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VIBRIO PARAHAEMOLYTICUS

FICHE TECHNIQUE SANTÉ-SÉCURITÉ: PATHOGÈNES

SECTION I – AGENT INFECTIEUX

NOM: Vibrio parahaemolyticus

SYNONYME OU RENVOI: VP, gastro-entérite

CARACTÉRISTIQUES: Vibrio parahaemolyticus, qui fait partie de la famille des Vibriomaceae, est un bacille Gram négatif incurvé, halophile, ne formant pas de spores et mesurant 0,5-0,8 µm de largeur et 1,4–2,4 µm de longueur(1,2,3). C'est un bacille anaérobie facultatif, oxydase-positif et pouvant fermenter le glucose sans produire de gaz(4). Il est doté d'un flagelle polaire lui conférant une grande mobilité en milieu liquide, et son flagelle latéral lui permet de migrer sur les surfaces semi-solides par essaimage(2). Les souches virulentes isolées de patients peuvent produire une hémolysine directe thermostable (TDH), et/ou une hémolysine apparentée à la TDH, une caractéristique qui n'est pas observée chez d'autres souches non pathogènes ou non virulentes présentes dans l'environnement. Les isolats producteurs de TDH sont classés comme étant Kanagawa-positifs et peuvent être identifiés par la zone de β-hémolyse qui entoure les colonies sur gélose Wagatsuma.

SECTION II – DÉTERMINATION DU RISQUE

PATHOGÉNICITÉ ET TOXICITÉ: Les infections se manifestent habituellement selon trois principaux syndromes cliniques: 60 à 80 % des infections entraînent une gastro-entérite, 34 %, une infection de plaies, et 5 %, une septicémie(4). La gastro-entérite représente le tableau clinique le plus fréquent et s'accompagne de symptômes tels que diarrhée (parfois sanguinolente et liquide), crampes abdominales, nausées, vomissements, maux de tête, frissons et faible fièvre(1). L'infection est en général spontanément résolutive et d'intensité modérée, durant environ 3 jours chez les patients immunocompétents; elle peut être traitée par réhydratation orale seulement(2). Une infection de plaie et une septicémie peuvent survenir après exposition à la bactérie; on a recensé 3 cas de ce genre et 2 décès en Louisiane et au Mississippi après le passage de l'ouragan Katrina en 2005(5). Des cas mortels de septicémie peuvent survenir chez des patients immunocompromis ou présentant un trouble préexistant (comme une maladie hépatique, un cancer, une maladie cardiaque ou le diabète, après une chirurgie gastrique récente ou en cas d'emploi d'antiacides).

ÉPIDÉMIOLOGIE: Présence mondiale. Le bacille est largement distribué en milieu marin côtier; il a été décelé dans l'eau de mer et les sédiments et fait partie de la flore normale des mollusques bivalves(2). La prévalence de la bactérie atteint un sommet pendant les saisons estivales chaudes. Des épidémies d'origine alimentaire ont été causées par V. parahaemolyticus (dont le sérotype O3:K6 est de plus en plus prédominant) au Chili, en France, au Japon, en Corée, au Laos, au Mozambique, au Pérou, en Russie, en Espagne, à Taïwan, aux États-Unis, et particulièrement dans les pays d'Extrême-Orient comme l'Inde, le Bangladesh et la Thaïlande, où la consommation de poissons et fruits de mer crus est importante(1,2). La première épidémie confirmée est survenue au Japon en 1950; on a alors recensé 272 cas et 20 décès après l'ingestion de jeunes sardines mi-séchées. Des épidémies ont aussi été observées aux États-Unis, par exemple celle de 1971, attribuée à la consommation de chair de crabe contaminée; dans ce pays, la bactérie serait à l'origine de 5 000 infections chaque année.

GAMME D'HÔTES: Humain, poissons à nageoires, mollusques et crustacés tels que morue, sardine, maquereau, limande, mye, pieuvre, crevette, crabe, homard, écrevisse, pétoncle et huître(1,2,4,5).

DOSE INFECTIEUSE: Une infection peut survenir après l'ingestion de 107 à 108 bacilles(2).

MODE DE TRANSMISSION: Le principal mode de transmission est l'ingestion de mollusques crus, insuffisamment cuits ou contaminés (p. ex. huîtres, myes et moules). La chair cuite de crustacés (crabe, homard, crevette) peut encore héberger la bactérie si la cuisson est insuffisante, ou en cas de recontamination par contact avec des fruits de mer crus(2). L'exposition de plaies ouvertes à de l'eau de mer, des mollusques, des crustacés ou des poissons à nageoires contaminés peut entraîner une infection et une septicémie(4).

PÉRIODE D'INCUBATION: Habituellement 15 heures après le moment de la transmission (de 4 à 96 heures)(1).

TRANSMISSIBILITÉ: L'infection ne peut être transmise d'une personne à une autre.

SECTION III - DISSÉMINATION

RÉSERVOIR: V. parahaemolyticus peut survivre dans les mollusques et crustacés pendant les saisons chaudes et fait partie de la flore normale des mollusques bivalves(2).

ZOONOSE: Aucune.

VECTEURS: Aucun.

SECTION IV - VIABILITÉ ET STABILITÉ

SENSIBILITÉ AUX MÉDICAMENTS: La bactérie est sensible à un certain nombre d'antibiotiques, comme la doxycycline ou la ciprofloxacine, la tétracycline, le ceftriaxone, le chloramphénicol, l'imipénem, l'ofloxacine, la nitrofurantoïne, le méropénem, l'oxytétracycline, les fluoroquinolones, les céphalosporines de troisième génération et les aminoglycosides(2,4,6). L'érythromycine peut être administrée aux femmes enceintes et aux enfants.

RÉSISTANCE AUX MÉDICAMENTS Une résistance à la pénicilline, l'ampicilline, l'apramycine, la céphalothine, la gentamycine, le triméthoprime et la streptomycine a été confirmée(6).

SENSIBILITÉ AUX DÉSINFECTANTS: Sensible à l'hypochlorite de sodium à 1 %, l'éthanol à 70 %, le glutaraldéhyde à 2 % et le formaldéhyde(7).

INACTIVATION PHYSIQUE: Extrêmement sensible à la chaleur, aucune bactérie n'étant décelable après 5 minutes à 48-50 °C; on peut donc inactiver efficacement la bactérie par une cuisson suffisante des mollusques et crustacés(2). On peut aussi réduire la quantité de bactéries dans les fruits de mer par conservation au froid (3 °C) pendant 7 jours, par congélation et par pasteurisation à basse température; les bactéries viables peuvent être complètement inactivées à une température de -18 °C ou -24 °C pendant 15 à 28 semaines(5). Une pression hydrostatique élevée peut également détruire les bactéries présentes dans les aliments sans altérer la nature de ces derniers; l'exposition à des rayons gamma (cobalt 60) à raison de 0,75 kGy s'est aussi révélée efficace pour ramener le nombre de bactéries à un niveau sous le seuil de détection.

SURVIE À L'EXTÉRIEUR DE L'HÔTE: La salinité est cruciale pour la survie et la prolifération de la bactérie, dont la multiplication est observée à une concentration de sel de 0,5-10 %, la concentration optimale se situant autour de 1-3 %(2). La bactérie peut survivre pendant l'hiver dans les sédiments marins, et sa prolifération redémarre lorsque les températures atteignent au minimum 15 C(5); la bactérie est aussi très résistante aux ions métalliques (jusqu'à 300 mM de Mg2 +). V. parahaemolyticus peut être viable mais non cultivable lorsqu'il est soumis à des conditions extrêmes, par exemple après 12 jours sans nutriment ou sous contrainte thermique (environ 4 °C).

SECTION V - PREMIERS SOINS ET ASPECTS MÉDICAUX

SURVEILLANCE: Surveiller l'apparition des symptômes et confirmer l'infection par la culture d'échantillons de selles provenant de patients chez qui on soupçonne sa présence(8). La détection de V. parahaemolyticus dans les aliments se fait habituellement par la méthode du nombre le plus probable (NPP); cette méthode ne permet toutefois pas de distinguer Vibrio parahaemolyticus de souches comme Vibrio vulnificus ou Vibrio mimicus, car la culture de souches qui ne fermentent pas le sucrose donne des colonies rondes (2 à 3 mm), de couleur verte ou bleue et d'apparence similaire sur gélose TCBS (thiosulfate-citrate-bile-sucrose). L'amplification par la polymérase (PCR), l'hybridation d'ADN et un milieu chromogène (technique d'ensemencement permettant de déceler V. parahaemolyticus et de le distinguer des autres espèces par la coloration pourpre unique qu'elle prend sur ce milieu) peuvent aussi permettre de confirmer une contamination ou une infection(5).

Remarque: Les méthodes de diagnostic ne sont pas nécessairement toutes disponibles dans tous les pays.

PREMIERS SOINS ET TRAITEMENT: Administrer le traitement antibiotique qui convient. Un traitement de réhydratation par voie orale devrait être administré aux patients infectés présentant de légers symptômes de gastro-entérite, et un traitement de remplacement des liquides et des électrolytes par voie intraveineuse devrait être utilisé dans les cas graves(2). Utiliser des antibiotiques chez les patients présentant une infection de plaie ou une septicémie(4).

IMMUNISATION: Aucun vaccin n'est actuellement offert sur le marché.

PROPHYLAXIE: Aucun agent prophylactique n'est actuellement offert sur le marché. On peut éviter les infections en conservant à basse température les mollusques et crustacés crus destinés à la consommation le plus rapidement après leur cueillette, car il a été établi que le nombre de bactéries est 50 fois plus élevé dans les mollusques et crustacés après 10 heures à 26 C, et 760 fois plus élevé après 24 heures(2).

SECTION VI - DANGERS POUR LE PERSONNEL DE LABORATOIRE

INFECTIONS CONTRACTÉES AU LABORATOIRE: Le premier cas d'infection acquise en laboratoire a été signalé en 1972 chez un technicien qui effectuait des sous-cultures de différentes souches de la bactérie(8); un autre cas a été signalé en 2002, causé par la manipulation expérimentale d'ormeaux infectés(9).

SOURCES ET ÉCHANTILLONS: Échantillons de selles, eau de mer et fruits de mer contaminés(2,8).

DANGERS PRIMAIRES: Les principaux risques en laboratoire sont l'ingestion et l'inoculation parentérale accidentelles(10).

DANGERS PARTICULIERS: Les animaux infectés de façon naturelle ou à des fins expérimentales constituent une source possible d'infection(4,9).

SECTION VII - CONTRÔLE DE L'EXPOSITION ET PROTECTION PERSONNELLE

CLASSIFICATION PAR GROUPE DE RISQUE: Groupe de risque 2

EXIGENCES DE CONFINEMENT: Installations, équipement et pratiques opérationnelles de niveau de confinement 2 pour le travail avec des matières, cultures ou animaux infectieux ou potentiellement infectieux.

VÊTEMENTS DE PROTECTION: Sarrau. Gants, lorsqu'un contact direct de la peau avec des matières infectées ou des animaux est inévitable. Une protection pour les yeux doit être utilisée lorsqu'il y a un risque connu ou potentiel d'éclaboussure (12).

AUTRES PRÉCAUTIONS: Toutes les procédures pouvant produire des aérosols ou mettant en cause des concentrations ou des quantités élevées doivent s'effectuer dans une enceinte de sécurité biologique (ESB) (12). L'utilisation d'aiguilles, de seringues et d'autres objets tranchants doit être strictement restreinte. Des précautions supplémentaires doivent être envisagées pour les activités avec des animaux ou à grande échelle (12).

SECTION VIII - MANUTENTION ET ENTREPOSAGE

DÉVERSEMENTS: Laisser les aérosols se poser et, tout en portant des vêtements de protection, couvrir délicatement le déversement avec des essuie-tout et appliquer un désinfectant approprié, en commençant par le périmètre et en se rapprochant du centre. Laisser agir suffisamment longtemps avant de nettoyer (30 minutes) (12, 13).

ÉLIMINATION: Décontaminer les déchets par stérilisation à la vapeur, incinération ou désinfection chimique(12).

ENTREPOSAGE: Dans des contenants étanches et scellés, étiquetés de façon appropriée et placés en lieu sûr(12).

SECTION IX – RENSEIGNEMENTS SUR LA RÉGLEMENTATION ET AUTRES

INFORMATION SUR LA RÉGLEMENTATION: L'importation, le transport et l'utilisation de pathogènes au Canada sont régis par de nombreux organismes de réglementation, dont l'Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments, Environnement Canada et Transports Canada. Il incombe aux utilisateurs de veiller à respecter tous les règlements et toutes les lois, directives et normes applicables.

DERNIÈRE MISE À JOUR: Septembre 2010

PRÉPARÉE PAR: Direction de la règlementation des agents pathogènes, agence de la santé publique du Canada.

Bien que les renseignements, opinions et recommandations présentés dans cette Fiche de renseignements proviennent de sources que nous jugeons fiables, nous ne nous rendons pas responsables de leur justesse, de leur caractère exhaustif ou de leur fiabilité, ni des pertes ou blessures pouvant résulter de l'utilisation de ces renseignements. Comme on découvre fréquemment de nouveaux dangers, il est possible que ces renseignements ne soient pas tout à fait à jour.

Tous droits réservés
© Agence de la santé publique du Canada, 2010
Canada

RÉFÉRENCES

  1. Nair, G. B., Ramamurthy, T., Bhattacharya, S. K., Dutta, B., Takeda, Y., & Sack, D. A. (2007). Global dissemination of Vibrio parahaemolyticus serotype O3:K6 and its serovariants. Clinical Microbiology Reviews, 20 (1), 39-48. doi:10.1128/CMR.00025-06
     
  2. Yeung, P. S., & Boor, K. J. (2004). Epidemiology, pathogenesis, and prevention of foodborne Vibrio parahaemolyticus infections. Foodborne Pathogens and Disease, 1 (2), 74-88. doi:10.1089/153531404323143594
     
  3. Drake, S. L., DePaola, A., & Jaykus, L. A. (2007). Overview of Vibrio vulnificus and Vibrio parahaemolyticus. Comprehensive Reviews in Food Science and Food Safety, 6, 120-145.
     
  4. Butt, A. A., Aldridge, K. E., & Sanders, C. V. (2004). Infections related to the ingestion of seafood Part I: Viral and bacterial infections. The Lancet Infectious Diseases, 4 (4), 201- 212. doi:10.1016/S1473-3099(04)00969-7
     
  5. Su, Y. C., & Liu, C. (2007). Vibrio parahaemolyticus: a concern of seafood safety. Food Microbiology, 24 (6), 549-558. doi:10.1016/j.fm.2007.01.005
     
  6. Baker-Austin, C., McArthur, J. V., Tuckfield, R. C., Najarro, M., Lindell, A. H., Gooch, J., & Stepanauskas, R. (2008). Antibiotic resistance in the shellfish pathogen Vibrio parahaemolyticus isolated from the coastal water and sediment of Georgia and South Carolina, USA. Journal of Food Protection, 71 (12), 2552-2558.
     
  7. Laboratory Safety Manual (1993). (2nd ed.). Geneva: World Health Organization.
     
  8. Sanyal, S. C., Sil, J., & Sakazaki, R. (1973). Laboratory infection by Vibrio parahaemolyticus. Journal of Medical Microbiology, 6 (1), 121-122.
     
  9. Lee, K. K., Liu, P. C., & Huang, C. Y. (2003). Vibrio parahaemolyticus infectious for both humans and edible mollusk abalone. Microbes and Infection / Institut Pasteur, 5 (6), 481- 485.
     
  10. Biosafety in the Laboratory - Prudent Practices for Handling and Disposal of Infectious Materials (1989). . Washington, D.C.: National Academy Press.
     
  11. Public Health Agency of Canada. (2004). In Best M., Graham M. L., Leitner R., Ouellette M. and Ugwu K. (Eds.), Laboratory Biosafety Guidelines (3rd ed.). Canada: Public Health Agency of Canada.