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CCA Bulletin 31/07

Ottawa, le 29 août 2007

 

Concentration des médias : qui contrôle quoi ?

Les faits en résumé

Cette semaine, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) entreprend une série d’audiences qui toucheront les problématiques de la concentration de la propriété des médias, la propriété mixte des médias et l’acquisition, par des firmes étrangères, d’une partie du système canadien de radiodiffusion. Avec l’avancement mondial des nouvelles technologies dans les secteurs de la radiodiffusion et des télécommunications, d’autres pays ont réagi à de tels défis en élaborant de nouvelles politiques et cadres de fonctionnement. La CCA rend public aujourd’hui un bref document de recherche soulignant les solutions européennes, australiennes et celles d’autres pays.

 

À l’ordre du jour du CRTC

Tout d’abord, le CRTC entendra Rogers Media, dans le cadre de sa proposition d’achat des stations Citytv situées à Toronto, Calgary, Edmonton, Vancouver et Portage la Prairie. Cette proposition fait suite à la décision du CRTC, plus tôt cet été, de rejeter la demande d’achat proposée par CTVglobemedia, dans le cadre de l’achat des actifs de CHUM Limited.  Le CRTC a alors jugé que, possédant déjà des stations dans chacun de ces marchés, l’achat de Citytv constituerait une violation de sa politique de propriété commune. Comme Rogers possède déjà d’importants intérêts dans la câblodistribution,  les télécommunications, la publication, la radiodiffusion ethnique et en services de télévision spécialisés, son entrée dans le monde de la télédiffusion conventionnelle soulève plusieurs questions au sujet de la propriété mixte et de l’intégration verticale entre les radiodiffuseurs et les distributeurs et des conséquences pour la production, la promotion et la distribution de contenu d’expression culturelle canadienne.

 

Ensuite, dès le 5 septembre, la Commission tiendra des audiences portant sur la proposition de CanWest Media d’acquérir Alliance Atlantis Communications. Comme la majeure partie des fonds pour le capital actions et pour le financement de la dette provient de la firme bancaire américaine Goldman Sachs and Company, plusieurs observateurs sont d’avis que cette offre d’achat viole les principes énoncés dans le Règlement sur la propriété et le contrôle des entreprises de télécommunications canadiennes qui stipule que le secteur de la radiodiffusion doit demeurer de propriété canadienne et sous contrôle canadien effectif. En plus d’acquérir l’imposant réseau d’Alliance Atlantis dans les secteurs de la télévision numérique et des services spécialisés, cette transaction comprend la prise de contrôle du système de distribution d’Alliance Atlantis, lequel renferme le plus grand inventaire des films et émissions de télévision de langue anglaise dont la plupart ont été produits avec des fonds canadiens d’investissement publics et autres. Selon des sources bien informées, l’audience du CRTC dans ce dossier serait reportée en novembre et la période de commentaires réouverte brièvement afin de permettre d’intervenir sur des nouveaux documents cruciaux déposés par CanWest après la date de fermeture de cette étape du processus réglementaire.

 

Enfin, à la mi-septembre, le CRTC tiendra les très anticipées audiences sur l’impact de la concentration milieu de la radiodiffusion sur la diversité des voix dans ce système. Le CRTC évaluera l’opportunité de modifier les règlements concernant la propriété commune, l’intégration verticale, la propriété mixte incluant les soumissions des nouveaux médias et la concentration des médias.

 

Ces audiences du CRTC généreront un intérêt considérable, avec les milliers d’interventions écrites déposées devant la Commission reflétant une riche diversité d’approches. Vous retrouverez les interventions de la CCA à notre site Web (www.ccarts.ca)

 

La politique de radiodiffusion -  La tempête parfaite : un compte-rendu des politiques de radiodiffusion de quelques pays sélectionnés

 

Rédigé pour la CCA, par Susan Deer, étudiante du département de droit de l’Université d’Ottawa, en collaboration avec Garry Neil de Neil, Craig and Associates ce rapport décrit l’approche adoptée par différents pays dans des situations similaires. Voici un bref aperçu du document.

 

Europe

La Commission européenne et le Parlement européen ont adopté de nouvelles directives pour les Services de médias audiovisuels sans frontières. Les nouvelles directives devraient prendre effet d’ici la fin de 2007 et les États membres disposeront alors de 24 mois pour transposer les nouvelles dispositions dans leur droit national.

 

Les directives englobent l’Internet et les services sur demande en créant deux classes pour la production audiovisuelle : « linéaire » et « non linéaire ». Les deux types de production se différencient  sur la base de la dichotomie « push-pull », le type linéaire (ou push) permettant  de regarder les programmes de manière simultanée sur la base d’une grille de programmes établie ; le non linéaire (pull) permet au consommateur de choisir de regarder un programme sur la base d’un catalogue de programmes.

 

La Commission a l’intention de limiter la réglementation aux services médias « en compétition avec la télédiffusion », et en conséquence, le contenu produit par les individus n’ayant aucune visée pécuniaire,  incluant les sites Web privés, sont exclus. La règlementation visera la production linéaire et non linéaire, mais la portée de la réglementation sera différente pour chacune.

 

Le règlement actuel stipulant que la proportion de contenu européen doit compter pour au moins la moitié de toute la diffusion télévisuelle et que 10 % du temps de diffusion doit être consacré à la production européenne indépendante a été préservé et s’appliquera à toute programmation « linéaire », quelle que soit la méthode de distribution. Les nouvelles directives modifient également les règles s’appliquant aux communications commerciales audiovisuelles incluses dans les services linéaires..

 

Bien que les quotas de contenu européens ne sont pas obligatoires pour les services non linéaires, les pays membres disposent d’un large pouvoir discrétionnaire quant aux mesures à prendre afin d’assurer la disponibilité d’un contenu européen dans le système de distribution non linéaire.

 

Les pays membres doivent restreindre l’accès au contenu préjudiciable, qu’il soit distribué par des services linéaires ou non linéaires.  Le contenu préjudiciable comprend les programmes pouvant sérieusement nuire au développement physique, mental ou moral des mineurs, et en particulier celui contenant de la pornographie ou de la violence gratuite. Il sera également interdit d’inciter à la haine sur la base de discrimination sexuelle, raciale, ethnique, de religion, d’invalidité, d’âge ou d’orientation sexuelle.

 

La position de l’Europe et de la protection d’un quota européen dans le cadre des services de radiodiffusion diffusés par Internet ou par téléphone cellulaire n’est pas limpide. Quoique les nouvelles directives définissent les services linéaires comme comprenant les services disponibles sur une base de grille horaire (livrés) via les dispositifs traditionnels tels que la télévision, l’Internet et les téléphones cellulaires, la Commission européenne insiste sur le fait qu’Internet ne peut être soumis à des quotas puisque la distribution est tributaire des décisions prises par l’utilisateur.

 

Australie

Ces dernières années, l’Australie a restreint la diffusion de matériel pouvant offenser un adulte raisonnable  et pour protéger les enfants. Les codes développés dans ce cadre législatif s’applique tant à Internet qu’au « contenu mobile ». Suite à des plaintes, l’Autorité australienne des communications (Australian Communications and Media Authority) peut ordonner au fournisseur de service Internet l’utilisation d’un filtre restreignant l’accès au matériel jugé offensant.

 

Le gouvernement australien a aussi instauré des mesures moins restrictives quant à la propriété étrangère en radiodiffusion et a amendé les règlements limitant la propriété mixte des médias.

 

Dans le case de la propriété étrangère, le gouvernement a l’intention d’éliminer cette année de sa loi sur la radio télédiffusion (Broadcasting Services Act 1992) les règlements spécifiques s’appliquant aux médias. L’argument mis de l’avant pour justifier cet amendement est que comme ce secteur continue d’être considéré d’intérêt national, il reste au gouvernement via les lois et politiques réglementant l’investissement étranger suffisamment d’instruments pour assurer un rôle de gardien du bien public.

 

En ce qui concerne la propriété mixte des médias,  l’Australie a développé un système de pointage contrôlant la propriété mixte des médias. Selon un article publié dans le Globe and Mail du 6 août 2007, ce système serait déjà en place.

 

Le système de pointage fonctionne comme suit : chaque média dans un certain marché, incluant les journaux, les stations de télévision commerciales et les stations de radio, vaut un point. Si une entreprise possède plusieurs médias, alors la totalité de ceux-ci vaut un seul point. Si, dans un marché en particulier, l’on retrouve moins de cinq (5) points, i.e. moins de propriétaires différents, l’on juge alors que ce marché possède un « niveau inacceptable de diversité médiatique » et l’Autorité australienne peut alors prendre les mesures appropriées afin de corriger la situation en imposant des restrictions aux détenteurs de permis. Dans un marché plus petit, hors des métropoles, le niveau acceptable est de quatre (4) points.

 

De plus, est aussi considéré comme inacceptable le fait qu’une entité puisse être propriétaire d’une station de télévision, d’une station de radio et d’un journal, dans un même marché. L’organisme régulateur a le pouvoir d’imposer des mesures préventives dans les marchés qu’il juge à risque d’une trop grande concentration de propriété des médias.

 

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