Lois et règlements : l’essentiel

Partie 1 - Cadre général de l’activité législative

Chapitre 1.1 - Choisir les meilleurs outils

Aperçu

Ce chapitre complète la section 2 de la Directive du Cabinet sur l’activité législative, qui prévoit ce qui suit :

La voie législative devrait être strictement réservée aux cas où elle constitue la meilleure solution possible. Il appartient au ministre responsable de démontrer au Cabinet que ce principe a été respecté et qu’il y va de la réalisation des objectifs du gouvernement.

Ce chapitre a pour but d’aider les fonctionnaires à se conformer à cette exigence. Plus concrètement, il poursuit les objectifs suivants :

Les fonctionnaires sont encouragés à aborder la mise en œuvre des objectifs gouvernementaux de façon globale, en se concentrant sur les buts à atteindre et en ne préjugeant pas de l’efficacité d’une technique donnée, par exemple une mesure législative. Et si, après lecture de ce chapitre, on en vient à la conclusion qu’une mesure législative est souhaitable, il faudra s’interroger sur son contenu. On pourra alors consulter la Liste de contrôle pour l’élaboration des instructions de rédaction au chapitre 2.2.

Destinataires

Les responsables de programmes ministériels et leurs conseillers juridiques.

Messages clés


Introduction

Il y a lieu d'examiner soigneusement toute situation qui semble requérir l’attention du gouvernement, de façon à déterminer l'opportunité de l’intervention gouvernementale et, le cas échéant, la forme qu'elle doit revêtir. Pour ce faire, il faut bien définir les objectifs et recenser les meilleures façons de les réaliser. Ce ciblage devrait être fait le plus tôt possible dans le processus d’élaboration des orientations. Voici quelques questions utiles pour qui se prête à cet exercice :

Le processus d'appréciation ne suit pas nécessairement l’ordre dans lequel ces questions sont énoncées. Il peut être nécessaire de revenir sur les réponses obtenues à l’une ou l’autre des étapes du processus à la lumière de faits nouveaux.

Pour obtenir des réponses utiles, il importe avant tout de mener les consultations appropriées.

Quelle est la situation?

Il s’agit avant tout de faire ressortir les caractéristiques de la situation qui peut requérir l’attention du gouvernement. Cette situation peut se présenter sous la forme d’un problème à régler, auquel cas il importe de remonter à la cause véritable du problème et de ne pas tenter de le définir par ses symptômes.

La situation peut également donner l’occasion au gouvernement d’intervenir de façon créative ou positive, par exemple en célébrant un fait d'importance nationale ou internationale, plutôt que de se contenter de répondre à un problème.

La définition d’une situation passe souvent par la description de comportements, qu’ils soient observables ou à prévoir. Ces comportements peuvent être actifs (faire quelque chose) ou passifs (ne pas faire quelque chose). L’approche axée sur les comportements consiste, entre autres, à déterminer :

Quels sont les objectifs poursuivis et les résultats escomptés?

Pour répondre adéquatement à cette question, il importe de définir le plus concrètement possible les objectifs en précisant quels résultats précis sont escomptés. Il est vrai qu’objectifs et résultats escomptés vont de pair. Il existe toutefois une distinction.

L'objectif pourrait consister, par exemple, à rendre une activité plus sûre, alors que le résultat escompté serait de réduire de 30 % le nombre d'accidents attribuables à cette activité.

Autre exemple. L’objectif pourrait être d’accroître les compétences en technologie de l’information au Canada alors que le résultat escompté pourrait être d’accroître de 500 le nombre d’immigrants possédant ces compétences au cours des deux prochaines années.

Le gouvernement du Canada a-t-il un rôle à jouer?

Il faut ensuite se demander si l'intervention du gouvernement est possible et souhaitable. La Constitution limite les pouvoirs du gouvernement de diverses façons :

Les orientations en cause devraient être considérées dans la perspective globale du programme politique du gouvernement. Ainsi, la compatibilité de l’intervention avec ce programme et la façon dont le gouvernement aborde les relations fédéro-provinciales devraient être prises en compte.

Enfin, d'un point de vue purement pratique, le gouvernement dispose de ressources limitées et ne peut manifestement pas résoudre tous les problèmes; d’autres parties sont peut-être mieux à même d’atteindre les objectifs poursuivis.

Si le gouvernement devait intervenir, quel rôle devrait-il jouer? Devrait-il, par exemple, jouer un rôle de leader, agir en partenariat avec d’autres intervenants ou se contenter de stimuler ou de faciliter certaines mesures?

Quels outils d’intervention permettent d’atteindre les résultats escomptés?

Pour répondre à cette question, il est utile d’examiner l’éventail des outils d’intervention possibles, qu’on peut classer en cinq catégories :

Diffusion d’information

L’information peut être un outil très efficace. Les gens ajustent leur comportement en fonction de l’information dont ils disposent. En leur communiquant une information donnée, on peut influencer leur comportement; voici quelques exemples :

Renforcement des capacités

Le renforcement des capacités consiste pour les individus et les organisations à développer leur aptitude à mettre en oeuvre les objectifs politiques du gouvernement. Plus que la simple communication d’information, il suppose la transmission à ces personnes et organisations des moyens de développer cette aptitude, par exemple :

Outils de nature économique

Bon nombre d'outils sont de nature économique. Ils influencent les comportements des individus dans toutes leurs activités économiques; pensons notamment aux contributions, redevances et affectations de fonds publics. Mentionnons aussi la création de droits exclusifs ou limités tels les permis, les licences et les contingents de production qui, parce que négociables, sont susceptibles d'appréciation.

L’imposition d’obligations en matière d'assurance constitue également un outil de nature économique en ce qu’elle peut, par exemple, forcer une entreprise à évaluer et à réduire les risques liés à l’exercice de ses activités et à s’assurer que les prix qu'elle pratique couvrent les frais d’assurance et autres mesures de prévention.

Contributions et redevances

L’objet premier des contributions et redevances consiste à prélever des fonds. Toutefois, il s’agit aussi d’outils permettant d’influencer les choix concernant les activités auxquelles ils s’appliquent. C’est dans ce sens que les contributions et redevances peuvent s’avérer utiles dans l’atteinte des objectifs gouvernementaux; voici quelques exemples :

Pour plus d’information concernant les frais d’utilisation et le recouvrement des coûts, on peut consulter les documents suivants du Secrétariat du Conseil du Trésor :

Affectations de fonds publics

Le gouvernement peut intervenir de façon ciblée en injectant des fonds dans un domaine d’activité. Il s’agit d’un mécanisme permettant d’encourager certains comportements qui correspondent aux objectifs poursuivis par le gouvernement; par exemple :

Assujettissement à des règles

La réglementation, au sens large, consiste à dicter aux administrés la façon d'exercer leurs activités. Il existe plusieurs types de règles. Ainsi, elles peuvent varier dans leur façon d'influencer les comportements :

Les règles ayant force de loi trouvent généralement leur expression dans les obligations, les interdictions ou les droits qu'elles établissent; voici quelques exemples :

Les règles présentent différents niveaux de détail. Par exemple :

Enfin, mentionnons la technique rédactionnelle qu’est l’incorporation par renvoi. Cette technique permet de rédiger des règles (lois, règlements) de façon à incorporer – par simple renvoi – d’autres règles (lois ou règlements, mais aussi des normes industrielles, etc.), leur donnant ainsi force de loi sans avoir à les reproduire textuellement. Cette technique permet, entre autres, d’harmoniser les lois de plusieurs législatures, notamment si elles incorporent toutes les mêmes règles. Il faut toutefois noter que cette technique, surtout dans le contexte réglementaire, est assujettie à plusieurs contraintes juridiques, telles les exigences de publication des lois dans les deux langues officielles et d’accès aux textes législatifs.

Pour plus de renseignements concernant les types de règles, on consultera la liste des publications figurant à la fin de ce chapitre, de même que la Liste de contrôle pour l’élaboration des instructions de rédaction au chapitre 2.2.

Structures organisationnelles

Les structures organisationnelles contribuent souvent de façon sensible à l’atteinte des objectifs. Elles sous-tendent l’emploi d’autres outils en permettant de les administrer efficacement, par exemple :

Pour plus d’information concernant les structures organisationnelles, consulter les Modes d’exécution des programmes – politiques et programmes du Secrétariat du Conseil du Trésor, à : http://www.tbs-sct.gc.ca/Pubs_pol/opepubs/TB_B4/siglist_f.html ou la page d’accueil de la Division de la diversification des modes de prestation de services, à : http://www.tbs-sct.gc.ca/asd-dmps/ .

Combinaison d’outils et moment de l’intervention

Ces outils ne sont pas nécessairement exclusifs les uns des autres. Selon les circonstances, ils peuvent aussi se compléter. Par exemple, l’information est essentielle au fonctionnement d’une organisation et les structures organisationnelles sont souvent nécessaires à la mise en œuvre de règles de conduite comme les lois ou les règlements qui, à leur tour, peuvent être nécessaires à la création d'un organisme.

Le choix des outils d’intervention appropriés est aussi fonction du moment. Certains outils sont plus efficaces au début du processus de mise en œuvre des orientations alors que d’autres peuvent n’être requis que plus tard, selon les circonstances. Par exemple, la mise en œuvre d'une mesure législative est souvent précédée d'une campagne d'information qui, si elle est efficace, peut même rendre la mesure superflue.

Qu’implique le recours à ces outils d’intervention?

Il s'agit de déterminer les répercussions d’ordre juridique et organisationnel du recours à ces outils d’intervention, ainsi que les conditions processuelles de leur fonctionnement. Il importe d'apprécier les éléments qui suivent à la lumière du rôle que le gouvernement est à même de jouer, seul ou de concert avec d’autres ordres de gouvernement ou le secteur privé.

Il importe de consulter un conseiller juridique ministériel pour l’analyse juridique de la question.

Quels seraient les effets du recours à ces outils?

Il s'agit ici de prévoir le résultat du recours à ces outils, notamment :

Les règles de droit ont leurs forces et faiblesses et il importe d'en tenir compte au moment de décider d'y recourir. En raison de leur nature contraignante et de la possibilité d'en forcer l'exécution devant les tribunaux, elles permettent de venir à bout des obstacles qui entravent l’atteinte des résultats escomptés. Elles risquent toutefois de susciter l'hostilité et d’étouffer toute initiative qui aurait permis de réaliser les objectifs poursuivis. Il faut par ailleurs garder à l’esprit qu’une interdiction ou une obligation, même couchée dans un texte législatif, n’a pas toujours pour effet de modifier le comportement des gens de la façon escomptée.

Comment mesurer l’efficacité de ces outils d’intervention?

Il ne suffit pas de choisir les outils d’intervention et de les mettre à l'oeuvre. Il faut encore s’assurer d’un moyen d’en déterminer l’efficacité par l’établissement d’objectifs précis et mesurables et un contrôle adéquat des étapes clés. Le suivi devrait être continu et prendre en compte les solutions apportées par d’autres gouvernements à des situations semblables. Cette démarche est nécessaire non seulement pour savoir s’il faut poursuivre ou interrompre l’emploi des outils retenus, mais aussi pour étayer les choix futurs.

Quels outils devraient être retenus?

L’étape suivante consiste à choisir les outils les plus efficaces pour réaliser les objectifs. Force est de constater qu’un seul outil suffit rarement et que, dans la plupart des cas, il faudra opter pour une combinaison d’outils, laquelle pourra d’ailleurs varier selon les étapes de mise en œuvre des orientations. Ces outils devraient être choisis au terme d’une analyse coûts-avantages et au regard des réponses aux questions formulées précédemment.

Le moment paraît aussi bien choisi pour réexaminer l'opportunité de l'intervention du gouvernement fédéral. Peut-être qu’aucun outil d’intervention ne devrait être retenu dans les cas suivants :

Information complémentaire

Pour plus d’information sur les diverses méthodes de mise en œuvre des objectifs gouvernementaux, on peut consulter les ouvrages suivants :

 

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