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Maladies chroniques au Canada


Volume 23
Numéro 1
2002

[Table des matières]

Agence de santé publique du Canada

Recension de livre

Quantitative Methods for the Evaluation of Cancer Screening


Publié sous la direction de Stephen W Duffy, Catherine Hill et Jacques Estève

New York (US): Oxford University Press, 2001;
161 pages; ISBN 0-340-74125-2; 104,00 $ (CAN)


L'évaluation du dépistage du cancer est une opération complexe et semée d'embûches, même pour un praticien chevronné. Cet ouvrage unique et des plus nécessaire va plus loin que la simple compilation systématique des méthodes quantitatives les plus récentes, dont la description est généralement éparpillée dans les différentes publications scientifiques, puisqu'il examine aussi leurs aspects théoriques et pratiques dans un contexte appliqué. On y trouve également des méthodes permettant d'évaluer le dépistage du cancer à différentes étapes de la planification, de l'élaboration, de la mise en oeuvre et de la surveillance des programmes. On peut utiliser ces approches pour déterminer en premier lieu si le dépistage fonctionne (c'est-à-dire son utilité ou efficacité potentielle); deuxièmement, s'il y a lieu d'implanter un programme, souvent en prenant en considération les connaissances en matière de biologie des tumeurs (efficacité réelle); troisièmement, comment modifier le programme pour tenir compte tant des données biologiques que des ressources disponibles (rapport coût-efficacité); enfin, si le programme produit les résultats escomptés (surveillance et évaluation).

Les directeurs de la publication Steven Duffy, Catherine Hill et Jacques Estève ont adroitement réuni les travaux de différents auteurs qui avaient participé à un atelier à Paris en 1997. On retrouve dans les quatorze chapitres, qui sont en général de très grande qualité, des plans d'étude pour mesurer l'utilité et l'efficacité réelle du dépistage du cancer, des méthodes quantitatives sophistiquées telles que les modèles en chaînes de Markov, l'utilisation des données de routine et le rapport coût-efficacité. Si la plupart des exemples concernent le cancer du sein et le cancer du col utérin, on présente également certaines données sur le cancer colorectal et le neuroblastome de l'enfant.

Dans le chapitre 1 sont résumées avec concision les approches utiles pour l'évaluation du dépistage du cancer, à savoir l'examen rigoureux des critères de Wilson et Jungner requis avant la mise en oeuvre d'un programme de dépistage, le rôle des essais comparatifs randomisés (ECR), la nécessité des indicateurs précoces de l'efficacité du programme, car les réductions de la mortalité peuvent survenir dans un avenir trop éloigné pour être utiles. Les concepts essentiels pour la compréhension des techniques de dépistage du cancer, y compris les résultats des études et le délai d'exécution, sont bien illustrés à l'aide de figures et de tableaux clairs. Le résumé des percées réalisées dans ce domaine au cours des quatre dernières décennies sert de cadre à la conception des études d'évaluation, en soulignant l'importance des ECR pour établir l'utilité du dépistage, puis en décrivant les plans permettant d'évaluer les programmes déjà en place, y compris les études de cohortes non contrôlées et les études cas-témoins rétrospectives. L'excellente vue d'ensemble de l'influence importante de l'efficacité réelle et des coûts sur l'évaluation du dépistage du cancer que l'on retrouve au chapitre 2 met en lumière le volume important de données nécessaire, y compris les données épidémiologiques en l'absence de dépistage, les données démographiques, la qualité du dépistage et les politiques en la matière, les pratiques cliniques et les coûts occasionnés.

Le chapitre 3 porte sur les questions de la contamination et de l'assiduité des participants aux essais de dépistage; le débat entourant les méthodes susceptibles d'améliorer l'assiduité des personnes invitées à participer au dépistage est pertinent tant pour la conception des ECR que pour le bon déroulement des programmes en cours. Grâce aux méthodes statistiques permettant d'ajuster les données en fonction de la contamination et de la non-observance, on peut évaluer sans biais l'efficacité réelle du dépistage sans compromettre la randomisation, ce qui est très utile pour évaluer les résultats des ECR randomisés dans la littérature. Dans le chapitre 4 est présentée une méthodologie analytique plus ciblée visant à réduire le biais imputable à la sélection en l'absence de témoins randomisés en estimant la réduction de la mortalité par cancer obtenue grâce à un dépistage à un âge plus précoce.

Dans les trois chapitres suivants, on se penche sur les modèles statistiques qui évaluent différents aspects du dépistage en s'appuyant sur les nouvelles connaissances acquises concernant la biologie de la maladie (dans tous les cas, le cancer du sein est l'exemple utilisé). Le recours aux modèles en chaînes de Markov pour estimer les taux de progression de la maladie, y compris les estimations du temps de séjour, ou de la période de détection préclinique, est décrit en détail au chapitre 5, où l'on retrouve plusieurs pages de codes SAS utiles. Au chapitre 6 est présentée une méthode statistique décrivant la relation théorique au niveau de la population entre le taux de métastases détectables en clinique au moment du diagnostic et les taux de métastases occultes, ainsi que les données, les figures et les annexes statistiques à l'appui. Un autre modèle en chaînes de Markov, brièvement décrit au chapitre 7, prédit les réductions de mortalité susceptibles d'être obtenues à partir de différents intervalles de dépistage en estimant les taux de développement du cancer du sein préclinique, la progression du stade préclinique à la maladie clinique et l'évolution de la maladie clinique au décès.

Dans les chapitres 8 à 10 sont abordées diverses considérations pratiques ainsi que la question de l'utilisation des données de routine pour les fins de l'évaluation. Une brillante discussion sur l'utilisation des données sources requises pour l'évaluation, y compris les données des registres du cancer, est accompagnée d'une explication des nombreuses manières de classifier les cancers selon leur mode de détection, dont la lecture est indispensable pour tous ceux qui effectuent des analyses portant sur les cancers d'intervalle. On évoque ensuite les embûches des études de cohortes et des études cas-témoins, en particulier dans le cas des antécédents de dépistage du cancer du col utérin. Enfin, Hakolinen décrit élégamment comment surveiller l'impact du dépistage à l'aide de données sur l'incidence et la mortalité en employant des méthodes allant de la simple analyse des tendances ou de la comparaison des taux selon l'âge à différentes périodes jusqu'aux projections des cas de cancer et aux analyses multiniveaux. Le lecteur y trouvera des renseignements fort utiles sur certains facteurs confusionnels, notamment l'effet des percées thérapeutiques sur la mortalité et l'évolution des pratiques diagnostiques et celui de la prévalence des facteurs de risque sur l'incidence.

Dans les quatre derniers chapitres, on se penche sur l'impact du dépistage sur l'incidence et la mortalité dans le cas des cancers du col utérin et du sein et du cancer colorectal. Walter analyse les données provenant de l'étude cas-témoins canadienne initiale sur le cancer du col utérin pour calculer les périodes de détection préclinique (PDP), et observe que les résultats les plus positifs sont obtenus lorsque la maladie est détectée avant le stade où elle est devenue invasive. Le fait que la sensibilité soit élevée et la PDP longue signifie qu'un dépistage aussi peu fréquent qu'une fois tous les 10 ans est efficace et souligne l'importance de recruter les femmes pour le dépistage initial. Paci et ses collègues expliquent ensuite des méthodes simples permettant d'estimer l'ampleur du surdiagnostic du cancer du sein et de prédire les bienfaits sur le plan de la réduction de la mortalité procurés par le dépistage, méthodes qui seront utiles tout au long du déroulement du programme pour s'assurer que les chiffres d'incidence et de mortalité observés sont satisfaisants. Une méthode permettant d'estimer la sensibilité de la recherche du sang occulte dans les selles pour le dépistage du cancer colorectal qui tient également compte du temps de séjour moyen permet de faire varier ces estimations pour les régions distale et proximale du côlon et le rectum. Dans le dernier chapitre, Estève et ses collaborateurs élaborent des modèles pour évaluer les stratégies de dépistage du neuroblastome. Leur analyse illustre l'importance de créer des modèles intégrant une synthèse des connaissances biologiques, génétiques et épidémiologiques; une telle approche éclairée aurait dû être adoptée avant la mise en oeuvre de programmes de dépistage et d'essais d'efficacité à grande échelle et a mené au consensus actuel opposé au dépistage ou à de nouveaux essais.

Le fait que la matière utilisée pour le livre ait été tirée à l'origine d'un atelier limite la portée de l'ouvrage, car tous les sujets pertinents ne sont pas abordés. Toutes les questions ne sont pas traitées avec la même profondeur et la même portée : si, dans la plupart des chapitres, le lecteur est aiguillé vers les publications qui lui permettront d'approfondir le sujet, les documents essentiels (p. ex., la sélection des groupes témoins pour les études cas-témoins) font parfois défaut. Un glossaire des termes employés aiderait le lecteur qui connaît peu le domaine (par exemple, pour comprendre que la période de détection préclinique et le temps de séjour correspondent à la même notion). Plus important encore, cet ouvrage propose une intéressante discussion des modèles de type markovien ainsi que plusieurs suggestions créatives pour leur adaptation, il passe pratiquement sous silence les autres approches de modélisation mentionnées dans la littérature, telles que les tables de survie simplifiées qui peuvent être élaborées à partir de feuilles de calcul, les approches fondées sur l'analyse des décisions ou les modèles plus globaux de micro ou de macrosimulation dans la population. Enfin, compte tenu du titre de l'ouvrage, le lecteur pourrait s'attendre à trouver davantage de renseignements sur les indicateurs d'évaluation intérimaire qui sont essentiels pour la surveillance continue des programmes de dépistage afin d'assurer la qualité et la rentabilité des services.

En dépit de ces réserves, cet ouvrage est appelé à constituer une référence incontournable pour tout évaluateur sérieux des politiques et des programmes de dépistage. En général, la description des applications est assez fouillée pour permettre au lecteur de les expérimenter et elle est appuyée par des calculs détaillés et, dans certains cas, par des codes informatiques. Ce volume atteint son but, à savoir d'être accessible à un large éventail de professionnels dans le domaine de la santé publique et de la lutte contre les maladies, de même qu'aux statisticiens et aux épidémiologistes.

Évaluation globale :

Très bon

Points forts :

Cet ouvrage propose une excellente analyse d'une large gamme de questions de pointe d'ordre quantitatif liées à l'évaluation de nombreux aspects du dépistage du cancer et rend ces méthodes beaucoup plus accessibles aux utilisateurs éventuels grâce à des descriptions claires s'appuyant sur des tableaux, des graphiques, des exemples concrets, des codes informatiques et des annexes statistiques. Il contribue de façon importante et opportune à la constitution d'un corpus de données probantes dans le but ultime, crucial pour notre société, de s'assurer de l'efficacité et de la rentabilité de tous les fonds investis dans les activités de dépistage.

Points faibles :

La portée relativement large de l'ouvrage a pour corollaire que les sujets pertinents ne sont pas tous abordés et, partant, que certains sujets sont traités de manière inégale. Le lecteur ne trouvera aucune référence plus récente que 1999 et certaines lacunes sont manifestes.

Lecteurs :

Cet ouvrage intéressera au plus haut point les biostatisticiens et les épidémiologistes désireux d'en apprendre davantage au sujet des méthodes statistiques, des plans de recherche et des données requises pour l'évaluation du dépistage du cancer. Les gestionnaires et les administrateurs des programmes de dépistage auront également intérêt à lire cet ouvrage, qui leur permettra de mieux comprendre les méthodes disponibles ainsi que les moments et les moyens appropriés pour les mettre en application.


Leslie Gaudette

Chef intérimaire, Surveillance du traitement et des résultats
Division du cancer
Centre de prévention et de contrôle des maladies chroniques
Santé Canada
Pré Tunney
I.A. : 0602E2
Ottawa (Ontario)
K1A 0L2

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Dernière mise à jour : 2002-02-21 début