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Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente (CCERI)
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Perspectives d'amélioration de la réglementation environnementale : Un document d'Environnement Canada

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III. Réglementation environnementale intelligente

Les gouvernements ont recours à des politiques et à des règlements pour traiter de problèmes courants ou en devenir. Compte tenu des tendances complexes dont nous venons de parler plus haut, comment le gouvernement fédéral peut-il améliorer ses instruments d'intervention pour traiter des problèmes en devenir? Nous tentons de répondre à cette question dans la présente section, qui répertorie les caractéristiques particulières d'une réglementation environnementale intelligente.

A. Objectif : la maximalisation du bien public

Le bien public est le critère ultime à respecter dans l'évaluation des règlements et des systèmes réglementaires, car il faut voir si tous les avantages d'une politique en dépassent les coûts par comparaison avec toutes les solutions de rechange pertinentes possibles et compte tenu du point de vue du grand public5.

Mais le bien public n'est pas forcément facile à établir. Il faut commencer par définir le public. Et il ne faut pas oublier que si nous parlons du public canadien en général, il existe d'autres secteurs de compétence partageant l'allégeance des Canadiens, comme les collectivités et les provinces pour qui le bien-être de la collectivité planétaire revêt de l'importance. La réglementation peut donc exercer des incidences différentes et conflictuelles à différents niveaux de compétence et un bon règlement est celui qui, après évaluation, constitue un juste milieu.

B. Tenir compte de la dynamique

Les instruments réglementaires devraient être fonction de la nature du problème, de son contexte et de l'objectif visé. Le degré d'intervention doit être à la hauteur du risque qu'il pose. Et le temps et les ressources nécessaires ainsi que les coûts imposés aux réglementés devraient tous être proportionnels à la gravité du risque.

Deuxièmement, les instruments réglementaires doivent tenir compte de la dynamique au cSur du problème. Par exemple, si l'intérêt des réglementés coïncide avec l'intérêt public, un instrument de mesure facultatif devrait être une solution raisonnable. D'ailleurs, élargir l'utilisation des instruments volontaires est un domaine actif d'analyse et d'innovation réglementaires. Parfois, la divulgation obligatoire d'information pourrait suffire à remettre en une juste perspective les intérêts en cause et les pressions exercées par des tierces parties comme le public ou les consommateurs. D'autre part, lorsque les intérêts divergent, l'instrument peut être une combinaison plus ferme d'incitations ou de désincitations dont les points d'appui reposent sur une surveillance et des mesures exécutoires contraignantes. Une telle mise au point s'impose pour éviter les façons simplistes et fourre-tout d'envisager la réglementation.

En guise d'exemple, l'un des objectifs cités par de nombreux décideurs est de faire un consensus raisonnable parmi les intéressés. Un résultat qui laisse les intéressés raisonnablement satisfaits est parfois vu comme la marque d'une politique ou d'une intervention efficace. Dans certains cas, il peut s'agir d'un objectif raisonnable et réalisable. Cependant, ce n'est peut-être pas raisonnable dans le cas d'une intervention réglementaire conçue pour rectifier une externalité, c'est-à-dire qui fait faire des gains à certains groupes au détriment d'autres. Les intérêts divergeront souvent en pareil cas. Bref, des politiques et une réglementation saines ne permettront pas toujours de gagner partout à tout coup.

C. Caractéristiques d'une réglementation intelligente

Sur le plan pratique, on comprend beaucoup mieux maintenant au Canada et ailleurs ce qui constitue une réglementation intelligente. Une façon utile de classer ces progrès est de les répartir en deux catégories tenant compte à la fois des objectifs visés et des moyens adoptés :

  • de meilleurs instruments réglementaires;
  • de meilleurs systèmes d'élaboration des règlements et de gestion du processus réglementaire.

Ces deux domaines sont étroitement reliés en ce sens que de meilleurs systèmes d'élaboration des règlements aboutiront forcément à de meilleurs outils réglementaires.

1. Instruments réglementaires

a) Efficaces

De bons instruments réglementaires doivent être efficaces, c'est-à-dire qu'ils doivent répondre à l'objectif de la politique publique pour lequel ils ont été conçus. Cela ne veut pas dire que ces instruments réussiront à régler un problème ou à tirer parti d'une possibilité, mais qu'un objectif raisonnable peut être réalisé.

b) Économiques

Toutes choses étant égales, l'instrument choisi doit permettre d'atteindre l'objectif visé à moindres frais. Les meilleurs instruments favoriseront la répartition raisonnable et efficace des coûts et des bénéfices. En pareil cas, ils devront tenir compte des incidences concurrentielles et des problèmes d'équité pour les personnes réglementées et les différents intéressés.

c) Sûrs

Toutes les politiques et tous les règlements sont conçus à partir d'une information incomplète, générant ainsi de l'incertitude et des risques qui doivent être correctement gérés. En outre, de nombreux intéressés veulent que les autorités de réglementation leur assurent une plus grande certitude sur la place du marché.

On devrait toujours éviter l'incertitude inutile attribuable à une mauvaise politique. Cependant, dans des cas clairement établis, l'intérêt du public commande peut-être, par une question d'efficacité, de laisser le marché régler les risques et l'incertitude bel et bien réels attribuables à une politique ou à une réglementation quelconque ou mieux encore, on peut équilibrer certitude et besoin de s'assurer que le système réglementaire est capable de s'adapter et de réagir aux nouvelles informations et nouvelles influences. Une évaluation et une gestion convenables du risque permettront de parvenir à un tel équilibre.

d) Rentables

Les instruments les plus efficaces sont fondés sur le rendement, et plus précisément sur les objectifs à atteindre, tout en étant suffisamment souples pour donner de bons résultats et promouvoir l'innovation chez les réglementés; ils sont souvent préférables aux autres méthodes6.

e) Innovateurs

Les instruments réglementaires devraient être envisagés comme une possibilité d'accroître l'efficacité et la productivité du gouvernement, de la collectivité réglementée et de l'économie en général. Au gouvernement, les décideurs et les autorités de réglementation voudront sans doute cerner les possibilités d'explorer de nouveaux instruments politiques et de promouvoir l'innovation dans le secteur public. Politiques et réglementation devront également tenir compte des moyens à prendre pour encourager davantage l'innovation dans le secteur privé7.

f) Complémentaires

Une bonne intervention gouvernementale consiste rarement à trouver un seul instrument optimal. Elle consiste généralement en une combinaison équilibrée d'instruments qui intègrent un certain nombre d'objectifs politiques. Cette formule plus subtile d'intervention exige une panoplie de politiques complètes et actualisées.

g) Administrativement efficaces

De nombreux éléments pratiques en cause dans l'élaboration et la mise en Suvre des règlements tiennent largement aux activités commerciales générales portant sur la communication, la collecte et la diffusion d'information. Pourtant, comme tout administrateur le sait bien, de telles activités peuvent générer des frais de transaction considérables pour toutes les parties en cause. Les processus administratifs ont besoin d'être révisés pour s'assurer que toute l'information demandée est raisonnable et que l'on sait faire la part des choses entre le besoin de vérification et le processus de rationalisation de l'information.

h) Bien contrôlés et bien appliqués

Des instruments réglementaires bien conçus peuvent rater leur but s'ils ne sont pas mis en Suvre correctement. Le succès réglementaire exige la présence des ressources et des mécanismes nécessaires pour les surveiller ou les mettre en Suvre.

i) Exécutés par les personnes compétentes

Finalement, les instruments réglementaires doivent être conçus et mis en Suvre par ceux qui sont les mieux placés et les mieux en mesure de le faire. Cela devrait inclure la participation de tous les secteurs de compétence nécessaires en fonction de l'objectif politique visé. La mondialisation et les considérations de compétitivité, l'efficacité commerciale et la rationalisation administrative ont toutes imposé davantage de pressions aux différents secteurs de compétence, les obligeant à mieux harmoniser leurs activités réglementaires8.

2. Élaboration de la réglementation

a) Consultations et collaboration

Les consultations sont maintenant devenues un élément essentiel du processus réglementaire dans une démocratie moderne et une exigence formelle en vertu des lois fédérales comme la LCPE 1999. Dès le début de son histoire, Environnement Canada a compris l'importance d'une bonne communication et d'une solide consultation du public et des intéressés. Les possibilités de participation du public en général, surtout des intéressés directs, doivent être incluses dans différentes étapes de l'élaboration d'un instrument réglementaire. Une consultation efficace exige que le processus et les documents justifiant l'élaboration de la réglementation soient ouverts, clairs et explicites.

Environnement Canada dispose d'un système de gestion sophistiqué des relations fédérales, provinciales et territoriales et de ses rapports avec des partenaires internationaux. Le Canada préconise la méthode multilatérale d'étude des questions internationales au besoin, mais il a également soutenu activement les efforts régionaux et bilatéraux déployés pour régler des dossiers environnementaux9.

b) Ouverture et transparence

Un processus ouvert et transparent repose sur l'énoncé clair de l'instrument retenu et les raisons qui ont présidé à son choix. L'information sur la réglementation et le processus suivi doivent être complètement accessibles et correctement communiqués.

c) Recherche de rigueur

Une bonne information est essentielle à l'élaboration de politiques et de règlements. Du temps et des ressources sont nécessaires pour bien comprendre les problèmes et les questions en cause. Les décideurs et les autorités de réglementation ont besoin également d'information sur tout l'ensemble des instruments existants afin de choisir les meilleurs, notamment en procédant à un examen des pratiques exemplaires des autres ordres de gouvernement et des nouvelles méthodes proposées par les milieux de la recherche.

L'information n'est pas seulement nécessaire à l'étape initiale de l'élaboration d'une politique ou d'un règlement. Le processus réglementaire devrait intégrer des modalités de rétroaction et une analyse rétrospective. L'efficacité et les coûts des interventions réglementaires doivent être évalués après l'entrée en vigueur des règlements pour assurer que les objectifs sont atteints et pour confirmer les estimations originales, réviser les méthodes utilisées et circonscrire les conséquences imprévues.

d) Qualité versus temps et ressources

Toutes les pratiques à privilégier prennent du temps et des ressources, mais pourtant, un processus de « réglementation intelligente » ne devrait pas prendre trop de temps ni trop de ressources. Les consultations, les contrôles et les vérifications, ainsi que la recherche nécessaire ne devraient pas constituer un fardeau excessif. Le processus réglementaire doit être suffisamment souple pour tenir compte de la nécessité d'une intervention d'urgence. Les autorités de réglementation doivent être en mesure d'évaluer le type d'intervention envisagé et répartir leur temps et leurs ressources en conséquence10.

D. Élaborer une réglementation intelligente : un art ou une science?

Les facteurs qui contribuent à l'élaboration d'une réglementation intelligente, dont nous venons de parler, sont nombreux, complexes et souvent en contradiction les uns avec les autres. Malcolm Sparrow, dans son livre The Regulatory Craft, résume ainsi le dilemme :

« Devant des pressions sans précédent, les autorités de réglementation, lorsqu'elles proposent un règlement, sont aux prises avec une panoplie d'exigences souvent contradictoires :

  • le règlement doit être moins intrusif, mais plus efficace;
  • le règlement doit être peu contraignant, mais sans laisser les contrevenants s'en tirer;
  • le processus doit permettre de régler les problèmes plus rapidement, mais on parle de faire preuve d'une plus grande prudence la prochaine fois;
  • le règlement doit traiter des questions importantes, mais il faut que l'autorité réglementaire reste dans les limites de sa compétence;
  • le règlement doit davantage répondre à la collectivité réglementée, mais ne pas être récupéré par l'industrie. »

Comme le laisse entendre le titre du livre, il n'y a pas de calcul magique pour garantir qu'un règlement est bon. La pratique d'une telle activité exige des connaissances, des compétences et de la sagesse.


5 Bien entendu, il n'est pas toujours possible de traduire en coûts monétaires, voire de quantifier tous les avantages et les coûts qui ont trait à une politique ou à un règlement. Cependant, même si les évaluations ne sont que qualitatives, la discipline que le cadre de rentabilité impose améliorera la qualité des analyses et des décisions.

6 Cependant, dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les coûts de surveillance ou d'exécution sont très élevés, l'utilisation d'un outil de substitution, par exemple d'une technologie connue, est encore justifiable parfois.

7 La recherche lancée par Michael Porter, le réputé expert en matière de compétitivité, sur la manière dont des règlements bien conçus peuvent stimuler l'innovation et comporter un avantage concurrentiel, mérite une attention toute particulière.

8 On traite dans les sections suivantes de la façon de composer avec de telles pressions et de profiter de telles possibilités.

9 Certains développements et certaines possibilités dans ces domaines sont également débattus plus loin dans le cours du document.

10 Les propositions d'Environnement Canada traitant de la rationalisation administrative sont présentées dans la dernière section sur les domaines de possibilités.

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Mise à jour:  12/15/2003

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