Mon Claude chéri...
Ces jours derniers, une de mes amies mit au monde un gros garçon et
à ma grande surprise, quand j'allai la voir, elle m'apprit qu'il
s'appelle Claude-Henri. C'est une coïncidence drôle car elle ne
savait même pas que j'avais un ami de ce nom. Inutile de te dire si je
chéris ce petit Claude-Henri en herbe rien qu'en pensant à
l'autre que j'aime tellement et qui j'en suis sûre, me le rend bien.
Comme on se le prouverait si on était l'un et l'autre. On n'en aurait
jamais assez l'un de l'autre. Ce beau sentiment qui nous unit depuis si
longtemps ne pourrait que se fortifier, s'exalter. Oui, chéri, comme tu
le dis dans ta lettre, tu m'aurais bien gâtée, je n'en doute
guère. Je ne demanderais pas mieux que de répondre à tes
moindres désirs. Entre nous, il n'y aurait pas mieux que de
répondre à tes moindres désirs. Entre nous, il n'y aurait
aucune gêne, aucune réticence. Nos pensées, nos sentiments,
nos coeurs que sais-je encore ? ne feraient de nous qu'un seul et même
être soumis à une seule loi : l'amour.
Comme on se rattrappera dans un avenir heureux. Nous goûterons au
centuple toutes les joies dont ce maudit éloignement et cette non moins
maudite guerre nous privent. Que je serai heureuse d'être ta petite chose
!!... Bon, je m'arrête ici car je sens que je n'aurai plus le
contrôle de ma plume (tant pis pour Mr. le censeur, je lui souhaite
d'avoir dans sa vie un amour tel que le nôtre). Malgré moi, cher
mien, je dois finir ma lettre, mais pas avant que tu ne m'aies prise dans tes
bras pour couvrir d'un réseau de baisers aussi ardents, aussi enivrants
que ceux que je dépose pour toi au bas de cette page.
Écris-moi vite et longuement
Ton invariable
Carmita
[...]
Extrait d'une lettre de Carmita
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