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Relevé des maladies transmissibles au Canada

 

Relevé des maladies transmissibles au Canada
Volume 29  DCC-7
le 15 septembre 2003

Une déclaration d'un comité consultatif (DCC)
Comité consultatif national de l'immunisation (CCNI)
*

DÉCLARATION CONCERNANT L'USAGE RECOMMANDÉ DE L'ANTICORPS MONOCLONAL ANTI-VRS (PALIVIZUMAB)

Document Adobe télédéchargeable
16 pages - 242 KB PDF


Préambule

Le Comité consultatif national de l'immunisation (CCNI) donne à Santé Canada des conseils constants et à jour liés à l'immunisation dans le domaine de la médecine, des sciences et de la santé publique. Santé Canada reconnaît que les conseils et les recommandations figurant dans cette déclaration reposent sur les connaissances scientifiques les plus récentes et diffuse le document à des fins d'information. Les personnes qui administrent ou utilisent l'agent immunisant doivent également connaître le contenu des monographies de produit pertinentes. Les recommandations d'utilisation et les autres renseignements qui figurent dans le présent document peuvent différer du contenu des monographies de produit établies par le fabricant autorisé de l'agent immunisant au Canada. Les fabricants ont uniquement fait approuver l'agent immunisant et démontré son innocuité et son efficacité lorsqu'il est utilisé selon la monographie du produit. 

Introduction 

En 1997, l'usage de l'immunoglobuline intraveineuse (humaine) contre le virus respiratoire syncytial (IGIV-VRS) a été approuvé au Canada pour la prévention de l'infection due au VRS chez les enfants de < 2 ans atteints de dysplasie broncho-pulmonaire (DBP) ou d'une maladie pulmonaire chronique (MPC) ou nés prématurément (<= 35 semaines de gestation). Ce produit, une Ig intraveineuse dérivée de pools de plasma humain contenant de fortes concentrations d'anticorps protecteurs qui neutralisent le VRS, avait l'inconvénient de nécessiter des injections intraveineuses mensuelles d'un grand volume de liquide pendant plusieurs heures, et présentait en outre les risques théoriques associés à tout produit sanguin humain et était contre-indiqué chez les enfants souffrant de certaines lésions cardiaques congénitales. Dans le Guide canadien d'immunisation, le CCNI a indiqué que la prophylaxie par l'IGIV-VRS peut être bénéfique durant les 6 premiers mois de vie chez certains enfants de < 2 ans atteints de DBP ou les nourrissons nés après 29 à 32 semaines de gestation(1)

En juin 2002, Santé Canada a approuvé un anticorps monoclonal anti-VRS, le palivizumab (SynagisMC, Laboratoires Abbott Ltée, Saint-Laurent, Québec) pour la prévention de maladies graves des voies respiratoires inférieures causées par le VRS chez les enfants qui courent un risque élevé de maladies dues au VRS. Bien que le palivizumab n'ait été homologué au Canada qu'en juin 2002, on pouvait y avoir accès depuis 1999, par le biais du Programme d'accès spécial de la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada, pour immuniser des enfants présentant certains troubles à risque élevé(2). La présente déclaration du CCNI contient des recommandations concernant l'utilisation du palivizumab aux fins de la prévention des maladies dues au VRS. 

Épidémiologie et maladie clinique 

Le VRS est la principale cause de maladies des voies respiratoires inférieures chez les jeunes enfants dans le monde et infecte presque tous les enfants avant l'âge de deux ans(3-5) lors d'épidémies annuelles sévissant chaque hiver. La primo-infection ne confère pas une immunité protectrice, et une réinfection est possible durant des saisons consécutives et tout au long de la vie(6,7)

La manifestation clinique la plus fréquente du VRS chez les jeunes enfants est la bronchiolite, une infection aiguë des voies respiratoires inférieures associée à une tachypnée, à une toux et à une respiration sifflante à la suite d'une maladie des voies respiratoires supérieures(8). De 1 % à 2 % environ de tous les enfants atteints de bronchiolite seront assez malades pour devoir être hospitalisés afin de recevoir de l'oxygène, des liquides par voie intraveineuse ou d'autres soins d'appoint. Les frais d'hospitalisation représentent au moins 65 % du fardeau économique associé au VRS chez les enfants de < 4 ans(9), et des données montrent que les taux d'hospitalisation n'ont cessé de croître au cours des deux dernières décennies(10)

Les enfants de < 2 ans qui courent le plus grand risque d'infection grave des voies respiratoires inférieures sont les nourrissons auparavant en bonne santé qui sont âgés de < 6 semaines, les prématurés, ceux qui souffrent d'une maladie cardiaque ou pulmonaire sous-jacente et ceux qui sont immunodéprimés. Des études prospectives de cohortes d'enfants canadiens hospitalisés pour une infection à VRS révèlent que ces enfants sont plus nombreux à séjourner longtemps à l'hôpital, à devoir être admis à l'unité de soins intensifs et à avoir besoin d'une ventilation mécanique(11-16). Environ 1 % des enfants hospitalisés pour une bronchiolite due au VRS meurent, mais le taux de mortalité atteint environ 3 % chez ceux qui souffraient déjà d'une maladie cardiaque ou pulmonaire. 

Les nourrissons qui présentent une DBP/MPC à la suite de la prise en charge d'une maladie respiratoire associée à leur prématurité affichent des taux élevés de réhospitalisation pour une infection des voies respiratoires inférieures d'origine communautaire. Jusqu'à la moitié de ces nourrissons pourront être réadmis pour une infection virale, en particulier une infection à VRS, afin de recevoir des soins d'appoint en raison d'une détérioration marquée de leur fonction pulmonaire(17,18). Au Canada, environ 26 % des nourrissons de très petit poids à la naissance (< 1 500 g) qui survivent souffrent d'une MPC(19). Les études du Réseau collaborateur de chercheurs sur les maladies infectieuses chez les enfants au Canada (PICNIC) portant sur plusieurs années où sont survenues des épidémies montrent qu'environ 13 % de toutes les personnes admises à l'hôpital sont des enfants atteints d'une maladie pulmonaire chronique et que ces derniers sont plus nombreux à séjourner longtemps à l'hôpital et à être admis dans une unité de soins intensifs(11,12,15)

Les enfants souffrant d'autres maladies pulmonaires non associées à la prématurité (p. ex., pneumonie de déglutition récurrente, fibrose kystique du pancréas, malformation pulmonaire), en particulier ceux qui bénéficient d'une oxygénothérapie à domicile, semblent également courir un plus grand risque d'infection sévère des voies respiratoires inférieures due au VRS(20). Des taux élevés d'infections des voies respiratoires inférieures associées au VRS, notamment chez les enfants de < 6 mois, ont été observés chez des nourrissons inuits (484/1 000 nourrissons)(21), jusqu'à 38 % des nourrissons devant être hospitalisés(22) et 12 % devant être intubés pour une assistance respiratoire(21). Ces données concordent avec ce qui a été observé chez d'autres groupes autochtones, à savoir que cette population présente une forte incidence d'infections des voies respiratoires inférieures et de complications comparativement aux non-Autochtones(23,24)

La prématurité (< 36 semaines de gestation) est un facteur de risque indépendant d'infection sévère des voies respiratoires inférieures due au VRS et peut se solder par une apnée, une insuffisance respiratoire ou nécessiter une alimentation intraveineuse à cause d'une incapacité à s'alimenter(12,13,15). Le risque signalé d'hospitalisation pour une infection à VRS chez les nourrissons prématurés qui ne présentent pas d'autres facteurs de risque et qui retournent dans la collectivité après leur congé de l'hôpital varie grandement selon les études, allant de 1 % à 23 %(25,26-29). Environ 75 % des nourrissons qui reçoivent actuellement une prophylaxie au palivizumab au Canada sont nés après <= 32 semaines de gestation(2)

Les enfants souffrant d'une cardiopathie hémodynamiquement significative ont de la difficulté à accroître leur débit cardiaque et leur apport d'oxygène durant une infection des voies respiratoires inférieures et courent un risque important d'insuffisance respiratoire ou cardiaque durant de telles maladies(30). Bien qu'une première étude ait mis en évidence des taux très élevés de mortalité associés à l'infection à VRS chez les enfants atteints d'une cardiopathie congénitale(31), des études canadiennes récentes ont fait état d'un taux de mortalité de 3,4 % chez les enfants hospitalisés, d'un taux d'admission à l'unité de soins intensifs de 33,4 % et d'un taux de ventilation mécanique d'environ 18 %(32). Les enfants souffrant d'hypertension pulmonaire semblent courir un risque particulièrement élevé(30,33). Une infection à VRS avant ou après une chirurgie cardiaque de correction peut grandement aggraver le pronostic clinique(34,35)

Le VRS est une cause de plus en plus reconnue d'infection des voies respiratoires inférieures chez les adultes(36,37). Bien que les deuxièmes infections et les infections subséquentes puissent entraîner une maladie moins grave que la primo-infection(38), une infection à VRS après l'enfance peut causer des infections des voies respiratoires inférieures d'origine communautaire chez les adultes hospitalisés(39) et des exacerbations de la bronchite chronique(40). Les personnes âgées, de constitution frêle qui vivent dans la collectivité ou en établissement ainsi que les adultes souffrant d'une maladie cardiaque ou pulmonaire sous-jacente courent un risque particulièrement élevé de maladies graves dues au VRS. Lors d'éclosions survenues chez des personnes âgées vivant dans des établissements de soins de longue durée, l'infection a été compliquée par une pneumonie dans 5 % à 55 % des cas et le taux de mortalité atteignait 20 %(36,41). Aux États-Unis, on estime que 78 % des décès associés au VRS se produisent chez les personnes de >= 65 ans(42). Des infections sévères ont également été signalées chez les personnes immunodéprimées, notamment des greffés de tout âge(36,43). Les taux de mortalité sont les plus élevés chez les receveurs de greffe de moelle osseuse avant la prise de la greffe, jusqu'à 80 % d'entre eux pouvant en effet mourir d'une pneumonie grave(36).

Préparations immunisantes homologuées 

Le seul anticorps monoclonal anti-VRS homologué au Canada est le palivizumab. Ce dernier est une immunoglobuline G 1 (IgG 1) monoclonale humanisée, dirigée contre un épitope de la glycoprotéine du VRS, protéine de surface qui est bien conservée dans les isolats de VRS(44). Il est produit au moyen de la technique de l'ADN recombinant, où des régions déterminantes de complémentarité de l'anticorps monoclonal murin sont implantées dans le domaine de fixation de l'anticorps humain. La séquence d'acides aminés du palivizumab est à 95 % d'origine humaine et à 5 % d'origine murine. Comme le palivizumab n'est pas dérivé de l'immunoglobuline humaine, il ne risque pas d'être contaminé par des agents infectieux transmissibles par le sang. 

Efficacité et concentrations sériques protectrices 

Avant la réalisation d'études d'efficacité chez les enfants, des études de plages de doses efficaces ont été menées dans un modèle animal d'infection à VRS des voies respiratoires inférieures pour déterminer la concentration sérique d'immunoglobuline anti-VRS qui conférerait une protection contre l'infection pulmonaire. Dans ce modèle, des concentrations sériques de 25 à 30 µg/mL ont entraîné une réduction moyenne de 99 % des infections pulmonaires à VRS et cette réduction atteignait au moins 99 % lorsque la concentration dépassait 40 µg/mL(44). Des études de plages de doses chez des enfants qui ont porté sur des doses de 5 à 15 mg/kg de palivizumab ont établi que l'injection intramusculaire ou intraveineuse de doses de 15 mg/kg produisaient pendant une période pouvant atteindre 30 jours des concentrations sériques bien supérieures à celles considérées comme protectrices dans les études animales(45)

Selon la monographie du produit, l'administration de 15 mg/kg de poids corporel de palivizumab à des enfants donne une concentration sérique moyenne à 30 jours de 37 µg/mL (écart type [ET] 21) après la première injection, de 57 (ET 41) µg/mL après la deuxième injection, de 68 (ET 51) µg/mL après la troisième injection et de 72 (ET 50) µg/mL après la quatrième injection. Chez les enfants qui ont reçu du palivizumab pendant une deuxième saison, les concentrations sériques moyennes après la première et la quatrième injections s'élevaient à 61 (ET 17) µg/mL et à 86 (ET 31) µg/mL, respectivement. Chez les enfants de < 4 mois, la demi-vie moyenne du palivizumab était de 20 jours (intervalle de 16,8 à 26,8 jours). 

Le palivizumab a fait l'objet de seulement deux essais cliniques comparatifs randomisés, qui ont évalué son efficacité comme moyen de réduire l'incidence de l'hospitalisation due au VRS dans deux populations d'enfants : enfants prématurés ou atteints d'une MPC(26) et enfants souffrant d'une cardiopathie hémodynamiquement significative(46). Dans les deux études, la mesure primaire des résultats a été la réduction de l'hospitalisation des cas confirmés d'infection à VRS. 

Dans le premier essai, 1 502 enfants nés après <= 35 semaines de gestation qui étaient âgés de <= 6 mois ou encore qui avaient <= 24 mois et avaient reçu un diagnostic clinique de DBP exigeant un traitement médical continu (oxygène d'appoint, stéroïdes, bronchodilatateurs ou diurétiques au cours des 6 mois précédents) étaient admissibles(26). Neuf des 139 centres dans cette étude multicentrique étaient situés au Canada. Les enfants ont reçu des injections mensuelles de 15 mg/kg de poids corporel soit de palivizumab ou d'un placebo pendant 5 mois à partir du mois de décembre. Le taux d'hospitalisation due au VRS s'établissait à 10,6 % dans le groupe placebo et à 4,8 % dans le groupe traité au palivizumab, ce qui représente une baisse de 55 % du risque relatif pour cette mesure primaire des résultats. Des réductions ont également été signalées pour certaines mesures secondaires des résultats : durée du séjour à l'hôpital (62,4 contre 36,4 jours pour 100 enfants), durée de la maladie modérée à sévère chez les enfants hospitalisés (47,4 contre 29,6 jours pour 100 enfants) et période pendant laquelle de l'oxygène a dû être administré (50,6 jours contre 30,3 jours/100 enfants). 

L'analyse des sous-groupes de sujets a fait ressortir une certaine variation dans le niveau de protection conféré par la prophylaxie au palivizumab. Le risque d'hospitalisation due au VRS était réduit de 80 % chez les enfants nés après 32 à 35 semaines de gestation par rapport à ceux qui recevaient un placebo (9,8 % contre 2 %), de 78 % dans les cas des nourrissons non atteints d'une DBP (8,1 % contre 1,8 %), de 47 % chez les nourrissons nés après < 32 semaines de gestation (11 % contre 5,8 %) et de 39 % chez les nourrissons atteints d'une DBP (12,8 % contre 7,9 %). Aucune différence n'a été observée entre les groupes placebo et traités au palivizumab pour ce qui est du besoin de ventilation mécanique ou de la durée de la ventilation, de la durée de séjour dans l'unité de soins intensifs, de l'apparition d'une otite moyenne ou de l'hospitalisation non due au VRS. 

Les enfants souffrant d'une cardiopathie congénitale cyanogène qui ont reçu de l'IGIV-VRS dans les études d'efficacité ont connu beaucoup plus souvent des épisodes imprévus de cyanose et des problèmes après la chirurgie (22 sur 78, 28 %) que les membres du groupe témoin (4 sur 47, 8,5 %, p = 0,009)(46); aussi le produit n'a-t-il pas été homologué pour cette indication. Il semblerait que la charge liquidienne d'IGIV-VRS joue un rôle dans cette complication. Un essai multicentrique du palivizumab qui visait expressément cette population vient récemment de prendre fin(47); six des 76 centres étaient situés au Canada. Dans cet essai, 1 287 enfants de < 24 mois souffrant d'une cardiopathie hémodynamiquement significative qui n'avait pas été corrigée ou avait été corrigée partiellement par la chirurgie ont été répartis au hasard en deux groupes : l'un recevant un placebo et l'autre du palivizumab chaque mois pendant 5 mois durant la saison hivernale des infections respiratoires. La prophylaxie mensuelle était associée à une réduction de 45 % du taux d'hospitalisation pour une infection à VRS (9,7 % contre 5,3 %). Au Canada, les taux d'hospitalisation pour une infection à VRS dans les groupes placebo et suivant une prophylaxie s'élevaient respectivement à 11,9 % et à 7,6 %, alors qu'aux États-Unis, ils s'établissaient à 10,6 % et à 5,9 % et, en Europe, à 7 % et à 3 %. Ces réductions ont été observées chez les enfants souffrant d'une cardiopathie avec ou sans cyanose. En comparant le groupe placebo avec le groupe palivizumab, on a également constaté une baisse du nombre de jours d'hospitalisation (129 contre 57,4 jours/100 enfants, réduction de 56 %), du nombre de jours à l'hôpital où de l'oxygène a dû être administré (101,5 contre 27,9 jours/100 enfants, réduction de 73 %), de la proportion des sujets requérant une ventilation mécanique pour une infection à VRS (2,2 contre 1,3 %, réduction de 41 %) et du nombre de jours aux soins intensifs (71,2 contre 15,9 jours/100 enfants, réduction de 78 %). 

Indications 

Le palivizumab a été homologué pour la prévention des maladies graves des voies respiratoires inférieures causées par le VRS chez les enfants présentant un risque élevé de maladies dues au VRS, et la CCNI recommande qu'il soit administré dans les cas suivants juste avant et durant la saison hivernale et jusqu'à concurrence de cinq doses. 

Bébés prématurés

Les nourrissons nés avant terme après <= 32 semaines de gestation s'ils sont âgés de < 6 mois au début de la saison hivernale locale ou durant la saison hivernale au cours de laquelle ils sont jugés à risque d'une infection à VRS. 

Nourrissons souffrant d'une maladie pulmonaire 

Les enfants de < 24 mois atteints d'une DBP/MPC qui ont eu besoin d'oxygène ou d'un traitement médical pour cette maladie au cours des 6 mois précédents ou atteints d'autres troubles pulmonaires nécessitant une oxygénothérapie (p. ex., aspiration récurrente). 

Enfants souffrant d'une cardiopathie 

Les enfants de < 24 mois qui souffrent d'une cardiopathie hémodynamiquement significative. Comme on ne s'attend pas à ce que les enfants qui présentent une petite communication interauriculaire ou interventriculaire non compliquée ou des lésions hémodynamiquement non significatives, comme la persistance du canal atérien, sans avoir d'autre facteur de risque courent un grand risque de maladies pulmonaires sévères dues au VRS, il n'est pas recommandé d'administrer la prophylaxie au palivizumab à cette population. 

Enfants des collectivités éloignées 

Chez les enfants nés après < 35 semaines de gestation qui sont âgés de < 6 mois au début de la saison hivernale et qui vivent dans des collectivités éloignées du Nord, une prophylaxie peut être envisagée au terme d'une évaluation de l'accès aux soins médicaux et d'autres facteurs connus pour accroître le risque.

Calendrier et posologie 

Le palivizumab est administré tous les mois, à raison de 15 mg/kg de poids corporel, durant la période où le patient court un grand risque d'être exposé au VRS. Dans des essais cliniques(26,47) et depuis l'homologation du produit en Europe et aux États-Unis, on a présumé que cette période d'exposition s'étendait sur 5 mois durant la saison hivernale, soit à partir de novembre ou décembre, la dernière dose étant administrée en mars ou en avril. Dans la mesure du possible, la première dose de palivizumab devrait être donnée avant le début de la période où le risque est le plus élevé afin que la concentration sérique d'anticorps soit suffisante pour assurer une protection. 

L'infection à VRS n'est pas une maladie à déclaration obligatoire au Canada; on ignore donc quelle est l'incidence de la maladie dans la population tout au long de l'année dans les différentes provinces et territoires (en incorporant les changements d'une année à l'autre). Les études effectuées dans diverses régions du Canada indiquent que la saison du VRS débute entre novembre et janvier(11,21,32,48) et que l'épidémie annuelle atteint habituellement un sommet vers la fin d'avril. Comme il ressort de la surveillance de l'activité du VRS aux États-Unis, par un système de surveillance en laboratoires dans près de 50 États, les dates de début et de fin de saison varient grandement(23). La date médiane de début est en général plus tardive dans les États du Nord-Est que dans ceux du Sud, et la maladie survient encore plus tard dans le Midwest. En 2000-2001, dernière année pour laquelle on dispose de données complètes, la semaine médiane de début et de fin était le 25 novembre et le 5 mai pour le Nord-Est, le 9 décembre et le 26 mai pour le Midwest, et le 2 octobre et le 26 mai pour l'Ouest. 

Il n'existe actuellement aucune méthode validée pour déterminer avec exactitude quand le niveau de risque établi d'après le nombre d'isolats identifiés dans les laboratoires locaux ou d'après l'incidence des infections respiratoires dans la collectivité est suffisant pour qu'on mette en route un traitement prophylactique aux anticorps monoclonaux chez les enfants à risque élevé au Canada. Dans des études menées en milieu hospitalier par le réseau PICNIC, l'enregistrement de deux admissions à l'hôpital en une semaine servait à indiquer que le taux d'infections à VRS dans la collectivité locale était suffisant pour qu'une surveillance active à l'hôpital soit entreprise(15), et il semble que ce phénomène se produise avant que l'épidémie annuelle ne s'installe. Cette mesure, alliée aux activités locales et nationales de surveillance, peut faciliter la prise de décisions à l'échelle locale concernant le moment indiqué pour amorcer les programmes de prophylaxie au palivizumab. Certains laboratoires canadiens communiquent chaque semaine des rapports sur les isolats de VRS à Santé Canada dans le cadre du Système de surveillance et de détection de virus des voies respiratoires; ces données colligées sont accessibles sur le site Web de Santé Canada à l'adresse suivante : <http://www.phac-aspc.gc.ca/bid-bmi/dsd-dsm/rvdi-divr/index_f.html>. 

Comme l'infection à VRS ne confère pas une immunité protectrice(6), il est recommandé que les enfants qui contractent l'infection continuent de recevoir chaque mois des doses de palivizumab tout au long de la saison du VRS. 

Voie d'administration 

Le palivizumab est administré par voie intramusculaire uniquement. Comme il est surtout donné aux nourrissons, le point privilégié d'injection est la face antérolatérale de la cuisse. Si le volume d'injection dépasse 1 mL, la dose devrait être fractionnée. 

Doses de rappel et ré-immunisation 

Après un pontage cardiaque, les concentrations de palivizumab ont chuté de 58 %, passant d'une moyenne de 98 (ET 52) µg/mL à 41,4 (ET 33) µg/mL(47). Comme cette concentration post-chirurgicale peut être beaucoup plus basse que la concentration sérique protectrice (> 40 µg/mL), une dose répétée de palivizumab devrait être administrée si l'enfant court toujours le risque d'être infecté par le VRS. 

Même si la plupart des enfants ne seront admissibles à la prophylaxie que pendant une seule saison, ceux qui souffrent de problèmes cardiaques ou pulmonaires sous-jacents pourront recevoir le traitement prophylactique durant une deuxième saison hivernale. 

Conditions d'entreposage et de manipulation 

Le palivizumab est fourni sous la forme d'une poudre lyophilisée stérile qui est reconstituée avant d'être administrée. Avant sa reconstitution, il doit être conservé entre 2 °C et 8 °C dans son contenant original et ne doit pas être congelé. Pour préparer le produit administré, on ajoute de l'eau stérile dans des conditions d'asepsie et on fait tourner doucement le flacon pendant 30 secondes. Il ne faut pas agiter le flacon, car cela pourrait entraîner la séparation de la poudre dissoute du diluant. 

Le palivizumab reconstitué devrait être laissé à la température ambiante pendant au moins 20 minutes jusqu'à ce que la solution devienne limpide ou semble légèrement opalescente à l'inspection visuelle. Le produit ne renferme pas d'agent de conservation; le fabricant recommande donc de l'utiliser dans les 6 heures (et de préférence dans les 3 heures) qui suivent sa reconstitution. 

Administration simultanée d'autres vaccins 

Le palivizumab est un agent d'immunisation passive visant une cible antigénique très spécifique (la glycoprotéine F du VRS). Il n'inhibe donc pas la réponse immunitaire à d'autres vaccins et peut être administré en même temps mais à un point d'injection distinct. 

Effets secondaires 

Dans l'essai comparatif randomisé à double insu contrôlé contre placebo de la prophylaxie au palivizumab chez les enfants prématurés ou atteints d'une MPC, les taux d'effets secondaires étaient similaires dans les groupes placebo (10 %) et d'intervention (11 %)(26). On n'observait aucune différence statistiquement significative dans les taux d'effets secondaires selon l'appareil ou le système, notamment au point d'injection (1,8 % du groupe placebo et 2,7 % du groupe traité au palivizumab). Parmi les réactions au point d'injection figuraient un érythème (1,2 % contre 1,7 %), de la douleur (0,0 % contre 0,3 %), une induration ou œdème (0,2 % contre 0,6 %) et une ecchymose (0,4 % contre 0,3 %). Les injections ont été interrompues à cause d'un effet secondaire lié au palivizumab chez 0,3 % des participants. Cinq enfants du groupe placebo (1 %) et quatre du groupe d'intervention (0,4 %) sont décédés durant l'essai pour des raisons jugées non liées à l'immunisation. 

Chez les enfants atteints d'une cardiopathie hémodynamiquement significative, on n'a pas retrouvé de différences importantes entre les deux groupes du point de vue des effets secondaires (palivizumab par rapport à placebo)(46). Les taux d'effets secondaires étaient les suivants : pour la fièvre, 27,1 % (palivizumab) contre 23,9 % (placebo); pour l'infection, 5,6 % contre 2,9 %, pour une réaction au point d'injection, 3,7 % contre 2,2 %; pour l'arythmie, 3,1 % contre 1,7 %; et pour la cyanose, 9,1 % contre 6,9 %. Dans aucun cas, les injections ont été interrompues dans l'étude à cause d'un effet secondaire lié à l'immunisation. Les effets secondaires graves, dont l'hospitalisation associée à l'infection à VRS, étaient les plus fréquents dans le groupe placebo (63,1 % contre 55,4 %, p = 0,005), et l'incidence de chirurgies cardiaques classées comme urgentes, planifiées ou plus tôt que prévu était similaire dans les deux groupes. Sur les 1 287 enfants, 48 sont décédés : 3,3 % dans le groupe traité au palivizumab et 4,2 % dans le groupe placebo. Aucun effet secondaire grave considéré comme associé au palivizumab n'a été signalé. 

Dans les essais ouverts et les registres recensés en Amérique du Nord et en Europe, les effets secondaires graves ne sont pas décrits, et l'incidence d'autres effets secondaires n'est pas plus élevée que dans les deux essais comparatifs randomisés(49-53). Une base de données mondiale sur l'innocuité tenue par les Laboratoires Abbott Ltée, qui renferme des rapports sur 533 390 nourrissons ayant reçu un traitement prophylactique en Amérique du Nord, en Europe et au Japon n'a pas mis au jour d'augmentation de la fréquence des effets secondaires graves ou des décès par rapport aux taux de référence chez les bébés prématurés à risque élevé (Dre Jessie Groothuis, Global Medical Director, Immunoscience Development, Abbott Laboratories Ltd., Chicago : communication personnelle, 2003). Le taux de réactions allergiques est de 0,02 cas pour 1 000 enfants ou d'un cas pour 35 000 doses de palivizumab, deux épisodes d'anaphylaxie ayant été enregistrés. Le taux de mortalité s'élève à 0,5/1 000 expositions chez les patients, ce qui se compare au taux relevé dans l'essai sur les nourrissons à risque élevé nés prématurément ou atteints d'une maladie pulmonaire(26)

Dans un sommaire des effets secondaires recensés par le programme Medwatch de la Food and Drug Administration, le palivizumab était le médicament le plus fréquemment cité comme principal suspect à l'origine de réactions graves ou mortelles chez les enfants de < 2 ans(54). Comme le programme Medwatch est un système de surveillance passive qui ne recueille pas de données sur le dénominateur, soit le nombre d'enfants exposés à un médicament, ni sur la maladie sous-jacente du receveur, rien dans ce rapport ne démontre l'existence d'un lien de cause à effet entre les événements cliniques signalés et l'administration de palivizumab. 

Même si la plupart des enfants ne pourront recevoir le traitement prophylactique mensuel au palivizumab que pendant une saison hivernale (cinq doses), certains enfants à risque élevé courront toujours un grand risque l'année suivante ou par la suite. Les réponses immunitaires indésirables, notamment l'apparition d'anticorps dirigés contre l'anticorps monoclonal, et les effets secondaires ne semblent pas être plus fréquents chez les enfants au cours de la deuxième saison de traitement au palivizumab que durant la première saison(55). Dans le cas des enfants recevant le produit pendant une seule saison, on a observé une fixation des anticorps anti-palivizumab à un titre de > 1,40 chez 2,8 % des membres du groupe placebo et 1,2 % des membres du groupe d'intervention, ce qui semble indiquer que la fixation n'est pas spécifique(26). Aucun VRS résistant au palivizumab n'a été identifié. 

Contre-indications 

Le palivizumab ne devrait pas être administré aux sujets qui présentent une hypersensibilité à l'un ou l'autre de ses composants. 

Précautions 

Des maladies mineures comme le rhume, accompagnées ou non de fièvre, ne sont pas des contre-indications de l'immunisation. La présence d'une maladie modérée à sévère, accompagnée ou non de fièvre, justifie le report de l'administration systématique de la plupart des vaccins afin qu'il n'y ait pas superposition des effets secondaires du vaccin et de la maladie sous-jacente ou afin d'éviter qu'une manifestation de la maladie sous-jacente ne soit identifiée à tort comme une complication de l'immunisation. La décision de retarder l'immunisation doit être prise en fonction de la gravité et de l'étiologie de la maladie sous-jacente. 

Autres considérations 

Si un flacon entier (500 mg, 1 g) n'est pas requis pour l'injection mensuelle donnée à un patient, le médecin devrait prendre des dispositions pour que plus d'un patient reçoive le palivizumab dans les 6 heures qui suivent afin de réduire au minimum le gaspillage. Des séances hebdomadaires d'immunisation des nourrissons admissibles dans une localité peuvent être avantageuses tout en maintenant le gaspillage à un niveau minimum. 

Au moins six évaluations économiques du palivizumab ont été effectuées à l'aide de diverses méthodes(56,57). Il semblerait que le palivizumab ne soit pas rentable s'il est administré à tous les nourrissons pour lesquels son usage a été approuvé. 

Chaque province ou région devrait déterminer l'épidémiologie locale du VRS afin de planifier de façon optimale la période hivernale d'intervention prophylactique (début et durée). 

Le palivizumab contribue efficacement à réduire l'incidence des hospitalisations associées au VRS chez les nourrissons nés prématurément après 33 à 35 semaines de gestation. Ces enfants ne constituent cependant qu'au plus 5 % de la cohorte de naissances au Canada; le coût actuel de la prophylaxie est donc considéré comme prohibitif si l'âge gestationnel est le seul facteur de risque d'un enfant.


Tableau 1.    Recommandations pour l'administration du palivizumab 

Recommandation du CCNI 

Qualité des preuves 

Fermeté de la recomman-
dation 

Bébés prématurés

Les nourrissons nés prématurément après
<= 32 semaines de gestation qui ont un âge chronologique de < 6 mois au début ou durant la saison hivernale locale pendant laquelle ils pourraient courir un risque d'infection à VRS. 

 

 

Nourrissons souffrant d'une maladie pulmonaire

Enfants de < 24 mois atteints

d'une maladie pulmonaire chronique/dysplasie broncho-pulmonaire et ayant requis une oxygénothérapie ou un traitement médical pour cette maladie au cours des 6 mois précédents.

d'autres troubles pulmonaires nécessitant une oxygénothérapie.

 

 


 


III 

 

 


 


F

Enfants souffrant d'une cardiopathie

Enfants de < 24 mois souffrant d'une cardiopathie hémodynamiquement significative.

 

I

 

A

Enfants des collectivités éloignées

Enfants nés après < 35 semaines de gestation qui ont < 6 mois au début de la saison hivernale et qui vivent dans des collectivités éloignées du Nord peuvent être considérés admissibles à la prophylaxie au terme d'une évaluation de l'accès aux soins médicaux et d'autres facteurs connus pour accroître le risque. 

 

III 

 



Tableau 2.    Preuves à l'appui des recommandations 

Plan de recherche

I Données obtenues dans le cadre d'au moins un essai comparatif randomisé

II-1 Données obtenues dans le cadre d'au moins un essai comparatif sans randomisation

II-2 Données obtenues dans le cadre d'études de cohortes ou d'études cas-témoins, réalisées de préférence dans plus d'un centre ou groupe de recherche

II-3 Données d'analyses comparatives des moments ou lieux avec ou sans l'intervention; résultats spectaculaires d'expériences non contrôlées

III Opinions exprimées par des sommités dans le domaine et reposant sur l'expérience clinique; études descriptives ou rapports de comités d'experts

Catégorie de la recommandation

A Preuves suffisantes pour recommander l'intervention

B Preuves acceptables pour recommander l'intervention

C Preuves existantes contradictoires qui ne permettent pas de formuler une recommandation pour ou contre l'intervention, d'autres facteurs pouvant cependant influer sur la prise de décisions

D Preuves acceptables pour déconseiller l'intervention

E Preuves suffisantes pour déconseiller l'intervention

F Preuves insuffisantes pour formuler une recommandation, d'autres facteurs pouvant cependant influer sur la prise de décisions


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*

Membres : Dre M. Naus (présidente), Dre A. King (secrétaire exécutive), Dr I. Bowmer, Dr G. De Serres, Dr S. Dobson, Dre J. Embree, Dr I. Gemmill, Dre J. Langley, Dre A. McGeer, Dre P. Orr, Dr B. Tan, A. Zierler.
Représentants de liaison : S. Callery (CHICA), Dr J. Carsley (ACPS), Dr T. Freeman (CFMC), Dre A. Gruslin (SOGC), A. Honish (CNCI), Dr B. Larke (CMHC), Dre B. Law (CCEC), Dr V. Lentini (MDN), Dre A. McCarthy (SCMI), Dr J. Salzman (CCMTMV),
Dre L. Samson (SCP), Dr D. Scheifele (CAIRE), Dre M. Wharton (CDC).
Représentants d'office : Dre A. Klein et Dr H. Rode (CEPBR), Dre R. Ramsingh (DGSPNI), Dre T. Tam (CPCMI).

Cette déclaration a été préparée par la Dre J.M. Langley et approuvée par le CCNI.

 

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Dernière mise à jour : 2003-09-15 début