Musée des beaux-arts du Canada / National Gallery of Canada

Bulletin 23, 1974

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Résumé

Aspects nationalistes de l'esthétique
de Lawren S. Harris

par Jean-René Ostiguy

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La recherche d'une peinture canadienne de caractère nationaliste a cours à la fin du XIXe siècle, mais elle manque d'optimisme. Au mieux, sous le règne du Canadian Art Club, elle réclame une peinture rurale, pastorale et surtout « pittoresque ». En 1908, toutefois, le critique Mortimer-Lamb propose une idée nouvelle. Il regrette que jusqu'à cette date les paysages du Grand Nord n'aient pas constitué un objet d'intérêt pour aucun peintre. On peut se demander si cette remarque n'a pas influencé Lawren S. Harris et ses amis dans leur projet de faire progresser une esthétique proprement canadienne.

Effectivement, c'est en 1908 que Harris effectue son premier voyage dans le Nord. Puis d'autres suivront, notamment en 1909, puis en 1912, au nord de l'Outaouais, aux limites de l'Ontario et du Québec. Son amour pour les régions nordiques se reflète dans le premier numéro de la revue The Lamps publiée par Arts and Letters Club, de Toronto. C'est là qu'il commence à utiliser un langage d'accent mystique que l'on retrouve dans ses articles ultérieurs. L'artiste ne cessera pas d'être toumenté par l'appel du Nord jusqu'à ce qu'il se rende à quelques centaines de milles du pôle, en 1930.

Harris semble avoir cessé de peindre entre 1931 et 1934. Il devient alors plus actif à la Theosophical Society de Toronto et consacre ses énergies à la synthèse de ses idées philosophiques et religieuses. Ainsi s'explique comment son art possède des ramifications avec une grande variété d'intérêts humains dépassant le cadre du nationalisme canadien proprement dit. Dans une série d'écrits qui débutent en 1923 et se poursuivent jusqu'en 1954, il définit les responsabilités des artistes d'avant-garde en insistant sur l'interdépendance de l'artiste et de la collectivité.

Selon Harris, la collectivité canadienne illustre une race nouvelle, celle des habitants de l'Amérique du Nord. Dès 1914, il a l'intuition du rôle particulier que devra jouer le peuple canadien sur le continent. Il précise sa pensée dans des écrits subséquents où il ne cesse de souligner, quelquefois avec agressivité, les différences qui séparent le Canada de l'Europe. Pourtant, en 1927, il se fait le défenseur d'une exposition à l'Art Gallery de Toronto, The International Exhibition of Modern Art, organisée par la Société Anonyme. Il déclare ne pas craindre que l'avant-gardisme de Kandinsky, de Mondrian, de Picabia ou de Max Ernst ait quelque influence néfaste sur la peinture canadienne. L'entrain des Canadiens, croit-il, est incompatible avec la mélancolie des Européens et leur caractère demeure, somme toute, plus près de celui de leurs voisins du Sud. Tous ces propos s'expliquent à la lumière du long séjour de Harris aux États-Unis.

Le nationalisme de Lawren Harris s'intègre dans le grand ensemble de la collectivité et de la culture nord-américaine et son avant-gardisme prend sa source dans la tradition du mysticisme théosophiste à la fois oriental et européen. Par l'approfondissement de ses propres théories esthétiques au cours des années vingt et trente, Harris obtient une position avantageuse d'où il nous révèle, d'une part, l'universalisme de l'esthétique de sa peinture paysagiste et, d'autre part, les assises de sa longue aventure dans l'art abstrait.

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