17

**

27,8

 

**

0,0

**

5,6

 

**

22,2  

**

22,2

 
18

**

0,0

 

**

4,9

**

4,9

 

**

9,9  

**

19,7

 
Ensem-
ble du Québec
 

5,2

   

5,8

 

4,9

   

5,4

   

12,6

 
* Coefficient de variation supérieur à 16,5 % et inférieur ou égal à 33,3 %. La valeur doit être interprétée avec prudence.
** Coefficient de variation supérieur à 33,3 %. La valeur n'est présentée qu'à titre indicatif.
(+)/ (-) Taux significativement plus élevé ou plus faible que celui de l'ensemble du Québec (p <= 0,05).
01 Bas-Saint-Laurent
02 Saguenay-Lac-Saint-Jean
03 Québec
04 Mauricie-Centre-du-Québec
05 Estrie
11 Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine
12 Chaudière-Appalaches
13 Laval
14 Lanaudière
15 Laurentides
16 Montérégie
17 Nunavik
18 Terres-Cries-de-la-Baie-James

   

Pour éventuellement obtenir des données encore plus précises sur les anomalies congénitales, on devra, à l'instar des systèmes internationaux, intégrer les informations sur les interruptions médicales de grossesses pour malformations congénitales, sur les fausses couches et sur les avortements4,11,12. Cet ajout est d'autant plus intéressant que l'on dénote une amélioration et une disponibilité plus grande des méthodes de dépistage précoce (échographie, ponction du cordon, amniocentèse, biopsie trophoblastique, etc.)13,14.

D'autre part, bien que l'approche déterministe soit supérieure à l'approche probabiliste pour apparier les différents événements se rapportant à un individu, l'utilisation d'un identifiant unique permettant de suivre une personne parmi l'ensemble des sources de données, demeure de loin le moyen le plus précis de mesurer le nombre réel d'anomalies congénitales8,10.

Par ailleurs, il faudrait mesurer la part que jouent les pratiques administratives liées à l'hospitalisation dans les comparaisons géographiques et temporelles de la prévalence des anomalies congénitales. Il est possible que des taux plus élevés d'anomalies congénitales soient simplement le reflet d'une propension plus grande à indiquer un code d'anomalies congénitales.

Enfin, il reste à voir parmi les différentes anomalies, lesquelles pourraient être retenues comme causes sentinelles.


Remerciements

Cette étude a bénéficié d'un appui financier du Bureau de la santé génésique et de la santé de l'enfant du Laboratoire de lutte contre la maladie. Les auteurs aimeraient remercier monsieur Jocelyn Rouleau de ce Bureau.


Références

    1. Ministère de la Santé et des Services sociaux. Politique de périnatalité. Québec: Gouvernement du Québec, 1993:21-2.

    2. Ministère de la Santé et des Services sociaux . La politique de la santé et du bien-être. Québec: Gouvernement du Québec, 1992:66-71.

    3. Soltani MS, Guediche MN, Bchir A, Ghanem H, Pousse H, Braham A. Facteurs associés aux faibles poids de naissance dans le Sahel tunisien. Archives françaises pédiatriques 1991;48:405-8.

    4. De Wals P, Royer-Trochet C. Évaluation des bases de données sanitaires pour la recherche et la surveillance épidémiologique des malformations congénitales. Régie régionale de la santé et des services sociaux de la Montérégie, 1997.

    5. Rouleau J, Arbuckle TE, Johnson KC, Sherman JG. Description et limitations du Système canadien de surveillance des anomalies congénitales (SCSAC) [rapport de la situation]. Maladies chroniques au Canada 1995;16(1):43-8.

    6. Johnson KC, Rouleau J. Temporal trends in Canadian birth defects birth prevalences, 1979-1993. Can J Public Health 1997;88(3):169-76.

    7. Ministère de la Santé et des Services sociaux. Les banques de données du MSSS. Numéro 1. Données sur la clientèle hospitalière (MED-ÉCHO). Québec: MSSS, 1986.

    8. Turner D, Roos LL, Traverse D, Stranc L, Harrison M, Fields ALA, Bryant H. Forging partnerships through data: a general strategy for record linkage. Dans: Information technology in community health. Victoria: School of Health Information Science, University of Victoria; 1998:1-2-1-6.

    9. Système canadien de surveillance des anomalies congénitales. Melding process description [document de travail]. Ottawa: Laboratoire de lutte contre la maladie, 1997.

    10. Roos LL, Wajda A. Record linkage strategies. Part I: estimating information and evaluating approaches. Methods of Information in Medicine1991;30:117-23.

    11. EUROCAT. 15 years of surveillance of congenital anomalies in Europe 1980-1994. Brussels: Scientific Institute of Public Health - Louis Pasteur, 1997.

    12. International Clearinghouse for Birth Defects Monitoring Systems. Congenital malformations worldwide. Amsterdam, 1991.

    13. Gérard CH, Gillerot Y, Koulischer L, Hustin J. Amniocentèse et biopsie trophoblastique. Journal gynécologique-obstétrique-biologique et reproductif de Paris. 1991;20:617-22.

    14. Gougard J, Ayme S, Stoll CL. L'évaluation des technologies diagnostiques des malformations congénitales. Journal gynécologique-obstétrique-biologique et reproductif de Paris 1992;21(3):278-80.




Références des auteurs

Robert Choinière, Régie régionale de la santé et des services sociaux (RRSSS) de Montréal-Centre, Direction de la santé publique, 3725, rue Saint-Denis, Montréal (Québec) H2X 3L9; Télécopieur : (514) 286-5782; Courriel : Robert_Choinière@ssss.gouv.qc.ca

Michel Pageau et Marc Ferland, RRSSS de Québec, Direction de la santé publique

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