Bulletin de la CCA 50/06
Ottawa, le 30 novembre
2006
«
Avantage Canada » et les questions de juridiction entre
Ottawa et les provinces : qu'est-ce que cela pourrait
signifier pour les arts et la culture?
Les
faits en résumé
Le
ministre des Finances, l'honorable James Flaherty, a présenté
sa Mise
à jour économique et financière 2006
au Parlement la semaine dernière. Le ministre
a présenté, dans un document intitulé
« Avantage
Canada : Bâtir une économie forte pour
les Canadiens », les plans financiers à
long terme de son gouvernement pour gérer les finances
de notre pays.
«
Avantage Canada » contient l'engagement de rembourser
la dette nette du Canada d'ici 2021. Ce plan inclut les dettes
des administrations provinciales et territoriales et la gestion
diligente du Régime de pensions du Canada et du Régime
de rentes du Québec. Et, pour rendre la chose plus
alléchante pour les Canadiens, le ministre s'engage
à affecter à des réductions d'impôt
sur le revenu des particuliers les économies en frais
d'intérêt du remboursement de la dette. Si le
gouvernement réalise des excédents imprévus,
cela permettra d'accélérer la réduction
de la dette et de diminuer davantage l'impôt sur le
revenu des particuliers. Traduction : il n'y aura pas d'investissement
financier nouveau au-delà des dépenses prévues
actuellement et des exercices ultérieurs de réaffectation
détermineront comment l'argent fédéral
sera affecté en fonction des priorités du gouvernement.
Pour
réaliser cet objectif, le gouvernement « se concentrera
sur ce qu'il fait de mieux. Il dépensera de façon
responsable, mènera des activités efficientes,
produira des résultats efficaces et rendra des comptes
aux contribuables. En plus, il « limitera l'utilisation
de son pouvoir de dépenser et concentrera ses nouvelles
dépenses dans des secteurs relevant de sa responsabilité. Le ministre répète l'engagement du
gouvernement de se concentrer sur les secteurs relevant de
la compétence fédérale dans le document,
« Avantage Canada, dont certains ont
dit qu'il s'agissait du plan financier le plus exhaustif du
Canada depuis des décennies.
L'utilisation
limitée du pouvoir de dépenser et l'accent mis
sur les secteurs relevant de la compétence fédérale
pourrait bien être le prélude d'une discussion
beaucoup plus large pour déterminer où le gouvernement
du Canada concentrera ses engagements politiques et financiers
au palier fédéral au cours des années
à venir. Au fil de l'histoire, les gouvernements fédéraux
ont utilisé le pouvoir fédéral de dépenser
pour financer des secteurs relevant de compétence provinciale
ou partagée. Les divers débats constitutionnels
des années 1990 ont également vu le gouvernement
progressiste-conservateur offrir de limiter le pouvoir fédéral
de dépenser et de transférer aux provinces et
aux territoires les responsabilités qu'il avait assumées
dans des secteurs relevant de compétence provinciale.
«
Avantage Canada » soulève certaines
questions intéressantes sur la participation du gouvernement
fédéral aux arts et à la culture. Compte
tenu de la faible priorité que le secteur s'est toujours
vu accordée, et si tout l'argent nouveau doit provenir
de réaffectations à l'intérieur d'un
budget fédéral qui diminue, quelle est la possibilité
que le Conseil des Arts du Canada, Radio-Canada, les musées,
etc., seront financés convenablement? Ces questions
sont encore plus troublantes du fait qu'elles sont éclairées
par une philosophie de petit gouvernement central et de transfert
des responsabilités aux provinces, ainsi que par une
préférence marquée pour les mesures fiscales
plutôt que pour les investissements directs.
Pour
en savoir davantage
Pour
faire tout ce qui est prévu dans « Avantage Canada, il est clair que les dépenses vont être
examinées de très près. Les décisions
seront prises au cas par cas, par l'entremise d'un nouveau
Système de gestion dans lequel les nouvelles dépenses
seront examinées à la fois par le Cabinet et
par le Conseil du Trésor : chaque programme de
financement sera d'abord examiné par son ministère,
ces examens seront ensuite évalués par le Conseil
du Trésor et le Cabinet en fera finalement un examen
rigoureux « pour veiller à ce que les dépenses
soient conformes aux priorités des Canadiens et qu'elles
permettent au gouvernement d'assumer avec efficacité
et efficience ses responsabilités. Le gouvernement
s'engage aussi à garder le taux de croissance des dépenses
de programmes, en moyenne, sous le taux de croissance de l'économie.
Qu'est-ce
que tout cela peut signifier pour le secteur des arts et de
la culture du Canada? La moindre discussion des secteurs relevant
de la compétence fédérale nous renvoie
directement à la Loi
sur l'Amérique du Nord britannique - la Constitution
canadienne. Le document d'assise qu'est la Loi constitutionnelle
énonce les secteurs relevant de la compétence
fédérale à l'article 91 et ceux qui relèvent
de la compétence des provinces à l'article 92.
D'autres secteurs relevent de la compétence fédérale,
comme la signature des accords internationaux, résultat
de décisions ultérieures de la Cour suprême
du Canada.
Il
est frappant de constater en lisant ces
deux articles de la Loi que la culture n'y est
pas mentionnée. Les compétences fédérales
en matière de radiodiffusion, de droits d'auteur et
de brevets d'invention et de découverte sont incluses,
mais il n'y a rien à propos des arts, du patrimoine
et d'autres secteurs où le gouvernement fédéral
a investi des ressources financières au fil des ans.
La
question centrale est de savoir comment le gouvernement entend
traiter la question des arts, de la culture et du patrimoine.
Va-t-il continuer de défendre un rôle important
du gouvernement fédéral dans la promotion et
le soutien de ces secteurs vitaux, ou va-t-il s'en défaire
en les remettant aux provinces? Ce sont des enjeux que la
Conférence canadienne des arts surveillera de très
près à mesure que le Système de gestion
des dépenses et « Avantage Canada »
vont se développer.
La
CCA continuera entre-temps de surveiller la situation et d'étudier
les interprétations constitutionnelles pour assurer
que toutes les responsabilités qui pourraient être
transférées aux provinces ou annulées
le seraient conformément aux meilleurs intérêts
des droits des Canadiens en matière de culture. Et
nous saisirons évidemment toutes les occasions d'avancer
la cause d'un financement adéquat des arts et de la
culture par l'entremise d'une gamme de mécanismes nécessaires,
que ce soit par le biais d'un financement direct, de mesures
d'imposition, de la réglementation ou du régime
concernant la proprié étrangère.
Qu'est-ce
que je peux faire?
Le
ministre Flaherty a annoncé la tenue de consultations
en ligne (qui se termineront le 18 décembre 2006!).
Il invite les Canadiens à commenter la « création
de cinq avantages canadiens qui nous aideront à améliorer
notre qualité de vie et à réussir sur
la scène mondiale ».
La
CCA interviendra évidemment dans ce processus démocratique
et nous encourageons cordialement tous nos membres
et partisans à le faire aussi et à faire connaître
leur opinion. Nous devrions publier l'intervention
de la CCA assez rapidement pour que vous puissiez l'utiliser
aussi dans votre propre intervention.
Par
conséquent, polissez vos arguments en faveur d'un rôle
soutenu du gouvernement fédéral dans les secteurs
des arts, de la culture et du patrimoine et soyez aux aguets.
Les temps qui viennent risquent d'être intéressants!
Nous devrons être prêts à intervenir de
façon cohérente et à point nommé
quand il faudra discuter de la grande question du soutien
financier et politique soutenu des arts, de la culture et
du patrimoine au Canada par le gouvernement fédéral.
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