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Quand chez-soi n'est pas un chez-soi

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Quand chez-soi
n'est pas
un chez-soi


Mauvais traitement et négligence dans les établissements de soins de longue durée — Le point de vue des pensionnaires
Notre mandat consiste à aider les Canadiens et les Canadiennes

à maintenir et à améliorer leur état de santé.

Santé Canada

Quand chez soi n'est pas un chez-soi: Violence et négligence dans les

établissements de soins de longue durée — Le point de vue des pensionnaires a été rédigé par Jean Kozak et Teresa Lukawiecki pour l'Unité de prévention de la violence familiale, de Santé Canada.

Disponible également en anglais sous le titre When Home Is Not a Home:

Abuse and Neglect in Long-Term Care — A Resident's Perspective

Les opinions exprimées dans cette monographie sont celles des auteures et ne reflètent pas nécessairement les points de vue de Santé Canada.

Il est interdit de reproduire ce document à des fins commerciales, mais sa reproduction à d'autres fins est toutefois encouragée, à condition que la source soit citée.

On peut obtenir, sur demande, cette publication en formats de substitution.

Pour obtenir plus de renseignements sur les questions de violence familiale, veuillez communiquer avec:

  • Centre national d'information sur la violence dans la famille
  • Unité de prévention de la violence familiale
  • Division des questions relatives à la santé
  • Direction générale de la santé de la population et de la santé publique
  • Santé Canada
  • Indice de l'adresse: 1909D1
  • 9e étage, Édifice Jeanne-Mance, Pré Tunney
  • Ottawa (Ontario) K1A 1B4 CANADA

  • Téléphone: 1-800-267-1291 ou (1 800 267-1291)
  • Télécopieur: (613) 941-8930
  • Fax Link: 1 888 267-1233 ou (613) 941-7285
  • ATME: 1 800 561-5643 ou (613) 952-6396
  • Site Web: http://www.phac-aspc.gc.ca/nc-cn

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2001

Cat. H72-21-176-2000F

ISBN 0-662-85035-1

Remerciements

La plupart des points forts du projet Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée mentionnés dans ce document et dans les deux textes d'accompagnement, résultent des démarches faites par des gens dont les intérêts et les points de vue diffèrent et qui ont uni leurs efforts pour concrétiser l'objectif commun — rendre la vie plus agréable dans les établissements de SLD. Nous remercions sincèrement toutes les personnes — les pensionnaires, le personnel des établissements de SLD, les familles ainsi que les représentants communautaires qui n'ont ménagé ni leur temps ni leurs idées pour participer aux nombreuses phases du projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée. Leurs observations et leurs préoccupations ont servi de fondement à toutes les ressources élaborées au cours des deux phases du projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée.

Nous tenons tout particulièrement à souligner le travail remarquable que les coordonnateurs locaux suivants ont accompli tout au long des deux projets de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée. C'est grâce à leur aide et à leur dévouement que le projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée a connu un immense succès à l'échelle du Canada.

Colombie-Britannique Pearl McKenzie

Manitoba Elizabeth McKean

Ontario Teresa Lukawiecki

Québec Carole Deschamps

Terre-Neuve Theckla Lundin

Nous tenons également à remercier les cinq établissements de coordination et les autres représentants d'établissement qui ont grandement contribué au succès des projets.

Colombie-Britannique St. Vincent's Hospitals, Vancouver, Jacqueline Senning

Manitoba Riverview Health Centre, Winnipeg, Elizabeth Boustcha

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
Ontario Service de santé des Sœurs de la Charité d'Ottawa, Ottawa, Jean Kozak

Québec Regroupement des Trois Rives, Vaudreuil, Lise Bélisle

Terre-Neuve Hoyles-Escasoni Complex, St. John's, Anne Morrison et Pat Amos

Le contenu du présent document est une synthèse des documents et des produits élaborés au cours des diverses phases du projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée.

Kozak, J.F. et Lukawiecki, T. Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée: Trousse éducative, 1997.

Kozak, J.F. & Lukawiecki, T. Final Report of the APL Project, 1997. Rapport présenté à Nouveaux Horizons: Partenaires des aînés, Santé Canada.

Kozak, J.F., Lukawiecki, T., & Dalle, D. Final Report of the Abuse Prevention in Long Term Care Train-the-Trainer Project, 1998. Rapport présenté au Fonds pour la santé de la population, Santé Canada.

Lukawiecki, T., Kozak, J.F., Wahl, J., & Dalle, D. Policy and Procedures Guidelines for Responding to and Preventing Resident Abuse and Neglect in Long Term Care, 1998.

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Table des matières

  • Section 1
    • Introduction 7
    • 1.1 Bilan des connaissances en matière de mauvais traitements et
      de négligence envers les personnes âgées vivant en institution 9
    • 1.2 Survol du projet de Prévention des mauvais traitements dans
      les établissements de soins de longue durée 12
  • Section 2
    • Mauvais traitements et négligence 17
    • 2.1 Définition des mauvais traitements et de la négligence 18
    • 2.2 Causes perçues des mauvais traitements et de négligence 30
  • Section 3
    • Conclusion 35
    • Bibliographie 37
    • Annexe A
    • Structure du projet de Prévention des mauvais traitements dans les
      établissements de soins de longue durée 39

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée


Section 1

Introduction

Cette monographie est la première d'une série en trois volets dans laquelle nous abordons les mauvais traitements et la négligence dans les établissements de soins de longue durée (SLD) du point de vue des pensionnaires.

Santé Canada, par l'entremise de l'Unité de la prévention à la violence familiale, mène l'Initiative de lutte contre la violence familiale (ILVF) en coordonnant les activités connexes de 13 ministères et de 3 organismes centraux qui participent de manière formelle à l'Initiative. Le Ministère, dans le cadre de l'ILVF actuelle, maintient son engagement quant à la résolution des questions relatives à la violence familiale, ce qui inclut la violence à l'égard des personnes âgées. L'UPVF, en collaboration avec la Division du vieillissement et des aînés, entreprend des recherches sur les effets de la violence et des mauvais traitements à l'égard des personnes âgées afin d'en améliorer le traitement et la prévention. L'UPVF a élaboré et révisé un certain nombre de ressources sur la violence à l'égard des personnes âgées qu'elle diffusera par l'intermédiaire du Centre national d'information sur la violence dans la famille.

Depuis près de 20 ans, le public prend de plus en plus conscience des mauvais traitements et de la négligence dont les personnes âgées sont victimes (un problème que l'on désigne aussi sous le nom de «violence faite aux aînés» dans la documentation). Les initiatives de recherche et de services communautaires portant sur les mauvais traitements et la négligence au Canada visent principalement les personnes âgées vivant au sein de leurs collectivités et non en institution.

À ce jour, l'ampleur des mauvais traitements et de la négligence dont les Canadiens âgés vivant en institution sont victimes n'a fait l'objet d'aucune enquête systématique. Les recherches, tant au Canada qu'à l'échelle internationale, se limitent habituellement à l'examen des tableaux rétrospectifs et à la tenue de sondages auprès des employés. Ce manque d'information restreint sérieusement notre compréhension de la violence et de la négligence envers les personnes âgées vivant en milieu institutionnel au Canada; ce qui nous empêche d'élaborer et de mettre en œuvre des programmes d'intervention et de prévention efficaces.

Notre série de monographies vise à présenter les conclusions tirées dans le cadre de deux projets éducatifs nationaux intitulés «Prévention des mauvais
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traitements dans les établissements de soins de longue durée», dans le but de commencer à combler nos lacunes des connaissances à ce chapitre. Au cours de ces projets, de 1995 à 1998, on a recueilli des renseignements auprès des pensionnaires, du personnel des établissements de soins de longue durée (SLD), des familles et des intervenants afin de connaître la façon dont ils perçoivent la violence et la négligence, la dynamique qui sous-tend les cas de violence et de négligence, ainsi que les mesures à prendre pour enrayer et prévenir la violence et la négligence. Les monographies ne se veulent pas un examen de la documentation publiée au sujet de la violence et de la négligence. Nous recommandons aux gens qui désirent consulter un examen de ce genre de se reporter à certains documents tels que l'excellente publication de l'Association canadienne de gérontologie «Abuse and Neglect of Older Canadians: Strategies for Change (1995)» et au document de Santé Canada, «Les mauvais traitements et la négligence envers les personnes âgées en milieu institutionnel: Document de travail rédigé à partir de documentation en langue anglaise», rédigé par Charmaine Spencer (1994).

Il nous est impossible de préciser l'ampleur du problème (prévalence et incidence), mais les renseignements présentés ici peuvent nous aider à comprendre la façon dont les personnes âgées, dans les établissements de SLD, perçoivent et décrivent la violence et la négligence; en plus de fournir des orientations quant aux mesures à prendre pour régler ce problème complexe. Il est essentiel de comprendre que n'importe qui peut poser des actes délibérés, ou involontaires, de violence et de négligence; cependant, cette monographie aborde la question du point de vue des pensionnaires.

Cette monographie est la première d'une série en trois volets. La première monographie, Quand chez soi n'est pas un chez-soi: Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée — Le point de vue des pensionnaires, résume principalement les perceptions des pensionnaires des établissements de SLD répartis à l'échelle du Canada, concernant ce qu'ils considèrent comme des actes de violence et des mauvais traitements. Le but est de nous aider à mieux comprendre les innombrables facteurs et dynamiques qui, selon les pensionnaires, soustendent les situations de violence et de négligence.

Dans le deuxième volet, qui s'intitule Être à l'écoute des besoins: Prévenir les mauvais traitements et la négligence envers les pensionnaires des établissements de soins de longue durée, nous examinons les observations formulées par les pensionnaires des établissements de SLD, le personnel qui y travaille, les familles, les intervenants et d'autres personnes concernant les mesures que les
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particuliers et les établissements pourraient prendre pour enrayer et prévenir la violence et les mauvais traitements à l'égard des pensionnaires âgés.

Dans le troisième volet, qui s'intitule Se sentir comme chez soi: Favoriser un milieu de soutien et de respect dans les établissements de soins de longue durée, nous examinons les principaux facteurs qui, selon les pensionnaires, le personnel, les familles, les bénévoles et les intervenants atténuent les dynamiques qui contribuent aux actes de violence et de négligence à l'égard des pensionnaires âgés. Cette monographie explore les mécanismes, les attitudes et les croyances qui, selon les personnes qui vivent, travaillent ou se rendent en visite dans les établissements de SLD, doivent être présents pour que nous soyons en mesure de créer un milieu idéal exempt de violence pour tous.

L'objectif ultime de ces trois monographies est de stimuler la discussion et l'action. Elles visent également à encourager les gens à s'efforcer de créer un milieu propice au bien-être des pensionnaires, un milieu offrant soutien et respect à chacun. Ces documents reflètent principalement le point de vue des pensionnaires; mais ils sont destinés à toutes les personnes associées aux établissements de SLD qui veulent s'occuper de la question de la violence et de la négligence dont les pensionnaires font l'objet. L'auditoire cible comprend les personnes qui évoluent à l'intérieur des établissements (par ex., les pensionnaires, le personnel, les familles et les bénévoles) et les personnes de l'extérieur (p. ex., les intervenants, les représentants des organismes de réglementation gouvernementaux et les associations professionnelles).

1.1 BILAN DES CONNAISSANCES EN MATIÈRE DE VIOLENCE ET DE NÉGLIGENCE ENVERS LES PERSONNES ÂGÉES VIVANT EN INSTITUTION

À l'heure actuelle, on estime que de 9 à 11% des personnes âgées vivent en milieu institutionnel au Canada (Division de la santé mentale, Santé Canada, 1994). Malgré la tendance actuelle qui est de fournir des soins à domicile, le nombre de personnes âgées ayant besoin de soins institutionnels demeurera considérable. Compte tenu de l'augmentation prévue du nombre de personnes âgées qui auront besoin de soins institutionnels (p.ex. Bélanger et Dumas, 1997), il faut aborder le plus tôt possible les questions liées à la qualité de la vie, y compris la prévention de la violence et des mauvais traitements envers les personnes âgées dans les établissements de SLD.

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
Les personnes âgées qui reçoivent des soins institutionnels se retrouvent dans un éventail d'établissements, des foyers d'accueil non médicaux, des foyers de soins infirmiers, jusqu'à des établissements de soins de courte durée et de longue durée. La violence et la négligence envers les personnes âgées qui vivent au sein de la collectivité font l'objet de nombreuses recherches et discussions au Canada; malgré ce fait, nous possédons peu d'information sur l'état de ce problème en milieu institutionnel. Selon des recherches nationales et internationales, la prévalence des actes de violence et de négligence à l'endroit des personnes âgées qui vivent au sein de la collectivité (c'est-à-dire celles qui ne vivent pas en milieu institutionnel) varie de 1% à 20%, d'après la définition de la violence et de la négligence ainsi que de la méthodologie utilisée pour étudier ce problème (Kozak, Elmslie et Verdon, 1995).

Le genre d'actes de violence et de mauvais traitements auxquels sont exposées les personnes âgées vivant en milieu institutionnel a fait l'objet d'une seule étude valable du point de vue méthodologique. À partir d'un échantillon de 577 membres du personnel infirmier (infirmières autorisées et infirmières auxiliaires autorisées) choisis au hasard dans 31 foyers de soins, Pillemer et Moore (1989) ont étudié le nombre de cas de violence physique et psychologique signalés par le personnel infirmier d'une ville des États-Unis. Les auteurs de l'étude signalent que 36% du personnel avaient été témoins de violence physique à l'égard des patients âgés; 21% avaient été témoins de recours à des moyens de contention; 15% avaient vu des patients poussés, empoignés, bousculés et pincés; et 15% avaient été témoins de gifles et de coups. Quatre-vingt-un-pour cent (81%) des membres du personnel avaient été témoins d'actes de violence psychologique.

Au Canada (tableau 1), la question de la violence et des mauvais traitements dans les établissements canadiens a fait l'objet de quelques études de moindre envergure. Toutefois, la documentation fait ressortir les nombreuses limites que comportent ces études (Kozak, Elmslie et Verdon, 1995; Beaulieu et Bélanger, 1995). En 1981, Bélanger et al. ont signalé qu'un sondage mené auprès d'un échantillon de 140 professionnels avait révélé que 35,5% des incidents de violence ou de négligence connus qui ont été rapportés par ces derniers sont survenus en milieu institutionnel; tandis que 28,4% de ces incidents sont survenus dans des établissements privés ou à domicile. Les répondants au sondage ont signalé que 57% des actes de violence et de négligence avaient été commis par le personnel ou d'autres dispensateurs de soins.

Au Manitoba, Shell (1982) a signalé que les professionnels ayant participé à son sondage en milieu institutionnel ont rapporté 402 incidents, répartis comme
Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Tableau 1 — Violence et négligence au Canada

ur Échantillon Méthode Conclusions

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
suit: exploitation financière (40,2%); violence psychosociale (37,4%); et violence physique (22,4%). Dans le cadre d'une étude menée plus récemment par l'Ordre des infirmières et infirmiers de l'Ontario (1993), 804 infirmières autorisées et infirmières auxiliaires autorisées ont participé à un sondage sur la violence faite aux pensionnaires par le personnel. Près de la moitié des répondants ont déclaré avoir été témoins d'au moins un acte de violence; 85% des rapports provenaient d'hôpitaux, 29% de foyers de soins infirmiers et 7% de foyers pour personnes âgées.

Nous ne connaissons pas l'ampleur réelle des mauvais traitements et de la négligence dans les établissements canadiens qui fournissent des soins aux personnes âgées; mais il ressort clairement de l'information présentée ci-dessus que — tout comme au sein de la collectivité — les personnes âgées vivant en milieu institutionnel risquent aussi d'être victimes de mauvais traitements et de négligence. Il est, par ailleurs, évident que l'on ne consulte pas les pensionnaires de manière uniforme pour cerner la nature des actes de violence et de négligence de leur point de vue ou pour dégager des moyens de régler le problème de façon efficace et avec sensibilité.

Le projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée avait pour objet de faire ressortir la façon dont les personnes âgées logées dans les établissements de SLD vivent et perçoivent les mauvais traitements et la négligence, ainsi que les mesures à prendre pour régler ce problème.

1.2 SURVOL DU PROJET DE PRÉVENTION DES MAUVAIS TRAITEMENTS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS DE LONGUE DURÉE

Projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée (1995_1996)

En 1995, Nouveaux Horizons: Partenaires des aînés, de Santé Canada, a financé l'élaboration d'une trousse éducative axée sur les pensionnaires en vue de:

  • sensibiliser les gens au problème des actes de violence et de négligence à l'endroit des personnes âgées en milieu institutionnel;
  • favoriser la tenue de discussions qui permettront de mieux comprendre ce problème, ainsi qu'un engagement à trouver des solutions;
  • sensibiliser davantage la population à la nécessité de créer un milieu de soutien et de respect pour les personnes âgées vivant en institution, ainsi qu'aux mesures à prendre pour favoriser un tel milieu.

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Au cours de la première phase du projet, on a formé 494 groupes de discussion composés de pensionnaires des établissements de SLD, de membres du personnel (clinique et administratif), de bénévoles œuvrant au sein de ces établissements, de membres des familles et d'intervenants en Colombie-Britannique, en Alberta, au Manitoba, en Ontario (français et anglais), au Québec (français et anglais) et à Terre-Neuve. Certains pensionnaires ont été consultés dans le cadre d'entrevues individuelles en raison des limitations dont ils souffraient sur le plan de la santé.

Lors des séances et des entrevues, on a demandé aux participants de faire part de leurs observations et de leurs expériences relativement aux points suivants:

  • signification du placement en établissement pour le pensionnaire;
  • définition de la violence et des mauvais traitements, du point de vue du pensionnaire;
  • causes perçues des actes de violence et de mauvais traitements à l'endroit des pensionnaires;
  • intervention contre la violence, et prévention des mauvais traitements et de la négligence envers les pensionnaires;
  • définition d'un milieu de soutien et de respect.

Un groupe d'experts national (formé de pensionnaires des établissements de SLD, de membres du personnel infirmier, de bénévoles et d'intervenants, de membres du personnel administratif, de membres des familles et de chercheurs) s'est servi des renseignements recueillis lors de ces séances pour élaborer une trousse éducative, «Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée». Cette trousse originale comprend deux vidéos et neuf modules de discussion. Elle favorise la création d'un milieu de soutien et de respect du point de vue des pensionnaires.

La Trousse éducative a été présentée à un groupe indépendant pour examen critique, et elle a fait l'objet de séances de formation et d'évaluation pilotes à Vancouver, Winnipeg, Ottawa, Montréal et St. John's. Accueillie de manière très positive, elle a été jugée favorablement par les pensionnaires, le personnel, les membres des familles et les bénévoles. Révisé en fonction des observations des groupes pilotes, la trousse a été distribuée à l'échelle du pays. L'annexe A contient des renseignements au sujet des équipes et des établissements qui ont participé au projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée.

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée



Traduit de Elder Abuse: The Hidden Crime, Advocacy Centre for the Elderly (1988).

Volet Formation des formateurs du projet Prévention
des mauvais traitements dans les établissements
de soins de longue durée (1997_1998)

Misant sur le succès du projet initial, on a obtenu du financement auprès du Fonds pour la santé de la population, de Santé Canada, pour initier les formateurs à l'utilisation de la trousse éducative. Six cent soixante-cinq (665) personnes ont été formées à l'échelle du Canada à l'utilisation de la Trousse éducative. Les ateliers visaient à les former à agir à titre de personnes-ressources au sein de leurs collectivités contre la violence et la négligence à l'endroit des personnes âgées dans les établissements de SLD. Les ateliers de formation ont eu lieu au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest ainsi que dans toutes les provinces, sauf l'Île-du-Prince-Édouard.

Plus de 97% des participants ont jugé que les ateliers de formation étaient bons ou excellents. Ils ont indiqué qu'ils retourneraient dans leurs collectivités pour former d'autres personnes en regard des mauvais traitements et de la négligence, et pour mettre à profit leur savoir-faire afin d'appuyer la recherche de solutions. Un sondage de suivi, un mois plus tard, indiquait que plus de la moitié des répondants avaient déjà commencé à tirer parti de leurs nouvelles connaissances et le reste d'entre eux n'avaient pas encore pu mettre en pratique l'information obtenue au cours des ateliers de formation.

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Au cours de cette seconde phase, les participants ont communiqué aux animateurs de la formation d'autres aperçus du problème des mauvais traitements et de la négligence, en plus de leur faire part de moyens innovateurs de régler la question. En outre, un comité directeur national du projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée a aussi établi des lignes directrices en matière de politiques et de façons de faire1 afin d'aider les établissements à élaborer des politiques adaptées et pertinentes pour prévenir les mauvais traitements et la négligence envers les pensionnaires. L'information fournie dans cette série de monographies est fondée sur les conclusions tirées des deux phases.

Terminologie

Dans ce document, un établissement de SLD en est un subventionné par l'État, qui fournit des soins infirmiers de base aux personnes âgées. Ce qui comprend des foyers d'accueil pour personnes âgées, des foyers de soins infirmiers et des établissements de soins de longue durée situés en milieu hospitalier.

Parmi les groupes de discussion, ceux des pensionnaires comprenaient des gens ayant plus de 55 ans. Ceux des familles étaient composés de parents et d'intervenants. Les groupes formés d'employés comprenaient des membres du personnel préposés aux soins directs (infirmières autorisées; infirmières auxiliaires autorisées; infirmières auxiliaires immatriculées; aides en soins de santé) ainsi que du personnel non préposés aux soins directs (travail social, service de pastorale, psychologie, administration) et des bénévoles.

Le terme «participant» est généralement utilisé pour désigner les personnes qui prennent part aux discussions des groupes de discussion, aux essais pilotes ou aux ateliers pour formateurs.

1. Lukawiecki, T., Kozak, J., Wahl, J., & Dalle, D. Policy and Procedures for Preventing Abuse and Neglect within LTC Institutions, 1998. Département de recherche, Service de santé des SCO, Ottawa (Ontario).
Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée


Section 2

Mauvais traitements et négligence

Les définitions sont importantes parce qu'elles aident les gens à déterminer si une situation donnée constitue un acte de violence ou de négligence. Il est difficile de définir les mauvais traitements et la négligence car une personne pourrait considérer un événement particulier comme un acte de violence ou de négligence tandis qu'une autre ne le jugerait pas comme tel. La culture, les croyances religieuses et les valeurs personnelles sont quelquesuns des facteurs qui influent sur la façon dont les gens perçoivent les événements. En raison de ces différences, il est probable que les pensionnaires, le personnel et les familles ont des perceptions différentes des actes délibérés, ou de l'absence d'actes, qui constituent des actes de violence ou de négligence.

En général, les mauvais traitements et la négligence sont définies comme tout acte, ou toute absence d'actes, qui compromet la santé d'une autre personne. L'abus de pouvoir sous-tend la plupart des situations de violence et de négligence. Le terme «violence» est utilisé pour décrire les situations dans lesquelles les gens utilisent leur pouvoir pour exploiter les autres. L'abus de pouvoir peut se produire entre des personnes ou à un niveau systémique, ou au niveau des politiques.

Les mauvais traitements et la négligence sont en outre plus susceptibles d'être commis lorsque ceux qui interagissent avec les pensionnaires se préoccupent davantage de la tâche à accomplir que du pensionnaire. Le paternalisme manifesté envers les bénéficiaires de soins peut miner leur confiance personnelle en leur capacité de subvenir à certains de leurs propres besoins. Le personnel, les autres pensionnaires, les membres de la famille et les bénévoles qui en font trop pour un pensionnaire peuvent involontairement agir avec violence. D'autre part, le fait de ne pas combler les besoins des personnes âgées incapables de le faire elles-mêmes constitue une forme de négligence.

La violence et la négligence peuvent prendre plusieurs formes, y compris sur les plans psychologique et physique (figure 1), et se traduire par:

  • des actes criminels ou non criminels;
  • un acte isolé, ou un acte qui s'inscrit dans un comportement type;
  • un acte délibéré ou involontaire;
  • des actes subtils qui sont en apparence peu importants, ou des actes graves;

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée

  • des actes commis par une personne, un groupe ou une organisation (violence systémique).

Les comportements criminels sont décrits dans le Code criminel. Certains de ces comportements comprennent des voies de fait, une agression sexuelle, de la négligence et la séquestration. Dans la plupart des cas, pour qu'un comportement soit considéré comme un acte criminel, on doit avoir eu l'intention de provoquer des souffrances. Par exemple, lorsqu'un pensionnaire ne souffrant d'aucun trouble cognitif frappe une autre personne, c'est considéré comme des voies de fait. Toutefois, un pensionnaire atteint de déficience intellectuelle et de troubles mentaux, qui commet le même acte, n'en sera pas tenu criminellement responsable. Cependant, il incombe toujours au personnel de l'établissement de s'efforcer de mettre en œuvre les mesures qui s'imposent pour mettre un terme à ce comportement. De plus, même si la personne qui commet l'acte de violence est déficiente intellectuelle, la victime peut toujours déposer une plainte officielle qui pourrait entraîner une accusation.

Dans certains cas, les politiques et les règlements institutionnels ou gouvernementaux peuvent créer, favoriser ou même perpétuer des situations qui mettent les pensionnaires en danger. Habituellement, lorsqu'une situation dangereuse se produit, elle résulte d'une ou de plusieurs façons de fournir des soins. Souvent, ces façons de faire semblent légitimes ou sont si profondément ancrées dans les activités quotidiennes de l'établissement que personne ne se demande si elles conviennent à tous les pensionnaires des établissements de SLD. Par exemple, les habitudes alimentaires d'un pensionnaire donné peuvent être incompatibles avec les politiques établies relativement à l'heure des repas. Ceux qui ont toujours eu l'habitude de prendre le petit déjeuner tard, ou de ne pas le prendre, peuvent éprouver un sentiment de frustration lorsque le repas du matin n'est offert qu'à certaines heures, ou lorsqu'on les oblige à le prendre en raison des politiques institutionnelles.

2.1. Définition de la violence et de la négligence

La majorité des observations au sujet des sources de violence et de négligence portaient principalement sur les interactions entre les pensionnaires et le personnel (68% des observations), ensuite sur les façons de faire et les politiques des établissements de SLD (27%), les autres pensionnaires (20%) et les familles (16%). Comme on avait demandé aux participants de tous les groupes de discussion de discuter des actes de violence et de négligence à l'endroit des pensionnaires, 78%
Quand chez soi n'est pas un chez-soi
de toutes les observations portaient sur cette question. Quelquesuns des groupes de discussion (de pensionnaires, de membres du personnel, de membres des familles, et d'intervenants) ont formulé des observations au sujet des actes de violence et de négligence à l'endroit du personnel (17%) et des familles (6%). Les participants de ces groupes ont reconnu que les actes de violence et de négligence constituent un phénomène très complexe dont nous pouvons tous être les auteurs ou les victimes. On doit insister sur la nécessité de faire preuve d'une grande prudence lorsqu'il s'agit de pourcentages; car le fait, pour une personne ou un groupe de personnes de ne pas commenter aucune observation concernant une question donnée ne signifie pas que celle-ci n'a aucune importance pour eux.

Seulement un petit nombre des observations formulées par les pensionnaires et le personnel ont fait ressortir des gestes qui seraient généralement considérés d'emblée comme des voies de fait ou d'agression sexuelle envers les pensionnaires. Ce résultat reflète peut-être les préoccupations ou la peur qu'engendre l'idée de signaler de tels incidents, mais les pensionnaires qui ont participé aux deux projets ont souligné que les actes de violence et de négligence caractérisant leur vie quotidienne et celle des autres dans les établissements de SLD, étaient moins clairs et nets.

Les participants sont d'avis que les principales formes de violence et de négligence résultaient de trois facteurs de base:

  • attitudes négatives ou mauvaise dynamique de la personnalité;
  • manque de compétence;
  • processus systémiques ou institutionnels créant et favorisant un déséquilibre de pouvoir entre les pensionnaires et le personnel.

Dans l'ensemble, les perceptions de ce qui constitue des actes de violence et de négligence pourraient être catégorisées d'après le modèle de définition élaboré dans «Les mauvais traitements et la négligence envers les personnes âgées en milieu institutionnel: Document de travail rédigé à partir de documentation en langue anglaise2». Les principales formes de violence et de négligence cernées sont les suivantes:

  • Médicale
  • Exploitation financière
  • Physique

2. Division de la santé mentale, Santé Canada. Les mauvais traitements et la négligence envers les personnes âgées en milieu institutionnel: Document de travail rédigé à partir de documentation en langue anglaise, 1994. Ottawa: Ministre des Approvisionnements et Services.
Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée

  • Violation des droits civils et des droits de la personne
  • Psychologique
  • Systémique
  • Sexuelle

Les participants ont défini la violence et la négligence comme étant l'absence d'actes, ou tout acte qui inflige des souffrances à un pensionnaire, lui interdit quelque chose ou le met en danger. Les effets perçus de ces actes, ou de ces absences d'actes allaient de la perte de dignité et de respect, jusqu'au défaut de répondre aux besoins fondamentaux. Le personnel a dégagé clairement les formes de violence et de négligence, mais tendait à les énoncer en incluant les raisons perçues de ces actes (p. ex.: problèmes de comportement difficile, familles et processus institutionnel). Les familles ont discuté de la négligence et de formes plus complexes de violence (psychologique, violation des droits civils ou des droits de la personne, systémique) plutôt que des signes évidents et manifestes de violence physique. Les participants qui étaient plus souvent en contact avec les pensionnaires (p. ex. le personnel et les bénévoles) étaient plus susceptibles de percevoir la violence physique (p. ex. pensionnaires malmenés).

«Le premier soir suivant mon arrivée, j'ai appelé l'infirmière parce que je ne me sentais pas bien. Elle m'a dit qu'elle n'avait pas le temps de s'occuper de moi et que l'aideinfirmière viendrait me voir à la fin de sa pause. Je me suis mis à pleurer comme un enfant et je me suis dit, c'est ça la vie dans un foyer de soins infirmiers.» (pensionnaire)

Négligence

Tous les groupes ont souvent mentionné qu'il y avait négligence dans les établissements de SLD, et les observations formulées à ce chapitre émanaient le plus souvent des bénévoles et d'intervenants (80%). La majorité d'entre eux ont souligné qu'il s'agissait de négligence involontaire, mais qu'elle provoquait un sentiment d'impuissance chez les personnes touchées. Les participants ont dit que les formes de négligence comprenaient le fait d'être laissé de côté ou oublié, qu'on ne réponde pas aux sonnettes ou aux voyants d'appel, et que le personnel ne réponde pas aux besoins des pensionnaires. Selon les pensionnaires et leurs familles, le fait de laisser les pensionnaires seuls (pendant les pauses du personnel) sur la toilette ou de les laisser étendus ou assis dans des vêtements souillés, et la rareté des contacts avec le médecin constituent d'autres formes de négligence (et de manque de respect).

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Pourcentage d'observations portant sur la négligence, par répondant

Type de répondant
%
Pensionnaires
40
Personnel clinique
29
Administration
50
Famille
43
Bénévoles/Intervenants
80

Un petit nombre de pensionnaires ont dégagé des formes de négligence active: être enfermé à clé dans les chambres; être privé de nourriture, de bains, de médicaments; et ne recevoir aucune aide alors que l'on a signalé au personnel qu'on se trouve dans une position inconfortable. Le personnel et les familles qui participaient au projet de Prévention de mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée n'ont signalé aucun acte de négligence active.

Les membres du personnel ont signalé que les actes de négligence commis par les familles constituent un problème à la fois pour les pensionnaires et pour euxmêmes. Ils ont mentionné qu'ils doivent faire face aux conséquences psychologiques qui touchent les pensionnaires lorsque les membres de leurs familles oublient de leur rendre visite alors qu'ils avaient promis de le faire, ou lorsque les familles déposent les pensionnaires à l'établissement et ne reviennent jamais les voir. Le personnel clinique chargé des soins a formulé moins d'observations (29%) que le personnel administratif (50%) au sujet de la négligence.

«On est assis sur la toilette à attendre après avoir uriné et s'être rhabillé… et on vous a oublié.» (pensionnaire)

«Ils les ramènent [à leur chambre] en fauteuil roulant et les laissent là, faisant face au mur. Vous aimeriez passer les trois prochaines heures à regarder le mur?» (famille)

«Nous n'avons pas le temps de les attendre [lorsqu'ils sont aux toilettes]. Nous n'avons pas le temps de passer quelques minutes avec eux pour bavarder. Je dois les quitter pour aller m'occuper d'un autre pensionnaire.» (membre du personnel)

Violence physique

Les pensionnaires de toutes les régions ont souligné à plusieurs reprises qu'ils n'avaient jamais fait l'objet d'actes manifestes de violence physique. Aucun groupe n'a signalé avoir décelé des signes évidents de violence physique (ecchymoses ou
Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
exulcérations). Les pensionnaires avaient de la difficulté à parler de la violence physique manifeste mais il leur était facile de discuter du fait d'avoir été transportés sans égards.

Pourcentage d'observations portant sur la violence physique,
par répondant

Type de répondant
%
Pensionnaires
16
Personnel clinique
24
Administration
-
Famille
43
Bénévoles/Intervenants
20

Très peu de pensionnaires ont signalé avoir été au courant ou témoins de situations où une personne avait été giflée; mais ils ont précisé que ces situations s'étaient produites en raison du comportement agressif ou inacceptable perçu d'un pensionnaire (p. ex., un membre du personnel a giflé une pensionnaire parce que celle-ci ne pouvait s'arrêter de pleurer). Les pensionnaires ont reconnu que la violence, tant physique que psychologique, constitue une «route à deux sens» et que dans certains cas, le personnel réagit peut-être tout simplement, au comportement agressif ou violent des pensionnaires.

«Les membres du personnel ne m'ont jamais frappé mais l'un d'eux m'a déjà déplacé très brutalement.» (pensionnaire)

«En arrivant dans le corridor, j'ai entendu un employé crier après une pensionnaire. J'ai jeté un coup d'œil du côté du poste de garde [des infirmières]… et je me suis rendu compte qu'elles ne pouvaient entendre ce qui se passait. J'ai reculé de quelques pas et j'ai parlé à mon amie [pensionnaire] qui me dit croire que la pensionnaire en question avait frappé l'interne.» (intervenant)

«Je n'ai jamais vu qui que ce soit frapper quelqu'un, mais j'ai vu des membres du personnel se comporter très brutalement envers les patients. Ils vont parfois en pleine nuit arracher les couvertures et pousser les patients pour les retourner en leur disant ensuite qu'ils vont les retourner. Ils les traitent comme des sacs de pommes de terre.» (membre du personnel)

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Violence psychologique

Les participants ont mentionné que la violence psychologique, qui entraîne une perte de dignité ou de respect de soi, est une forme de violence courante. Les pensionnaires ont dit que la violence psychologique se traduit par divers actes, dont les suivants: traiter les pensionnaires comme des enfants; leur parler sur un ton condescendant; les exploiter; ne pas les prendre au sérieux; les rabaisser; les humilier; leur manquer de respect; ou leur donner l'impression qu'ils nuisent. Les formes de violence psychologique plus graves que subissent les pensionnaires comprennent le fait d'être confinés dans les chambres, lorsque les membres du personnel chargé de les accompagner ne sont pas disponibles, et le fait de ne pas pouvoir utiliser le téléphone. Ces observations ont été réitérées par le personnel et par les familles.

Pourcentage d'observations portant sur la violence psychologique,
par répondant

Type de répondant
%
Pensionnaires
40
Personnel clinique
53
Administration
50
Famille
71
Bénévoles/Intervenants
80

Les participants ont discuté à plusieurs reprises de la violence verbale, qui est une forme de violence psychologique comprenant des situations où les gens lancent des injures, font des remarques désobligeantes, et hurlent. Les familles et les pensionnaires considèrent que les cris, l'intimidation, les menaces verbales, et le commérage au sujet des pensionnaires sont aussi des formes de violence.

Les familles ont indiqué que les membres du personnel commettent une autre forme de violence psychologique lorsqu'ils traitent les pensionnaires comme des enfants ou des ennemis. Les bénévoles disent qu'ils vivent des relations conflictuelles semblables avec le personnel.

«L'infirmière me dit qu'elle va me laisser me brosser les dents. On me traite comme un enfant, comme si j'avais quatre ans.» (pensionnaire)

«Après quelque temps, on vous attribue un sobriquet. À mon arrivée, ils disent `Voici la râleuse'. Comment suis-je censée agir?» (famille)

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
«Lorsqu'une pensionnaire entend un membre du personnel faire une observation à son sujet comme `je ne lui donne pas son bain ce soir, je la déteste', elle a envie de rentrer sous terre.» (membre du personnel)

Violence sexuelle

Seulement un petit nombre de pensionnaires ont dit que les actes de violence sexuelle pouvaient faire partie des actes de violence susceptibles d'être commis dans les établissements de SLD. Le type d'actes de violence mentionnés à ce chapitre sont les viols et le harcèlement sexuel perpétrés par d'autres pensionnaires (commis par les hommes à l'endroit des femmes). Un pensionnaire s'est dit préoccupé par le fait que des pensionnaires harcellent les enfants des membres des familles en visite.

Même s'ils ne considèrent pas que ce soit une forme de violence sexuelle, les participants ont mentionné que les femmes sont mal à l'aise lorsque le personnel masculin leur apporte des soins personnels (lorsqu'il s'agit de prendre un bain, de s'habiller, d'aller à la toilette). Le personnel a soulevé la question des touchers inacceptables et le fait de toucher à une personne sans sa permission (il est question des touchers en général et non des touchers de nature sexuelle).

Pourcentage d'observations portant sur la violence sexuelle,
par répondant

Type de répondant
%
Pensionnaires
2
Personnel clinique
6
Administration
-
Famille
-
Bénévoles/Intervenants
-

«Cela me déplaît. Laissez les femmes s'occuper des femmes et les hommes s'occuper des hommes. Il est désagréable pour une femme de demander à un homme de changer sa couche.» (pensionnaire)

«Une des pensionnaires ne m'aime pas, elle n'aime pas que je la touche lorsque j'essaie de la soigner… c'est pourquoi seul le personnel féminin s'occupe d'elle.» (membre du personnel masculin)

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Exploitation financière

Seuls les pensionnaires ont fait allusion à l'exploitation financière. À ce chapitre, ils ont mentionné le vol de biens et d'argent; le fait de recevoir leurs fonds «sous forme d'allocation»; le fait de ne pas avoir accès à leurs fonds; et le fait que les employés brisent parfois des objets ou utilisent leurs effets personnels sans permission. Les pensionnaires ont indiqué que d'autres pensionnaires entrent dans les chambres pour fouiller dans leurs effets personnels et les prendre. Les pensionnaires ont aussi signalé que certains reçoivent moins de services et de nourriture, et qu'ils sont traités différemment selon leur capacité de payer (obtenant, par exemple, une chambre privée plutôt qu'une chambre à plusieurs lits). Lorsqu'on leur a expressément demandé si les pensionnaires étaient parfois victimes d'exploitation financière, le personnel et d'autres personnes ont confirmé que c'était le cas, mais qu'il s'agissait habituellement de vols commis par des membres de la famille ou des inconnus. Les membres du personnel n'estiment pas que les pensionnaires qui prennent les biens des autres commettent un vol. Ils croient plutôt que ces actes sont involontaires résultant d'un processus maladif tel que la maladie d'Alzheimer.

Pourcentage d'observations portant sur l'exploitation financière, par répondant

Type de répondant
%
Pensionnaires
6
Personnel clinique
-
Administration
-
Famille
-
Bénévoles/Intervenants
-

«N'apportez jamais vos biens les plus précieux dans un établissement.» (pensionnaire)

Violation possible des droits civils et des droits de la personne

Tous les participants sont d'avis que les pensionnaires des établissements de SLD peuvent avoir le sentiment d'être confinés et soumis à des mesures de restriction. La principale plainte formulée avait trait au nonrespect du droit à l'intimité. Certaines situations peuvent entraîner la violation des droits de la personne, par exemple lorsque les membres du personnel entrent dans les chambres sans frapper
Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
ou sans se présenter; lorsqu'ils fournissent des soins de base sans chercher à préserver l'intimité du pensionnaire (lorsqu'ils l'aident à aller à la toilette ou à prendre un bain, par exemple); et lorsqu'ils discutent librement, devant d'autres personnes, de questions que les pensionnaires jugent personnelles.

Pourcentage d'observations portant sur la violation possible des droits civils et des droits de la personne, par répondant

Type de répondant
%
Pensionnaires
14
Personnel clinique
12
Administration
-
Famille
14
Bénévoles/Intervenants
20

Les pensionnaires, le personnel et les familles ont tous souligné que le fait de ne pas communiquer certains renseignements aux pensionnaires peut aussi constituer une violation des droits civils et des droits de la personne. Les pensionnaires disent avoir l'impression qu'on les tient à l'écart et qu'on les traite comme des «citoyens de seconde zone». Les familles jugent qu'on ne les informe pas pleinement des questions relatives aux soins. Dans le même ordre d'idées, les membres du personnel disent que les familles leur demandent souvent de ne pas consulter le pensionnaire au sujet des décisions relatives aux soins. Cette situation semble se produire plus particulièrement dans le cas des pensionnaires atteints d'une déficience intellectuelle allant de moyenne à grave.

«On m'interdit de descendre à moins qu'un membre de ma famille ne m'accompagne. J'écoute les bruits qui m'entourent et je me dis `Mon Dieu, si je ne suis pas déjà fou, je le deviendrai si je vis ici une minute de plus.' Je retourne alors à ma chambre et je regarde une bonne émission télévisée.» (pensionnaire)

«Personne ne peut nous expliquer ce qui se passe, et pourquoi.» (famille)

«Nous nous efforçons d'informer la famille et le pensionnaire, mais il est parfois difficile de convaincre la famille de se présenter et le pensionnaire ne comprend pas. De plus, nous courons dans tous les sens pour tenter de répondre aux besoins de chacun.» (membre du personnel)

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Violence médicale

Les pensionnaires et les familles ont mentionné que le recours aux médicaments perçu comme excessif constitue une forme de violence médicale. Les exemples de violence médicale que les participants au projet de Prévention des mauvais traitements en établissements de soins de longue durée ont donnés sont les suivants: erreurs de dosage; médicaments périmés; peu ou pas de contacts avec les médecins; et utilisation de contraintes chimiques. Un petit nombre de pensionnaires ont tellement de difficulté à vivre avec d'autres ayant de graves problèmes de comportement (errance, violence verbale, agressions physiques), qu'ils suggèrent d'utiliser des contraintes chimiques pour exercer un contrôle sur eux.

Pourcentage d'observations portant sur la violence médicale,
par répondant

Type de répondant
%
Pensionnaires
16
Personnel clinique
29
Administration
50
Famille
57
Bénévoles/Intervenants
20

Le personnel, tant clinique qu'administratif, juge que l'on a trop souvent recours aux médicaments pour régler les problèmes liés au comportement des pensionnaires (comportement agité, par ex.) et qu'il y aurait lieu de chercher des solutions de rechange. En outre, l'utilisation de moyens de contention dans les établissements de SLD inquiète ces deux groupes. Les membres du personnel sont d'avis qu'il faut faire preuve d'une plus grande vigilance concernant l'utilisation de moyens de contention; ils sont préoccupés par les établissements non agréés qui ne sont pas tenus de se soumettre à une évaluation continue ou de respecter un code de déontologie. Les familles ainsi que les bénévoles et les intervenants sont d'avis que le personnel est trop porté à administrer des médicaments aux pensionnaires.

«On vous donne des pilules pour vous calmer alors que vous avez juste envie de pleurer.» (pensionnaire)

«Une des voisines de chambre de ma mère a été victime d'une surdose de médicaments. On lui avait administré le mauvais médicament, mais personne ne l'a jamais avoué.» (famille)

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
«Les pensionnaires refusent parfois de prendre un médicament prescrit, mais nous sommes obligés de le leur administrer.» (membre du personnel)

Violence systémique

La violence systémique est l'une des principales questions sur lesquelles les participants ont formulé des observations (75% des observations). Les exemples donnés comprennent le fait d'appeler les pensionnaires des «patients»; d'obliger les pensionnaires à s'installer dans des chambres de dimensions réduites; l'incapacité de contrôler le niveau de bruit; l'adhésion rigide aux horaires établis; l'obligation de se dépêcher lorsqu'il s'agit de prendre un repas ou d'aller à la toilette; la nécessité de toujours attendre pour recevoir des soins; et le manque de continuité dans les soins, en raison de l'emploi de personnel à temps partiel. Comme on pouvait s'y attendre de la part d'une population vivant en milieu institutionnel, un grand nombre des observations faites par les pensionnaires avaient trait à la piètre qualité de la nourriture et à l'impossibilité de manger ce qu'ils désirent, quand ils le désirent. Comme le demande un membre du personnel, pourquoi une pensionnaire diabétique âgée de 90 ans ne pourrait-elle pas manger un chocolat, si elle en a envie?

Le personnel juge que le processus d'admission est fatigant et bouleversant pour les pensionnaires car il les oblige à répondre aux questions incessantes des préposés de nombreux services. De plus, le personnel souligne que les couleurs bizarres des chambres («vert chirurgie») contribuent à créer une ambiance institutionnelle plutôt qu'une ambiance accueillante.

Pourcentage et type d'observations portant sur la violence systémique

Type de répondant
%
Politiques et procédures
47
Groupement par fonction
27
Niveaux de dotation
22
Soins et spiritualité
20
Horaires
17

Un grand nombre de participants ont souligné que la mise en œuvre de politiques et de marches à suivre rigides crée des situations où les besoins personnels et la dignité des pensionnaires ne sont pas respectés. Par exemple, en raison des politiques relatives à l'horaire des repas, il est difficile de répondre aux besoins des gens qui
Quand chez soi n'est pas un chez-soi
n'ont jamais pris de petit déjeuner parce qu'ils préfèrent prendre un repas léger au milieu de l'avant-midi. Une politique qui prévoit la réinstallation des pensionnaires dans des chambres situées au sein d'autres unités risque de perturber considérablement les pensionnaires concernés; car elle ne permet pas de tenir compte des relations sociales qu'ils sont susceptibles d'avoir établies au sein de l'unité précédente et qui sont rompues à la suite du déplacement. Le personnel indique, par ailleurs, que les politiques peuvent entraîner des conflits par inadvertance lorsqu'elles contredisent l'ordre des priorités établies. Il faut examiner très soigneusement l'interaction entre les politiques et les conséquences possibles de cette interaction.

Les pensionnaires et le personnel ont également mentionné que le fait de regrouper les pensionnaires en fonction de leur niveau fonctionnel ou de catégories de maladies crée des problèmes, en particulier lorsque certains pensionnaires sont plus jeunes que les autres. Par exemple, les pensionnaires se sont plaints d'être obligés de partager une chambre avec des pensionnaires atteints d'une déficience mentale grave ou qui sont beaucoup plus âgés, car il leur est alors difficile de communiquer avec eux et de discuter d'expériences communes. De plus, tous les participants ont mentionné plusieurs conditions dont l'interaction provoque des situations dans lesquelles le processus systémique de prestation de soins peut être incompatible avec les droits et les besoins individuels. Suivent quelques-unes de ces conditions: effectifs réduits; absence perçue de soins continus disponibles; accès insuffisant à un soutien spirituel (autre que la disponibilité des chapelles ou des services hebdomadaires); et conflits d'horaire (p. ex., les rendez-vous avec les services professionnels ont lieu seulement le matin, ce qui incite le personnel infirmier à bousculer les patients).

«Les petits problèmes nous perturbent davantage quand nous sommes vieux. Lorsqu'on m'a dit que je devais changer de chambre, j'ai pleuré. Il est difficile de supporter certaines situations quand on a 90 ans.» (pensionnaire)

«(…) c'est comme si l'on vivait un rapport de pouvoir dans ce genre de situation. C'est un abus de pouvoir et je crois que c'est insidieux. Je ne pense pas que beaucoup de gens le reconnaissent vraiment — le contrôle obligatoire.» (intervenant)

«Ils perçoivent peut-être cette mesure comme un acte de violence, alors que nous la percevons uniquement comme un moyen d'accomplir notre travail.» (membre du personnel)

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
2.2 CAUSES PERÇUES DE LA VIOLENCE ET DE LA NÉGLIGENCE

Les participants aux groupes de discussion considèrent les éléments suivants comme les principales causes ou les principaux facteurs de la violence et de la négligence dans les établissements de SLD:

  • attitude/personnalité;
  • manque de compétence;
  • processus systémiques ou institutionnels;
  • déficience intellectuelle et problèmes de communication.

Attitude/personnalité

Les pensionnaires, le personnel et les bénévoles reconnaissent tous que la piètre attitude manifestée par certains membres du personnel des établissements de SLD envers les personnes âgées est un facteur qui contribue énormément à la violence et aux mauvais traitement. Soixante-dix pour cent (70%) des observations formulées par tous les groupes concernant les facteurs contributifs perçus avaient trait à de mauvaises attitudes ou à des conflits de personnalité.

On trouve que les membres du personnel qui ne valorisent pas le pensionnaire à titre de personne, ou qui se concentrent uniquement sur les aspects financiers de leur travail, manquent d'égards et de respect et sont peu bienveillants. Les incompatibilités de caractères entre les pensionnaires et le personnel sont aussi perçues comme une source de conflits.

Selon les participants au projet de Prévention des mauvais traitements des établissements de soins de longue durée et plus particulièrement les pensionnaires, les personnes qui se fondent sur des stéréotypes voulant que les pensionnaires soient handicapés et dépendants ont tendance à les traiter comme des «enfants» incapables d'accomplir certaines tâches ou de prendre des décisions en leur propre nom. Ce processus crée, en retour, une dépendance chez les pensionnaires en ce qui concerne les activités de la vie quotidienne, ce qui place les dispensateurs de soins dans une position de pouvoir par rapport aux pensionnaires. Tous les participants reconnaissent que ce déséquilibre des pouvoirs est l'un des principaux facteurs pouvant entraîner des différends susceptibles d'empirer et de provoquer des actes de violence et des mauvais traitements.

Les pensionnaires ont insisté sur le fait que le personnel leur parle «comme à des enfants» et utilise des expressions telles que «mon petit chéri» ou «ma petite chérie» d'une manière condescendante. Les pensionnaires reconnaissent que le personnel utilise ces expressions pour exprimer un sentiment de chaleur envers
Quand chez soi n'est pas un chez-soi
eux, mais ils considèrent néanmoins que cela démontre, la plupart du temps, qu'il les perçoit comme des enfants sans défense.

Manque de compétence

Les participants ont souligné que le personnel doit posséder les compétences nécessaires pour fournir des soins et comprendre le processus d'évolution des maladies ainsi que les mesures de gestion et d'intervention que celles-ci nécessitent (par ex. les problèmes de comportement associés à la maladie d'Alzheimer). Le personnel et les pensionnaires sont d'avis qu'il faut fournir au personnel une formation fondée sur une approche reconnaissant et valorisant la personne, et non sur une approche qui met l'accent uniquement sur les soins techniques.

Les participants au projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée se disent inquiétés, en outre, par l'emploi de personnel temporaire à temps partiel. Ils reconnaissent que les contraintes budgétaires obligent les établissements à avoir recours à des travailleurs suppléants moins rémunérés, mais ils craignent que ces travailleurs — qui sont, par ailleurs, en mesure de fournir des soins infirmiers de base — n'aient pas reçu la formation requise concernant les processus d'évolution des maladies, la violence et les mauvais traitements ainsi que les nombreuses autres questions importantes pour la prestation de soins efficaces et adaptés. Un grand nombre des participants ont dit que les établissements doivent adopter une politique en vertu de laquelle l'embauche de travailleurs suppléants se ferait uniquement auprès de services de placement privés en mesure de prouver que leur personnel a reçu ou reçoit une formation concernant ces questions.

Processus systémiques ou institutionnels

Tous les participants jugent que le processus institutionnel, dès l'admission, est l'un des principaux facteurs qui risquent d'engendrer des situations pouvant conduire à des actes de violence et de négligence. Un grand nombre d'entre eux craignent que la réduction des effectifs ainsi que l'augmentation des contraintes de temps auxquelles le reste des effectifs fait face n'entravent gravement la prestation de soins de qualité; ce qui aurait pour effet d'entraîner la détérioration des soins et de provoquer un sentiment de frustration accru. Par exemple, les pensionnaires disent que les longs délais d'attente avant qu'on s'occupe d'eux résultent directement du manque d'effectifs. Selon le personnel, le fait que les établissements mettent de plus en plus l'accent sur l'obligation de respecter des limites de temps, et non
Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
sur la qualité des soins, est l'une des principales sources de frustration et d'épuisement professionnel.

Les pensionnaires sont d'avis que le recours à la dotation de postes à temps partiel nuit à la continuité des soins. L'emploi de personnel à temps partiel oblige souvent les pensionnaires à traiter avec de nouveaux employés qui ne connaissent pas leurs préférences ou leurs besoins de soins particuliers. De plus, les pensionnaires estiment devoir accepter des soins personnels de la part d'inconnus.

Tous les participants s'entendent pour dire que le processus institutionnel est tel qu'il oblige les pensionnaires à se plier à des horaires serrés et rigides, et n'incite pas le personnel à prendre le temps de s'asseoir avec les pensionnaires pour bavarder. Ils ont tous mentionné que l'adhésion rigide aux horaires ou aux ordres réduit les possibilités de respecter les désirs de chacun ou de personnaliser davantage les services au sein de l'établissement. Par exemple, le personnel est obligé de réveiller les pensionnaires et de leur servir les repas à des heures fixes et ce, même si certains d'entre eux ne veulent pas manger. «Je peux rester au lit si je ne veux pas me lever, alors qu'ici, les pensionnaires n'ont pas le choix», dit un membre du personnel.

Le fait d'obliger un pensionnaire à prendre un médicament qu'un médecin lui a prescrit, sans qu'ils n'en aient convenu lors d'une consultation, est un autre problème qui a provoqué des confrontations entre les préposés aux soins directs et les pensionnaires.

Déficience intellectuelle et problèmes de communication

Tous considèrent que les pensionnaires ayant une déficience intellectuelle et ceux qui ont de la difficulté à communiquer risquent davantage d'être victimes de violence et de mauvais traitements que les pensionnaires en possession de leurs moyens. Même si le personnel n'a pas l'intention de faire preuve de violence, il risque de commettre des actes de violence et de négligence en ne sachant pas ce qu'un pensionnaire désire réellement à cause de son incapacité de communiquer. «Les personnes incapables de s'exprimer ne peuvent nous communiquer ce qu'elles désirent» note un membre du personnel.

Le personnel insiste sur la nécessité d'utiliser d'autres moyens de communication, ou de déterminer ce que le pensionnaire désire en l'observant attentivement. Le personnel doit absolument prendre le temps de comprendre les désirs des pensionnaires. Le manque de temps pour agir ainsi et l'emploi de personnel à temps partiel ne connaissant pas les pensionnaires constituent, selon le personnel, des facteurs susceptibles d'entraîner des actes de violence et de négligence.

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Il est important de prendre le temps de déterminer les besoins individuels des pensionnaires; mais le personnel partout au Canada souligne qu'il a peu de temps à passer avec les pensionnaires. Lorsqu'il doit consacrer plus de temps aux pensionnaires ayant de la difficulté à communiquer leurs besoins, il dispose de moins de temps pour s'occuper des autres pensionnaires. Ce qui engendre du ressentiment et un sentiment de frustration chez les pensionnaires obligés d'attendre pour obtenir les services d'un aide-soignant ou d'une infirmière.

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée


Section 3

Conclusion

Le projet de Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée avait pour but de définir la violence et la négligence et ce, principalement du point de vue des pensionnaires des établissements canadiens de SLD, ainsi que d'explorer tous les moyens pratiques d'enrayer et de prévenir la violence et les mauvais traitements.

Du point de vue des pensionnaires, les actes de violence et de négligence qui se produisent le plus souvent sont liés aux interactions quotidiennes: il peut s'agir d'un mot, d'un geste ou d'une absence d'actes. Les pensionnaires sont exposés à ces actes parce qu'ils sont obligés de recevoir de l'aide pour combler leurs besoins fondamentaux. Lorsque ces besoins ne sont pas comblés, pour quelque raison que ce soit, les pensionnaires se sentent négligés.

La violence et la négligence sont aussi perçues comme résultant d'un sentiment de dévalorisation, de l'obligation d'abandonner des habitudes de vie ou des effets personnels pour respecter les règlements rigides auxquels le personnel et les établissements sont assujettis. La violence et la négligence sont le résultat ultime du manque de personnel, de l'emploi de travailleurs non qualifiés et des attitudes condescendantes ou négatives manifestées par toutes les personnes concernées.

En raison de la complexité de ce qui est perçu comme de la violence ou de la négligence, et de notre incapacité à protéger les personnes contre des actes criminels, délibérés et imprévus, il est probablement impossible d'en arriver à un milieu totalement exempt de violence pour qui que ce soit. Néanmoins, nous devons absolument nous efforcer d'établir une politique de tolérance zéro à l'égard des actes de violence et des mauvais traitements. À cette fin, les pensionnaires, le personnel, les familles, les bénévoles et la collectivité en général doivent continuellement interagir et communiquer les uns avec les autres, car nous sommes tous en partie responsables du problème et de la solution.

Nous croyons que la solution au problème de la violence et de la négligence dont sont victimes les personnes âgées dans les établissements de SLD doit être axée sur les pensionnaires mêmes. Ce qui n'atténue aucunement le fait que les actes de violence et de négligence peuvent toucher n'importe qui. Ils peuvent être perpétrés par les pensionnaires mêmes, les familles, le personnel de première ligne
Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
et les administrateurs, les bénévoles et d'autres personnes. Qui plus est, il peut souvent s'agir de gestes réciproques commis pour de nombreuses raisons telles que de simples malentendus. Les pensionnaires eux-mêmes ont signalé que les actes de violence peuvent résulter de l'agressivité que les pensionnaires manifestent envers le personnel.

La présente monographie porte sur l'amélioration de la vie des personnes âgées vivant dans les établissements de SLD en abordant le problème de la violence et des mauvais traitements de leur point de vue. Ce faisant, par l'intermédiaire de politiques et de procédures efficaces et adaptées, de programmes de sensibilisation et de formation efficaces, et de la création d'un milieu de respect et de soutien, nous poursuivrons notre progression vers l'établissement d'un milieu accueillant pour tous, c'est-à-dire pour les personnes qui vivent, travaillent ou se rendent en visite dans les établissements de SLD.

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Bibliographie

Beaulieu, M. et Bélanger, L. Intervention dans les institutions de soins de longue durée concernant les mauvais traitements à l'endroit des personnes âgées, 1995. Dans Association canadienne de gérontologie, Mauvais traitement auprès des personnes âgées: stratégies de changement (p. 4964). Montréal, QC: Éditions Saint-Martin.

Bélanger, L. The Types of Violence the Elderly Are Victims Of: Results of a Survey Done with Personnel Working with the Elderly, 1981. Document présenté à la 3e Réunion scientifique annuelle de la Gerontological Society of America. Toronto (Canada).

Bélanger, A. & Dumas, J. Rapport sur l'état de la population du Canada, 1997: effets de l'entourage des personnes âgées sur leur condition socioéconomique, 1997. Ottawa: Statistique Canada, no de catalogue 91-209-XPF.

Division de la santé mentale, Santé Canada. Les mauvais traitements et la négligence envers les personnes âgées en milieu institutionnel: Bibliographie commentée, 1994. Ottawa: Ministre d'Approvisionnements et Services Canada.

Kozak, J.F, Elmslie, T. & Verdon, J. «Prevalence and incidence of abuse and neglect: National and international perspective», 1985. Dans MacLean, M. (éd.), Abuse and Neglect of Older Canadians: Strategies for Change. Toronto: Thompson Educational Publishing Inc., 175-190.

MacLean, M. (éd.). Abuse and Neglect of Older Canadians: Strategies for Change, 1995. Toronto: Thompson Educational Publishing Inc.

Ontario Nursing Association College. Report on Abuse of the Elderly, 1993. Toronto.

Pillemer, K. & Moore, D.W. «Abuse of patients in nursing homes: Findings from a survey of staff», 1989. Gerontologist, 29(3), 414-320.

Shell, D.J. Protection des personnes âgées: étude sur les personnes âgées maltraitées, 1982. Rapport du Conseil manitobain sur le vieillissement. Winnipeg: Association de gérontologie du Manitoba.

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
Spencer, C. Les mauvais traitements et la négligence envers les personnes âgées en milieu institutionnel, 1994. Ottawa: Division de la santé mentale, Direction des services de la santé, Santé Canada.

Quand chez soi n'est pas un chez-soi
Annexe A 

Structure du projet de Prévention des
mauvais traitements dans les établissements
de soins de longue durée

Les deux projets Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée ont été financés par les organismes suivants de Santé Canada:

Le projet Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée a été financé par Nouveaux Horizons: Partenaires des aînés, Santé Canada.

Le volet Formation des formateurs du projet Prévention des mauvais traitements dans les établissements de soins de longue durée a été financé par le Fonds pour la santé de la population, Santé Canada.

Les établissements responsables de la coordination des projets étaient les suivants:

Établissement central

  • Département de recherche
  • Service de santé des Sœurs de la Charité d'Ottawa Inc.
  • 43, rue Bruyère
  • Ottawa (Ontario)
  • K1N 5C8

Établissements régionaux

ColombieBritannique St. Vincents' Hospitals, Vancouver

Manitoba Riverview Health Centre, Winnipeg

Québec Regroupement des Trois Rives, Vaudreuil

Terre-Neuve Hoyles-Escasoni Complex, St. John's

Directeur des recherches

Jean Kozak

Coordonnatrice nationale du projet

Teresa Lukawiecki

Adjoint aux recherches

David Dalle

Mauvais traitements et négligence dans les établissements de soins de longue durée
Coordonnateurs/formateurs locaux

Colombie-Britannique Pearl McKenzie, Jacqueline Senning

Manitoba Elizabeth McKean

Ontario Teresa Lukawiecki

Québec Carole Deschamps, Jocelyne Marion

Terre-Neuve Theckla Lundin

Comité directeur national:

Le Comité directeur national chargé de surveiller les projets était composé des membres suivants:

Marie Beaulieu Elliot Paus Jennsen Jacqueline Senning

Lise Bélanger Jean Kozak Joan Simpson

Joan Bell Kirby Kranabetter Michael Stones

Elizabeth Boustcha Teresa Lukawiecki Arthur Sullivan

Thérèse Darche Theckla Lundin Judith Wahl

Carole Deschamps Ellen McDowell Rosemary Williams

Irene Ens Ellizabeth McKean Ruth Williams

Kathleen Haley Pearl McKenzie Lill Ziegler

Joan Harding Leone Perron

Cora Hinds Randy Romain

Coordonnateurs locaux

Carole Deschamps, Teresa Lukawiecki, Theckla Lundin, Jocelyne Marion, Elizabeth McKean et Pearl McKenzie.

Chefs de projet des établissements de coordination

Colombie-Britannique St. Vincents' Hospitals, Vancouver, Jacqueline Senning

Manitoba Riverview Health Centre, Winnipeg, Elizabeth Boustcha

Ontario Service de santé des Sœurs de la Charité d'Ottawa, Ottawa, Jean Kozak

Québec Regroupement des Trois Rives, Vaudreuil, Lise Bélisle

Terre-Neuve Hoyles-Escasoni Complex, St. John's, Anne Morrison/Pat Amos

Établissements d'accueil

Nous tenons à remercier les 40 établissements répartis à l'échelle du pays qui ont généreusement accepté d'offrir les ateliers de formation chez eux, contribuant ainsi à la réussite des ateliers de formation des formateurs.
Quand chez soi n'est pas un chez-soi