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Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente (CCERI)
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 * Mémoires
Pratiques de gestion de la réglementation au sein de l'Union Européenne

Ce profil des approches à la gestion de la réglementation au sein de l'Union Européenne fait partie d'une série de courts articles consacrés aux pratiques en vigueur dans certains pays de l'OCDE et préparés pour le Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente du Canada. En plus de profils individuels, la série compte également un sommaire des principales tendances et innovations en matière de gestion de la réglementation, basé sur une étude de la situation en Australie, en Finlande, aux États-Unis, au Royaume-Uni et dans les pays de l'Union européenne.

Préparé par The Regulatory Consulting Group Inc. pour
le Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente
Ottawa (Canada)
Juin 2003

ÉVALUATION DE LA GESTION DES TEXTES ÉGLEMENTAIRES AU SEIN DE L'UNION EUROPÉENNE

A. INTRODUCTION

Le processus d'intégration européenne a débuté au mois de mai 1950, lorsque la France a proposé de réaliser les premières assises d'une Fédération européenne qui comprenait à l'origine la Belgique, l'Allemagne, la France, l'Italie, le Luxembourg et les Pays Bas. Aujourd'hui, l'Union européenne compte quinze États membres. Le Danemark, l'Irlande et le Royaume Uni s'y sont joints en 1973, la Grèce en 1981, l'Espagne et le Portugal en 1986, et l'Autriche, la Finlande et la Suède en 1995. D'ici le 1er mai 2004, dix nouveau États membre1 de l'est et de l'ouest de l'Europe s'y joindront. Actuellement, des négociations sont en cours en vue de l'adhésion de deux autres pays2. Aujourd'hui, l'UE compte environ 374 millions de personnes. On en comptera 105 millions de plus à la suite de l'élargissement.

L'Union européenne n'est pas un nouveau super-État se substituant aux États existants, pas plus qu'il n'est comparable à d'autres organisations internationales. Ses États membres délèguent une partie de leur souveraineté aux institutions communes, qui défendent les intérêts de l'ensemble de l'Union pour les questions d'intérêt commun. Toutes les décisions et procédures s'appuient sur les traités de base ratifiés par les États membres. L'approche collective qu'elle a adoptée en vue d'apporter des réformes en matière de réglementation qui soient bien adaptées aux besoins de ses États membres en fait donc un intéressant sujet de recherche, car il s'agit d'une institution susceptible de nous éclairer sur la meilleure façon d'apporter ce genre de réformes au sein d'états fédérés.

B. STRUCTURE DE GOUVERNEMENT ET PROCESSUS DÉCISIONNELS

1. Structure de gouvernement

Il est important de comprendre le fonctionnement et le partage de pouvoirs entre les différentes institutions de l'UE afin de bien saisir comment les décisions sont prises. Les principaux objectifs de l'Union sont les suivants :

  • instaurer une citoyenneté européenne, au moyen de l'établissement de droits fondamentaux pour l'ensemble des membres, de droits liés à la libre circulation et de droits civiques et politiques;

  • garantir liberté, sécurité et justice, par la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures;

  • favoriser le progrès économique et social par la création d'un marché intérieur et d'une monnaie unique, par la création d'emplois et l'établissement d'une politique de développement régionale et de protection de l'environnement;

  • affirmer le rôle de l'Europe sur la scène internationale en favorisant une politique étrangère et de sécurité communes.

Afin d'atteindre ces objectifs, l'Union européenne s'est dotée de cinq institutions principales : le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne, la Commission européenne, la Cour de justice et la Cour des comptes. Les décisions sont prises sur proposition de la Commission européenne au Conseil, qui les fait ensuite approuver par le Parlement.

i) Le Parlement européen

Le Parlement européen comprend 626 représentants élus pour un terme de cinq ans. Le traité de Maastricht, signé en 1992, permet aux citoyens des États membres de voter et de se présenter aux élections peu importe leur lieu de résidence. Le traité d'Amsterdam de 1997 accorde à l'UE des pouvoirs plus étendus. Grâce à ces deux traités, le Parlement européen a cessé d'être une assemblée purement consultative et est devenu un parlement législatif exerçant des pouvoirs semblables à ceux des parlements nationaux. Les membres sont réunis dans l'un de sept groupes politiques actuellement reconnus ou siègent à titre de membres « indépendants ». Le Parlement est dirigé par un président élu. Il partage le pouvoir législatif avec le Conseil dans un processus de « codécision » couvrant les secteurs législatifs suivants : la libre circulation des travailleurs, la création du marché interne, la recherche et le développement technologique, l'environnement, la défense des consommateurs, l'éducation, la culture et la santé. Cependant, le Parlement peut seulement soumettre un avis dans les domaines de la fiscalité et de la révision annuelle des prix agricoles.

ii) Le Conseil de l'Union européenne

Le Conseil est l'organe législatif de l'Union européenne; chaque État membre y est représenté par un ministre qui relève de son Parlement national et peut engager son gouvernement à respecter la législation adoptée par l'Union. Il assure la coordination des politiques économiques générales des États membres. De plus, il conclut, au nom de l'UE, les accords internationaux entre celle-ci et un ou plusieurs États ou organisations internationales. Il partage le pouvoir budgétaire avec le Parlement. Le Conseil se réunit normalement de deux à quatre fois par année, selon l'urgence des points à discuter. Il est dirigé par un président qui est élu pour un terme de six mois parmi ses membres, à tour de rôle.

Les actes législatifs du Conseil peuvent prendre la forme de règlements, de directives, de décisions, de recommandations ou d'avis qui sont préparés par le Comité des représentants permanents (COREPER). Celui-ci se réunit chaque semaine pour coordonner le travail d'approximativement 250 comités et groupes de travail formés de fonctionnaires des États membres. C'est lui qui rédige les avis techniques qui seront utilisés par le Conseil. Il est formé des représentants permanents des États membres et de leurs assistants, et siège à Bruxelles. Le Conseil fait actuellement l'objet de réformes afin d'accueillir les nouveaux membres de l'UE.

iii) La Commission européenne

La Commission européenne comprend vingt membres, y compris le président et les deux vice-présidents, nommés pour un terme de cinq ans par le Parlement européen. Organe administratif de l'Union, elle propose les textes de loi qui sont soumis au Parlement et au Conseil, administre les politiques communautaires et veille au respect du droit communautaire, conjointement avec la Cour de Justice. Représentante de l'Union sur la scène internationale, elle négocie des accords internationaux, essentiellement de commerce et de coopération. Un secrétariat général voit au bon fonctionnement administratif de la Commission, dirigé par un secrétaire général qui relève directement de la Commission. Les centres de responsabilité ont chacun à leur tête un directeur général, qui rend compte de son action au membre de la Commission responsable, un peu comme dans un gouvernement de cabinet.

La Commission rédige des propositions dans le domaine des transports, de l'industrie, des politiques sociales, de l'agriculture, de l'environnement, de l'énergie, du développement régional, des relations de travail et de la coopération au développement. En vertu du principe de « subsidiarité », les initiatives de la Commission ne concernent que les domaines où une initiative au niveau de l'Union européenne apparaît plus efficace qu'une action entreprise au niveau national, régional ou local.

La Commission est l'organe d'exécution de l'Union européenne. Cette fonction couvre tous les domaines dans lesquels l'Union intervient, mais le rôle de la Commission est particulièrement important dans des secteurs comme la concurrence (contrôle des ententes et des fusions, élimination ou contrôle des aides publiques discriminatoires), l'agriculture ou la recherche et le développement technologique. Elle veille également au respect des règles de concurrence par les entreprises, sous le contrôle de la Cour de justice.

iv) La Cour de justice

La Cour de justice est composée d'un juge par État membre, afin que les différents systèmes juridiques nationaux y soient représentés. Elle est assistée par huit avocats généraux dont le rôle consiste à présenter des conclusions motivées sur les affaires qui lui sont soumises. Les juges et les avocats généraux sont nommés d'un commun accord par les gouvernements des États membres renouvelable pour un mandat de six ans, un renouvellement partiel intervenant tous les trois ans. La Cour de justice assure le respect du droit dans l'interprétation et l'application des traités. C'est donc elle qui tranche lorsqu'il y a divergence quant à la façon d'interpréter la loi.

v) La Cour des comptes

La Cour des comptes est composée de 15 membres nommés par le Conseil pour un mandat renouvelable de six ans. Les membres élisent en leur sein un président pour une durée de trois ans. Le rôle de la Cour des comptes est de contrôler la bonne exécution du budget de l'Union, et de veiller à la bonne gestion financière. Elle contribue ainsi à l'efficacité et à la transparence du système de gestion financière de la Communauté. Son rôle est analogue à celui du Bureau du vérificateur général du Canada.

vi) Organes consultatifs et financiers

Outre les cinq institutions susmentionnées, il y a cinq autres organes consultatifs et financiers qui contribuent au processus législatif de l'Union européenne. Leur création récente est le fruit d'intenses négociations visant à accroître la participation démocratique de la société civile, du milieu des affaires et d'autres groupes au processus de prise de décisions.

Ces organes consultatifs sont :

  • le Comité économique et social européen, qui exprime les opinions de la société civile organisée sur les questions de politique économique et sociale;

  • le Comité des régions qui exprime les opinions des autorités régionales et locales sur les questions de politique régionale, d'environnement et d'éducation;

  • le Médiateur européen, qui s'occupe des plaintes formulées par les citoyens s'estimant victimes d'un acte de « mauvaise administration »;

  • la Banque européenne d'investissement, qui contribue à la réalisation des objectifs de l'Union par le financement d'investissements privés et publics à long terme;

  • la Banque centrale européenne qui définit et met en oeuvre la politique monétaire européenne et conduit les opérations de change.

2) Processus décisionnel sur le plan législatif

On trouvera ci-après une description du processus décisionnel sur le plan législatif qui permet de comprendre les liens qui existent entre les différents organes de l'UE. Il y a ainsi trois procédures générales : la codécision, l'avis conforme et la consultation. Le choix de la procédure de décision découle de la base juridique sur laquelle repose une initiative de l'Union européenne. Concrètement, il revient à la Commission européenne de déterminer la base juridique à partir d'éléments objectifs susceptibles d'un contrôle juridictionnel. Ce choix est très important pour déterminer le rôle approprié des différents organes législatifs. Par exemple, le Parlement peut seulement donner son avis dans le cadre de la consultation alors qu'il constitue le véritable co-législateur dans le contexte de la codécision.

i) La procédure de codécision

La procédure de codécision a été introduite par le traité de Maastricht en 1992, et son champ d'application a été précisé par le traité d'Amsterdam (1997). Le processus décisionnel peut se résumer ainsi :

  • la Commission propose un texte législatif;

  • première lecture : le Parlement adopte une position en se fondant sur les conclusions du comité pertinent et propose des modifications s'il y a lieu;

  • deuxième lecture : le Parlement approuve, rejette ou modifie la décision du Conseil à la majorité absolue de ses membres (314) et soumet la proposition révisée au Conseil, qui peut accepter les modifications ou les modifier la proposition à son tour, mais ces modifications doivent être adoptées à l'unanimité;

  • en cas de désaccord, un comité de conciliation, composé de représentants du Conseil et du Parlement, se réunit pendant six semaines au maximum afin d'en arriver à un texte conjoint;

  • troisième lecture : à défaut d'accord, le projet de loi communautaire est réputé ne pas avoir été adopté et meurt au feuilleton.

ii) L'avis conforme

La procédure de l'avis conforme a été instituée par l'Acte unique européen (1986). Elle implique que le Conseil doit obtenir l'assentiment du Parlement européen pour que certaines décisions soient prises. Le Parlement européen est susceptible d'accepter ou de rejeter une proposition mais ne peut pas l'amender.

iii) La consultation simple

Dans le cadre de la procédure de consultation, l'avis du Parlement européen est sollicité. Lorsque l'avis a été formulé, la Commission dispose de la faculté d'amender sa proposition en conséquence. Ensuite, la proposition est examinée par le Conseil, qui peut l'adopter telle quelle ou après l'avoir amendée. Toutefois, si le Conseil décide de rejeter la proposition de la Commission, il ne peut le faire qu'en statuant à l'unanimité. Les domaines concernés par cette procédure sont les suivants : coopération policière et judiciaire en matière pénale; révision des traités; coopération économique renforcée; discrimination; citoyenneté de l'Union; agriculture; visas, asile, immigration et autres politiques liées à la libre circulation des personnes; transports (surtout les principes susceptibles d'affecter gravement le niveau de vie et l'emploi dans certaines régions); règles de concurrence; dispositions fiscales; politique économique.

3. Processus décisionnels

i) Instruments législatifs

La prise de décision au niveau de l'Union européenne est le résultat des interactions entre le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne et la Commission européenne. La Cour des Comptes, le Comité économique et social, le Comité des régions, la Banque centrale européenne et le Comité économique et financier interviennent également dans de nombreux domaines spécifiques. Les règles de ce processus décisionnel sont inscrites dans les traités et couvrent chaque domaine dans lequel l'Union européenne est amenée à agir. La Commission européenne est chargée de rédiger les propositions qui seront étudiées et mises en oeuvre par les centres de responsabilités des directions générales. La politique de l'UE en ce qui concerne la gestion des textes réglementaires fait l'objet des lignes directrices générales pour la politique législative publiées en 1996 par le président de la Commission européenne, lesquelles s'appliquent à toute nouvelle législation. Le but des lignes directrices est de faire en sorte que tous les textes législatifs soient conséquents et bien rédigés, que la politique de rédaction soit transparente, planifiée et cordonnée et que le suivi et l'évaluation soient rigoureux. Il n'y a cependant aucune obligation légale à réaliser une analyse d'impact de la réglementation.

L'Union européenne emploie deux instruments principaux de réglementation : les directives et les règlements. Si une proposition justifie que l'Union européenne protège l'intérêt public et est considérée d'importance supranationale, le Conseil européen et le Parlement peuvent décider qu'il y a lieu d'adopter un règlement. Les règlements remplacent les lois des États membres et doivent être respectés. Les directives ont aussi force de loi, mais elles imposent un processus et des normes qui doivent être appliqués au niveau national de chaque pays. Il appartient aux États d'incorporer les directives à leurs lois et institutions nationales. Le recours aux directives permet aux États membres de choisir la meilleure façon d'appliquer la loi en tenant compte de leurs cultures juridique et administrative. Pour appliquer le principe de subsidiarité du traité, on utilise principalement les directives (environ 7 fois sur 10), lesquelles seront appelées à remplacer la législation actuelle. Après avoir établi des règles pour l'ouverture des marchés, la Commission procède actuellement à l'introduction d'une importante réglementation en lien notamment avec la protection de l'environnement.

ii) Hiérarchie du processus décisionnel

Le processus décisionnel repose sur les pouvoirs législatifs suivants, en ordre hiérarchique :

Niveau européen :
  • Règlements du Conseil
  • Directives du Conseil
  • Règlements de la Commission
  • Directives de la Commission
Niveau national :
  • Transposition de la législation de l'Union
  • Lois nationales Ordonnances du gouvernement
Entités du gouvernement central :
  • Règlements officiels
  • Recommandations générales
Législation auxiliaire :
  • Règlements des gouvernements régionaux
  • Règlements municipaux
  • Règlements négociés collectivement
  • Lois règlements de gouvernements locaux
  • Règlements d'entités gouvernementales locales

En plus de la législation de l'UE, l'Organisation mondiale du commerce et l'Organisation internationale du Travail imposent des règles découlant d'accords internationaux bilatéraux et multilatéraux. Celles-ci sont ensuite transposées sous forme de lois. La législation de l'UE demeure principalement pour harmoniser les règles nationales incompatibles, bien que selon le Comité économique et social, la priorité est accordée à la simplification de la réglementation, à la qualité des règlements, à l'amélioration du processus législatif, à la décentralisation des fonctions de direction vers les organismes spécialisés, à la consultation et à l'analyse de l'impact de la réglementation.

3. Responsabilités des États membres en matière de réglementation

Les États membres ont la responsabilité de mettre en oeuvre les directives réglementaires proposées par la Commission européenne, et approuvées par le Conseil et le Parlement européen. Dans le cadre de ses fonctions de direction, la Commission veille à ce que la législation européenne soit dûment appliquée par chacun des États membres. Elle prend l'initiative de mesures contre les États qui n'observent pas leurs obligations communautaires en vertu des traités. Lorsqu'un règlement à l'amiable est impossible, elle porte la question à l'attention de la Cour de justice dont les décisions sont exécutoires.

4. Valeurs de l'Union européenne

En règle générale, le principe de base du système juridique de l'Union européenne est l'application de la reconnaissance mutuelle des lois des États membres tant que les règles nationales ne causent pas de distorsion et ne nuisent pas au bon fonctionnement du marché interne. Le cas échéant, la Commission propose une loi conformément à la « méthode communautaire » qui guide l'action législative et le processus décisionnel.

Cette méthode assure un traitement équitable pour tous les États membres, du plus grand au plus petit. Elle fournit un moyen d'arbitrer entre divers intérêts au travers de deux filtres successifs : le filtre de l'intérêt général, au niveau de la Commission; le filtre de la représentation nationale et démocratique au niveau du Conseil et du Parlement européen. Le caractère indépendant de la Commission fait en sorte que l'intégrité des traités est protégée tandis que le Conseil et le Parlement européen représentent les intérêts démocratiques des États membres.

Avant d'entreprendre toute action législative et réglementaire, l'UE veille à ce que la proportionnalité et la subsidiarité, deux principes fondamentaux, soient respectées. La proportionnalité veille à ce que les impacts, le fardeau administratif et les responsabilités découlant de l'action législative soient répartis de manière proportionnelle et équitable entre les États membres. Le principe de subsidiarité signifie que les responsabilités de mener à bien une action juridique doivent être confiées au niveau de gouvernement le plus approprié, allant des échelons supérieurs (communauté) aux échelons inférieurs (le plus près du bénéficiaire ou du citoyen). Ces critères s'appliquent à toutes les politiques de l'UE.

C. RÉFORME DE LA RÉGLEMENTATION DANS L'UNION EUROPÉENNE

1. Contexte

La réforme de la réglementation est une priorité de l'Union européenne depuis les années 80, le milieu des affaires et les citoyens se plaignant de plus en plus de la prolifération des règles nationales nuisant à la concurrence et au bon fonctionnement du marché interne, et imposant un fardeau administratif toujours plus lourd. Selon une enquête menée en 2001 auprès des entreprises, ces dernières pourraient économiser au moins 50 milliards d'euros si la réglementation était de meilleure qualité, somme correspondant à une réduction de 15 % de leurs coûts de mise en conformité. En plus de ces coûts assumés par le monde des affaires, d'autres dépenses doivent être assumées par l'administration publique de l'Union du fait que certains règlements sont inefficaces. La Commission européenne a estimé que le coût pour la société d'une réglementation de mauvaise qualité pouvait être de l'ordre de 10 % du PIB3.

Plusieurs réformes ont été amorcées dans le but d'améliorer la piètre performance de l'Union européenne à cet égard. En 1992, le Conseil européen d'Édimbourg a identifié des méthodes en vue de simplifier et d'améliorer l'environnement réglementaire. Des formes nouvelles et moins contraignantes de réglementation, comme la « nouvelle approche » pour établir des normes de sécurité des produits, les directives cadres et le recours à la supervision par le pays d'origine ou les « passeports » de marchés internes dans des secteurs clés de services étaient au nombre des initiatives conçues pour améliorer l'environnement et les processus réglementaires. Dans le domaine de l'analyse des impacts de la réglementation, un processus d'analyse d'impact sur les entreprises (BIA) a été adopté pour la nouvelle législation.

En 1995, le rapport Molitor a présenté dix-huit recommandations générales en vue d'améliorer l'environnement réglementaire en réponse au Conseil d'Édimbourg. Celles-ci, selon le Comité économique et social, ont été « mises en veilleuse » jusqu'en 2002 en attendant la rédaction d'un Plan d'action pour une meilleure réglementation.

L'initiative SLIM (Simplifier la législation relative au marché intérieur) a été lancée en mai 1996 pour trouver des moyens permettant de simplifier la législation relative au marché intérieur. Elle visait à déterminer comment simplifier l'environnement réglementaire et à améliorer la performance de l'administration publique, tant au niveau national que communautaire. Elle proposait aussi que toute la législation soit soumise à une évaluation.

En mars 2000, le Conseil européen de Lisbonne a arrêté un objectif stratégique ambitieux pour l'Union européenne, à savoir devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale. Cet objectif a été réitéré à la conférence de Santa Maria de Feira en juin 2000, qui a souligné l'importante contribution d'une meilleure réglementation à une économie plus concurrentielle. Les Conseils européens de Stockholm en mars 2001, de Laeken en décembre 2001 et de Barcelone en mars 2002 ont également insisté sur la nécessité de mettre en place une stratégie coordonnée afin de simplifier l'environnement réglementaire au sein de la Communauté européenne. Une déclaration jointe au traité de Maastricht invite également la Commission à accompagner ses propositions législatives d'une analyse coûts-bénéfices.

L'initiative visant à simplifier la législation relative au marché intérieur a connu des résultats limités. Un récent rapport sur les résultats de la 5e phase de l'initiative SLIM (Simplifier la législation relative au marché intérieur) révèle que seulement cinq États membres ont pris des initiatives visant à simplifier la législation nationale sur la base des directives/règlements communautaires examinés durant la cinquième phase de l'initiative SLIM, et que dans la plupart des cas, il n'a pas été possible d'identifier ou de quantifier les réductions de coûts pour les utilisateurs. De l'avis du Comité économique et social, il est clair que les mesures destinées à simplifier la législation et la réglementation doivent être améliorées.

Conformément au mandat défini par le Conseil européen à Lisbonne, confirmé et élargi aux sommets de Stockholm, de Göteborg, de Laeken et de Barcelone, la Commission européenne a procédé à des travaux visant à simplifier et à améliorer l'environnement réglementaire en 2001. Un Plan d'action a été rédigé en 2002 à la suite des recommandations formulées dans le rapport intérimaire SLIM de mars 2001, le Livre blanc sur la gouvernance européenne a été adopté en juillet 2001 (notamment la section intitulée « De meilleures politiques, de meilleures réglementations et de meilleurs résultats »), et une communication de nature politique a été présentée au Conseil européen de Laeken en 2001.

Les grands thèmes identifiés dans chacune de ces initiatives sont : simplifier l'environnement réglementaire ; améliorer la qualité de la législation communautaire ; développer une culture législative commune au sein de l'Union, y compris la transposition et l'application de la législation communautaire. Ces thèmes marquent un changement dans l'objet qui ne tend plus à l'accroissement de la compétitivité des entreprises dans l'UE, mais qui s'attache plutôt à l'amélioration de l'architecture et à la performance des institutions qui exercent des fonctions dans ce nouvel environnement.

2. Simplifier l'environnement législatif et réglementaire

La législation européenne est au coeur de l'intégration économique et politique de l'Union. Elle a accordé des droits importants aux citoyens ainsi qu'aux entreprises, et a favorisé l'ouverture des marchés partout en Europe. Dans de nombreux secteurs, elle a permis la concentration de 15 différents ensembles de lois en une seule qui s'applique à l'échelle de l'UE. Cependant, les citoyens et les entreprises critiquent souvent ces regroupements, qu'ils jugent inutiles, encombrants et trop complexes. Ils n'arrivent pas toujours à différencier la loi communautaire à proprement parler de la transposition des directives des États membres en une loi nationale. Au fil des ans, ces critiques se sont traduites par une augmentation des demandes pour que la législation de l'UE soit réduite et simplifiée.

Bien que relativement modeste comparativement à celui de chacun des 15 États membres, l'ensemble des lois communautaires, appelé l'« Acquis communautaire », comptait 97 000 pages de législation subordonnée (règlements directives et décisions) à la fin de 2002. Environ 2 500 nouveaux textes législatifs s'ajoutent chaque année. En raison de la complexité accrue et du niveau de précision souvent trop élevé de certaines lois fondamentales découlant des difficiles compromis de rédaction survenus au cours du processus d'approbation, chacun des sommets en est arrivé à la même conclusion : un tel volume est encombrant pour les utilisateurs si l'on considère notamment l'élargissement prochain et les objectifs de concurrence de la Communauté. Plusieurs initiatives ont été lancées pour réduire et simplifier le volume de législation par la consolidation, la codification, la refonte et la simplification.

La consolidation consiste à regrouper dans un texte non exécutoire les dispositions d'un règlement spécifique énoncées dans un acte réglementaire et ses modifications subséquentes. Certaines directions générales comme celle de l'agriculture ont commencé à consolider la législation dans des secteurs spécifiques depuis au moins 1999, et poursuivront ces travaux pendant plusieurs années encore.

En ce qui concerne la codification, ou l'adoption d'un nouvel instrument légal qui permet de rassembler dans un nouveau texte unique, sans modification du fond, toutes les dispositions d'un acte et ses modifications ultérieures, un accord interinstitutionnel a été conclu en décembre 1994. À la suite de cet accord, un vaste programme de codification a été lancé en novembre 2001 pour clarifier la législation en réunissant dans un nouvel instrument juridique simplifié toutes les dispositions de la loi initiale et ses amendements subséquents. Depuis la fondation de l'Union européenne, l'Acquis communautaire n'a jamais été passé en revue pour en corriger l'organisation, la structure ou la présentation. Jusqu'à présent, approximativement 40 pour 100 ou 35 000 pages ont été codifiées et consolidées. D'ici 2005, on s'attend à ce qu'il ait été entièrement révisé et présenté au Parlement pour approbation. L'objectif est de le rendre simple, lisible et transparent, disponible dans toutes les langues de la Communauté. On espère aussi mettre en place une nouvelle base de données et un nouveau système de gestion afin de permettre aux États membres de consulter l'Acquis en ligne.

En ce qui concerne la refonte, il s'agit d'adopter un seul acte juridique qui apporte les changements requis quant au fond, les codifie et laisse inchangées les autres dispositions de la loi antérieure. L'accord interinstitutionnel d'avril 2002 propose un recours plus structuré à la technique de la refonte pour les textes législatifs (voir Sec(2001) 1364).

La simplification signifie rechercher, avec l'avantage de la sagesse rétrospective, à rendre la législation plus simple et plus appropriée aux exigences de l'utilisateur. On espérait que le programme SLIM parviendrait à simplifier la législation, mais les résultats ont été plutôt limités.

Dans son Plan d'action, la Commission se donne comme double objectif de simplifier l'ensemble des lois communautaires et d'en réduire le volume. Elle recommande la mise en place d'un programme destiné à simplifier la législation européenne et identifie les secteurs à privilégier, ainsi que la création d'un comité spécial qui aurait pour mandat de mener à bien cette opération de simplification. Le programme de codification devrait enfin bénéficier de procédures d'adoption accélérées en première lecture pour les propositions de codification législative présentées par la Commission.

3. Améliorer la qualité de la législation communautaire

Le Livre blanc sur la gouvernance européenne a identifié sept facteurs pour améliorer la qualité, l'efficacité et la simplicité des actes réglementaires.

  • Premièrement, les propositions doivent être élaborées sur la base d'une analyse convaincante de l'opportunité d'une intervention au niveau de l'Union.

  • Deuxièmement, il y a lieu d'examiner d'autres avenues que la voie législative, comme le recours à des règles non exécutoires, telles que recommandations, lignes directrices ou même autoréglementation.

  • Troisièmement, le bon type d'instrument doit être utilisé lorsqu'il s'avère nécessaire de légiférer, et il convient de recourir plus souvent à ce que l'on appelle les « directives cadres ».

  • Quatrièmement, les mesures d'application peuvent être élaborées dans le cadre de la coréglementation, qui associe des mesures législatives ou réglementaires exécutoires à des mesures prises par les acteurs les plus concernés.

  • Cinquièmement, l'action communautaire peut être complétée ou renforcée par l'emploi de ce  qu'il convient d'appeler la « méthode ouverte de coordination », qui offre un moyen d'encourager la coopération, d'échanger de bonnes pratiques et de convenir d'objectifs communs et d'orientations communes aux États membres.

  • Sixièmement, une culture renforcée d'évaluation et de rétro-information doit être créée afin de tirer les enseignements des succès et des erreurs du passé.

  • Enfin, la Commission doit retirer ses propositions lorsque la négociation interinstitutionnelle sape les principes de subsidiarité ou de proportionnalité consacrés par le Traité ou compromet les objectifs desdites propositions.

La Commission a appuyé l'adoption de ces recommandations et identifié trois grands secteurs d'action dont elle est responsable : améliorer la consultation, améliorer le processus d'analyse d'impact et faire un meilleur usage des instruments législatifs.

i) Améliorer la consultation

Dans le cadre de son Plan d'action, la Commission a rédigé des lignes directrices intitulées « Vers une culture renforcée de consultation et de dialogue − proposition relative aux principes généraux et aux normes minimales applicables aux consultations engagées par la Commission avec les parties intéressées ». Ces lignes directrices s'appuient sur quatre grands principes : la participation de tous au moment d'élaborer et d'appliquer les politiques communautaires; l'ouverture et la responsabilité, afin de garantir la transparence; l'efficacité des consultations qui auront lieu le plus tôt possible dans le processus de définition des nouvelles politiques; la cohérence dans les approches choisies par les différentes institutions de l'Union pour garantir des mécanismes d'évaluation, d'analyse et de retour d'information qui soient compatibles avec les activités de la Commission visant à « mieux légiférer ».

ii) Améliorer l'analyse d'impact

Même s'il est prévu de procéder à une évaluation préalable des propositions en vue de déterminer si une action au niveau de l'Union est nécessaire, les analyses d'impact détaillées, qui avaient pourtant fait l'objet d'une recommandation du président de la Commission européenne dans les lignes directrices générales pour la politique législative publiées en 1996, ne sont pas obligatoires. Comme les institutions de l'Union européenne ont conclu en certain nombre d'accords les obligeant à garantir la qualité de la législation, une importance accrue a été accordée à l'utilisation obligatoire des analyses d'impact. Le Groupe Mandelkern a proposé que des mesures soient adoptées au niveau interinstitutionnel ou qu'un accord interinstitutionnel soit rédigé exigeant que les propositions présentées en première lecture fassent l'objet d'une analyse ou d'une évaluation des impacts.

Dans le cadre du mandat qui lui a été confié par les Conseils européens de Göteborg et de Laeken, la Commission a intégré à son Plan d'action des lignes directrices qui seront appliqués progressivement à partir de 2003 pour toutes les initiatives importantes, à savoir celles qui sont présentées dans la stratégie politique annuelle ou, ultérieurement, dans le programme de travail de la Commission. Les lignes directrices constituent en outre un outil pour la mise en oeuvre du développement durable et la mise en place d'un instrument intégré d'analyse de l'impact sur le développement durable. L'approche vise à remplacer les mécanismes d'évaluation d'impact qui sont incomplets et à vérifier si les grandes politiques qui sont proposées ont un impact acceptable et sont conformes à l'objectif général d'une « amélioration de la réglementation ».

iii)Pour un usage mieux adapté des instruments législatifs

Le Plan d'action invite à mieux distinguer entre le recours au règlement et à la directive. À cet égard, la Commission rappelle que le règlement ne doit être utilisé que pour une action exigeant une uniformité d'application dans les États membres, alors que la directive doit être un instrument définissant un cadre juridique et des objectifs à atteindre pour l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité. La Commission propose que lui soient délégués plus de pouvoirs exécutifs pour choisir l'instrument approprié et préparer des propositions en vue d'un examen législatif. Il y aurait lieu notamment d'accorder une plus grande attention aux alternatives à la réglementation, comme la coréglementation et l'auto-réglementation.

4. Développer une culture législative commune au sein de l'Union

Les recommandations formulées par le Conseil européen d'Édimbourg en 1992 reconnaissaient que pour simplifier la réglementation, il fallait apporter des changements aux structures de l'Union et à ses modes de fonctionnement, et non seulement aux règles et aux directives. À cet égard, le Plan d'action identifiait deux principaux secteurs d'action : la création d'un réseau législatif entre les institutions communautaires, d'une part, et entre les institutions et les États membres, d'autre part, afin d'améliorer la transposition et l'application du droit communautaire.

i) Améliorer la coordination et la mise en oeuvre au sein des institutions européennes

Pour accroître la cohérence de ses projets d'actes législatifs et mieux coordonner la mise en oeuvre du Plan d'action par tous les responsables de la réglementation de l'Union, la Commission met en place un réseau interne pour « mieux légiférer ». En particulier, le réseau sera chargé de surveiller le respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité, ainsi que des engagements pris par la Commission dans son Plan d'action; d'identifier et de résoudre les difficultés éventuelles dans l'application de ces principes; enfin, de coordonner la préparation de l'évaluation annuelle de la qualité réglementaire et des rapports nationaux. À cet égard, une entente interinstitutionnelle entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen est sur le point d'être conclue.

ii) Établir une meilleure coordination entre l'Union et les États membres

Le Plan d'action propose également d'établir une meilleure coordination et un échange d'information entre la Commission et les administrations nationales, par le biais de correspondants « transposition et application » chargés d'assurer un meilleur suivi des transpositions, de procéder à une évaluation permanente de l'application concrète des directives et règlements. Le but visé est d'améliorer la rétroaction des États membres et d'échanger les bonnes pratiques sur des questions comme les analyses d'impact législatif et les normes de consultation.

5. Organes de réglementation

La Commission européenne est divisée en 20 directions générales, chacune responsable d'aspects spécifiques du cadre réglementaire. Les activités de réglementation sont organisées par champ d'intérêt, puisque plusieurs directions générales peuvent avoir un degré de responsabilité variable dans un champ en particulier. Par exemple, la réglementation de l'Initiative de marché unique implique la participation des directions responsables de la concurrence, des affaires économiques et financières, du marché intérieur, des politiques relatives aux entreprises, de la politique régionale, de la fiscalité, du commerce et de la justice. Bien que chaque direction ou service fonctionne de manière autonome, il y a une volonté de travailler horizontalement à l'harmonisation des politiques, des règlements et des approches en matière de recherche.

D. GESTION ET PROCESSUS DE RÉGLEMENTATION

L'Union européenne a proposé d'importants changements à son régime de gestion des textes réglementaires. La présente section porte surtout sur l'utilisation des principes régulateurs et des déclarations d'impact ainsi que sur les approches en matière de consultation publique.

1. Politique de l'UE en matière de réglementation

La politique de l'Union européenne en matière de réglementation est fondée sur les lignes directrices générales pour la politique législative émises par le président de la Commission européenne en 1996, et reprises dans les divers documents de la Commission pour améliorer la réglementation. Celles-ci reflètent les principes de bonne réglementation publiés par l'OCDE en 1995. Ces lignes directrices n'ont rien de contraignant d'une façon générale, mais plusieurs éléments de la politique ont été révisés et déclarés obligatoires afin de donner suite au Plan d'action, notamment dans le domaine de la consultation et de l'évaluation d'impact.

2. Analyse d'impact de la réglementation (AIR)

La politique de l'UE en ce qui concerne la gestion des textes réglementaires n'est pas définie clairement ni simplement C'est une politique qui s'est élaborée avec le temps et qui vise un certain nombre d'objectifs juridiques tout en sensibilisant les intervenants aux impacts que les propositions législatives peuvent avoir sur les grands objectifs politiques. Ces différents éléments sont consolidés dans les lignes directrices de 1996 pour la politique législative qui s'appliquent à toutes les nouvelles propositions législatives. C'est le Bureau du Secrétaire général qui a la responsabilité de l'application, du suivi et de la révision des lignes directrices. Il doit veiller à ce que toutes les nouvelles propositions législatives soient fondées sur des bases juridiques valides et qu'elles respectent les principes de subsidiarité et de proportionnalité, assurer la mise à jour des lignes directrices et rédiger le rapport annuel « Mieux légiférer » pour le Conseil européen.

Il n'existe actuellement aucune base juridique pour les analyses d'impact de la réglementation (AIR) au niveau européen, ni d'obligation légale d'entreprendre des AIR complètes.Plusieurs articles prévoient la conduite d'une analyse d'impact de la réglementation, notamment l'Article 6 du Traité en vertu duquel la définition et la mise en application de toutes les politiques communautaires doivent tenir compte de la protection de l'environnement et promouvoir le développement durable et l'Article 174 qui exige que l'UE tienne compte des éventuels coûts-bénéfices au moment de rédiger des politiques relatives à l'environnement. Il n'existe toutefois aucune obligation générale de procéder de façon systématique à des analyses d'impact.

En vertu des lignes directrices générales pour la politique législative (Exposé des motifs), les propositions doivent : viser un objectif précis et être justifiées; reposer sur une base juridique clairement identifiée; respecter les principes de subsidiarité et de proportionnalité; simplifier le cadre législatif ou administratif en vigueur; être simples, concises et clairement exprimées; être compatibles avec les priorités et les actions; être fondées sur des évaluations rationnelles et à jour permettant de bien identifier de l'intérêt commun; faire l'objet d'évaluations durant le processus décisionnel et la période de mise en oeuvre; être le fruit de consultations externes plus larges.

Une des principales faiblesses du processus d'évaluation réside dans le fait que les lignes directrices ne précisent pas les méthodes ou les hypothèses techniques à utiliser pour évaluer l'impact d'une proposition. De plus, le Secrétaire général ne peut pas refuser des propositions qui ne répondent pas aux règles de base énoncées dans les lignes directrices. Chaque direction générale détermine donc comment les exigences doivent être respectées, sauf en ce qui concerne l'évaluation budgétaire, l'impact environnemental et l'impact d'affaires. Ces évaluations particulières sont soumises à un examen central.

Actuellement, le Plan d'action prévoit la mise en place d'un processus intégré d'analyse d'impact de la réglementation, dans le cadre du mandat défini par le Conseil européen d'Édimbourg. Ce nouvel instrument est destiné à remplacer les exigences actuelles en matière d'étude de l'impact sur les entreprises, sur l'égalité entre hommes et femmes, sur l'environnement, sur les petites et moyennes entreprises, et le commerce. Il se fonde sur six piliers conceptuels reflétant les directives de l'OCDE : la justification, la consultation, l'analyse, la maximisation des bénéfices nets, la cohérence et la responsabilité. L'AIR sera intégrée dans le cycle de planification stratégique et de programmation/gestion par activités.

Le processus de l'AIR comprendra deux étapes. L'analyse préliminaire donne une première vue d'ensemble du problème identifié, des choix possibles et des secteurs concernés. Cette évaluation sera une condition pour l'inclusion dans la Stratégie politique annuelle. Dans un deuxième temps, on procédera à une évaluation d'impact proportionnelle/approfondie. Il faudra ensuite déterminer quelles propositions nécessitent une analyse en profondeur sous la direction d'un groupe de travail interministériel présidé par le Bureau du secrétaire général. L'évaluation d'impact doit être effectuée conformément au principe de l'analyse proportionnelle, ce qui signifie que la profondeur de l'analyse doit être proportionnelle à l'importance des impacts éventuels. On a proposé de mettre en place un système de mesures explicites pour quantifier l'« importance ». Il reste que les propositions qui sont les plus susceptibles d'avoir des impacts significatifs recevront la priorité.

L'identification des impacts, directs et indirects, sera exprimée en termes économiques, sociaux et environnementaux. L'UE s'est fixé comme priorité d'identifier les impacts pertinents dans le cadre de sa Stratégie de développement durable. Les impacts seront évalués par le biais d'une analyse coûts-bénéfices, d'une analyse coûts-efficacité, d'une analyse des coûts de conformité, d'une analyse multi-critères et d'une évaluation des risques.

3. Consultation et transparence

Selon le Livre blanc sur la gouvernance, l'un des éléments clés pour assurer le renouvellement organisationnel de l'UE repose sur l'amélioration du processus de consultation. La Commission a rédigé des lignes directrices afin de satisfaire aux exigences du Livre blanc et les a intégrées à son Plan d'action et à sa nouvelle approche en matière d'analyse d'impact. Même si la Commission avait déjà pris l'habitude de consulter les parties intéressées et de procéder à des consultations en ligne avant d'élaborer ses propositions dans presque tous ses champs d'activité, chaque direction générale employait ses propres méthodes et mécanismes de consultation auprès de ses groupes d'intérêt sectoriels respectifs. Le Livre blanc propose une approche plus cohérente et des normes minimales pour ses activités de consultation.

La Commission a conçu une nouvelle approche de consultation afin d'encourager une participation plus grande des parties intéressées, assurer la cohérence du processus tout en permettant assez de flexibilité pour tenir compte d'intérêts divers, et dégager quelques meilleures pratiques afin d'améliorer les techniques de consultation. En particulier, la Commission a voulu faire établir un lien plus net entre le recours à la consultation et ses procédures d'analyse d'impact.

Le document de consultation « Vers une culture renforcée de consultation et de dialogue − proposition relative aux principes généraux et aux normes minimales applicables aux consultations engagées par la Commission avec les parties intéressées » décrit cinq normes minimales.

  • Premièrement, toute communication dans le cadre de la consultation devrait être claire et concise pour assurer que le fondement et le contenu des consultations sont appropriés.

  • Deuxièmement, pour assurer une consultation équitable, les groupes cibles de la consultation doivent être clairement identifiés comme ayant un intérêt direct ou indirect à l'égard de la politique.

  • Troisièmement, la consultation doit être accessible. Sans pour autant exclure les autres moyens de communication, la Commission créera un « point d'accès unique » pour les consultations sur Internet.

  • Quatrièmement, des délais suffisants doivent être accordés aux participants pour leurs préparatifs et aux décideurs pour leur analyse. Il a été proposé qu'un délai d'au moins huit semaines soit accordé.

  • Enfin, un accusé de réception des contributions devrait parvenir aux participants afin d'offrir un retour d'informations adéquat aux parties qui ont répondu à la consultation.

E. Défis pour le système européen de gestion des textes réglementaires

Même si différents outils d'évaluation ont déjà été mis au point, le Comité économique et social, entre autres, a identifié un certain nombre de défis qui devront être surmontés en ce qui concerne le régime des analyses d'impact de la réglementation (AIR).

1. Responsabilité de l'AIR

Comme ce sont les directions générales qui ont la responsabilité de préparer et de mener à bien les AIR, des directives émises au niveau politique éviteraient les incohérences et veilleraient à ce que des normes minimales soient respectées. À l'heure actuelle, il n'y a pas d'instance centrale de contrôle de la qualité comparable au bureau de l'information et des affaires réglementaires (U.S. Office of Information and Regulatory Affairs) qui fait partie du Office of Management and Budget de la Maison Blanche. Toutes les propositions de règlement doivent être soumises à ce bureau au préalable.

Aucune institution comparable ayant de telles responsabilités n'existe actuellement au sein de l'Union européenne. Bien que la Commission ait proposé la mise en place d'un réseau interne pour coordonner l'élaboration des propositions législatives, ce réseau n'a pas encore pris forme. Comme 90 % de la législation provient des États membres, un organisme semblable devra être créé dans chaque État.

Il y aurait aussi la possibilité de créer un Bureau d'évaluation des textes réglementaires sur le modèle américain, chargé de mettre en place le système d'AIR et d'en assurer l'application.

2. Processus coordonné de « simplification »

Malgré les efforts déployés pour simplifier les régimes de réglementation, y compris l'Acquis communautaire, ces activités pourraient être d'une efficacité très limitée si elles ne sont pas reprises au niveau de chaque État membre. Il peut être nécessaire d'assurer une coordination centrale institutionnelle afin que le processus soit mis en oeuvre convenablement sans imposer un fardeau excessif aux États membres. Cette coordination exigera une direction politique et une approche coordonnée de la part de l'administration.

3. Formation des responsables de la réglementation

Pour produire des analyses d'impact de qualité, il est nécessaire d'assurer au personnel une formation continue de qualité. Or, il n'existe aucune politique à cet égard. Le Comité économique et social a recommandé qu'un système de formation centralisé soit créé afin d'aider chaque responsable de la réglementation à se doter des compétences nécessaires pour accomplir leur travail.

4. Utilisation de méthodes analytiques cohérentes et flexibles

Le Comité économique et social a souligné l'absence de règles et de méthodes quantitatives permettant de mesurer correctement l'importance des impacts. Des consultations sont actuellement en cours avec d'autres pays de l'OCDE en vue d'examiner différentes approches analytiques. Même s'il n'est pas inhabituel que la qualité de l'information soit bonne, l'analyse a révélé des faiblesses. La plupart des propositions ne fournissent que des renseignements descriptifs limités, et dans un certain nombre de cas, on ne fournit aucune preuve qu'une analyse d'impact a bel et bien été effectuée. Une analyse systémique des coûts et des bénéfices est rarement réalisée. Par exemple, moins de 20 % des Analyses d'impacts sur les entreprises (BIA) et des Exposés des motifs examinés par le Centre sur les politiques européennes entre 1996 et 2001 ont identifié les coûts des projets de manière détaillée. À l'heure actuelle, il n'existe aucune procédure administrative simple pour entreprendre une AIR et aucune directive obligatoire précisant à quel moment et de quelle manière les analyses doivent être effectuées. Enfin, il n'y a aucune norme détaillée permettant d'évaluer la qualité de l'analyse.

5. Assurer des consultations appropriées

Bien que la Commission ait déterminé qu'une période de huit semaines constituait un délai minimum pour la consultation, ce délai peut être prolongé lorsque des organisations européennes ou nationales ont besoin de plus de temps pour consulter leurs membres, lorsqu'il est nécessaire de prendre en compte les instruments exécutoires supra-institutionnels, pour répondre à des besoins ou à des demandes spécifiques décrites dans une proposition particulière, ou encore pour respecter divers jours fériés. De telles directives devraient s'appliquer spécifiquement aux AIR.

6. Analyse ex-poste

Comme dans bien d'autres pays, l'OCDE a constaté que les analyses ex poste des règlements existants brillent par leur absence. Compte tenu du nombre de ces règlements, ce genre d'analyse faciliterait sans doute le processus de simplification.

F. INNOVATIONS ET TENDANCES

1. Approches non conventionnelles et autres formes possibles de règlement

L'Union européenne a toujours favorisé les approches non conventionnelles, mais aucune évaluation systématique ou cohérente n'en a été faite. Le Comité économique et social a noté qu'il y a un manque de directives et de soutien pratique à l'échelle ministérielle, malgré l'expérience concluante en ce sens de certains États membres.

À l'heure actuelle, l'Union européenne a de plus en plus recours à la coréglementation ainsi qu'à l'autoréglementation (accords volontaires).

L'autoréglementation est fondée sur la coopération entre toutes les parties intéressées qui consentent à respecter les règles communautaires qui s'appliquent aux accords qu'elles concluent. Compte tenu de la rapidité des changements technologiques et des changements touchant les marchés, de la mondialisation des communications et des techniques de gestion, l'autoréglementation comporte des avantages en termes de viabilité et de rentabilité que n'a pas la législation, de nature plus permanente. La Commission impose généralement des conditions strictes au recours à l'autoréglementation, notamment :

  • l'autoréglementation ne remplace pas l'exécution 

  • les accords doivent se conformer à la loi 

  • les accords doivent se fonder sur une communauté d'intérêt entre les entreprises et le public

  • les accords doivent être exécutoires et vérifiables

  • les accords doivent être efficaces en ce sens qu'ils doivent comporter des recours clairs, d'application extraterritoriale.

La coréglementation allie la prévisibilité et la nature exécutoire de la législation à la flexibilité de l'autoréglementation. C'est un mode de gouvernance coopératif qui limite l'intervention publique à ce qui est essentiel et accorde à l'entreprise une marge de manoeuvre aussi grande que possible pour s'acquitter de ses obligations. Il y a donc un partage de responsabilités entre les secteurs public et privé. On a eu recours à un tel mécanisme dans le domaine de la sécurité sur les lieux de travail et la protection des consommateurs ou de l'environnement. La coréglementation a connu un certain succès dans le cadre de l'Initiative sur le marché unique européen.

Le défi pour l'UE a été d'établir des approches uniformes et cohérentes pour l'utilisation de telles solutions de rechange qui assurent la transparence, le suivi, la rétroaction et le contrôle ainsi qu'un degré acceptable de reddition de comptes tant pour les gouvernements que les participants à de tels accords.

2. Politique en matière de concurrence et protection du consommateur

Il semble y avoir une tendance vers l'harmonisation des marchés d'infrastructures, en particulier dans les secteurs des télécommunications, du transport par rail, l'électricité et le gaz. L'UE a été vigilante pour faire en sorte que la réglementation soit employée pour favoriser le respect de principes nobles comme la protection du consommateur. Les directives sont élaborées en se fondant sur cette priorité. La politique en matière de concurrence comporte quatre grands volets : accords restrictifs et abus de position dominante; contrôle des fusions; libéralisation; examen minutieux de l'aide de l'État. En ce qui concerne la libéralisation des marchés, il faut prendre en compte les règlements qui restreignent la concurrence dans les marchés caractérisés par des infrastructures monopolistes comme l'électricité et le gaz où les infrastructures appartiennent à des sociétés d'État. La politique de l'UE consiste à favoriser la concurrence en séparant les infrastructures des activités commerciales afin d'améliorer la qualité des services et d'assurer un contrôle sur les prix tout en préservant la propriété publique des infrastructures. À l'heure actuelle, l'UE a émis des directives afin d'amorcer l'ouverture des marchés suivants : les télécommunications, les transports, les services postaux, le gaz et l'électricité. Les succès les plus probants ont été atteints dans le secteur des télécommunications où les frais d'utilisation ont chuté de près de 35 % pour certains types de communications, et où l'on a constaté une amélioration générale des produits et services. Pour faciliter la libéralisation des marchés, l'UE peut choisir d'adopter une directive au niveau de l'Union afin d'encourager l'harmonisation, ou une directive que les États membres pourront intégrer à leur propre cadre législatif.

1 Chypre, République tchèque, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, Slovaquie et Slovénie

2 La Bulgarie et la Roumanie devraient se joindre à l'UE d'ici 2007.

3 UE, « Avis du Comité économique et social faisant suite à la "Demande de la Commission européenne relative à l'élaboration par le Comité d'un avis exploratoire sur la Communication de la Commission - Simplifier et améliorer l'environnement réglementaire" », Journal officiel des Commnautés européennes, 2002, C125/105.

Mise à jour:  8/30/2004

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