1999
Les marchés aux puces peuvent receler des trésors

Augustin Lebourdais.
Augustin Lebourdais
Collection Jean-Marc Cormier
photographie : n&b ; 28 X 35,5cm

En 1999 le Centre d'archives régional des Îles enrichi sa collection en faisant l'acquisition de trois registres reliés écrits par Augustin Lebourdais. Le Centre d'archives régional des Îles acquiert ces documents d'un philatéliste ayant trouvé ces registres parmi d'autres documents dans un marché aux puces. N'ayant aucun intérêt pour leur contenu et prenant conscience qu'ils ont été rédigé aux Îles-de-la-Madeleine entre 1890 et 1920, ce collectionneur accepte de les céder au Centre d'archives régional des Îles.

Deux des trois registres sont la compilation des transactions effectuées par M. Augustin Lebourdais au moment où il travaille pour le gouvernement fédéral comme télégraphiste aux Îles-de-la-Madeleine. Le troisième, le plus volumineux contient la correspondance d'affaires et des lettres personnelles. Une trouvaille originale qui servira sûrement à documenter une page de l'histoire des Îles-de-la-Madeleine et de la région.

Augustin Lebourdais

L'auteur de ces manuscrits, Augustin Lebourdais, que l'on prénomme " Auguste ", né en 1844, à l'Islet près de Québec est le fils de Jean-Baptiste Lebourdais et de Pauline Bernier. Il arrive aux Îles-de-la-Madeleine en 1871. Âgé de 27 ans, il est le premier maître sur le "SS Wasp" un brick de 443 tonneaux qui se dirige vers Bristol avec une cargaison de blé et de bois. Une violente tempête d'automne projete alors le navire sur les dunes du côté nord des Îles-de-la-Madeleine. La quille s'ensable, les vagues qui viennent s'y briser projetent les membres de l'équipage à la mer. Il est le seul rescapé du naufrage du navire s'étant échoué sur la dune du nord près de Pointe-aux-Loups.

Voici le récit du naufrage d'Augustin tel que relaté dans "Capitaines des Hauts Fonds" :

 

" Lebourdais raconte qu'il s'était amarré (attaché) au beaupré sur le pont du gaillard d'avant. En cet endroit, il ne subissait pas l'assaut direct de la vague qui balayait le pont autour de lui. Il passa la nuit entière à regarder le bateau se désintégrer sous l'effet des vagues. À l'aurore, il vit se détacher une grande partie de la poupe et de son couteau crispé entre ses doigts gelés, il coupa la corde qui le retenait au beaupré. Chancelant, il s'agrippa au reste de cette structure jusqu'à la dérive, tandis que d'énormes vagues déferlaient sur lui. Il réussit à atteindre la poupe avant qu'elle se brise et agrippé à elle, il s'éloigna du bateau.

Par deux fois, il fut projeté hors de ce radeau improvisé et par deux fois il réussi à revenir à bord, mais la troisième fois il eut le pied coincé entre deux parties de l'épave et fut entraîné inconscient vers le rivage glacé. L'épave s'immobilisa jusqu'au moment ou une vague la projeta sur le glacier et sous le choc, Lebourdais fut catapulté sur la glace, hors de la portée des vagues.

A demi inconscient, il demeura probablement plusieurs heures sur la banquise, et à son réveil il vit une meule de foin sur la dune voisine et entrepris, misérablement, de se traîner jusque là. Après s'être réchauffé à l'abri du foin, il repartit à la recherche d'un gîte plus confortable, mais ne vit rien. Le sable nu n'offrant pas d'abri pour les intempéries, il revint vers la meule de foin et y creusa un trou pour s'abriter. Épuisé et transi, il sombra dans un profond sommeil. Le lendemain la tempête diminua, la mer devint plus calme, mais le froid persistait. Vers midi quelques Madelinots vinrent examiner l'épave, passant près de la meule de foin mais n'aperçurent pas les jambes à découvert du naufragé qui gisait là.

Lebourdais dormit ainsi dans son misérable gîte, pendant vingt-quatre heures, Et à son réveil ses bottines remplies d'eau étaient gelées et ses jambes aussi. Au loin, au-delà des dunes, il crut entrevoir ce qui semblait être une maison. Gelées ou non ses jambes devaient le porter jusque là. Il était décidé à lutter contre la mort. Et dans l'angoisse de la nuit, il se traîna sur ses jambes de glace. La mer rugissait à droite et à gauche, la cabane était loin…loin…Le froid le pénétrait et ses forces l'abandonnaient. Il tomba et se traîna…se traîna…sa main saisit le bois…hélas! C'était une cabane de pêcheur abandonné.

C'était le grand désespoir, la mort montait lentement de ses jambes, envahissait. Ce qui restait de vivant dans son corps torturé par le froid. Puis, ce fut l'engourdissement, l'inconscience. C'est là dans cette cabane à tous les vents qu'on le trouva au matin, n'ayant plus qu'un souffle de vie." (1)

 

Des gens de Grosse-île le trouve et le transporte au Cap-Vert où on doit lui amputer les deux pieds. Avec la reprise de la navigation au printemps, il regagne Québec, atteint de gangrène on doit alors lui amputer les jambes.

À Québec, il retrouve son cousin qui exerce le métier de télégraphe et qui lui apprend les rudiments de ce métier. En 1881, soit à l'âge de 37 ans il revient s'installer aux Îles-de-la-Madeleine, où il occupe un poste de télégraphiste à Grosse-Île. Il est le premier opérateur de télégraphie de l'archipel et devient également inspecteur des lignes télégraphiques.

Le 19 août 1882, il épouse Émilienne Renaud de Bassin et s'établis à Grosse-Île. En 1889, ils déménagent à Cap-aux-Meules. Augustin Lebourdais et Emilienne Renaud ont 6 enfants, Emma, Joseph, Augustin Jr, Eugénie, Gaudiose, et Alphonse. À l'automne 1919, il tombe gravement malade et décède le 26 février 1920 à l'âge de 76 ans.

1- Landry, Frédéric. Capitaines des hauts fonds. Éditions Garneau, 1973, p. 109-111.

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Dernière mise à jour: 11 mars, 2004
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