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Maladies chroniques au Canada


Volume 24
Numéro 1
2003

[Table des matières]

Agence de santé publique du Canada

Rapport d'atelier

Appel à l'action en faveur de l'utilisation de meilleures pratiques dans l'évaluation des stratégies globales de lutte contre le tabagisme


Steve Manske, Catherine Maule, Shawn O'Connor, Chris Lovato et Dexter Harvey


Résumé

Le Groupe de travail national sur les meilleures pratiques de lutte contre le tabagisme a organisé un atelier de deux jours en vue de promouvoir l'utilisation de meilleures pratiques dans l'évaluation des stratégies globales de lutte contre le tabagisme. Un modèle de meilleures pratiques, visant la mise au point d'un système autorégulateur (cybernétique) de meilleures pratiques, a servi de guide pour le contenu et le déroulement de l'atelier. Les organisateurs comptaient établir un cadre commun de surveillance et de contrôle des stratégies canadiennes de lutte contre le tabagisme en cherchant initialement à créer de solides relations de travail entre 43 décideurs, praticiens et chercheurs provenant de 12 entités gouvernementales distinctes du Canada. Les participants ont déterminé les besoins et formulé des recommandations inhérents à une meilleure compréhension et utilisation de stratégies d'évaluation uniformes, au renforcement des capacités et à la reconnaissance de la complexité du travail d'évaluation des stratégies globales de lutte contre le tabagisme. L'atelier a permis de mettre en évidence le besoin d'assurer une meilleure communication afin de faciliter la compréhension entre les différents secteurs participants. Il a également permis de cerner les avantages potentiels de l'harmonisation, entre les différentes entités, des méthodes d'évaluation des stratégies de lutte contre le tabagisme. Les mesures à prendre en priorité sont notamment la création d'une équipe nationale qui veillera à mettre au point un modèle d'évaluation commun, l'exécution d'une analyse de l'environnement à la recherche d'indicateurs, la planification des programmes d'évaluation/de contrôle et de recherche ainsi que la détermination des rôles des différents intervenants.

Mots clés : évaluation de programme; lutte globale contre le tabagisme; médecine fondée sur des données probantes; meilleures pratiques; prévention et contrôle; tabagisme


Introduction

Pour pouvoir accomplir un bon travail dans le domaine de la santé publique, il faut être capable de prendre des décisions éclairées sur les meilleures mesures à prendre face à des problèmes de santé complexes. Ces mesures, appelées «meilleures pratiques», sont «les programmes et politiques de recherche et les interventions susceptibles d'exercer l'effet le plus marqué sur la réduction du fardeau actuel et futur de la maladie»1. Le présent article décrit un atelier qui s'est tenu à Toronto les 25 et 26 mars 2002 en vue d'appuyer l'utilisation des meilleures pratiques dans l'évaluation de stratégies globales de lutte contre le tabagisme.

L'atelier a été organisé par le Groupe de travail national sur les meilleures pratiques de lutte contre le tabagisme* (le Groupe de travail), qui réunit des représentants d'organisations canadiennes soucieuses de déterminer et de mettre en œuvre les meilleures pratiques à adopter pour les programmes et politiques de lutte contre le tabagisme. La lutte contre le tabagisme est une préoccupation légitime, compte tenu de la gravité des effets possibles sur la santé, et plus d'une trentaine d'années de pratique et de recherche dans ce domaine ont permis de constituer une importante base de données probantes. Par ailleurs, les concepts et procédés qui guident le Groupe de travail pourraient également trouver des applications dans la lutte contre d'autres problèmes de santé complexes tels que la sédentarité et la mauvaise alimentation.

Contexte

Modèle de détermination, de mise en œuvre et d'évaluation des meilleures pratiques

Le Groupe de travail utilise un modèle de meilleures pratiques2 qui prévoit trois phases :

Phase 1 : déterminer les pratiques et outils recommandés (récapitulation de ce que l'on sait déjà)

Phase 2 : disséminer, mettre en œuvre et évaluer efficacement

Phase 3 : se servir de ces résultats pour orienter les pratiques futures

La phase 1 consiste à tirer de la base de connaissances actuelle un ensemble de recommandations et d'outils pour un domaine donné. À cette fin, il faut, selon le modèle, cerner une question clairement et passer les données qui s'y rapportent au crible scientifique. Les étapes cruciales suivantes consistent à passer ces données au crible de l'expérience pratique, notamment de la plausibilité et des avis d'experts. La phase 1 aboutit à la création d'une trousse d'outils qui peuvent être des interventions en matière de programmes ou de politiques, des lignes directrices relatives aux nouvelles recherches ou une combinaison quelconque de ces deux éléments. La notion selon laquelle les meilleures pratiques se déterminent en fonction de critères à la fois scientifiques et pratiques est un trait distinctif de cette approche. Dans le cas de la plupart des autres cadres, on a limité la recherche des interventions optimales à celles qui étaient scientifiquement validées3,4, sans plus considérer l'aspect pratique.

Les étapes de la phase 2 exigent que les processus de dissémination, d'adoption et de mise en œuvre incitent à vérifier comment les recommandations s'intégreront au nouveau contexte auquel elles s'appliqueront. Cependant, il est fallacieux de penser que l'on peut transposer des recommandations dans un nouveau contexte ou une autre époque5. C'est pourquoi la dernière étape de la phase 2 vise à aider les utilisateurs à évaluer dans quelle mesure ils ont réalisé une meilleure pratique.

À la phase 3, les utilisateurs sont invités à intégrer les résultats de leur évaluation dans la planification des futures interventions et recherches (c.-à-d. la phase 1). Ce faisant, ils créeront un système autorégulateur itératif.

L'atelier devait servir à mettre au point, à l'échelle nationale, une des composantes d'un tel système autorégulateur de meilleures pratiques. Autrement dit, les organisateurs voulaient concevoir un cadre commun de surveillance et de contrôle des stratégies globales de lutte contre le tabagisme au Canada et en favoriser l'adaptation aux réalités de chacune des entités gouvernementales. Il n'en existe pas à l'heure actuelle au Canada, mais on en trouve ailleurs dans le monde (p. ex., au Massachussets6, en Californie7,8 et en Arizona9). Les États-Unis ont cherché à assurer la comparabilité entre les États grâce au programme ASSIST10. Ce programme a facilité l'utilisation du cadre au moyen d'une assistance et d'une formation techniques.

Si les 14 entités gouvernementales canadiennes (une nationale, dix provinciales et trois territoriales) adoptaient un cadre commun de surveillance et de contrôle, les décideurs pourraient tirer profit des expériences faites aux différents endroits et les comparer en vue d'améliorer les pratiques. Il est essentiel d'assurer la surveillance et le contrôle permanents des stratégies nationale, provinciales et régionales pour être en mesure d'aider à déterminer les types de données requises pour faciliter la prise de décisions fondées sur des données probantes à la lumière des objectifs de chaque entité. Le maintien d'un lien entre les objectifs et l'évaluation aide à garantir des résultats et une bonne utilisation des fonds consentis11.

Nécessité d'évaluer les stratégies globales de lutte contre le tabagisme

Le tabagisme demeure le principal problème de santé publique évitable au Canada12-16, et les données épidémiologiques confirmant son effet dévastateur s'accumulent de jour en jour14. Le tabac est le plus souvent perçu comme une cause du cancer du poumon, mais il est également associé à divers autres cancers, à la maladie cardiovasculaire (MCV), à la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) ainsi qu'au diabète17. À cela, il faut ajouter des conséquences économiques et sociales énormes18-20.

Devant cet état de choses, des organisations gouvernementales et non gouvernementales ont consenti des efforts systématiques à la lutte contre le tabagisme. Bien que la prévalence du tabagisme ait quelque peu diminué - le taux des adultes fumeurs s'établissant actuellement à 22 %21 -, les mesures de lutte demeurent une priorité des programmes de santé. Les données recueillies au cours de quatre décennies confirment la nécessité d'adopter des mesures de lutte globales. Les endroits où des réductions ont été observées dans les taux de tabagisme parmi l'ensemble de la population (soit la Californie, la Floride et le Massachusetts) ont utilisé des stratégies globales coordonnées7,22,23. De même, les interventions globales ont modifié considérablement les profils de la santé de la population par rapport à diverses maladies (p. ex., la MCV24 et le cancer25). Les expériences d'autres pays peuvent être prises en considération dans l'établissement des pratiques canadiennes, mais il est ressorti de notre étude antérieure du modèle des meilleures pratiques2 que toute stratégie empruntée devrait être adaptée, et subséquemment évaluée, en milieu canadien.

Principes directeurs applicables à la détermination et à la mise en œuvre des meilleures pratiques d'évaluation des stratégies globales de lutte contre le tabagisme

La collaboration de chercheurs et d'utilisateurs potentiels des pratiques recommandées est un élément essentiel du processus d'adoption du modèle des meilleures pratiques. Bien que l'expertise scientifique des uns et la pratique des autres permette d'améliorer les recommandations, la collaboration entre ces deux groupes n'est pas forcément simple. Le Groupe de travail a appliqué ses propres principes en matière de «meilleures pratiques», partant du modèle des «communautés de pratique»26,27, qui sont des réseaux d'échange de pratiques, pour orienter le travail de création d'une telle collaboration.

Les communautés de pratique (CP) sont des groupes de personnes poursuivant un but commun, qui entretiennent des échanges réguliers en vue de partager des connaissances et des pratiques26-28. Vu que les collaborateurs participant à l'atelier provenaient de milieux différents (p. ex., de la Nouvelle-Écosse comme de la Colombie-Britannique; du milieu de la recherche comme de celui de la pratique), un engagement mutuel devait, selon le modèle de la CP, pouvoir aider à créer une relation de confiance entre les participants. La confiance devait d'abord s'installer entre les collaborateurs avant que la communauté puisse s'entendre sur un but commun en tenant chacun responsable du sens à donner à ce but. Avec le temps, les communautés en viennent à partager une même façon de décrire ce but et de procéder à sa réalisation. Le Groupe de travail espérait pouvoir aider à créer une CP parmi les chercheurs et décideurs en vue d'élaborer un cadre commun d'évaluation des stratégies globales de lutte contre le tabagisme.

Le Groupe de travail a opté pour la formule de l'atelier, soit du face-à-face, pour obtenir un engagement des collaborateurs potentiels. Il a toutefois reconnu que la CP issue de cet exercice nécessiterait une quelconque forme de communication électronique, comme le téléphone, le courrier électronique et l'Internet pour développer et maintenir ses activités. Les CP de grandes entreprises qui sont dispersées géographiquement ont souvent recours à des moyens de communication électroniques, mais une première rencontre en personne est tout de même utile pour permettre à leurs membres de tisser des liens personnels susceptibles de créer la relation de confiance souhaitée29. Les CP dont les membres sont dispersés réussissent mieux lorsque ceux-ci ont en commun des valeurs, des histoires et des codes30,31.

Travail préliminaire

Avant l'atelier, on a effectué des recherches sur les stratégies, cadres et ressources d'évaluation déjà utilisés aux États-Unis. L'atelier devait être l'occasion de présenter cette information à des dirigeants clés des provinces et territoires canadiens. Dans l'ensemble, on s'est efforcé lors de cette rencontre de tirer les meilleurs résultats de ces cadres d'évaluation et de les communiquer à toutes les entités gouvernementales, en vue d'aider les décideurs à adapter les programmes de lutte contre le tabagisme à la lumière des données concernant l'efficacité.

La vision envisagée pour l'atelier était de :

  • dégager une approche commune de l'évaluation, dans les limites de ce qui est possible et approprié
  • faciliter le processus de mise au point d'évaluations de grande qualité pouvant donner des résultats d'une plus grande valeur grâce à des approches communes
  • appuyer l'utilisation des meilleures pratiques dans les évaluations pour pouvoir satisfaire aux exigences de la reddition de comptes.

Les objectifs de l'atelier étaient de :

  • favoriser la création de réseaux et l'échange d'information dans et entre les provinces et les secteurs de la lutte contre le tabagisme (recherche/évaluation, pratique et prise de décisions)
  • identifier les principales composantes communes des stratégies ou interventions de lutte contre le tabagisme des différentes entités gouvernementales
  • vérifier (en gros) quelle information il faut tirer d'une évaluation de ces composantes/interventions pour pouvoir orienter le processus décisionnel courant
  • explorer l'intérêt qu'il peut y avoir à mettre au point des indicateurs communs et à établir des processus qui simplifieraient l'évaluation au sein de tous les gouvernements concernés et rendraient la collecte d'information et la prise de décisions plus efficaces; de recueillir des idées sur la façon d'y parvenir
  • planifier des étapes précises devant mener à l'élaboration et à la mise en œuvre de plans d'évaluation provinciaux applicables aux principales activités de lutte contre le tabagisme (en intégrant les systèmes de collecte de données existants), et de se concentrer sur les secteurs où il serait avantageux de collaborer en vue faire progresser le travail des personnes responsables de la mise en œuvre des stratégies de lutte contre le tabagisme, des interventions et des évaluations.

Sommaire des délibérations de l'atelier

Parmi les 43 participants se retrouvaient 11 praticiens de la santé publique (p. ex., des praticiens de la lutte contre le tabagisme d'organismes bénévoles provinciaux), 15 décideurs (p. ex., des coordonateurs de stratégies provinciales de lutte contre le tabagisme) et 17 chercheurs représentant dix gouvernements provinciaux, un gouvernement territorial et le gouvernement fédéral. Le premier jour, les discussions ont été centrées sur cinq domaines identifiés au cours du travail préliminaire comme étant le fondement potentiel d'un cadre d'évaluation ou d'un modèle logique. Ces domaines pourraient servir à déterminer les intrants et les extrants de ce qui suit : les capacités et ressources vouées à la lutte contre le tabagisme; les mesures prises au niveau des politiques pour lutter contre le tabagisme; les mesures prises au niveau des programmes pour lutter contre le tabagisme; le travail de recherche, de contrôle et d'évaluation axé sur la lutte contre le tabagisme; ainsi que les partenariats de collaboration. Les discussions ont porté sur un vaste éventail de questions, dont des recommandations visant l'amélioration des approches actuelles, des indicateurs qui permettraient de démontrer la réussite des activités dans chaque domaine, ainsi que les défis et obstacles inhérents à la démonstration de la réussite.

Le deuxième jour, les discussions ont porté sur l'évaluation des activités par rapport à trois des buts de la Stratégie nationale* (la prévention, la protection et la cessation; il n'a pas été traité du quatrième but, la «dénormalisation») et sur ce qu'il faudrait pour mettre en œuvre l'évaluation de programmes globaux visant des objectifs multiples.

Grâce à une série d'exercices en petits groupes et en plénière, les participants ont pu cerner les besoins et stratégies en matière d'évaluation, du point de vue de différentes entités gouvernementales, décideurs, praticiens et chercheurs. Les besoins étaient centrés sur trois thèmes : une meilleure compréhension et utilisation de stratégies d'évaluation uniformes; le renforcement des capacités grâce à un soutien financier et stratégique et à des outils susceptibles de faciliter l'évaluation; ainsi que l'élaboration de stratégies tenant compte des complexités de la mise en œuvre d'évaluations. Les trois thèmes se résument ainsi :

Compréhension et utilisation de stratégies d'évaluation

  • mettre en commun de l'information sur les activités et outils afin d'améliorer la qualité des activités de lutte contre le tabagisme
  • accroître la coordination et la participation parmi les principaux intervenants/décideurs dans le domaine de la lutte contre le tabagisme, ce qui inclut la création de liens parmi et entre les groupes de chercheurs, de praticiens et de décideurs en vue de faciliter la collecte et l'utilisation de renseignements sur les approches en matière d'intervention

Capacités

  • intégrer l'évaluation à tous les plans de programmes, par exemple, en assignant un pourcentage des budgets à l'évaluation et à la collecte de données avant et tout au cours de la mise en œuvre de toute intervention
  • assurer le suivi des perceptions des professionnels de la santé à l'égard du tabagisme, de leurs rôles face au tabagisme et des mesures qu'ils prennent pour lutter contre ce problème, et revendiquer des changements à ce niveau

Complexité

  • recueillir de l'information se rapportant à chacun des buts, soit la prévention, la protection, la cessation et la dénormalisation
  • reconnaître que l'interaction et la complexité des facteurs contributifs liés à la stratégie globale d'une entité gouvernementale sont importantes, peu importe que l'on évalue une seule activité ou une gamme d'activités. Il faut, par exemple, prendre en considération la segmentation du marché, les déterminants de la santé, les connaissances et attitudes ainsi que les comportements associés au tabagisme et le contexte
  • assurer le suivi de l'impact des interventions pendant une période suffisante, après l'achèvement de l'intervention, pour évaluer sa persistance
  • tenir compte d'un ensemble d'enjeux liés à l'éthique, aux droits de la personne et aux considérations juridiques au moment de mettre en œuvre et d'évaluer bon nombre d'interventions

Recommandations

Voici les principales recommandations qui se sont dégagées de l'identification de ces besoins :

  • Élaborer des systèmes permettant aux entités gouvernementales du Canada de partager de l'information, notamment des trousses de mesures et méthodes normatives qui font appel aux technologies, et un centre d'échange de données de surveillance et de ressources existantes pour l'évaluation.
  • Créer des mécanismes pour appuyer la constitution de réseaux et la coordination, notamment prévoir des thèmes ou rencontres concernant expressément l'évaluation à des conférences nationales, des communautés de pratique en ligne et des paramètres de partenariat formulés clairement.
  • Formuler et disséminer des définitions et objectifs clairs et uniformes, notamment assurer la cohérence de la conception et du langage de l'évaluation, afin de faciliter la mise en commun de l'information, et des objectifs tangibles (p. ex., des réductions en pourcentage du nombre de fumeurs) permettant de suivre les progrès réalisés dans l'atteinte des buts de la stratégie globale d'un gouvernement. Nous devons nous entendre sur le sens du mot «globale» qualifiant une stratégie de lutte contre le tabagisme, ainsi que sur les définition de «fumeur» et de «cesser».
  • Constituer des ressources financières afin de renforcer la volonté d'évaluer, en grossissant les ressources existantes et en cherchant de nouvelles sources de financement, ainsi qu'en favorisant un financement stable et durable, peut-être au moyen d'une taxe spécifique sur le tabac. Il faudra élaborer des lignes directrices concernant le financement à accorder, par habitant, à la lutte contre le tabagisme et à l'évaluation.
  • Accroître la capacité de guider l'évaluation au niveau local, en créant un réseau national ou un comité consultatif d'experts qui apporterait une aide dans la collecte et l'interprétation des données, de manière à «réoutiller» les chercheurs pour qu'ils appuient les communautés.
  • Accroître le soutien politique et communautaire à la lutte contre le tabagisme, en utilisant les données provenant d'enquêtes périodiques sur les attitudes et croyances comme outils de revendication.
  • Assurer un suivi d'autres facteurs qui ne font pas directement partie des interventions contre le tabagisme, notamment des activités, ressources et marges bénéficiaires de l'industrie du tabac.
  • Mettre au point et disséminer des pratiques fondamentales qui font le lien entre les objectifs des stratégies de lutte contre le tabagisme et leurs résultats. Ces pratiques pourraient inclure ce qui suit :

    • fixer des barèmes d'objectifs réalistes pour les résultats
    • appuyer des examens systématiques (meilleures pratiques) et l'application des connaissances
    • faire usage et faire rapport des résultats négatifs et des conséquences non voulues
    • envisager une rétroinformation régulière sous forme de fiches de rendement provinciales
    • contrôler l'utilité et l'impact des pratiques d'évaluation
    • appuyer l'évaluation par des mécanismes garantissant l'indépendance, dans la mesure du possible.

Les participants à l'atelier ont recensé les mesures prioritaires suivantes pour soutenir l'élaboration d'un cadre d'évaluation des stratégies globales :

  • effectuer une analyse de l'environnement afin de repérer les lacunes et d'identifier des indicateurs aux échelons international, national et provincial
  • planifier des programmes d'évaluation/de contrôle et de recherche, en tenant compte des questions liées aux capacités
  • créer une équipe nationale pour s'entendre sur un modèle d'évaluation (incluant des définitions), un mécanisme de coordination, un entrepôt de données, des façons d'intégrer les données, des sources de données (état civil, etc.), un programme de recherche et des priorités
  • préciser les rôles et responsabilités des différents paliers (fédéral, provincial/territorial) et secteurs (gouvernemental, non gouvernemental, recherche).

Analyse

Les résultats de l'atelier confirment la nécessité d'adopter des mesures pour faciliter l'évaluation des stratégies globales de lutte contre le tabagisme au Canada et un système national capable d'appuyer les meilleures pratiques dans ce domaine. Pour ce faire, il faudra accorder une attention particulière à la complexité du travail en cause, aux capacités additionnelles requises (ressources et outils) et à l'amélioration de la mise en commun et de la coordination des évaluations. Les participants à l'atelier ont formulé des recommandations visant les mécanismes et produits nécessaires pour répondre à ces besoins.

Un thème récurrent dans les délibérations a été le besoin d'assurer une bonne application des connaissances et la difficulté d'y parvenir. Par exemple, les participants du secteur des programmes/décideurs et du secteur de la recherche/de l'évaluation avaient tendance à employer des termes différents pour désigner des concepts semblables. De même, l'importance accordée aux concepts variait selon les secteurs. L'atelier a permis d'amorcer un dialogue, mais pour réaliser une communauté de pratique envisagée par Wenger, soit une conception commune et une entente des différents secteurs, entités gouvernementales et organisations, il faudra assurer une plus grande interaction entre les principaux intervenants. Un échange d'information plus poussé (p. ex., les modèles logiques) entre les participants avant l'atelier aurait peut-être favorisé l'entente à l'atelier même. Pour donner suite aux résultats de l'atelier, les participants utilisent différentes formes de réseautage électronique, notamment le logiciel Web QuickPlaceMC, qui permet de créer des profils des membres et facilite le développement et la mise en commun de l'expertise et d'outils pratiques (p. ex., des enquêtes ou des protocoles) associés à l'évaluation de stratégies globales de lutte contre le tabagisme.

L'atelier a également permis de souligner le manque de lignes directrices relatives à l'évaluation des stratégies globales de lutte contre le tabagisme. Les participants s'entendaient pour dire que l'adoption d'un cadre d'évaluation commun à tous les gouvernements procurerait de nombreux avantages. Une telle coordination permettrait, par exemple, de tirer profit des expériences qui se font naturellement lorsqu'une ou plusieurs provinces mettent en œuvre des changements de politique particuliers alors que d'autres ne le font pas. Elle rendrait également possibles certaines économies d'échelle, du fait que des outils et protocoles mis au point par un gouvernement pourraient également être utilisés par les autres.

Le Groupe de travail s'attend à ce que les mesures jugées prioritaires par les participants contribuent à l'élaboration d'un cadre d'évaluation, et notamment d'un énoncé d'objectif, de définitions et de calendriers d'intervention, ainsi que d'un ensemble minimal normatif de données à recueillir dans toutes les évaluations de stratégies globales. Ces mesures contribueront également à la production d'un aperçu à jour des efforts actuellement déployés pour contrôler et évaluer, et d'une grille de comparaison des meilleures pratiques provinciales et d'évaluation des données probantes qui réponde par le fond et la forme aux besoins des décideurs.

Conclusions

Cet atelier a permis de réaliser d'importants progrès en créant des liens entre les chercheurs, les praticiens et les décideurs, au sein des entités gouvernementales fédérale, territoriales et provinciales et entre elles. Ce faisant, il a atteint ses objectifs, mais tous ceux qui oeuvrent dans le domaine de la lutte contre le tabagisme ont énormément à accomplir pour que sa vision se réalise.

Les participants à l'atelier ont tracé les grandes lignes de l'information qu'il faut tirer de l'évaluation des principales composantes/interventions pour appuyer le processus décisionnel courant. Ils ont manifesté un grand intérêt pour la mise au point d'indicateurs communs. La prise d'autres mesures après l'atelier permettra de concevoir des processus pour simplifier l'évaluation au sein de tous les gouvernements et rendre la collecte d'information et la prise de décisions plus efficaces. Le Groupe de travail national sur les meilleures pratiques de lutte contre le tabagisme s'active à trouver le financement et d'autres ressources nécessaires pour mettre les recommandations en œuvre.

Remerciements

Nous tenons à remercier les organisations qui ont financé l'atelier : Santé Canada, l'Initiative canadienne de recherche sur le tabac et le Centre de recherche sur le comportement et d'évaluation des programmes. De plus, cet atelier n'aurait pu être mené à bien sans la collaboration entière et enthousiaste des participants et l'apport du groupe chargé de la planification.

Références

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Coordonnées des auteurs

Loraine D Marrett, Division d'oncologie préventive, Action Cancer Ontario, Toronto, Canada

Dave Broadhurst, Division de la science de l'atmosphère, région de l'Ontario, Environnement Canada

Stéphanie Charron, Direction générale des produits de santé et des aliments, régions de l'Ontario et du Nunavut, Santé Canada

Laurie Fraser, Unité de santé de Sudbury et du district, Sudbury (Ontario)

Lynn From, Division de la dermatologie, campus du Women's College, Sunnybrook and Women's College Health Sciences Centre, Toronto (Ontario), Canada

William Hunter, Direction de la santé publique, ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario

Patricia Payne, Société canadienne du cancer, Division de l'Ontario

Mary Louise Yarema, Santé publique Toronto, Toronto (Ontario), Canada

Cheryl Rosen, Division de la dermatologie, Départment de médecine, Toronto Western Hospital, Université de Toronto, Toronto (Ontario), Canada

Correspondance : Loraine D Marrett, Division d'oncologie préventive, Action Cancer Ontario, 620 University Avenue, Toronto (Ontario), Canada M5G 2L7; télécopieur : (416) 971-6888; courriel : loraine.marrett@cancercare.on.ca


* Aux dates de l'atelier, les organisations membres étaient : le Conseil canadien pour le contrôle du tabac (CCCT), l'Initiative canadienne de recherche sur le tabac (ICRT), le Centre de recherche sur le comportement et d'évaluation des programmes (CRCEP) et Santé Canada. Les professionnels de la santé invités à participer à la préparation de l'atelier provenaient de Santé Canada, de l'Unité de recherche sur le tabagisme en Ontario, de l'Université de la Colombie-Britannique et de l'Université du Manitoba. L'atelier a été financé par le CRCEP, l'ICRT et Santé Canada.

* Comité directeur de la Stratégie nationale pour la réduction du tabagisme au Canada. Nouvelles orientations pour le contrôle du tabac au Canada : Une stratégie nationale. Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (1999).

Selon l'expérience de la Californie et l'information provenant des Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis, un taux estimatif raisonnable pour l'évaluation des interventions communautaires individuelles serait de 10 % et, pour l'évaluation du programme global, il équivaudrait à un 10 % additionnel.

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Dernière mise à jour : 2004-07-29 début